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Conseil des droits de l'homme de l'ONU : Condamnation unanime de la Corée du Nord

Toutefois les pays occidentaux préfèrent ignorer les violations commises en Libye

(Genève, le 24 mars 2012) – L'adoption par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies d'une résolution condamnant les violations des droits humains en Corée du Nord est un signe à la fois de la gravité de celles-ci et de la nécessité pour le nouveau président du pays, Kim Jong-un, de procéder à de profondes réformes, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Pour la première fois, les alliés de la Corée du Nord au sein du Conseil n'ont pas appelé à un vote, préférant laisser la résolution passer par consensus. La session du Conseil, qui a duré quatre semaines, a pris fin le 23 mars 2012.

« La condamnation sans opposition par le Conseil des droits de l'homme du bilan épouvantable de la Corée du Nord en matière de droits humains est un événement qui fera date », a déclaré Julie de Rivero, directrice du bureau de Genève de Human Rights Watch. « Quand aucun Etat n'est disposé à défendre le bilan de la Corée du Nord dans ce domaine, il ne peut plus faire aucun doute que ce pays doit mettre en œuvre des réformes profondes. »

Toutefois le Conseil des droits de l'homme a agi de manière moins avisée dans son traitement de la Libye et de la Birmanie, certains États membres semblant déterminés à reconnaître des améliorations dans ces deux pays, sans accorder assez d'attention aux violations des droits humains qui s'y déroulent actuellement, a affirmé Human Rights Watch.

Le Conseil a adopté une résolution sur la Libye qui ne reconnaît pas l'étendue et la gravité des violations des droits humains actuellement commises dans ce pays et ont rejeté des efforts visant à assurer une surveillance continue de ces violations. Des amendements proposés à la dernière minute par la Russie et l'Ouganda ont été rejetés.

Les amendements de la Russie incluaient un appel à la libération de personnes détenues arbitrairement et à la tenue de procès équitables pour les autres détenus, ainsi qu'une demande que le Bureau de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme fasse un rapport sur la situation en matière de droits humains dans son ensemble en Libye. Les amendements de l'Ouganda exprimaient des préoccupations au sujet d'informations concernant des meurtres ou des mauvais traitements de personnes originaires d'Afrique subsaharienne. Ils encourageaient la Libye à enquêter sur toutes les violations, y compris celles commises à l'encontre de membres de minorités ethniques et de migrants.

Des États membres qui avaient affirmé vouloir soutenir un texte plus fort sur la Libye, dont les États-Unis et plusieurs membres de l'Union européenne, ont voté contre les amendements proposés, alors même qu'ils affirmaient insister auprès de la Libye pour qu'elle apporte une réponse à l'existence de preuves solides d'une poursuite des graves violations des droits humains dans ce pays.

« Cette résolution ignore les graves violations commises actuellement en Libye, y compris ce qui apparaît comme des crimes contre l'humanité perpétrés par certaines milices », a ajouté Julie de Rivero. « Les gouvernements qui ont rejeté les demandes d'une meilleure justice en Libye et d'une surveillance de la situation par des observateurs extérieurs ne rendent pas service aux citoyens de ce pays. »

La résolution du Conseil sur la Birmanie est également décevante, en ce qu'elle n’exige pas la création d'un mécanisme pour superviser la libération des prisonniers politiques. Il est très important de faire face aux violations des droits humains pendant les périodes de transition, quand les efforts en ce sens peuvent avoir davantage d'impact et des tendances s'établissent pour l'avenir, a estimé Human Rights Watch.

« Certains membres du Conseil souhaitent manifestement savourer l'instant présent en ce qui concerne certains progrès récents en Libye et en Birmanie, sans complètement admettre qu'il reste beaucoup de travail à faire », a poursuivi Julie de Rivero. « L'idée trop optimiste que le Conseil se fait de la Libye d'aujourd'hui confirme une tendance inquiétante à passer trop rapidement à autre chose quand la situation dans un pays donné s'améliore. »

Le Conseil des droits de l'homme a fermement condamné les violations des droits humains commises actuellement en Syrie. Il a appuyé la poursuite d'une surveillance étroite de la Syrie par la Commission d'enquête qu'il a nommée, et a pris une autre mesure importante en appelant la commission à dresser la carte des graves violations des droits humains commises depuis mars 2011 dans ce pays.

