En avril, le décès en garde à vue d'un activiste de l'opposition, Solo Sandeng, a été suivi par une vague de répression à l’encontre de l'opposition, avec pour cible principale le plus grand parti d'opposition de Gambie, le Parti démocratique uni (UDP). Sandeng a été arrêté le 14 avril, alors qu’il manifestait, en tête de cortège, en faveur de la réforme électorale. Il a été conduit au siège des services nationaux de renseignement et battu à mort brutalement. Le gouvernement a dispersé deux autres manifestations, le 16 avril et le 9 mai, procédant à l’arrestation de dizaines de manifestants, dont un est mort en détention.
De nombreux autres manifestants en détention ont déclaré avoir été battus et torturés alors qu’ils étaient placés sous la responsabilité des services de renseignement. Fatoumatta Jawara a déclaré dans un affidavit: « Ils m'ont emmenée dans un lieu sombre. Ils m’ont déshabillée et battue si violemment que je me suis effondrée ».
Depuis la manifestation du 14 avril, Jammeh a menacé à plusieurs reprises les partis d'opposition. « Laissez-moi prévenir la vermine maléfique que l’on nomme opposition », a-t-il dit en mai. « Si vous voulez déstabiliser ce pays, je vous enterrerai neuf pieds sous terre ».
La rhétorique incendiaire de Jammeh a encouragé la police et l'armée à faire un usage excessif de la force contre les manifestants. Quand l’un d’entre eux a été libéré sous caution après son arrestation en mai, un officier de police lui a dit: « Tu ferais mieux de faire attention, car tout ce que tu dis, nous le saurons. En prison, les gens sont en sécurité…Dehors, vous êtes plus en danger, puisqu’on vous observe ».
Le Président Jammeh et l'Alliance patriotique pour la réorientation et la construction (APRC) ont par ailleurs régulièrement puisé dans les ressources de l’État pour faire campagne, y compris en bénéficiant de véhicules et de locaux gouvernementaux, et mobilisé des fonctionnaires et des membres des forces de sécurité pour le compte de la réélection de Jammeh.
Le gouvernement gambien devrait immédiatement remettre en liberté tous les manifestants pacifiques, ouvrir une enquête transparente et impartiale sur les décès de membres de l'opposition en garde à vue, ménager aux partis d'opposition un accès aux médias contrôlés par l’Etat en dehors du cadre de la campagne officielle, et cesser d'utiliser les ressources de l'État pour faire campagne. Il devrait également veiller au respect, par les forces de sécurité, des droits de l'opposition de faire campagne librement et pacifiquement en l’absence de harcèlement ou d’arrestation.
Les bailleurs de fonds internationaux les plus importants de la Gambie devraient fixer au gouvernement des critères clairs avant l’élection. Si elle échouait à les respecter, la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) devrait alors suspendre la Gambie de ses organes décisionnaires, et les États-Unis et l'Union européenne imposer des interdictions de voyager, des gels d’avoirs et autres sanctions ciblées aux hauts fonctionnaires impliqués dans des violations des droits de l'homme.
« Les élections devraient être le moment pour les Gambiens de faire entendre leur voix, quelle que soit leur sensibilité politique », a conclu Babatunde Olugboji. « Pour convaincre les groupes d'opposition qu'ils peuvent mener sans crainte leurs activités, le gouvernement devrait immédiatement remettre en liberté les membres injustement emprisonnés de l’opposition, garantir à celle-ci un accès immédiat aux médias contrôlés par l’État, et ouvrir des enquêtes impartiales sur les décès survenus en détention ».
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