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RésuméLa politique tunisienne consistant à placer certains des prisonniers politiques (dont le nombre sélève à plus de 500) en isolement cellulaire total peut se prolonger pendant des années. Elle est une des pratiques les plus dures héritées du régime carcéral des années 90, décennie durant laquelle on peut estimer que les conditions de détention ont été les pires. Cette politique met en péril la santé mentale des prisonniers, leur ôte tout moyen de remettre en cause leur réclusion, et viole les normes internationales qui exigent que toute personne détenue soit traitée de façon humaine et dans le respect de la dignité humaine. Aujourdhui, trente à quarante prisonniers, pour la plupart dirigeants du mouvement tunisien islamiste Nahdha, sont enfermés dans de petites cellules disolement, ce, au moins vingt-trois heures par jour. Certains de ces prisonniers ont passé la majeure partie de ces treize dernières années en isolement. Les autres sont en isolement depuis des mois et, dans un bon nombre de cas, depuis plus dun an. À de rares exceptions près, les courtes « sorties » quotidiennes comme la douche ne leur donnent pas loccasion de voir dautres détenus. En dehors du personnel pénitencier, les seules personnes quils rencontrent sont les membres de leurs familles, lors de brèves visites. Même au cours de ces entrevues, ils naperçoivent ni dautres prisonniers, ni les proches dautres prisonniers. Ils ne côtoient que les gardes qui restent auprès deux et consignent souvent par écrit leurs conversations échangées durant les visites de leur famille. Selon leurs familles, ces prisonniers ne savent toujours pas pourquoi ils sont placés en isolement ni comment et quand ladministration pénitentiaire réexaminera leur situation. Le caractère arbitraire de cet isolement et labsence de perspectives débouchant sur une issue aggravent leur souffrance et celle de leurs familles. Dautres prisonniers sont placés en isolement collectif. Cette pratique consiste à enfermer un petit groupe de prisonniers dans la même cellule, aucun dentre eux nayant le droit de voir les prisonniers ne faisant pas partie du groupe ou davoir accès aux lieux et aux activités dont les autres détenus profitent. En 1991, le Ministre de lintérieur tunisien a officiellement donné lordre à tous les membres des services de sécurité de respecter lEnsemble de règles minima pour le traitement des détenus, instrument élaboré par lONU. Malgré cet ordre, les prisonniers tunisiens placés en isolement demeurent soumis à des conditions de détention qui, de toute évidence, ne respectent pas ces principes. Beaucoup de ces prisonniers nont pas droit à lheure quotidienne minimum à lextérieur qui leur permettrait de faire de lexercice physique. En outre, nombre dentre eux vivent dans des cellules qui ne possèdent pas de fenêtre leur permettant de jouir de la lumière du jour et de lair frais. Alors que selon lEnsemble de règles minima, les prisonniers devraient pouvoir participer régulièrement à des activités instructives et récréatives, les détenus placés en isolement cellulaire nont le droit de participer ni aux programmes de formation professionnelle et technique ni aux programmes éducatifs proposés par la prison. De plus, les choix de lecture sont très limités. En théorie, lincarcération en cellule disolement de certains prisonniers peut, dans des cas très limités, avoir des raisons légitimes dexister. Mais lisolement prolongé auquel la Tunisie soumet des détenus sélectionnés (pour la plupart des dirigeants du parti interdit Nahdha), nous semble moins reposer sur des motifs légitimes liés à ladministration du centre de détention que sur une volonté politique de punir, de démoraliser ces personnes et décraser la mouvance islamiste quelles représentent. La Tunisie ne pourra pas prétendre respecter les normes internationales en matière de droits humains tant quelle aura recours à lisolement prolongé.
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