La résolution sur la Syrie a également pris note du fait que la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a encouragé le Conseil de sécurité à saisir la Cour pénale internationale de la situation en Syrie. L'adoption à une très large majorité de cette résolution, par 40 voix contre 3 (Chine, Cuba et Russie) avec trois abstentions (Equateur, Inde et Ouganda), devrait constituer pour le gouvernement syrien le signal que le soutien à travers le monde pour sa politique est en train de s'amenuiser, a souligné Human Rights Watch.

Le Conseil des droits de l'homme présente un bilan mitigé dans ses réponses aux soulèvements populaires dans d'autres pays arabes, selon Human Rights Watch. Ainsi, le Conseil a envoyé un signal positif en soutenant l'ouverture d'une enquête indépendante sur les violations des droits humains et la création au Yémen d'un bureau de l'ONU chargé des droits humains et en appelant à la libération des personnes détenues arbitrairement.

Mais en même temps, comme lors de ses sessions précédentes, il n'a même pas discuté de la situation à Bahreïn, malgré la poursuite de la répression de manifestations pacifiques dans ce pays pendant qu'il était en session. Le 20 mars, le porte-parole de la Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme a exprimé la préoccupation causée par “des informations inquiétantes” sur le recours à une force disproportionnée par les unités de sécurité bahreïnies, notamment l'usage excessif de gaz lacrymogènes qui auraient causé la mort de plusieurs manifestants et passants ces derniers mois.

Les États arabes membres du Conseil ont voté de manière irrégulière, soutenant fortement un rôle actif du Conseil vis-à-vis de la Syrie mais votant contre ou s'abstenant sur des résolutions conernant le Sri Lanka et l'Iran, et ignorant purement et simplement la situation à Bahreïn.

« Les réponses très contrastées du Conseil aux soulèvements populaires dans les pays arabes est un bon révélateur du fait que le vote de ses États membres tend à être dicté par la géopolitique, plutôt que par les principes », a encore dit Julie de Rivero. « La situation à Bahreïn mérite un examen approfondi, quel que soit le pouvoir d'influence de ses alliés. »

Le Conseil des droits de l'homme a également adopté une résolution sur le Sri Lanka, à laquelle le gouvernement de ce pays s'est fortement opposé. Cette résolution a apporté la preuve que la communauté internationale souhaite fortement que les responsabilités soient établies et que des comptes soient rendus pour les violations des droits humains commises pendant le conflit armé au Sri Lanka, qui a pris fin en mai 2009.

Le Conseil a de nouveau condamné les violations des droits humains en Iran et a prorogé le mandat de l'expert-pays nommé pour surveiller cette situation, seuls cinq États votant contre la résolution (Russie, Chine, Cuba, Bangladesh et Qatar). Des résolutions ont également été adoptées sur l'octroi d'une assistance technique à la République démocratique du Congo, à la Guinée et à la Somalie.

Pour la première fois au Conseil des droits de l'homme, 40 pays dont le Nigéria, le Bénin, Maurice, les Maldives, le Mexique et le Costa Rica, se sont unis pour adopter une déclaration interrégionale condamnant les violations commises en Erythrée.

Outre quatre résolutions concernant Israël qui suivent dans une large mesure des textes adoptés lors des années précédentes, une nouvelle initiative sur les colonies de peuplement a été présentée par le Pakistan, visant à créer une mission d'information internationale pour enquêter sur les conséquences en matière de droits humains de l'établissement par Israël de colonies de peuplement dans les Territoires palestiniens occupés.

La session du Conseil a également donné lieu, pour la première fois, à un débat sur les résultats d'une étude effectuée à l'échelle mondiale sur les violations des droits humains commises sur la base de l'identité et de l'orientation sexuelles, qui avait été commandée par le Conseil des droits de l'homme l'année dernière.

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