IX. RECOMMANDATIONS DÉTAILLÉESA tous les gouvernements ouest-africains impliqués dans la traite des enfants, y compris le Togo, le Bénin, le Nigeria, le Niger, la Côte d'Ivoire, le Ghana et le Gabon36 Concernant les poursuites pour traite des enfants et autres délits qui lui sont liés
· En accord avec la décision consensuelle prise en 2002 à la réunion de consultation, à Libreville, au Gabon, entre vingt-et-un états africains, établir une convention régionale contre la traite, en s'assurant que toute convention comporte la pleine protection des droits humains des enfants victimes de la traite. Inclure des représentants qualifiés des ONG et de la société civile dans toutes les négociations régionales. Dans le cadre d'une stratégie multilatérale de lutte contre la traite, défendre l'inscription de la traite des enfants comme prioritaire dans le programme de travail de la nouvelle Union Africaine. · Enquêter, poursuivre et punir rapidement les responsables de la traite des enfants, en utilisant les lois pénales actuelles en attendant qu'une législation spécifique de lutte contre la traite soit promulguée. Veiller à la transparence des poursuites contre les trafiquants en maintenant un compte rendu public de toutes les poursuites et des décisions finales prises pour chaque cas. Prendre des mesures immédiates pour enquêter sur toutes les allégations de corruption impliquant des policiers, des gendarmes, des procureurs, des membres du système judiciaire ou toute autre personne impliquée dans la mise en application des lois pénales relatives à la traite des enfants. Prendre également des mesures immédiates pour poursuivre en justice les infractions. Concernant le recrutement des enfants victimes de la traite
· Incorporer dans les programmes scolaires des informations sur la traite des enfants. Sensibiliser les responsables communautaires et religieux aux causes de la traite des enfants, aux dangers potentiels du travail des enfants et à la Convention relative aux droits de l'enfant. Fournir des informations à tout le personnel travaillant avec ou pour des enfants, tels que les juges, les avocats, les magistrats, le personnel de maintien de l'ordre, les militaires, les enseignants, les administrateurs d'écoles, le personnel soignant, les travailleurs sociaux, les personnalités officielles des gouvernements locaux et le personnel des institutions pour enfants. · Accorder prioritairement son attention à l'augmentation des opportunités d'éducation et de formation professionnelle pour les enfants, en particulier les filles. Développer, mettre en _uvre et assurer le suivi des programmes destinés à traiter les disparités dans la scolarité des filles et des garçons et les taux d'abandon. Mettre en _uvre des campagnes publiques d'information sur les dangers potentiels du travail domestique, sur les marchés, dans l'agriculture et dans les usines. Doter les comités locaux de vigilance d'un personnel féminin et masculin spécifiquement formé à éduquer les familles à des solutions alternatives au placement des enfants dans des activités dangereuses. · Dans le contexte de la traite des enfants, considérer les orphelins et les enfants affectés par le SIDA comme un groupe cible vulnérable en incorporant des mesures spécifiques de protection des orphelins et des enfants affectés par le SIDA dans le plan national d'action contre la traite des enfants. Renforcer les programmes pour combattre les pratiques discriminantes contre les enfants infectés ou affectés par le VIH-SIDA. Concernant le transport des enfants victimes de la traite
· Poster des officiers formés à l'identification et à l'appréhension des trafiquants d'enfants aux points de transit où l'on sait que se rassemblent les enfants victimes de la traite avant d'être emmenés à l'étranger. Etablir un système pour assurer le retour en toute sécurité, dans leurs pays d'origine, des enfants emmenés à l'étranger par des intermédiaires puis abandonnés. Inclure des services de soutien adéquats et un accès à un personnel sachant traiter les enfants avec gentillesse. Concernant l'exploitation des enfants victimes de la traite à des fins commerciales
· Prendre toutes les mesures nécessaires pour que soient poursuivis en justice les auteurs de violence physique et/ou sexuelle contre des travailleurs domestiques. Développer des campagnes publiques d'information sur la prévalence des abus contre les travailleurs domestiques. Assurer soins et soutien aux enfants qui s'échappent de leur travail domestique et qui ont souffert de violences physiques ou sexuelles, y compris le traitement des maladies sexuellement transmissibles. Concernant le retour en toute sécurité des enfants victimes de la traite et leur réintégration
