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France : Jugement contre les contrôles au faciès

La Cour d'appel a condamné l'Etat à dédomager des personnes victimes de contrôles abusifs

(Paris, le 29 juin 2015) – La Cour d’Appel de Paris a condamné le 24 juin 2015 l’Etat français à dédommager des personnes dont l’identité avait été contrôlée de manière abusive, marquant ainsi un tournant dans le combat pour mettre fin aux contrôles au faciès en France, ont estimé sept organisations de la société civile.

Dans cinq décisions historiques rendues mercredi 24 juin 2015, la Cour d'appel de Paris a estimé que les contrôles d'identité discriminatoires sont illégaux et qu'il est « peu important par ailleurs que le contrôle se soit déroulé sans que n’aient été tenus de propos humiliants ou insultants ». La Cour d'appel a constaté une violation des droits dans 5 des 13 cas jugés en appel. En première instance, les treize demandeurs avaient été déboutés.

« Les juges rappellent à l’Etat que les principes d’égalité et de non-discrimination s’appliquent également aux forces de l’ordre », a déclaré Me Slim Ben Achour, avocat, avec Me Felix de Belloy, des treize personnes qui avaient porté plainte.

Dans ses jugements d’arrêts, la Cour souligne en effet que l'État a l'obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir la discrimination, devoir auquel il a manqué. Elle note en particulier que l'absence de toute trace des contrôles d'identité effectués prive les victimes de la possibilité de déposer un recours effectif en cas de discrimination ou d'abus.

La Cour a également souligné qu'il est du rôle du juge de veiller à ce que les contrôles effectués soient fondés sur des raisons objectives.

Malgré cette victoire dans 5 affaires, les 8 autres décisions négatives n’en restent pas moins préoccupantes. En effet, la Cour indique que le comportement des requérants ne serait pas considéré suspect ailleurs, mais qu’il l’est dans des « lieux touchés par la délinquance ». La distinction faite entre des affaires survenues dans des quartiers différents crée un système judiciaire à deux vitesses, l'un pour les quartiers caractérisés par leur « dangerosité » et l’autre pour le reste du territoire. Ces huit décisions font également reposer une charge excessive sur les personnes contrôlées, qui doivent apporter elles-mêmes la preuve d'un motif discriminatoire, échouant ainsi à appliquer pleinement le principe de non-discrimination que la Cour reconnaît par ailleurs dans ses décisions.

Ces décisions de la Cour d’Appel doivent conduire l'État à modifier le cadre juridique régissant les contrôles d'identité, afin que les contrôles ne puissent être effectués que sur la base de motifs objectifs et individuels, et fournir aux personnes contrôlées un récépissé qui précise les motifs du contrôle. Ces mesures devront s'inscrire dans une réforme en profondeur des contrôles d'identité pour en finir avec les contrôles au faciès, comme s’y était engagé le Président de la République, avant son élection en 2012.

« Ces arrêts de la Cour vont amener sans nul doute les plus hautes autorités de l’Etat à prendre des mesures garantissant les droits fondamentaux des citoyens, ceci d'autant plus qu'elles feront jurisprudence », a déclaré Mme Lanna Hollo, représentante en France de Open Society Justice Initiative.

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Organisations signataires

  • Gisti

  • Human Rights Watch

  • Ligue des Droits de l’Homme

  • Maison pour un développement solidaire

  • Open Society Justice Initiative

  • Syndicat de la Magistrature

  • Syndicat des avocats de France

 

 

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