Skip to main content

Les caméras-piétons ne suffiront pas à mettre fin aux pratiques policières discriminatoires en France

Pour faire cesser les contrôles au faciès, il est urgent que des réformes clé soient enfin engagées

Des policiers effectuent un contrôle pendant le confinement dû au Covid-19 à Nice, France, le 8 avril 2020.  © 2020 Eric Gaillard/Reuters

Interrogé sur les contrôles au faciès lors de son interview télévisée du 14 juillet, le président français Emmanuel Macron a dit vouloir généraliser le port des caméras-piétons par les policiers d’ici la fin de son mandat en 2022 pour « retracer la vérité des faits (…) et rétablir la confiance entre la population et la police ».

Que le président français veuille s’attaquer aux contrôles d’identité discriminatoires est positif. Mais comme de nombreux dirigeants avant lui, Macron mise trop sur les seules caméras-piétons pour mettre un terme à ces pratiques policières abusives et illégales. 

Les caméras-piétons sont des caméras mobiles individuelles fixées sur le devant de l’uniforme des agents de police pour procéder à l’enregistrement de leurs opérations. Selon la loi, elles sont destinées à prévenir les incidents lors des interventions, à collecter des preuves, et à aider à former les agents. 

Mais selon le Directeur général de la police nationale lui-même à l’issue d’une expérimentation de grande ampleur menée récemment, l’enregistrement des contrôles d’identité par les caméras-piétons « ne constitue pas un moyen de vérifier si le contrôle sur la personne est abusif » ni ne permet de vérifier si les personnes font l’objet de contrôles répétés. Associations et avocats soulignent depuis longtemps que les caméras-piétons ne constituent pas, à elles seules, un moyen efficace de combattre les contrôles au faciès, en particulier parce qu’elles sont déclenchées à la discrétion de l’agent de police.

Les associations et institutions indépendantes de défense des droits humains dénoncent depuis des années des contrôles d’identité sans fondement ciblant des jeunes Noirs et Arabes, y compris, comme Human Rights Watch l’a récemment documenté, des enfants parfois âgés de seulement dix ans. Pour empêcher ces abus, les autorités devraient réformer le Code de procédure pénale pour définir plus strictement quand et comment les contrôles d’identité doivent être conduits, et interdire explicitement toute discrimination. En outre, toute personne contrôlée devrait se voir remettre une trace écrite (un « récépissé de contrôle ») et les statistiques concernant les contrôles devraient être systématiquement collectées. Il est également urgent de prendre des mesures spécifiques pour les contrôles d’identité impliquant des enfants.   

Emmanuel Macron a raison lorsqu’il dit que « cela fait trop longtemps qu’on parle [des contrôles au faciès] » – les gouvernements successifs ont en effet tous échoué à y mettre un terme. Les pratiques policières discriminatoires sont profondément néfastes, pour les personnes qui les subissent comme pour la cohésion sociale. Il est plus que temps que le gouvernement français s’y attaque sérieusement. Espérons que, cette fois, ce sera le cas.  

Your tax deductible gift can help stop human rights violations and save lives around the world.