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Canada

Événements de 2019

Deux femmes tiennent des affiches où figurent les noms et les photos de leurs proches, lors de la cérémonie marquant la clôture de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA), à Gatineau, dans la province de Québec, au Canada. 

© 2019 REUTERS/Chris Wattie

Le Canada, démocratie plurielle et multiculturelle, jouit dans le monde d’une réputation de défenseur des droits humains et est salué pour sa solide tradition de protection des droits civils et politiques fondamentaux garantis par la Charte canadienne des droits et libertés. Le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau a fait des efforts considérables pour faire progresser les droits humains au Canada. Le gouvernement Trudeau est un ardent défenseur d’une société multiraciale et multiculturelle qui respecte les droits des immigrants, des personnes handicapées, des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) et d’autres minorités.

En dépit de ces efforts, le Canada ne parvient toujours pas à remédier aux difficultés de longue date concernant les droits humains, notamment le large éventail de violences à l’encontre des peuples autochtones, la poursuite de l’incarcération des détenus de l’immigration et un droit carcéral sans interdiction de l’isolement prolongé. Le Canada est aussi en prise avec de graves problèmes de droits humains liés aux activités à l’étranger des entreprises d’extraction minière canadiennes et des exportations répétées de matériel militaire à des pays connus pour leurs violations des droits de l’homme.

Droits des autochtones

Il est encore extrêmement difficile de défaire des dizaines d’années de discrimination systémique et structurelle envers les peuples autochtones au Canada. Alors que le Canada retirait officiellement son statut d’objecteur à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DDPA) en 2016 et s’engageait à mettre en œuvre la DDPA conformément à la Constitution canadienne, un projet de loi d’initiative parlementaire visant à harmoniser les lois canadiennes avec la DDPA était rejeté par le Sénat en juin.

Un accès insuffisant à de l’eau potable propre et salubre, continue à poser un grave problème de santé publique dans de nombreuses communautés autochtones et à entraver les efforts visant à faire progresser les droits des autochtones au Canada, pourtant l’un des pays du monde les plus riches en eau. Le gouvernement s’est engagé à lever tous les avis concernant la qualité de l’eau potable dans les réserves des Premières Nations d’ici à 2021. En septembre, 56 communautés des Premières Nations au Canada étaient encore soumises à ces avis à long terme qui alertent les communautés lorsque leur eau n’est pas potable.

En septembre, le tribunal canadien des droits de la personne a conclu que le gouvernement pratiquait sciemment et imprudemment, une discrimination envers les enfants autochtones vivant dans les réserves en ne finançant pas les services aux enfants et aux familles. Le gouvernement Trudeau a présenté une demande de révision judiciaire de la décision d’octobre.

En janvier 2019, le comité des droits de l’homme des Nations Unies a conclu que le Canada, en raison de la loi sur les Indiens, controversée depuis de longues années, pratiquait encore la discrimination envers les femmes des Premières Nations et leurs descendants. Le gouvernement Trudeau a annoncé en août que les femmes des Premières Nations obtiendraient l’égalité avec les hommes dans le cadre de la loi sur les Indiens, en leur permettant de conserver leur statut d’autochtone si elles épousent un non-autochtone.

Violence contre les femmes autochtones

En juin, l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées lancée par le gouvernement en 2016 pour lutter contre la violence endémique à l’égard des femmes et des filles autochtones a publié son rapport final. L’enquête a fait 231 recommandations et a conclu que la violence à l’égard des femmes et des filles autochtones équivaut à un « génocide ». Le premier ministre Trudeau a promis de mettre sur pied un plan d’action national « afin de donner suite aux appels à la justice énoncés dans le rapport de l’Enquête en prenant des mesures concrètes, cohérentes et menées par les peuples autochtones. »

Détention liée à l’immigration

Le gouvernement fédéral canadien et l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) se sont montrés ouverts à une réforme du système de détention liée à l’immigration. Cependant, malgré les directives stipulant que les enfants ne doivent être détenus pour des raisons liées à l’immigration que dans des « circonstances extrêmement limitées » ou comme mesure de « dernier recours » en vertu de la loi sur l’immigration du Canada, des enfants sont encore détenus dans des centres de détention de l’immigration. En 2018-2019, 118 enfants étaient retenus ou hébergés dans des centres de détention. Si un plus petit nombre d’enfants a été détenu dans l’ensemble par rapport à 2017-2018, le temps moyen passé en détention s’est allongé.

