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Les révolutions démocratiques dans les pays arabo-musulmans sont-elles bonnes ou mauvaises pour l’avancement des droits humains des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) ? Il n’y a qu’elle seule étude de cas à examiner ces jours-ci – la Tunisie – et la question n’a toujours pas été tranchée.

La Tunisie est le seul pays le long de la côte sud de la Méditerranée ayant légalisé les  associations défendant les droits des personnes LGBT. Pourtant l’État continue d’envoyer des hommes en prison sur la base de l’article 230 du code pénal qui prévoit des peines pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement pour sodomie.

Pour prononcer un verdict de culpabilité, il n’est pas nécessaire que la police ait pris des hommes sur le fait, ni qu’il y ait des témoins. La police arrête régulièrement des personnes qu’elle soupçonne de sodomie – ou qu’elle trouve dans des lieux de rencontre gays, ou bien qui ont juste « l’air gay » – et les soumet à un examen anal, a déclaré Badr Baabou, président de l’association Damj (« Inclusion »), l’une des organisations de défense des droits des personnes LGBT légalisées en Tunisie. Cet examen est le principal élément de preuve incriminant cité dans les condamnations, selon Baabou. Et pourtant cet examen est judiciairement peu probant, cruel, dégradant, et constitue une violation du droit à la vie privée, qui est protégé par le droit international et par la constitution tunisienne de 2014.

La plupart des Tunisiens ne sont pas favorables à l’abolition de l’article 230, qui pénalise la sodomie et le lesbianisme, a déclaré Baabou. Plutôt que d’essayer de changer l’opinion publique, Baabou préfère mobiliser la société civile. Aussi en janvier, Damj a contribué au lancement du Collectif pour les libertés individuelles, un rassemblement de trente associations tunisiennes et internationales défendant les droits fondamentaux, notamment des organisations défendant les droits humains en général et des organisations de défense des droits des femmes. L’abolition de l’article 230 figure en bonne place dans la plateforme du collectif.

Ordonnance judiciaire sur la suspension des activités de l'association de défense des droits LGBT Shams pendant 30 jours, datée du 29 décembre 2015. © Shams

Le collectif sera cependant confronté à une profonde opposition. Le 4 janvier, un tribunal de Tunis, répondant à une plainte du gouvernement, a suspendu pour une durée de 30 jours les activités de l’association Shams qui défend les droits des personnes LGBT, au motif que les déclarations sur les droits des homosexuels faites à la télévision par son président s’écartaient des objectifs définis dans les statuts de Shams, qui sont de défendre « les minorités sexuelles et de genre ».

Lorsque l’association Shams a été fondée en mai 2015, Abdellatif Mekki, un député bien connu qui était précédemment ministre de la Santé, a exhorté à sa dissolution. « Le peuple tunisien a fait une révolution pour la liberté et pour que chaque personne puisse exercer ses droits…pas pour fonder une association pour défendre les gays…. Les homosexuels…devraient être punis comme la loi le prévoit, parce que ce genre de comportement individuel est dangereux pour la société », a-t-il déclaré.

Quel que soit le sort réservé à Shams, la société civile en Tunisie a lancé un débat sur les lois relatives à la sodomie qui est davantage public que dans les pays voisins. Le débat à propos de l’article 230 survient alors que les organisations de la société civile contestent d’autres lois apparemment populaires comme la Loi 52, qui prévoit une année obligatoire de prison pour consommation de marijuana, et comme la disposition du Code de la Famille, selon laquelle les femmes héritent seulement la moitié de ce qu’héritent les hommes.

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