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Une année s’est écoulée depuis le meurtre de Gustave Makonene. Le corps de cet employé de Transparency International Rwanda a été découvert le 18 juillet 2013 sur la rive du lac Kivu au Rwanda, aux environs de la ville de Rubavu, dans la province de l’Ouest.

Des résidents locaux ont trouvé son corps affalé contre un grand arbre, avec une corde autour du cou. Ils pensent qu'il aurait peut-être été jeté d'une voiture sur la route au-dessus du lac et que l'arbre aurait bloqué sa chute dans l'eau. Une contusion sombre était visible sur son cou. Le rapport médical de la police a indiqué qu'il a été étranglé.

Un an plus tard, les motifs de ce meurtre n’ont toujours pas été tirés au clair : s’agissait-il d’un crime de droit commun ou bien était-il lié à son travail en tant que militant anticorruption ?

Makonene avait travaillé sur des allégations de corruption, dont certaines auraient impliqué des membres de la police. Il semble y avoir eu peu de progrès dans l'enquête sur son meurtre.

Les autorités rwandaises ont déclaré à Human Rights Watch que le dossier est toujours ouvert. Le ministère de la Justice a indiqué que des enquêtes sont en cours et que de nouvelles informations ont été transmises par la police, sans fournir d’autres détails.

Le meurtre de Makonene a brièvement fait les gros titres de quelques journaux il y a un an, mais depuis lors, un silence presque complet s’est installé, à la fois aux niveaux national et international.

Ce silence reflète à la fois la faiblesse des médias indépendants et des organisations indépendantes au Rwanda et la réticence des partenaires internationaux du Rwanda à s'exprimer sur les questions perçues comme sensibles. Si personne ne réclame justice, cette affaire pourrait rester non résolue.

Ce silence est frappant en comparaison avec les réactions aux meurtres d'autres militants dans des pays voisins.

Ce contraste est illustré par les cas d’Ernest Manirumva, vice-président de l'organisation anticorruption burundaise OLUCOME, tué en 2009 dans la capitale du Burundi, Bujumbura, et de Floribert Chebeya Bahizire, directeur exécutif de l'organisation congolaise des droits humains Voix des Sans Voix, tué en 2010 dans la capitale de la RD Congo, Kinshasa.

Les organisations de défense des droits humains dans ces deux pays ont fortement dénoncé ces meurtres et vigoureusement fait campagne pour obtenir justice. Aucune de ces affaires n'a encore été résolue de façon satisfaisante, mais les militants continuent leurs campagnes, en veillant à ce que les meurtres soient couverts par les médias locaux et en obtenant le soutien de diplomates.

Pourquoi la situation est-elle si différente au Rwanda ? Réclamer justice pour le meurtre d’un militant anticorruption devrait être un réflexe naturel pour les organisations de défense des droits humains et pour d’autres groupes indépendants.

Au lieu de cela, il s’agit presque d’un sujet tabou au Rwanda. Quand Human Rights Watch a soulevé le cas de Makonene auprès de membres de ces groupes, de journalistes locaux et d’acteurs internationaux, leurs réponses ont varié du malaise, ou d’un haussement d'épaules à des expressions de préoccupation apparemment sincères mais privées.

Au cours des dernières années, l'intimidation, le harcèlement, l'obstruction et les menaces du gouvernement ont considérablement affaibli les organisations indépendantes du Rwanda.

En 2013, des gens moins critiques à l’égard du bilan du gouvernement en matière de droits humains ont pris illégalement le contrôle de la direction de l'une des dernières organisations des droits humains indépendantes restantes , la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l'homme (LIPRODHOR).

En quelques jours, la nouvelle direction a été reconnue par l’Office rwandais de la gouvernance, l'organisme étatique chargé de la supervision des organisations non-gouvernementales (ONG).

Silence de la Plate-forme

Pendant ce temps, la Plate-forme de la société civile rwandaise, un groupe d'organisations largement pro-gouvernementales, semble plus soucieuse de défendre le bilan du Rwanda en matière de droits humains que de demander justice pour les exactions. Elle n'a publié aucune déclaration publique condamnant le meurtre de Makonene.

Les médias rwandais ne s'en tirent guère mieux. Ils restent fortement dominés par la presse et la radio pro-gouvernementales, et les journalistes indépendants ne couvrent que rarement les questions politiquement sensibles.

Depuis 2010, un journaliste indépendant a été assassiné ; plusieurs autres ont été poursuivis et emprisonnés pour des articles publiés dans des journaux ; d'autres ont fui le pays après des menaces répétées ; et deux journaux indépendants populaires ont été fermés.

Certains diplomates ont évoqué le cas de Makonene en privé auprès des autorités rwandaises, mais il n'y a pas eu de forte condamnation publique du meurtre de la part des gouvernements bailleurs de fonds, qui prétendent soutenir une société civile forte dans le cadre d'une démocratie dynamique.

 

 

 

 

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