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Cisjordanie : Israël est responsable de la montée de la violence des colons

Les habitants de communautés palestiniennes entières sont toujours déplacés, des mois après les attaques

Une famille palestinienne s’apprêtait à quitter la communauté de Khirbet Zanuta, dans le sud de la Cisjordanie, le 30 octobre 2023. Les attaques répétées menées par des colons, parfois accompagnés de soldats, ont contraint tous les habitants de cette communauté à partir. © 2023 Marcus Yam/Los Angeles Times via Getty Images

(Jérusalem) – L'armée israélienne a participé à des violentes attaques menées par des colons en Cisjordanie ou n'a pas protégé les Palestiniens contre ces attaques, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui ; ces attaques ont déplacé des habitants de 20 communautés, et ont entièrement déraciné au moins sept communautés depuis le 7 octobre 2023.

Sous couvert des hostilités en cours à Gaza, des colons israéliens ont agressé et torturé des Palestiniens, commis des violences sexuelles, volé leurs biens et leur bétail, menacé de les tuer s'ils ne partaient pas définitivement, et détruit des domiciles et des écoles. De nombreux Palestiniens – dans certains cas des communautés entières – ont fui leurs foyers et leurs terres. L’armée israélienne n’a pas indiqué aux résidents déplacés qu’elle assurerait leur sécurité ou qu’elle leur permettrait de rentrer chez eux, les obligeant à vivre ailleurs dans des conditions précaires.

« Des colons et soldats ont déplacé des communautés palestiniennes entières, détruisant chaque foyer, avec le soutien apparent des plus hautes autorités israéliennes », a déclaré Bill Van Esveld, directeur adjoint de la division Droits des enfants à Human Rights Watch. « Alors que l’attention du monde est tournée vers Gaza, les abus en Cisjordanie se multiplient, alimentés par des décennies d’impunité et l’indulgence des alliés d’Israël. »

Décombres d’une maison détruite à Al-Qanub, une communauté palestinienne dans le sud de la Cisjordanie, suite à la fuite des habitants qui étaient menacés de mort par des colons israéliens armés, le 9 octobre 2023. © 2023 Privé

Human Rights Watch a enquêté sur des attaques qui ont forcé le déplacement de tous les habitants de cinq communautés palestiniennes en Cisjordanie en octobre et novembre 2023 : Khirbet Zanuta et Khirbet al-Ratheem au sud d'Hébron, Al-Qanub à l'est d'Hébron, ainsi qu'Ein al-Rashash et Wadi al-Seeq, à l'est de Ramallah. Les éléments de preuve indiquent que des colons armés, avec la participation active d'unités de l'armée, ont à plusieurs reprises bloqué les accès routiers et attaqué des communautés palestiniennes ; les colons ont détenu, agressé et torturé des habitants, les ont chassés de leurs maisons et de leurs terres sous la menace d'armes, ou les ont contraints à fuir en les menaçant de mort, parfois en les empêchant d’emporter leurs biens.

Human Rights Watch a mené des entretiens avec 27 témoins des attaques et a visionné des vidéos filmées par les résidents, montrant le harcèlement commis par des hommes en uniforme militaire israélien qui tenaient des fusils d'assaut M16. Au 16 avril, les Forces de défense israéliennes (FDI) n'avaient toujours pas répondu aux questions posées à ce sujet par Human Rights Watch, dans un courrier électronique transmis le 7 avril.

Un habitant palestinien de Wadi al-Seeq, en Cisjordanie, photographié après l’attaque menée par des colons en présence de soldats israéliens, le 12 octobre 2023. Il a été dû être hospitalisé en raison de ses blessures. © 2023 Privé

Le nombre d’attaques par des colons contre des Palestiniens a augmenté en 2023, atteignant son plus haut niveau depuis que l’ONU a commencé à enregistrer ces données en 2006. Ceci était déjà le cas même avant les attaques menées par le Hamas le 7 octobre, qui ont tué environ 1 100 personnes en Israël.

L'ONU a enregistré plus de 700 attaques menées par des colons entre le 7 octobre 2023 et le 3 avril 2024, dont près de la moitie en présence de soldats en uniforme. Depuis le 7 octobre, les attaques ont entraîné le déplacement de plus de 1 200 personnes, dont 600 enfants, qui vivaient dans des communautés rurales d'éleveurs. Depuis le 7 octobre, selon l’ONU, au moins 17 Palestiniens ont été tués et 400 ont été blessés en Cisjordanie, tandis que les Palestiniens y ont tué 7 colons depuis cette date.

Une organisation israélienne de défense des droits humains, Haqel: In Defense of Human Rights, a demandé à la Haute Cour israélienne d'ordonner à l'armée de protéger les habitants déplacés de six communautés, dont Khirbet Zanuta et de permettre leur retour. Le 20 février, selon Haqel, le bureau du procureur israélien a affirmé dans sa réponse qu'aucun déplacement forcé n’avait eu lieu, et que les Palestiniens étaient partis volontairement en raison de problèmes liés à l’élevage et à l’agriculture. La prochaine audience dans cette affaire est prévue pour le 1er mai.

La police israélienne a juridiction sur les colons, en matière d’application de la loi, tandis que l’armée a juridiction sur les Palestiniens en Cisjordanie occupée. Après le 7 octobre, le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, a ordonné à la police de ne pas appliquer la loi envers des colons violents, selon un journal d’investigation israélien. La police a nié cette information, mais Ben-Gvir lui-même ne l’a pas démentie. La grande majorité des plaintes palestiniennes contre des colons ou soldats israéliens n’aboutissent pas à des inculpations, selon les données officielles compilées par l’ONG israélienne Yesh Din.

Après le 7 octobre, le ministère israélien de la Sécurité nationale a distribué des milliers d’armes, à des habitants israéliens, notamment à des colons. En décembre, le bureau du Procureur général a signalé au Parlement (Knesset) que le ministère avait illégalement approuvé 14 000 permis d’armes à feu.

Depuis le mois de décembre, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont annoncé des politiques de visa interdisant à certains colons violents d’entrer dans ces pays. En outre, les États-Unis et le Royaume-Uni ont imposé des sanctions financières à huit colons, ainsi qu’à deux colonies israéliennes en Cisjordanie. L’Union européenne envisage aussi l’adoption de sanctions, mais les discussions sont toujours en cours, en raison de la forte réticence de la République tchèque et de la Hongrie.

Le transfert forcé ou la déportation d’habitants d’un territoire occupé, ainsi que la destruction ou l’appropriation massives de biens dans un territoire occupé, constituent des crimes de guerre.

Les autres gouvernements devraient suspendre leur soutien militaire à Israël, étant donné le risque de complicité dans des abus. Ils devraient également revoir et éventuellement suspendre les accords bilatéraux, tels que l’Accord d’association UE-Israël, et interdire le commerce avec les colonies dans les territoires occupés.

Les États-Unis, l’Union européenne, le Royaume-Uni et d’autres pays devraient prendre des mesures afin que les individus responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité répondent de leurs actes, notamment par le biais d’enquêtes et de poursuites pénales relevant de la compétence universelle, et devant la Cour pénale internationale.

Texte complet en anglais, avec des informations plus détaillées : en ligne ici.

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