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Cameroun: Les autorités ont illégalement mis fin à un atelier de discussion sur les droits des personnes LGBT

L'ingérence du gouvernement constitue un déni des libertés de réunion et d'expression

(Nairobi, le 4 avril 2012)  – Les autorités camerounaises ont illégalement mis fin, le 27 mars 2012 à Yaoundé, à un atelier de discussion sur les droits humains qui devait inclure un débat sur les droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), et ont arrêté un de ses organisateurs, a déploré Human Rights Watch aujourd'hui. Cet acte constitue une violation du droit à la liberté de réunion et d'expression au regard de la loi du Cameroun et du droit international, a ajouté Human Rights Watch.

L'atelier, qui devait se tenir dans un hôtel de Yaoundé, avait été autorisé par le sous-préfet, un responsable administratif local, conformément à la loi du Cameroun. Mais le sous-préfet a révoqué son autorisation alors que le colloque commençait, lorsqu'il s'est rendu compte que les « droits humains » qui allaient être discutés incluaient ceux des minorités sexuelles. La police a arrêté Stéphane Koche, un activiste travaillant pour les groupes organisateurs de l'atelier, et l'ont retenu pendant trois heures avant de le libérer sans retenir de chefs d'accusation contre lui.

« Les Camerounais ont droit aux libertés de réunion et d'expression, même si leurs points de vue ne plaisent pas aux autorités », a déclaré Boris Dittrich, directeur du plaidoyer auprès de la division Droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) à Human Rights Watch. « Fermer un atelier de discussion et arrêter un activiste n'est pas une manière acceptable de la part des autorités de Yaoundé de traiter des personnes qui se sont réunies pour parler de droits humains. »

L'atelier, qui devait durer trois jours, était coordonné par trois groupes – les Adolescents contre le sida (Adolescents against AIDS, SID’ADO), l'Association pour la Défense des Homosexuel-le-s, (Association for the Defense of Gays and Lesbians, ADEPHO), et le Collectif des Familles des Enfants Homosexuel-le-s (Collective of Families of Gay and Lesbian Children). Diverses organisations professionnelles et de défense des droits humains devaient y participer, dont des groupes de défense des droits des femmes, des organisations de lutte contre le sida et des groupes représentant des pharmaciens, des médecins et des avocats. Des représentants des ambassades des Etats-Unis et d'Allemagne à Yaoundé étaient également présents.

Les participants ont indiqué à Human Rights Watch que peu après leur arrivée à l'hôtel, des jeunes, décrits par un participant comme des « voyous » (« thugs »), ont fait leur apparition. Un représentant du Rassemblement de la jeunesse camerounaise (Cameroonian Youth Rally) – une organisation de jeunes anti-gays qui n'a ni autorité publique ni pouvoirs de police – est intervenu, accompagné d'un groupe de jeunes hommes, et a lancé aux participants: « Partez – cette réunion n'aura pas lieu. »

Peu après, des policiers, des gendarmes et des responsables civils, dont le préfet de Mfoundi et le sous-préfet de Yaoundé qui avait autorisé la réunion, sont arrivés à leur tour et ont dispersé les participants.

Ceux-ci ont raconté à Human Rights Watch que le sous-préfet a affirmé avoir autorisé une réunion qui devait discuter du VIH/sida, et non pas un colloque lors duquel serait abordé le thème de l'homosexualité. « Ils ont affirmé qu'il était illégal de parler de l'homosexualité car l'homosexualité est illégale », a indiqué un des participants.

La législation du Cameroun interdit les « relations sexuelles avec une personne du même sexe ». Cette loi ? viole le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantit le droit au respect de la vie privée (article 17) et le droit à la non-discrimination (articles 2 and 26). Il n'existe pas au Cameroun de loi qui puisse justifier l'interdiction de réunions visant à discuter des droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT).

Contacté par Human Rights Watch qui cherchait à savoir sur quelle base juridique était fondée la décision de fermer l'atelier, un responsable du ministère camerounais de la Justice a affirmé ne pas être au courant de l'incident.

« Utiliser la loi controversée du Cameroun sur la sodomie comme prétexte pour interdire toute discussion sur les droits en matière sexuelle est injuste et excessif, et cela revient à ajouter une violation des droits humains à une autre », a conclu Boris Dittrich. « Les autorités camerounaises devraient présenter des excuses aux organisateurs de l'atelier et les autoriser à tenir ce colloque, ainsi que d'autres, de manière pacifique et en toute sécurité. »

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