Human Rights Watch News

Nouvelles - avril 2002

LANCEMENT DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE

Le 11 avril, dix gouvernements ont ratifié le Statut de la Cour Pénale Internationale (CPI), portant le nombre total de ratifications à 66, soit davantage que les soixante requises pour le lancement de la Cour. Cette étape franchie, le traité entrera en vigueur le 1er juillet et la Cour devrait être en mesure de commencer de siéger d'ici la fin de cette année.

Il s'agit d'un moment historique pour la défense des droits humains et la justice internationale. La CPI sera la première de ce type jamais établie, un tribunal pénal international permanent, potentiellement en mesure de poursuivre partout des individus responsables de crimes contre les droits humains les plus graves : génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité tels que recours systématique à la torture, disparitions forcées ou viols. La CPI a été créée parce que des systèmes judiciaires nationaux -- du Guatemala à la Sierra Leone en passant par l'Irak -- n'avaient pas su rendre justice aux victimes de crimes atroces. La Cour prendra ces cas en charge quand les systèmes nationaux n'auront pas fonctionné.

Human Rights Watch a joué un rôle central pour inscrire la création de cette Cour à l'agenda international, aidant à négocier le traité fondateur, promouvant sa ratification et défendant son principe face à ses détracteurs, notamment les Etats-Unis. Nous continuerons de surveiller la mise en place de la Cour, notamment la sélection des juges et des procureurs, de façon à assurer que la CPI se montre ainsi à la hauteur des grandes espérances qu'elle suscite.

Pour en savoir plus sur la Cour Pénale Internationale : http://www.hrw.org/french/themes/icc/icc.htm


VIOLENCE EN AFGHANISTAN

La violence ciblée et les pillages menés par des milices ethniques ont chassé les communautés pachtounes dans le nord de l'Afghanistan. Ces déplacements et l'insécurité en vigueur risquent de miner le processus visant à mettre en place un nouveau gouvernement national. Le rapport " Le prix des crimes commis par les Talibans : abus contre les Pachtounes dans le nord de l'Afghanistan ", publié le 9 avril, cite des cas d'exécutions sommaires, de passages à tabac, de violences sexuelles, d'enlèvements et de pillages commis depuis novembre 2001, quand les forces non pachtounes de l'Alliance du Nord ont repris le contrôle du nord du pays.

Dans une tribune libre publiée par le Washington Post, les chercheurs Peter Bouckaert et Sam Zia-Zarifi ont fait état de violences ethniques continuelles en Afghanistan, notamment de la violence exercée par les milices ouzbèkes, tadjikes et hazaras contre les Pachtounes, considérée comme une " dette à payer " pour les " péchés des Talibans ", simplement parce que la plupart de ces Talibans étaient membres de la communauté pachtoune.

A Kaboul, Human Rights Watch a débattu de ses informations avec le Représentant spécial des Nations Unies pour l'Afghanistan, le Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, des membres de l'Administration intérimaire, ainsi que du Bureau du Représentant spécial de l'Union européenne pour l'Afghanistan, de plusieurs ambassades européennes, de la Force internationale d'assistance et de sécurité, de représentants de la Commission européenne et du Département d'Etat américain. A Islamabad, HRW a rencontré les ambassadeurs de Norvège et de Suède et des membres de l'ambassade américaine.

A Washington, HRW a rencontré des responsables du Département d'Etat, de la Commission des Relations internationales de la Chambre des Représentants et de la Commission de la Défense du Sénat.

Le rapport est disponible en anglais en ligne: http://www.hrw.org/reports/2002/afghan2/
La tribune publiée dans le Washington Post peut être consultée sur : http://www.hrw.org/editorials/2002/afghan_0320.htm

LES COMMISSIONS MILITAIRES AUX ETATS-UNIS : DU MIEUX MAIS TOUJOURS INSUFFISANT

Le Département américain de la Défense a publié les nouveaux règlements des commissions militaires, autorisées par le décret militaire du Président Bush en date du 13 novembre. Human Rights Watch et d'autres avaient fortement critiqué le décret Bush pour ses manquements aux Conventions de Genève et pour ne pas garantir aux prévenus les protections qui leur sont dues tout au long du processus judiciaire. Les nouvelles règles, annoncées le 21 mars, répondent à de nombreuses préoccupations soulevées par Human Rights Watch mais ne répondent néanmoins toujours pas aux critères de respect des droits humains tels qu'appliqués par une cour indépendante et impartiale. Ils ne respectent pas non plus les dispositions des Conventions de Genève pour le jugement des prisonniers de guerre. Ces règlements laissent par ailleurs intactes les larges prérogatives de la juridiction militaire sur les étrangers, même quand ils ont été arrêtés loin du champ de bataille afghan.