En dépit de l’adoption d’un cadre national en matière de détention liée à l’immigration qui vise à diminuer l’utilisation de prisons et à améliorer les conditions de détention, le Canada continue à utiliser des prisons pour la détention liée à l’immigration. Selon l’ASFC, le nombre de détenus de l’immigration est passé à 7212 en 2018-2019, par rapport 6609 l’année précédente.

Isolement cellulaire

La cour d’appel de Colombie britannique a confirmé en juin, que la pratique de l’isolement cellulaire prolongé est inconstitutionnelle et constitue une violation des droits des prisonniers. Le gouvernement fédéral porte actuellement en appel une décision judiciaire comparable rendue en Ontario qui annulait les précédentes lois sur l’isolement cellulaire du fait de leur inconstitutionnalité. Alors que le gouvernement a actualisé sa loi sur les prisons, il a été critiqué pour ne pas éliminer la possibilité d’isolement cellulaire prolongé.

Responsabilité des entreprises

Le Canada possède les deux tiers des entreprises extractives du monde et sa position dominante lui donne l’occasion de montrer le chemin en remédiant aux difficultés que présente le domaine des droits humains dans le secteur de l’extraction minière. Cependant, aucune loi canadienne ne comporte de mécanisme permettant aux autorités d’exercer un contrôle ou une surveillance efficace des effets sur les droits humains de l’activité des entreprises extractives à l’étranger.

La cour Suprême du Canada a entendu en janvier, une action en matière civile contre une entreprise canadienne Nevsun Resources, concernant des allégations de graves violations de droits humains, notamment esclavage, torture et travail forcé dans une mine en Étythrée. La décision dans cette affaire devrait établir un précédent concernant la compétence des tribunaux canadiens en matière d’imputabilité aux entreprises canadiennes des violations des droits humains commises à l’étranger.

Depuis 2011, Human Rights Watch ne cesse d’exhorter le gouvernement canadien de mettre en place un poste d’ombudsman chargé d’enquêter de manière indépendante, de rendre compte publiquement des atteintes aux droits humains perpétrées par les entreprises extractives canadiennes et de tenir les parties responsables. Le gouvernement Trudeau est revenu sur son engagement antérieur de créer ce poste.

Au lieu de cela, le gouvernement a annoncé en avril l’instauration d’un ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises (OCRE), poste de conseiller disposant de peu de pouvoirs d’enquête et d’une capacité limitée de tenir les entreprises responsables. Ce poste n’est pas indépendant mais son titulaire a plutôt un rôle de conseiller auprès du ministre de la Diversification du Commerce international.

Le Parlement canadien examine les possibilités concernant une loi moderne sur l’esclavage. Suivant un projet de loi d’initiative parlementaire et une consultation continue du gouvernement, un groupe parlementaire composé de membres de tous les partis a annoncé en avril un projet de loi sur la transparence des chaînes d’approvisionnement (LTCA), qui cherche à imposer aux entreprises canadiennes des obligations, notamment une obligation légale de diligence, de prendre activement des mesures pour empêcher l’utilisation de l’esclavage moderne dans leurs chaînes d’approvisionnement étrangères.

Liberté religieuse

En juin 2019, la province de Québec a adopté la loi 21 interdisant à certaines catégories d’employés du secteur public de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions. Il est interdit aux enseignants, juges, agents de la paix, entre autres fonctionnaires, de porter des signes de leur religion (dont le hijab, la kippah et le turban) dans le lieu de travail. La loi controversée interdit aussi à quiconque ayant le visage couvert pour des raisons religieuses de recevoir des services du gouvernement, y compris de santé et de transport public. En promulguant cette interdiction, le Québec a invoqué de manière préemptive la disposition « dérogatoire » qui permet aux autorités provinciales ou fédérales d’écarter temporairement certaines des garanties de la Charte des droits et libertés, ce qui rend difficile l’annulation de la loi par les tribunaux.

