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Vietnam : Le gouvernement doit mettre fin à la répression des militants du droit du travail

Les leaders syndicaux sont harcelés, arrêtés et emprisonnés

(New York) - Le gouvernement vietnamien doit immédiatement libérer des activistes illégalement emprisonnés pour des manifestations pacifiques en faveur des droits des travailleurs, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.

Ce rapport de 32 pages, « Not Yet a Workers' Paradise: Vietnam's Suppression of the Independent Workers' Movement » (« Loin d'un Paradis pour les Travailleurs : la Répression du Mouvement des Travailleurs Indépendants au Vietnam »), documente la répression par le gouvernement vietnamien contre des syndicats indépendants et dresse le portrait des activistes œuvrant pour les droits des travailleurs qui ont été détenus, placés en résidence surveillée ou emprisonnés par le gouvernement vietnamien, en violation du droit international. Le rapport appelle les gouvernements donateurs et les entreprises étrangères investissant au Vietnam à faire pression sur le gouvernement pour qu'il traite les travailleurs correctement.

« En arrêtant ses principaux leaders, le gouvernement vietnamien tente d'écraser le mouvement syndical indépendant », a déclaré Brad Adams, directeur de la division Asie au sein de Human Rights Watch. « Le gouvernement continue de prendre pour cible et d'harceler des activistes syndicaux indépendants, lesquels sont considérés comme une menace particulière pour le parti communiste en raison de leur capacité à mobiliser et à organiser un grand nombre de personnes. »

Depuis 2006, au moins huit activistes indépendants ont été condamnés à des peines de prison sur la base de charges douteuses évoquant la sécurité nationale. Ils ont tous été détenus au regard de la loi vietnamienne, laquelle viole les libertés fondamentales. Ceux qui ont été jugés ne se sont pas vu accorder les standards internationalement reconnus d'un procès équitable. D'autres activistes syndicaux ont été harcelés, intimidés, et forcés à cesser leurs activités syndicales ou à fuir le pays.

Entre une inflation à deux chiffres et le déclin global de l'économie, le malaise des travailleurs continue de grimper au Vietnam. Des centaines de travailleurs, venant d'abord de compagnies étrangères, ont rejoint des mouvements de grève pour demander des augmentations de salaire et de meilleures conditions de travail. Bien qu'autorisées par le droit international, aucune de ces grèves n'est considérée comme légale par le gouvernement vietnamien.

Il est interdit aux travailleurs de former ou de rejoindre un syndicat - ou de conduire des grèves - qui ne sont pas autorisées par la confédération officielle du travail contrôlée par le parti communiste. Le salaire minimum mensuel a été élevé jusqu'à 650 000 dong (36 US$) pour la plupart des travailleurs, une somme qui demeure insuffisante pour fournir des conditions de vie décentes, en particulier au vu de l'inflation galopante. Cette augmentation n'a pas calmé le mécontentement des travailleurs.

Le rapport détaille les dispositions de la loi vietnamienne du travail, tels que les amendements au Code du travail effectués en 2007, qui ont imposé des mesures de restrictions extrêmement dures aux grèves et syndicats indépendants. Alors que le code du travail autorise les grèves menées par des syndicats contrôlés par le parti communiste, il établit des conditions à la fois strictes et encombrantes qui, dans la pratique, annulent ce droit.

« Les lois du travail en vigueur au Vietnam font en sorte qu'il n'y ait virtuellement aucune possibilité pour les travailleurs d'appeler à une grève légale », a déclaré M. Adams. « Le soi-disant processus de réforme et d'amendement du code du travail s'est concentré sur le renforcement du contrôle du gouvernement sur le mouvement des travailleurs et sur la négation en pratique de leurs droits. Le Comité du Peuple, les Cours du Peuple, et la confédération officielle du travail - tous contrôlés par le parti communiste vietnamien - fonctionnent comme une machine qui édite règle sur règle pour empêcher la tenue de grèves légales. »

Depuis 2006, un nombre sans précédent de travailleurs a commencé à rejoindre les grèves « sauvages » (ou grèves sans autorisation du syndicat officiel) dans des entreprises détenues par des compagnies étrangères, autour d'Ho Chi Minh ville et dans les provinces environnantes du sud. Alors que les grèves s'étendaient aux provinces du centre et du nord, les travailleurs ont élargi le spectre de leurs demandes pour inclure les droits des travailleurs, tels que la possibilité de former des syndicats indépendants et la dissolution de la confédération du travail contrôlée par le parti.

En Octobre 2006, des activistes vietnamiens ont annoncé la formation de deux syndicats indépendants, l'Organisation Unie des Travailleurs et Fermiers du Vietnam ou OUTFV (Hiep Hoi Doan Ket Cong Nong) et l'Union indépendantes des Travailleurs du Vietnam ou UITV (Cong Doan Doc Lap). Leurs objectifs déclarés étaient de protéger les droits des travailleurs, y compris le droit de former et de rejoindre des syndicats indépendants, de prendre part à des grèves, et de négocier collectivement avec les employeurs sans avoir besoin d'obtenir une autorisation du gouvernement ou du parti. Ils projetaient aussi de disséminer des informations sur les droits des travailleurs et sur les conditions de travail exploitantes et abusives de la plupart d'entre eux.

Pendant une courte période en 2006, le gouvernement vietnamien - avant son entrée dans l'organisation mondiale du commerce et la normalisation de ses relations avec les Etats-Unis - a toléré la construction d'une société civile. Les partis politiques d'opposition, les journaux clandestins, et les premiers syndicats indépendants du Vietnam ont émergé, une situation rare dans un régime de parti unique dominé par le Parti Communiste du Vietnam.

La tolérance du gouvernement envers la dissidence pacifique a cependant été de courte durée. Dans les semaines qui ont suivi la mise en route des deux syndicats indépendants, le gouvernement a arrêté tous les dirigeants et sympathisants connus des syndicats.

Sur les huit militants syndicaux indépendants condamnés à des peines de prison depuis 2006, trois sont toujours emprisonnés et au moins deux d'entre eux purgent des peines de probation administrative ou sont en résidence surveillée. Les trois autres ont subi des périodes de détention, d'interrogatoire, une surveillance intrusive et un harcèlement de la part des personnes qui les surveillaient.

Des agents vietnamiens sont suspectés d'avoir enlevé Le Tri Tue, un des fondateurs de l'Union Indépendante des Travailleurs du Vietnam. Le Tri Tue a été porté disparu en mai 2007 alors qu'il tentait de fuir vers le Cambodge pour y demander l'asile politique. Le département d'Etat américain a gravement noté dans son rapport de 2008 sur la situation des droits humains au Vietnam que « Le Tri Tue était toujours porté disparu... et que des rumeurs indiquaient que des agents de sécurité du gouvernement vietnamien l'avaient tué. »

« Aucun des syndicalistes pacifistes du Vietnam n'aurait jamais du être arrêté, détenu ou emprisonné », a déclaré M. Adams. « Les gouvernements donateurs, l'Organisation Internationale du Travail des Nations Unies, les entreprises qui investissent au Vietnam, et les autres doivent insister pour que le Vietnam traite ses travailleurs correctement et libère tous les activistes encore emprisonnés. »

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