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Les communautés du nord-est de la République démocratique du Congo pleurent la perte d'un homme extraordinaire. L’Abbé Benoît Kinalegu, le prêtre catholique qui a alerté le monde au sujet des terribles exactions commises par l'Armée de résistance du Seigneur (Lord’s Resistance Army, LRA) en RD Congo, est décédé le 8 avril 2016. Il est mort de problèmes rénaux et respiratoires, dans la ville de Dungu, à l'âge de 53 ans.

L’Abbé Benoît Kinalegu, prêtre congolais photographié en 2012.  © 2012 Human Rights Watch

J'ai rencontré pour la première fois l’Abbé Benoît au début de 2009, peu après qu'il eut donné l'alerte par radio sur les « massacres de Noël », sanglant épisode lors duquel la LRA, groupe rebelle dirigé par Joseph Kony, a lancé une vague d'attaques particulièrement brutales contre les populations civiles dans la région congolaise du Haut-Uélé, faisant plus de 800 morts.

Quand je suis arrivée avec une collègue à Dungu pour vérifier si les informations que nous avions reçues étaient vraies, on nous a dit que la personne que nous devions absolument rencontrer était l'Abbé Benoît. Dès notre première rencontre, nous avons été frappés par son courage. Il a accepté de nous aider à découvrir ce qu'il s'était passé et nous a accompagnés à moto jusqu'aux lieux reculés où s'étaient produits les massacres. Son empathie avec les victimes et les témoins traumatisés, dont beaucoup avaient vu certains de leurs proches être massacrés à coups de machettes, a été instantanée. Il était doux, réconfortant et solidaire. Ils le considéraient avec respect et il leur a prodigué des encouragements, leur assurant qu'ils ne seraient pas oubliés.

Au fil des années, l’Abbé Benoît ne s'est pas contenté de documenter les horribles crimes commis par la LRA. Il a pris la tête d'une campagne de plaidoyer, exhortant le président des États-Unis, Barack Obama, à participer à la protection des civils face à la menace de la LRA. La voix de l’Abbé Benoît, avec d’autres voix, a conduit au déploiement de conseillers spéciaux américains chargés de soutenir une « Taskforce » régionale mise sur pied pour lutter contre la LRA. L'abbé a contribué à mettre en place un réseau d’alerte précoce pour signaler par radio toute activité suspecte de la LRA, de sorte que les communautés, même dans les zones les plus reculées dépourvues de réseau de téléphone cellulaire, puissent alerter rapidement et obtenir de l'aide quand les attaques se produisaient. Ces efforts ont contribué à une réduction notable des attaques de la LRA ces dernières années.

Son œuvre peut-être la plus importante a été la création à Dungu d’un centre pour les enfants qui ont été enlevés par la LRA et forcés à devenir esclaves sexuels ou combattants. Il les a aidés à se remettre, à reconstruire leurs vies et à se réinsérer dans leurs communautés. Son sourire chaleureux et sa nature optimiste les ont aidés sur le long chemin du rétablissement. Pour les nombreuses victimes de la LRA et leurs familles, il a été un pilier sur lequel elles pouvaient s'appuyer lors des périodes les plus sombres.

L’Abbé Benoît va me manquer énormément. Et comme beaucoup d'autres, je ne l'oublierai pas, pas plus que ses remarquables efforts pour contribuer à faire de notre monde un endroit meilleur.

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L’Abbé Benoît Kinalegu était le directeur de la Commission de Paix et Justice de l'Église catholique pour le diocèse de Dungu-Doruma, dans le nord-est de la RD Congo. En 2012, il a été lauréat du Prix Alison Des Forges, décerné par Human Rights Watch, pour son extraordinaire dévouement à la cause qu'il défendait.

Pour de plus amples informations sur son travail, veuillez suivre le lien:
https://www.hrw.org/fr/news/2012/10/26/abbe-benoit-kinalegu-rd-congo

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La Croix 13.04.16

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