Africa - West

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CRITERES DU DROIT INTERNATIONAL ET DES DROITS HUMAINS

      Le droit humanitaire international interdit à toute force d'occupation de recruter par la force des personnes, dans les régions sous son contrôle et limite le recrutement volontaire. Selon la Quatrième Convention de Genève consacrée à la protection des citoyens qui se retrouvent sous contrôle d'un état ennemi, "il n'est pas permis qu'une force d'occupation contraigne des personnes protégées à servir dans ses forces armées ou auxiliaires."63 De plus, "ni pressions, ni propagande visant à assurer un enrôlement volontaire ne sont permises."64 La convention interdit plus loin des actions telles que les punitions corporelles, la torture et "tout autre acte de brutalité" (article 32). Dans la mesure où le Rwanda est la puissance d'occupation dans l'est de la RDC et que ses troupes ont participé au recrutement de force, parfois brutal, de civils de la RDC dans l'armée du RCD-Goma, il agit en violation du droit humanitaire international.
      Le recrutement de force par le RCD-Goma, sous l'autorité des forces rwandaises serait, de la même façon, en violation du droit humanitaire international. Contrairement aux états65, les forces dissidentes n'ont normalement aucune autorité légale pour enrôler des personnes dans un service armé. Elles peuvent exercer une telle autorité quand un commandement responsable, contrôlant une part substantielle du territoire et de la population sur une période prolongée, exerce effectivement une autorité de type gouvernementale, à l'intérieur de ce territoire. Même dans ce cas de figure, Human Rights Watch maintient que la conscription doit se faire en accord avec le droit et avec un sens de l'impartialité plutôt qu'à la discrétion d'autorités locales qui agiraient sans retenue. Les conscrits doivent connaître la durée de leur service et doivent pouvoir tenir leurs familles informées de leurs déplacements.
      Même si le RCD-Goma devait exercer l'autorité de type gouvernementale nécessaire pour imposer légalement la conscription dans l'est de la RDC, il n'a respecté aucune loi ni fait preuve d'aucune forme d'impartialité en recrutant des personnes. Les autorités locales civiles et militaires enrôlent des hommes et des enfants selon leur bon vouloir, ne leur fournissent aucune information sur la durée de leur service et ne leur donnent évidemment aucune possibilité de prévenir leurs familles de leurs déplacements.
      Le Protocole I des Conventions de Genève interdit le recrutement d'enfants de moins de quinze ans et exige des états signataires qu'ils prennent toutes les mesures possibles afin de s'assurer que les moins de quinze ans ne participent pas directement aux hostilités.66 La Convention sur les Droits de l'Enfant ratifiée par le Rwanda en 1991, fournit des interdictions identiques dans l'article 38.67 Le Rwanda a signé, mais n'a pas ratifié, la Charte Africaine sur les Droits et le Bien-être de l'Enfant qui exige que les états signataires ne recrutent pas d'enfants, définis comme personnes de moins de dix-huit ans et qu'ils prennent toutes les mesures nécessaires pour s'assurer qu'aucun enfant ne participe aux hostilités.68
      En supplément des interdictions générales sur la conscriptions, le RCD-Goma est légalement lié par le Protocole II des Conventions de Genève qui s'applique à toute force dans un conflit armé non international.69 Le Protocole II interdit de recruter des enfants de moins de quinze ans ou de les utiliser dans des hostilités.
      Tant le Rwanda que le RCD-Goma ont signé les Accords de Lusaka de 1999 dans lesquels toutes les parties ont accepté de mettre fin au recrutement et à l'utilisation d'enfants soldats.70 En recrutant des enfants et en les formant au combat, le Rwanda et le RCD-Goma ont tous les deux violé les dispositions des Conventions de Genève comme celles des Accords de Lusaka de 1999.
      A l'appui de ces critères internationaux, Human Rights Watch affirme la position suivante : personne de moins de dix-huit ans ne doit être recruté (de plein gré ou par la force) dans les forces armées d'acteurs étatiques ou non étatiques, ni prendre part de façon directe dans des hostilités.

63 Quatrième Convention de Genève du 12 août 1949, article 51. La convention s'applique à "tous les cas d'occupation partielle ou totale du territoire d'une Haute Puissance Contractante, même si la force d'occupation en question ne rencontre aucune résistance armée." (article 2.) Le Rwanda et la RDC sont tous les deux signataires des Conventions de Genève ; le Rwanda est aussi signataire du Protocole I des Conventions de Genève.

64 Ibid.

65 Le droit international restraint faiblement la capacité des gouvernements à lever des armées et à subvenir aux besoins de défense nationale. Les limites concernent uniquement les interdictions sur la conscription et le déploiement militaire d'enfants de moins de dix-huit ans (voir plus bas), sur les pratiques cruelles, inhumaines ou dégradantes pour forcer à la conscription (voir, par exemple, les Conventions de Genève de 1949, l'article 3 common et le Protocole II, article 4(2)(a) et (c) ; l'Accord International sur les Droits Civils et Politiques, article 7 et la Charte Africaine sur les Droits Humains et les Droits de Peuples, article 12.

66 Protocole Additionnel I aux Conventions de Genève de 1949, article 77 (Protection des enfants).

67 Résolution 44/25 de l'Assemblée Générale en date du 20 novembre 1989, 44 U.N. GAOR Supp. (No.49) à 167, U.N. Doc. A/44/49 (1989), entrée en vigueur le 2 septembre 1990. Le Protocole Facultatif à cette convention établit qu'il faut être âgé au minimum de dix-huit ans pour participer directement aux hostilités, pour faire l'objet d'un recrutement obligatoire et pour être recruté ou utilisé dans des hostilités, par des acteurs non gouvernementaux aussi bien que par des forces gouvernementales. Cependant, le Rwanda n'a pas signé ce protocole.

68 OAU Doc. CAB/LEG/24.9/49 (1990) entré en vigueur le 29 novembre 1999, articles II et XXII.

69 Article 4(3)(c)-(d).

70 Article I(2).

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