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Russie : Climat dangereux pour les défenseurs des droits humains

Menaces à l'encontre d'une chercheuse de Human Rights Watch

(Moscou, le 4 octobre 2012) – Le climat hostile à la protection et de la défense des droits humains en Russie est en passe d'empirer, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Alors que des amendements législatifs imposent de nouvelles restrictions sur la société civile et que le gouvernement russe cherche à marginaliser les groupes de défense et de protection des droits humains, une chercheuse senior de Human Rights Watch a reçu plusieurs messages textuels de menaces directes et implicites.

En début de semaine, Human Rights Watch a signalé aux autorités russes ces menaces envoyées sur le téléphone portable de Tanya Lokshina, chercheuse senior de l'organisation, en leur demandant de diligenter une enquête et de  mettre les auteurs de ces messages devant leurs responsabilités.

« Ces menaces éhontées ont clairement pour but de faire réfléchir à deux fois celles et ceux qui œuvrent en faveur de la protection et de la défense des droits humains », a déclaré Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch. « Il est fondamental que les autorités russes diligentent une enquête sérieuse et qu'elles favorisent un environnement sain pour permettre l'exercice des missions en faveur de la défense et de la protection des droits humains. »

Les messages textuels, envoyés entre deux et six fois par jour entre le 28 et le 30 septembre 2012, faisaient référence à la grossesse de Tanya Lokshina et à d'autres détails personnels. Les émetteurs des messages ont de plus fait une grossière tentative pour lier à tort Tanya Lokshina aux insurgés islamiques. L'un des messages disait : « Nous attendons la naissance de ton fils pour qu'il nous rejoigne et nous aide dans notre lutte pour la liberté, si Allah le veut ».

Tanya Lokshina est une figure éminente du mouvement pour la protection et la défense des droits humains en Russie, et ce depuis 10 ans. Elle a, à cet égard, été la présidente du groupe Helsinki de Moscou et du centre de recherche Demos avant de rejoindre Human Rights Watch en 2008. Tanya Lokshina travaille sur des dossiers très variés, mais elle est particulièrement connue comme étant une grande spécialiste des droits humains dans la région russe instable du Caucase du Nord. La plupart des onze messages faisaient référence à la grossesse de Tanya Lokshina et laissaient entendre qu'elle-même et son bébé à naître auraient à subir des préjudices dans un avenir proche. Leurs auteurs affirmaient qu'ils etaient « près » d’elle et s’apprêtaient à agir, et prédisaient une « naissance difficile » pour son enfant.

Les messages contenaient des menaces directes et implicites liées à des détails très personnels sur les faits et gestes de Tanya Lokshina et de ses proches,  ainsi que sur sa grossesse, et mentionnant son adresse bien que celle-ci ne figure dans aucun annuaire public.

Le fait que ces menaces portaient sur ces informations confidentielles que seuls la chercheuse et son cercle restreint d'amis connaissaient laisse à penser que ces renseignements ont été obtenus au moyen d'une surveillance impliquant potentiellement des agents du maintien de l'ordre et de la sécurité.

« Ces menaces sont graves et visaient manifestement à faire entrave aux actions de Human Rights Watch », a déclaré Kenneth Roth. « Nous avons porté plainte auprès des autorités, car nous pensons qu'en fin de compte les auteurs de ces messages menacent Tanya Lokshina d’actes de violence. »

Ces dernières années, plusieurs figures de proue dans le monde journalistique et activiste russe qui avaient mis en lumière l'impunité qui accompagne les violations des droits humains dans le Caucase du Nord ont été victimes de harcèlement et de violentes agressions. Certaines d'entre elles ont même été tuées. Victimes de harcèlement ou d'assassinats, toutes ces personnes avaient reçu des messages de menaces, notamment peu de temps avant les faits.

Ces menaces s'inscrivent en outre dans un vaste climat de répression qui s'est abattu sur la société civile russe depuis le retour du président Vladimir Poutine au Kremlin.  Diverses lois adoptées précipitamment par la Douma cet été imposent de nouvelles restrictions aux manifestations publiques, qualifient de nouveau de crime la diffamation et infligent de nouvelles restrictions aux contenus qui circulent sur internet. Une loi adoptée en juillet oblige les organisations non gouvernementales engagées dans le « travail politique » et acceptant des fonds étrangers à s'inscrire dans la rubrique « agents étrangers ». Le 21 septembre dernier, la Douma a approuvé en première lecture un avant-projet qui, s'il était adopté, élargirait la définition du terme « trahison » de telles sortes que défense et protection des droits humains pourraient être érigées en infraction.

Dans ce contexte, les déclarations gouvernementales qui critiquent les organisations non gouvernementales et les étrangers sont de plus en plus nombreuses.

« Le climat relatif à la défense et à la protection des droits humains en Russie n'a jamais été aussi déplorable en 20 ans », a déclaré Kenneth Roth. « Les partenaires internationaux de la Russie devraient dire clairement que le chemin le plus sûr vers le statut de « paria » est de rétablir le piètre environnement des droits humains caractéristique de l'époque de l'Union soviétique. Ils devraient inciter la Russie à mettre un terme à la répression qui touche les défenseurs des droits humains et promouvoir un environnement sûr et favorable aux actions en matière des droits humains. »

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