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Afghanistan : Une nouvelle loi qui restreint les droits des femmes entre en vigueur

Le président Karzaï relègue les femmes chiites au rang de citoyennes de deuxième classe en vue d’obtenir le soutien des fondamentalistes lors du scrutin présidentiel

(New York, le 14 août 2009) - Les principaux alliés étrangers de l'Afghanistan devraient insister auprès du Président Hamid Karzaï pour qu'il amende une nouvelle loi qui officialise la discrimination contre les femmes chiites, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Human Rights Watch a appris aujourd'hui que la nouvelle loi discriminatoire a été publiée dans le journal officiel du 27 juillet 2009 (No 988) et entre ainsi en vigueur.

« Hamid Karzaï a conclu un accord inconcevable et sacrifié les femmes afghanes en échange du soutien des fondamentalistes au scrutin du 20 août », a déploré Brad Adams, directeur de la Division Asie à Human Rights Watch. « C'est pourtant lui qui se targuait d'être un modéré sur les questions relatives aux femmes », a-t-il rappelé.

Le texte final de la loi dont Human Rights Watch a pu obtenir une copie comporte de nombreux articles rétrogrades qui privent les femmes de leurs droits ancrés dans la constitution afghane. La nouvelle loi autorise un époux à priver sa femme de tout soutien matériel y compris la nourriture si elle refuse de se soumettre à ses désirs sexuels, et accorde le droit de garde des enfants exclusivement au père et au grand-père. Les femmes doivent désormais demander la permission de leurs époux pour travailler et les auteurs de viol peuvent éviter des poursuites judiciaires s'ils payent le « prix de sang »   à la jeune victime pour les lésions causées par le viol.

« Les droits des femmes afghanes sont en train d'être bafoués par des hommes influents qui se servent d'elles comme instruments dans leurs manoeuvres pour accéder au pouvoir », a déploré M. Adams. « Ces lois barbares étaient censées appartenir au passé avec le renversement des Talibans en 2001 et voilà que Hamid Karzaï les ressuscite et les officialise ».

La signature par le président Karzaï de la Loi chiite sur le statut personnel en mars dernier a suscité une vague de protestations dans le pays et à l'étranger. Cette nouvelle loi réglemente désormais des questions de la vie privée telles que le divorce, la séparation, l'héritage et l'âge minimum du mariage chez les femmes chiites musulmanes qui représentent entre 10 et 20 pour cent de la population. Le texte initial de la loi comportait des articles qui leur imposaient des restrictions sévères, notamment l'obligation de demander la permission avant de sortir, sauf en cas d'urgence, et celle d'avoir des relations sexuelles avec leur époux au moins une fois tous les quatre jours.

Élaborée dans le plus grand secret par l'ayatollah Asif Mohseni, un influent chef religieux chiite radical, cette loi a été approuvée par les chefs conservateurs chiites au Parlement. De nombreuses militantes afghanes ont accusé le président Karzaï de se départir de ses convictions modérées sur les droits des femmes en vue d'obtenir des votes au scrutin présidentiel.

En avril dernier, les femmes afghanes sont descendues pour la première fois dans la rue pour manifester, bravant ainsi les menaces et les risques de répressions violentes. Dans le monde, le président américain Barack Obama, le premier ministre canadien Stephen Harper, le premier ministre britannique Gordon Brown, le secrétaire général de l'OTAN et de nombreux autres dirigeants ont tous unanimement condamné cette loi. En réaction aux pressions, Hamid Karzaï s'est adressé en mars aux groupes de la société civile pour examiner la loi. Malgré les améliorations apportées à l'issue de ces consultations, elle contient toujours des dispositions très restrictives.

Human Rights Watch a déclaré que cette loi est une violation manifeste des droits ancrés dans la constitution, qui interdit toute discrimination entre les citoyens afghans et de l'article 22 qui stipule que les hommes et les femmes « ont les mêmes droits et devoirs devant la loi ». En outre, elle n'est pas conforme à la « Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes » dont l'Afghanistan est signataire.

« Le parlement devrait abroger cette loi et le conseil constitutionnel devrait lui aussi rejeter les dispositions qui violent la constitution et les obligations juridiques internationales de l'Afghanistan », a ajouté M. Adams. « Pour leur part, les autres candidats présidentiels devraient promettre aux femmes afghanes d'amender ou d'abroger d'urgence cette loi inique s'ils sont élus », a-t-il conclu.

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