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Avec des médias réduits au silence, le Burundi est plongé dans la confusion

Une tentative de coup d'État et de lourds combats dans la capitale du Burundi, Bujumbura, font les grands titres des médias à travers le monde, mais de nombreux Burundais n'ont toujours aucune idée de ce qui s'est réellement passé. Certains préfèreraient que cela reste ainsi.

Hier, moins de 24 heures après l'annonce par un groupe d'officiers militaires que le président Pierre Nkurunziza avait été destitué, des individus présumés fidèles à ce dernier ont attaqué les sièges des quatre médias les plus populaires du pays: Radio publique africaine (RPA), Radio Bonesha FM, Radio Isanganiro et RadioTélévision Renaissance. Des hommes vêtus d'uniformes de police ont lancé une grenade sur les locaux de Radio Bonesha FM et ont ouvert le feu sur ses équipements de diffusion. La RPA et la RadioTélévision Renaissance ont également été partiellement endommagées. Aucune de ces quatre stations ne peut plus émettre.

Le principal journal indépendant du Burundi, Iwacu, a suspendu ses activités après avoir été averti qu’il pourrait subir le même traitement s'il continuait de paraître.

À l'autre extrémité de l'échiquier, des informations ont circulé selon lesquelles, après la tentative de coup d'État du 13 mai, des individus non identifiés ont attaqué le siège de Radio Rema FM, une station proche du parti au pouvoir.

Le silence imposé aux médias a privé les Burundais de toutes leurs sources nationales d'information indépendante. Les Burundais qui vivent à la campagne – soit la majorité de la population de ce pays essentiellement rural – n'ont aucune idée de ce qui est en train de se passer. Ils s'en remettent aux émissions des radios internationales, à des bribes d'information et aux rumeurs.

La station de radio et télévision d'État, la RadioTélévision Nationale du Burundi, émet toujours mais a essentiellement diffusé des programmes de musique. Un bref discours du président a été interrompu hier en raison de lourds affrontements qui se déroulaient à proximité de la station.

Des journalistes burundais ont déclaré à Human Rights Watch qu'ils craignaient des représailles, car beaucoup d'entre eux sont considérés comme des sympathisants de l'opposition par les alliés du président. Craignant pour leur sécurité, de nombreux défenseurs  des droits humains ont également décidé de se cacher.

Ce climat de peur s'est accentué depuis que des manifestations ont commencé le 26 avril à Bujumbura, en signe de protestation contre la décision de Pierre Nkurunziza de se présenter à l'élection présidentielle pour un troisième mandat. Maintenant, avec l’armée apparemment divisée et un effondrement de la loi et de l'ordre public, les Burundais qui se sont exprimés contre les violations des droits humains commises par la police, par les services de renseignement et par des membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, pourraient eux-mêmes être pris pour cible.

Les responsables de la tentative de coup d'État et les fidèles du président Nkurunziza ne devraient pas régler leurs différends politiques sur le dos des civils, ni utiliser les médias ou la société civile comme champ de bataille. Les deux camps devraient faire tous les efforts possibles pour protéger tous les Burundais, sans distinction, et restaurer le respect des droits humains fondamentaux.

Ceux qui ont ordonné les attaques contre les stations de radio connaissent le pouvoir des médias burundais. Ils savent que les journalistes feront état des violations des droits humains car ces professionnels prennent au sérieux leur devoir d'informer le public. Les personnes responsables des attaques pensent que si elles privent le pays d'informations, elles pourront continuer à agir en toute impunité. Mais les médias du Burundi ne risquent pas d’être réduits au silence trop longtemps. Les journalistes reviendront et enquêteront sur ce qui s'est passé. Les crimes éventuels seront révélés et à la fin, leurs auteurs seront traduits en justice.

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