Tous nos remerciements à ceux qui ont adressé des lettres au Secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld et au Département de la Défense pour faire valoir les préoccupations de Human Rights Watch.

Pour en savoir davantage sur les nouvelles commissions militaires : http://www.hrw.org/press/2002/03/tribunals0321.htm

LES DROITS HUMAINS EN OUZBEKISTAN

Malgré le rôle central de l'Ouzbékistan dans la campagne menée par les Etats-Unis en Afghanistan, l'épouvantable bilan de la situation des droits humains dans ce pays est demeuré inchangé. Le gouvernement d'Ouzbékistan conserve un contrôle étroit sur les médias et sur tout autre mode d'expression et ne tolère aucun parti politique indépendant, pas plus que les mouvements sociaux ou les dissidents qui cherchent à faire connaître les violations. Les agents de l'Etat ont torturé des détenus et au moins cinq personnes sont mortes en détention dans des conditions hautement suspectes au cours de l'année 2001. Le gouvernement continue de se livrer à des arrestations illégales ainsi qu'à la torture et d'arrêter les musulmans qui pratiquent leur foi hors du contrôle de l'Etat.

Avant le sommet entre les Présidents américain, George W. Bush et ouzbek, Islam Karimov, le 12 mars, Human Rights Watch a écrit au Président Bush, le pressant d'insister en faveur d'améliorations spécifiques à apporter à l'exécrable situation des droits humains en Ouzbékistan. HRW, Amnesty International, la Ligue internationale des droits de l'homme et Freedom House ont également écrit au maire de New York, Michael Bloomberg, avant qu'il ne rencontre le Président Karimov. Dans une tribune publiée dans le Washington Times, le Directeur de la division Advocacy de Human Rights Watch à Washington, Tom Malinowski et la spécialiste de l'Asie Centrale, Acacia Shields ont également encouragé le Président Bush à profiter de sa rencontre avec le Président Karimov pour conditionner le maintien de l'engagement américain aux côtés de l'Ouzbékistan aux progrès qui seraient faits pour mettre fin aux violations des droits humains et pour montrer une ouverture en faveur de changements politiques.

Ces efforts ont abouti à quelques concessions préliminaires de la part du gouvernement ouzbek. Le 5 mars, après des démarches diplomatiques américaines entreprises sur nos recommandations, le gouvernement ouzbek enregistrait comme légale l'Organisation indépendante des droits humains d'Ouzbékistan. HRW a rendu hommage à deux membres de cette association ces dernières années : son président, Mikhail Ardzinov, en 1995 et Islamail Adylov, en novembre dernier. Le Président Karimov s'est également de nouveau engagé à autoriser le Comité international de la Croix rouge (CICR) à se rendre dans les prisons du pays et dans les centres de détention préventive. L'an passé, HRW avait convaincu le Département d'Etat et le Département de la Défense de faire pression pour obtenir la libération des militants des droits humains, Mahbuba Kosymova et Ismail Adylov, ainsi que l'autorisation, pour le CICR, de se rendre dans les prisons ouzbeks. Le gouvernement ouzbek avait obtempéré dans un premier temps, mais le CICR avait ensuite suspendu ses visites après trois mois parce que les autorités entravaient son travail. Outre l'enregistrement légal des groupes de défense des droits humains, HRW demande la libération des principaux prisonniers politiques et religieux, l'enregistrement des partis politiques d'opposition, une réforme légale pour promouvoir la protection contre la torture et que les enquêteurs des Nations Unies soient invités à se rendre dans le pays.