· Etablir des protocoles pour les policiers, les gendarmes, d'autres officiels de l'état et les travailleurs sociaux à suivre lorsque des enfants qui prétendent avoir été victimes de la traite chercheront leur aide, notamment pour un retour en toute sécurité chez eux ou vers un lieu sûr. Assurer le suivi de l'application de ces protocoles. Etablir des registres publics centralisés pour tous les enfants victimes de la traite et leurs localisations, sous la supervision du Tribunal pour enfants ou d'une institution analogue quand celle-ci existe. S'assurer que toute somme d'argent due aux enfants par leurs employeurs leur sera versée par la constitution d'un crédit ou de tout autre mécanisme légal. · Libérer tout enfant placé en détention pour avoir transgressé la loi du fait de son statut de victime de la traite. Fournir des mesures de protection spéciale en accord avec la Convention relative aux droits de l'enfant, les instruments spécialisés de lutte contre la traite et le droit national. Promulguer une interdiction explicite de la détention des enfants victimes de la traite dans des institutions de correction. · Assurer un suivi efficace de tous les enfants qui ont été trafiqués et veiller à ce qu'ils ne soient pas de nouveau victimes de la traite. Assurer une prise en charge et un soutien appropriés aux enfants dont les parents sont complices dans la traite des enfants ou sont par ailleurs responsables d'abus et de négligence. Développer un protocole pour trouver des solutions d'accueil appropriées ou si nécessaire un placement institutionnel pour de tels enfants. Promouvoir des moyens alternatifs pour que les enfants qui risquent d'abandonner leur scolarité puissent gagner leur vie. · Protéger la sécurité des enfants victimes de la traite en promulguant des dispositions fermes en matière de protection des témoins. S'assurer que tous les enfants victimes de la traite qui témoignent dans des procédures criminelles ont l'opportunité de le faire dans un environnement qui leur soit agréable, en dehors d'une salle formelle de tribunal par exemple. · A des fins de planification et d'évaluation des programmes, développer un système de suivi des cas de traite d'enfants et des réponses gouvernementales. Maintenir une banque de données sur les données démographiques des enfants victimes de la traite, leurs environnements familiaux, les méthodes de recrutement, les relations avec les intermédiaires, les modes de transport à l'étranger, les types de travail à l'étranger, la durée des séjours, les méthodes de fuite et les méthodes de retour et/ou réinsertion. Partager les données pertinentes avec les gouvernements d'autres pays affectés par la traite des enfants. Au gouvernement du Togo
· Modifier les dispositions du projet de Code des enfants qui imposant des peines de prison aux parents qui aident les trafiquants d'enfant, qui ne rapportent pas les cas de traite d'enfants ou qui offrent des enfants à vendre. Créer une défense explicite des parents véritablement trompés sur la finalité du recrutement de leur enfant, qui ont cru que celui-ci déboucherait sur une éducation ou que tout au moins, il ne conduirait pas à l'exploitation de l'enfant. Permettre des sanctions réduites pour les parents qui raisonnablement mais de façon erronée ont cru que se faire le complice de la traite des enfants ou ne pas rapporter à la police des trafiquants d'enfants était dans l'intérêt supérieur de l'enfant. · Assurer une instruction primaire gratuite et accessible à tous les enfants, légalement garantie, comme le prévoit l'article 28 de la Convention relative aux droits de l'enfant. Mettre en _uvre des mesures pour améliorer la scolarisation des enfants et leur maintien à l'école et développer un système d'évaluation régulière de l'efficacité de ces interventions. Enquêter rapidement sur les cas d'enfants expulsés de l'école pour incapacité à s'acquitter des frais de scolarité ou à payer le matériel scolaire. Surveiller l'activité de trafiquants potentiels d'enfants dans l'enceinte des écoles ou à leurs abords. Aux bailleurs qui soutiennent ces gouvernements
