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(Beyrouth, le 13 janvier 2017) - L’Iran devrait immédiatement annuler l'exécution prévue de 12 hommes reconnus coupables d'infractions à la législation sur les stupéfiants, programmée le 14 janvier à la prison centrale de Karaj, ont déclaré Human Rights Watch et Amnesty International aujourd’hui. Ces deux organisations se sont dites préoccupées par le fait que, malgré les promesses répétées du gouvernement, l'Iran n'a fait aucun progrès tangible en vue de réduire le nombre alarmant d'exécutions.

Le 8 janvier, des responsables de la prison, située dans la province d'Alborz, à l'ouest de Téhéran, ont transféré à l'isolement au moins 12 condamnés à mort pour des infractions liées aux stupéfiants, les informant de l'imminence de leur exécution. Toutefois, l'exécution a été reportée en raison du décès de l'ancien président iranien Ali Akbar Hashemi Rafsanjani. Human Rights Watch et Amnesty International ont pu confirmer l'identité de quatre condamnés sur 12 : il s’agit d’Ali Mohammad Lorestani, de Mohammad Soleimani, d’Ali Ebadi et de Majid Badrlou. Selon des sources bien informées sur ces dossiers, les accusés n'ont pas pu consulter d'avocat durant les interrogatoires, et les jugements concernant Lorestani, Soleimani et Ebadi se sont fondés sur les « aveux » d'autres prisonniers.

« Les responsables iraniens doivent mettre fin à toutes les exécutions et rendre hors-la-loi le recours à la peine de mort pour les trafiquants de stupéfiants, car il enfreint les normes juridiques internationales », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Remplir les prisons avec des trafiquants de drogue et se dépêcher de les envoyer au gibet sans garanties d’une procédure régulière, à l'issue de procès entachés de graves irrégularités, ne fera qu'aggraver le déficit de justice en Iran, sans résoudre le problème de la drogue. »

Aux termes de la loi iranienne sur les stupéfiants, la peine de mort est automatique pour le trafic, la possession ou le commerce d’au moins 30 grammes de drogues de synthèse comme l'héroïne, la morphine, la cocaïne ou leurs dérivés chimiques. L'Iran a exécuté des centaines de personnes en 2016, la majorité d'entre elles pour des infractions à la législation sur les stupéfiants. Selon Hassan Noroozi, membre du Parlement, 5 000 condamnés se trouvent dans le couloir de la mort pour de telles infractions en Iran, pour la plupart âgés de 20 à 30 ans.

Les autorités iraniennes ont arrêté Mohammad Soleimani, originaire de la ville de Kermanshah et père de trois enfants, à Karaj, en mars 2015, en lien avec la possession présumée de 700 à 800 grammes d'héroïne. Human Rights Watch et Amnesty International se sont entretenues avec une source informée qui a déclaré que Mohammad Soleimani n'était pas en possession de drogue au moment de son arrestation. D'après cette source, sa condamnation est fondée sur les « aveux » de deux hommes qui ont mis en cause Soleimani, après qu'eux-mêmes ont été arrêtés en possession de stupéfiants.

Une autre source informée a déclaré que la Cour suprême a annulé la condamnation à mort de Mohammad Soleimani en juillet 2016 et lui a accordé un nouveau procès. Toutefois, il a de nouveau été condamné à mort à l'issue d'un procès sommaire, limité à une brève audience devant un tribunal révolutionnaire à Karaj. Lors d'un second examen de cette affaire, la Cour suprême a rejeté son recours et confirmé la sentence capitale.

Des sources proches d'Ali Mohammad Lorestani ont déclaré à Human Rights Watch que les autorités de la province d'Alborz l'ont arrêté en octobre 2012. Détenu pendant au moins 18 jours dans un centre de détention de la police, il a été interrogé sans pouvoir consulter un avocat. « Sa famille ignorait totalement où les autorités [l']avaient emmené, a déclaré une source. Il a eu un doigt cassé lors de son transfert à la prison. »

Les autorités ont arrêté Majid Badrlou, chauffeur de taxi de 29 ans, et ont saisi 990 grammes d'héroïne dans son véhicule le 15 juillet 2011. Une source proche du dossier a déclaré à Human Rights Watch que Majid Badrlou n'a pas fait appel, car il craignait que cela n'aggrave le résultat du procès. Cette source a ajouté que « les autorités ont roué de coups Majid Badrlou lorsqu'il était détenu pour interrogatoire au centre de détention du Bureau iranien de contrôle des drogues ».

« La peine de mort est un châtiment cruel, inhumain et dégradant, qui viole le droit à la vie. Son utilisation est abjecte en toutes circonstances, mais procéder à ces exécutions serait d’autant plus tragique que les débats qui se déroulent actuellement au Parlement iranien pourraient conduire à l'abolition de la peine de mort pour des infractions non-violentes à la législation sur les stupéfiants », a déclaré Philip Luther, directeur des recherches et des actions de plaidoyer pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnesty International.

« Au lieu de condamner 12 personnes à la potence, l'Iran devrait instaurer un moratoire officiel sur les exécutions et s'attacher à avancer vers l'abolition définitive de la peine de mort dans le pays », ont déclaré Human Rights Watch et Amnesty International.

En décembre 2015, des membres du Parlement ont présenté un projet visant à supprimer la peine de mort pour les infractions à la législation sur les stupéfiants, à l'exception des trafics armés. Cependant, cette initiative n'a pas abouti. Le 23 novembre 2016, 100 députés ont présenté un nouveau projet de loi, moins audacieux que le précédent, car il interdit le recours à la peine de mort uniquement pour les infractions non-violentes à la législation sur les stupéfiants et maintient plusieurs catégories d'infractions à cette législation qui emportent la peine de mort. Plusieurs commissions parlementaires examinent actuellement ce projet de loi.

Human Rights Watch et Amnesty International ont à maintes reprises recensé de graves violations des garanties des droits de la défense et de l'équité des procès – recours à la torture et aux mauvais traitements, et procès sommaires notamment – dans les affaires où les accusés encourent la peine de mort en Iran pour des infractions à la législation sur les stupéfiants.

Le Comité des droits de l'homme de l'ONU a déclaré que la peine de mort prononcée à l'issue d'une procédure inéquitable constitue une violation non seulement du droit à la vie mais aussi de l'interdiction de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Même dans les pays qui maintiennent ce châtiment, le droit international relatif aux droits humains statue que son usage doit être restreint aux « crimes les plus graves » – les crimes impliquant un homicide volontaire – ce qui n'englobe pas les infractions liées à la législation sur les stupéfiants. Human Rights Watch et Amnesty International sont opposées en toutes circonstances à la peine de mort, parce qu'elle est par essence irréversible et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.

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