Pour en savoir plus sur l'Ouzbékistan: http://www.hrw.org/europe/uzbekistan.php

LA JUSTICE AVANCE AU TCHAD

Une avancée majeure est intervenue dans la plainte concernant l'ancien dictateur tchadien, Hissène Habré, qui vivait un exil confortable au Sénégal depuis qu'il avait quitté le pouvoir en 1990. En janvier 2000, Human Rights Watch, en collaboration avec des organisations tchadiennes, avait d'abord convaincu un juge sénégalais de faire arrêter Habré pour torture et crimes contre l'humanité, jusqu'à ce que les cours d'appels du Sénégal, sous la pression du nouveau chef de l'Etat, déboutent la plainte. Par la suite, HRW a aidé les victimes tchadiennes à intenter des poursuites devant la justice belge dont les tribunaux ont étendu leurs compétences aux crimes graves contre les droits humains. Du 26 février au 7 mars, un juge d'instruction belge et une équipe de policiers se sont rendus à N'Djamena, la capitale du Tchad, où ils ont bénéficié de la coopération du gouvernement tchadien. Leur présence a fait les gros titres au Tchad et a transformé le cas théorique contre Habré, auprès de cours lointaines, en une réalité concrète, déclenchant une tourmente dans un pays où les acolytes les plus brutaux d'Hissène Habré occupent toujours la plupart des postes-clés dans les services de sécurité. L'équipe a visité cinq lieux de détention de N'Djamena où les anciens prisonniers leur ont montré comment ils y étaient détenus et torturés. D'anciens prisonniers ont également amené le juge sur les sites où ils furent forcés de creuser des fosses communes pour ceux morts en détention. Le juge a également recueilli le témoignage de nombreux anciens proches d'Hissène Habré et permis aux victimes de se confronter à leurs bourreaux. Ces victimes espèrent maintenant que le juge inculpera Habré et demandera au Sénégal de l'extrader, ce dernier pays ayant jusqu'à présent veillé à ne pas laisser filer Habré dans l'attente d'une telle requête.

Pour en savoir plus sur l'affaire Hissène Habré en français: http://www.hrw.org/french/themes/habre.htm

L'EXAMEN DU PROJET DE LOI GREC SUR LE TRAFIC DE PERSONNES RETARDE

Le 6 mars, Human Rights Watch a publié un commentaire détaillé du projet de loi de la Grèce pour lutter contre le trafic de personnes, basé sur l'enquête que nous avions effectuée en juillet 2001. En partie à cause des critiques émises par HRW et d'autres ONG locales, le gouvernement grec a retardé l'examen du projet de loi par le Parlement de façon à pouvoir lui apporter quelques modifications. Dans son commentaire, HRW soulignait en effet que ce texte ne considérait pas comme un crime toutes les formes de trafic de personnes, mais se concentrait sur les trafics liés au commerce du sexe ; qu'il ne prévoyait pas de peines explicites pour les responsables officiels de l'Etat qui se seraient rendus complices ou auraient participé à de tels trafics ; qu'il n'interdisait pas explicitement la détention des victimes de ces trafics et enfin, qu'il ne prévoyait pas explicitement de mesures de protection pour les victimes et les témoins.

Pour en savoir plus:
http://www.hrw.org/backgrounder/eca/greece/greece_memo_greece.htm

MASSACRE PERPETRE PAR L'ARMEE AU NIGERIA

Entre le 22 et le 24 octobre 2001, les soldats de l'armée nigériane ont tué plus de deux cents civils non armés dans plus de sept villes et villages de l'Etat de Benue, dans le centre-est du Nigeria. Ces attaques ont fait partie d'une opération militaire bien planifiée, menée en représailles à la mort de dix-neuf soldats, deux semaines auparavant, dans la région. La responsabilité de ces assassinats avait été attribuée à des membres de la communauté ethnique Tiv. Ceux qui ont été tués par les soldats ont été victimes d'un châtiment collectif et visés simplement parce qu'ils appartenaient à la même communauté. L'absence de condamnation et d'enquête de la part du gouvernement sur les tueries de Benue risque d'encourager les militaires à perpétrer de nouvelles attaques en toute impunité.

Publié le 1er avril, le rapport " Revanche des militaires à Benue : une population attaquée " présente l'enquête sur l'exécution extra-judiciaire de plus de deux cents civils non armés et la destruction de propriétés. Human Rights Watch a également critiqué le silence public des gouvernements étrangers après les massacres de Benue, soulignant en particulier que les Etats-Unis et le Royaume-Uni avaient omis d'exercer leur influence. Le rapport a largement circulé au Nigeria où il a reçu une ample couverture par la presse, se retrouvant à la " une " de tous les principaux journaux. Le Ministre nigérian de l'information a réagi en personne dans un entretien à la BBC. Human Rights Watch a rencontré des diplomates américains et britanniques pour discuter des conclusions du rapport et de ses recommandations.