· Fournir un soutien dans la lutte contre la traite aux pays de transit et à ceux « de destination » des enfants togolais (comme le Bénin, le Nigeria, le Niger, la Côte d'Ivoire et le Gabon) ainsi qu'aux pays « d'origine » des enfants vers le Togo (comme le Ghana, le Bénin et le Nigeria). Refuser d'utiliser la suspension de l'aide au développement comme une excuse pour ne pas prendre un rôle actif dans les efforts de lutte contre la traite38. · Surveiller les programmes de lutte contre la traite afin de savoir s'ils abordent les violations des droits humains sous jacentes à la traite des enfants, en particulier la discrimination contre les filles. S'assurer que les programmes de lutte contre la traite soutenus par les bailleurs ne sont pas mis à mal, au niveau local, par, par exemple le traitement des enfants victimes de la traite comme des délinquants, des menaces d'emprisonnement contre les parents ou la discrimination contre les familles affectées par le VIH-SIDA. Aux Nations Unies
· Plaider énergiquement en faveur d'un soutien plus important des bailleurs aux programmes gouvernementaux et non-gouvernementaux de lutte contre la traite. Intégrer la traite des enfants dans les stratégies globales d'allégement de la pauvreté, de développement, d'éducation et de droits des femmes. · A l'UNICEF : Evaluer précisément la mise en _uvre par le Togo des Observations de conclusion du Comité sur les droits de l'enfant de 1997. Exercer des pressions sur les bailleurs pour qu'ils fournissent des ressources adéquates au Togo afin qu'il remplisse les obligations qui sont les siennes selon la Convention relative aux droits de l'enfant. Formuler des recommandations concrètes concernant la mise en _uvre de l'Article 35 sur l'élimination de la traite des enfants. Développer des programmes de formation sur les causes, les méthodes et les conséquences de la traite des enfants afin que ceux-ci soient intégrés dans les programmes scolaires. · A l'UNICEF et le BIT : Fournir une assistance technique au gouvernement togolais sur l'élimination de la traite des enfants, incluant une analyse des dispositions relatives à la traite des enfants dans le projet de loi de Code des enfants. Rechercher les meilleures pratiques sur la réintégration des enfants victimes de la traite et formuler des recommandations à l'organisme togolais qu'est le Comité national pour la réception et la réintégration sociale des enfants victimes de la traite. · Au Bureau pour le contrôle de la drogue et la prévention du crime (ODCCP) : S'assurer que les efforts pour poursuivre et punir les trafiquants d'enfants respectent les droits humains des enfants victimes de la traite, en accord avec l'Article 6 du Protocole des Nations Unies sur la traite et les instruments sur les droits humains pertinents. · Au Conseil économique et social et au Haut Commissariat pour les droits de l'Homme (HCNUDH) : S'assurer que la législation nationale mettant en _uvre le Protocole des Nations Unies sur la traite est en conformité avec les Principes recommandés et les directives sur les droits humains et la traite des personnes (2002) Aux organisations multilatérales en Afrique
· Au Conseil exécutif de l'Union Africaine (U.A.) : Appeler tous les états membres à inclure des politiques de lutte contre la traite et des programmes dans leurs priorités relatives aux enfants. En collaboration avec le département légal, participer à l'élaboration d'une convention sous-régionale de lutte contre la traite. A travers le Conseil économique, social et culturel (ECOSOC), inviter les ONG de lutte contre la traite à contribuer à la formulation des résolutions et initiatives de lutte contre la traite. · A la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples : Inscrire la traite des enfants à l'ordre du jour des réunions semestrielles. Donner instruction aux experts pour qu'ils préparent des documents consultatifs sur les violations de la Charte africaine sur les droits de l'Homme et des peuples (1981) et formuler des recommandations sur la façon dont la Commission peut aider les gouvernements à mettre un terme à la traite des enfants. 36 Les témoignages de ce rapport incriminent ces pays. Cependant, en Afrique de l'Ouest, le BIT a également identifié des cas de traite d'enfants au Burkina Faso, au Cameroun et au Mali. 37 L'Article 9 exige que les états (1) selon qu'il convient et conformément à leur système juridique, adoptent des mesures efficaces d'ordre législatif, administratif ou autre pour promouvoir l'intégrité et prévenir, détecter et punir la corruption des agents publics et (2) prennent des mesures pour s'assurer que leurs autorités agissent efficacement en matière de prévention, de détection et de répression de la corruption des agents publics, y compris en leur donnant une indépendance suffisante pour empêcher toute influence inappropriée sur leurs actions. 38 Comme noté plus haut, les Etats Unis et l'Union européenne ont suspendu leur aide au développement au Togo depuis le début des années 90 à cause de l'absence d'élections libres et impartiales. |