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La justice en danger en République démocratique du Congo

Des propositions de loi risquent de compromettre l’indépendance des tribunaux

Des personnes, dont de nombreux chauffeurs de taxi-moto, manifestent autour du Palais du peuple, siège du Parlement, à Kinshasa, le 24 juin 2020.  © 2020 Arsene Mpiana/AFP via Getty Images

Dans une déclaration à la nation à la veille des 60 ans de l’indépendance de la République démocratique du Congo la semaine dernière, le président Félix Tshisekedi a promis de s’opposer à toute réforme qui affaiblirait le système judiciaire du pays.

Ses propos venaient en réaction à trois propositions de loi sur le fonctionnement de l’ordre judiciaire et de la magistrature que certains députés fidèles à l’ancien président Joseph Kabila espèrent faire adopter au parlement en s’appuyant sur la très large majorité de leur famille politique. Ces propositions de loi visent à donner au ministre de la Justice un contrôle renforcé sur les procureurs, en lui octroyant notamment un droit de regard sur les poursuites pénales ainsi que le droit de sanctionner tout procureur poursuivant une instruction contre sa volonté.

Si elles étaient adoptées, ces lois menaceraient de compromettre gravement un système judiciaire déjà affaibli par des années d’ingérences politiques et de corruption. Depuis longtemps, Human Rights Watch plaide pour des réformes afin de renforcer l’État de droit en RD Congo.

Plusieurs organisations de la société civile n’ont pas tardé à faire entendre leur opposition à ces propositions de loi, de même que des partis politiques ou encore les Églises catholique et protestante. Ces critiques croissantes ont donné lieu à des manifestations, émaillées d’actes de vandalisme pour certaines. Les magistrats ont également défilé dans les rues de plusieurs villes du pays.

Le ministre de la Justice, Célestin Tunda, un fidèle de Kabila, aurait quant à lui contourné le Conseil des ministres et le président, et approuvé les propositions. Le 27 juin, il était brièvement interpellé, faisant monter d’un cran les tensions politiques à Kinshasa.

Le 2 juillet, les ambassades du Canada, du Royaume-Uni et des États-Unis ont émis une déclaration commune dans laquelle elles affirment que « réduire cette indépendance [des tribunaux] viendrait miner la protection des droits civils et politiques en RDC. »

Ces propositions de lois ont été déposées par les députés pro-Kabila alors qu’un important procès pour corruption, le premier de cette envergure en RD Congo, touchait à sa fin le mois dernier. Tandis que bon nombre de Congolais sont désireux de voir enfin justice rendue dans des affaires de corruption et de violation des droits humains, les lois en question constitueraient un grand pas en arrière, protégeant des responsables de haut rang de l’administration précédente qui jouissent de l’impunité depuis de nombreuses années.

« Je n’accepterai sous aucun prétexte des réformes dans ce secteur qui, par leur nature et contenu, viendraient porter atteinte à des principes fondamentaux régissant la justice », a affirmé le président Tshisekedi.

Le premier round de cette joute politique s’est soldé par un report des débats parlementaires sur ces propositions de loi au mois de septembre. Elles devraient être purement et simplement retirées. Au lieu de présenter des amendements aux lois en vigueur qui protègeraient encore un peu plus quelques intouchables, le parlement devrait s’efforcer de protéger les droits de tous les Congolais et œuvrer pour que les auteurs de graves violations soient enfin amenés à rendre des comptes.

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