Pour lire le rapport en ligne: http://www.hrw.org/reports/2002/nigeria/
Pour lire le communiqué de presse en français: http://www.hrw.org/french/press/2002/nigeria0401.htm

LES DROITS HUMAINS EN RUSSIE ET EN TCHETCHENIE

La Tchétchénie est le seul endroit d'Europe où des civils sont tués quasi-quotidiennement. Même si le gouvernement de Russie insiste sur le fait que la situation en Tchétchénie s'est normalisée, Human Rights Watch continue d'enquêter sur les disparitions forcées, le recours indiscriminé à la force et sur les faibles efforts entrepris pour enquêter sur ces crimes. HRW continue aussi de réclamer que la Russie soit davantage comptable de ses actions, en exposant les atrocités commises et en faisant pression sur les alliés de la Russie et sur les Nations Unies pour qu'ils condamnent ces abus.

En janvier, le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) a examiné le rapport de la Russie sur la protection des droits des femmes. Grâce à notre mémorandum et à notre présence lors de cet examen, les membres du Comité ont interrogé le gouvernement sur la violence exercée contre les femmes en Tchétchénie. Le rapport du Comité a souligné que dans la plupart des cas, la Russie n'avait pas mené d'enquête sérieuse ni arrêté les responsables, malgré des preuves solides témoignant que les forces armées russes avaient commis des viols ou autres formes de violence sexuelle contre les femmes en Tchétchénie. Le Comité a pressé la Russie d'enquêter sur de tels actes et de les punir ; de créer un programme d'éducation sur les droits humains à l'intention des forces armées et de mettre en œuvre rapidement des mesures disciplinaires visant les personnels militaires et policiers.

Voir le mémorandum de HRW : http://www.hrw.org/backgrounder/eca/chechnya_women.htm

Le 19 mars, en grande partie grâce aux éléments fournis par Human Rights Watch et à ses recommandations, le Sénat américain a adopté une résolution aux termes forts sur la situation des droits humains en Tchétchénie, appelant le Président russe, Vladimir Poutine à " agir immédiatement pour mettre fin aux violations des droits humains par les soldats russes en Tchétchénie, enquêter (à ce sujet) et engager les poursuites appropriées contre les accusés ". Cette résolution appelait également le Président Bush à " rechercher une information spécifique auprès du gouvernement de la Fédération de Russie sur les enquêtes concernant les violations des droits humains dénoncées en Tchétchénie et sur les poursuites engagées contre les individus accusés de ces abus ".

HRW a également exposé ses préoccupations et recommandations lors de la session en cours de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. L'organisation a réclamé une résolution condamnant les abus commis en Tchétchénie et appelant la Russie à enquêter sur ces abus. " Pendant deux ans, une Russie rigide a bravé les résolutions de la Commission ", a déclaré Elizabeth Andersen, directrice exécutive de la Division Europe et Asie Centrale de Human Rights Watch. " Maintenant, les membres de la Commission ont choisi de protéger les droits humains en Russie et de préserver l'intégrité de la Commission ".

Ces recommandations peuvent être lues sur : http://www.hrw.org/un/unchr-chechnya.htm

Signe de progrès : le 29 mars, le Commandant russe des forces servant en Tchétchénie a publié un décret obligeant le personnel de l'armée à respecter les droits humains pendant toutes les opérations menées en Tchétchénie. Le décret impose également à toutes les troupes relevant de la police ou du Ministère de l'intérieur qui sont impliquées dans la détention d'individus de s'identifier et impose que tous les véhicules militaires utilisés arborent leur numéro d'immatriculation. Les éléments recueillis par Human Rights Watch sur les violations des droits humains en Tchétchénie, y compris les disparitions, ont montré que l'absence d'éléments distinctifs sur les uniformes des forces russes constituait une sérieuse entrave à l'identification de leurs auteurs.

Pour en savoir plus sur les droits humains en Russie et en Tchétchénie : http://www.hrw.org/campaigns/russia/chechnya/


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