En mai, trois rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont prévenu que la loi « porterait

probablement atteinte à la liberté de conscience, de religion et à l’égalité des citoyens ».

Droits des personnes handicapées

Après des années d’activisme des défenseurs des droits des handicapés, le Canada a adopté en juin 2019, la loi canadienne sur l’accessibilité. La loi qui cherche à faire du Canada un pays sans obstacles d’ici 2040, exige des secteurs réglementés par le gouvernement fédéral, dont le secteur bancaire et les télécommunications, de se conformer à la future réglementation sur l’accessibilité dans les domaines de l’emploi, des prestations de service et de programmes, de la construction et des espaces publics ainsi que des transports qui desservent plusieurs provinces ou traversent les frontières fédérales. La loi ne s’applique pas aux secteurs réglementés par les provinces, encore que l’Ontario, le Manitoba et la Nouvelle Écosse aient mis en œuvre des lois régissant l’accessibilité. La Colombie britannique s’est engagée à mettre en œuvre une législation sur l’accessibilité.

Principaux acteurs internationaux

En mai, le rapporteur spécial de l’ONU sur les matières dangereuses, Baskut Tincak, s’est rendu au Canada pour évaluer les progrès du gouvernement fédéral sur la gestion des matières toxiques et leur incidence sur les droits humains. Il a conclu que les peuples autochtones sont touchés, de manière disproportionnée par les déchets toxiques et a exprimé sa déception face au fait que ni la province de l'Ontario, ni Ottawa, n’ont remédié aux conséquences sanitaires de la contamination au mercure pour la communauté de la Première Nation de Grassy Narrows.

Politique étrangère

Le Canada, en tant que membre du groupe de Lima composé essentiellement de pays d’Amérique latine, n’a cessé d’inciter les autorités vénézuéliennes à remédier à la crise politique, humanitaire, des droits humains et économique que traverse actuellement le pays. Le Canada a répondu aux violations des droits humains par le gouvernement de Nicolás Maduro en imposant plusieurs séries de sanctions ciblées et en suspendant temporairement ses activités diplomatiques à Caracas. En avril, le Canada a élargi ses sanctions à 43 personnes de plus, ce qui amène à 113 le total de responsables vénézuéliens soumis à des sanctions canadiennes.

En juin, le gouvernement a annoncé des sanctions à l’encontre du Nicaragua en raison de ses violations systématiques des droits humains. Les mesures consistent notamment en gel des avoirs et interdiction de voyage s’appliquant à 9 membres clés du gouvernement nicaraguayen. La ministre des Affaires étrangères alors en exercice, Chrystia Freeland a déclaré que le gouvernement nicaraguayen doit être « tenu responsable » et mettre fin à la crise actuelle à travers « un véritable dialogue avec les groupes d’opposition ».

En septembre, le gouvernement canadien a adhéré au traité international sur le commerce des armes et s’est alors trouvé confronté à la pression croissante d’une coalition d’organisations de la société civile de mettre fin à son contrat de vente d’armes de 15 milliards de dollars conclu avec l’Arabie saoudite et de communiquer les résultats de son examen des permis d’exportation de matériel militaire à des pays connus pour leurs violations des droits humains mené en 2018.

En juin, 34 sénateurs et plus de 100 organisations de droits humains et défenseurs ont envoyé une lettre collective à la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland, conjurant le Canada à faire davantage entendre sa voix sur la scène internationale pour tenir le Myanmar responsable du génocide des Rohingya en engageant des procédures devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour enfreindre la Convention de l’ONU sur le génocide.

À la session de juin du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, le Canada s’est joint à 24 autres gouvernements pour exhorter la Chine de mettre fin aux détentions arbitraires massives et autres violations à l’encontre les Musulmans de la région du Xinjiang. La déclaration commune appelait également la Chine à coopérer avec la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et les experts de l’ONU pour permettre un accès réel à la région.

En 2019, le Canada a aussi présenté avec d’autre États, des résolutions sur le Venezuela, le Nicaragua, le Yémen et le Sri Lanka au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.