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Traité sur le mercure : Dernière occasion de s’attaquer aux effets de cette substance sur la santé

Lors des négociations finales, les gouvernements occidentaux devraient accepter d’inclure des dispositions relatives à la prévention et au traitement

(Genève, le 10 janvier 2013) - La proposition de traité international visant à s’attaquer aux effets néfastes du mercure devrait inclure des dispositions spécifiques relatives à la protection des enfants et autres populations vulnérables, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les gouvernements doivent se réunir à Genève à partir du 13 janvier 2013 pour un cinquième et dernier cycle de pourparlers en vue de la finalisation du traité. Le mercure est un métal toxique qui s’attaque au système nerveux central et se révèle particulièrement nocif pour les enfants. 

Jusqu’à présent, le projet de traité s’est focalisé sur l’environnement et a négligé le rôle important que le secteur de la santé doit jouer en faisant face aux problèmes occasionnés par le mercure, a fait remarquer Human Rights Watch. Les gouvernements occidentaux se sont opposés à l’inclusion de dispositions plus fermes relatives à la santé.

« Les délégués présents aux négociations du traité sur le mercure devraient saisir cette dernière occasion d’élaborer des stratégies efficaces en matière de santé afin de prévenir et de traiter l’empoisonnement au mercure », a souligné Juliane Kippenberg, chercheuse senior à Human Rights Watch. « Des millions de personnes à travers le monde sont exposées quotidiennement au mercure, dans l’extraction minière artisanale et ailleurs. Des mesures plus fermes de prévention et de traitement de l’empoisonnement au mercure s’avèrent absolument nécessaires ».

Les recherches de Human Rights Watch ont permis de recueillir des informations détaillées sur la façon dont les orpailleurs utilisent le mercure pour extraire l’or du minerai, courant ainsi le risque d’un empoisonnement au mercure. Au moins 13 millions de personnes travaillent dans l’extraction artisanale de l’or à travers le monde, dont beaucoup d’enfants. Rares sont ceux qui sont conscients des incidences néfastes que peut avoir le mercure.

Au Mali, Human Rights Watch a interrogé des enfants qui n’avaient pas plus de 11 ans à propos du travail qu’ils effectuent au quotidien avec le mercure. En Papouasie-Nouvelle- Guinée, un médecin a décrit aux chercheurs de Human Rights Watch l’impact du mercure sur les orpailleurs : « Nous avons des dizaines de cas d’empoisonnement au mercure. … Ils regardent fixement le mur. Vous ne pouvez pas leur parler ; ils ne comprennent rien. Ils sont comme des zombies. Et nous avons eu plusieurs cas de patients qui n’ont pas guéri. »

Bon nombre de systèmes de santé sont mal équipés pour faire face à l’empoisonnement au mercure. Lors d’une enquête réalisée par Human Rights Watch en Tanzanie, un médecin du travail exerçant dans une zone minière s’est inquiété du fait que les travailleurs de la santé « passaient à côté du diagnostic » d’intoxication au mercure en raison de leur manque de formation.  

La proposition formulée par les gouvernements latino-américains d’inclure dans le traité sur le mercure un article distinct relatif à la santé a été une démarche positive, a estimé Human Rights Watch. L’article devrait exiger davantage d’informations en matière de santé publique, de recherche, de surveillance, de tests, de traitement, ainsi qu’un renforcement des capacités des systèmes de santé afin de répondre à l’exposition au mercure. Dans un document de conclusions adressé aux gouvernements, Human Rights Watch a proposé un texte précis en vue de l’inclusion d’un article sur la santé.

Human Rights Watch juge positif le fait que l’article du traité actuel sur l’extraction minière artisanale exige que les parties mettent en place des activités de santé publique pour les communautés d’orpailleurs, mais l’organisation estime que cela ne suffit pas pour remédier au problème. Le mercure est utilisé dans une variété de domaines, et il affecte dès lors une multitude de populations différentes. Il est notamment utilisé dans la production de chlore, de chlorure de polyvinyle (PVC), un type de plastique, et de piles, ainsi que dans la médecine dentaire. L’utilisation de combustibles fossiles, principalement de charbon, contribue aussi considérablement aux émissions de mercure.

Lors du dernier cycle de négociations qui s’est tenu en juillet 2012, les gouvernements occidentaux – en particulier le Canada, les États-Unis et l'Union européenne– se sont opposés à l’inclusion d’un article distinct sur la santé, faisant valoir que le traité portait principalement sur l’environnement.

Ils ont indiqué que l’inclusion de stratégies en matière de santé risquait d’affecter le secteur de la santé et d’entraîner une hausse du coût de mise en œuvre du traité. Ils ont également déclaré que les références actuelles aux stratégies en matière de santé dans le projet de texte étaient suffisantes. Leur position a provoqué un débat houleux avec les gouvernements latino-américains et africains, dont les représentants réclamaient un article plus ferme sur la question de la santé.

« La position des États-Unis, du Canada et de l’Union européenne est décevante », a déploré Juliane Kippenberg. « Les pays les plus riches devraient reconnaître que les stratégies environnementales et sanitaires sur le mercure sont indissociables et ils devraient fournir un soutien financier sur les deux plans. »

Le traité devrait être adopté vers la fin de l’année 2013 au Japon, sous la dénomination de « Convention de Minamata ». Dans les années 1950, la ville de Minamata au Japon a été le théâtre de l’une des pires catastrophes de l’histoire sur le plan de l’empoisonnement au mercure, plus de 1 700 personnes ayant perdu la vie et beaucoup d’autres ayant souffert de maladies et de handicaps tout au long de leur vie. Le Japon est toutefois demeuré en retrait du débat sur l’inclusion, dans le traité, de stratégies en matière de santé.  

« Aujourd’hui, le Japon a une occasion de dire ‘Plus jamais’ », a expliqué Juliane Kippenberg. « Il devrait tirer des enseignements de Minamata et faire activement pression pour inclure des stratégies en matière de santé dans le traité sur le mercure. »

Dans le monde entier, la dégradation de l’environnement – entre autres la contamination par le mercure – conduit à la négation des droits, notamment du droit à la santé, a relevé Human Rights Watch. Les gouvernements devraient reconnaître le droit international des droits humains dans le préambule du traité et intégrer les droits humains dans le droit de l’environnement.

L’empoisonnement au mercure peut causer une vaste palette de problèmes de santé. Le mercure peut s’attaquer au système cardiovasculaire, aux reins, à l’appareil gastro-intestinal, au système immunitaire et aux poumons. Les tremblements, les convulsions, les troubles de la vue, les maux de tête, les pertes de mémoire et de concentration sont autant de symptômes d’une exposition au mercure. Des niveaux plus élevés d’exposition au mercure peuvent entraîner une insuffisance rénale, une insuffisance respiratoire, voire la mort.

Le mercure est particulièrement nocif pour les fœtus et les nourrissons, et il peut être transmis de la mère à l’enfant pendant la grossesse ou par le lait maternel. Il peut causer des dommages irréversibles sur le plan du développement de l’enfant. Des chercheurs ont qualifié l’intoxication au mercure d’ « épidémie invisible ».   

 

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