202302global_lbq_collage_fr

« Voilà pourquoi nous sommes devenues des activistes »

Violences contre les femmes lesbiennes, bisexuelles et queers et les personnes non binaires

© Privé

VERSION ABRÉGÉE

 

I. Résumé

Les femmes queers, même si elles ne s’affichent pas en tant que telles, s’exposent à des types spécifiques de violence. Machorra, c’est l’équivalent de ‘gouine’ en espagnol. On fait des choses qui déplaisent aux hommes. J’adore conduire mon camion. J’invite mes amis à grimper à bord et à en descendre comme bon leur semble. Cela déplaît aux hommes. Parce que cela signifie que je me déplace comme je veux ; que je n’ai pas besoin d’eux. Je ne sais pas vraiment si c’est propre aux femmes queers, mais quand on travaille avec des hommes dans des espaces activistes, on ne cherche pas à avoir leur accord. Si on ne cherche pas à leur plaire, ils disent que nous sommes violentes. Nous mettons les hommes
en colère.
[1]


– Sofía Blanco, défenseure autochtone des droits fonciers, Mexique

Je crois que le récit d’une seule femme queer peut changer tous ceux qui suivront. C’est la raison pour laquelle j’ai accepté de vous parler, de vous dire ce qui s’est passé.[2]


– Amani, activiste et auteure lesbienne, Tunisie

En juin 2021, la petite amie d’Amani a mis fin à leur relation. Amani a expliqué à Human Rights Watch que dans les mois qui avaient précédé cette rupture, les parents de son amie avaient « refusé de la laisser sortir » et « voulaient la forcer à épouser un homme ».[3] Ils y sont parvenus, et elle a rompu avec Amani. Celle-ci a précisé que ce n’était « pas la première fois » qu’une femme la quittait pour « la raison simple et troublante que je ne suis pas un homme, que je ne suis pas quelqu’un d’assez bien pour la femme
que j’aime
».

Alors qu’elle s’adressait à Human Rights Watch, Amani n’a évoqué qu’une seule fois le traitement bien documenté[4] et violent[5] dont font l’objet les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) en Tunisie.[6] La conversation a principalement porté sur son travail d’écrivain et sa vie amoureuse.

Amani sait qu’étant lesbienne, elle s’expose à des violences physiques et à un harcèlement sexuel, et que la police tunisienne risque de l’arrêter arbitrairement. À vrai dire, elle a déjà subi ces trois formes d’exactions. Cependant, bien que les médias et les ONG à travers le monde ne s’intéressent guère à cette question, les mariages forcés affectent eux aussi les droits, les libertés et les possibilités de connaître le bonheur des femmes queers, ce qui constitue une violation directe des lois internationales régissant les droits humains en matière de libre et plein consentement des futurs époux.[7] D’après Amani, les femmes queers qu’elle connaît ont « soit été mariées de force à un homme, soit été quittées par leur petite amie que l’on forçait à épouser un homme. Ce phénomène se retrouve partout. C’est notre vie au quotidien ».

Les paroles d’Amani sont conformes aux propos recueillis par Human Rights Watch auprès d’autres personnes lesbiennes, bisexuelles et queers (LBQ+)[8] à travers le monde qui ont été affectées par un mariage à un homme, ne voulant pas de ce mariage ou étant dans l’incapacité de quitter leur mari, y compris en Indonésie, au Kirghizstan et au Malawi. Liliya, fondatrice d’une organisation LBQ+ au Kirghizstan, a été mariée de force à un homme par ses parents quand elle avait 19 ans. Asante, une lesbienne du Malawi, a été agressée physiquement à deux reprises par l’époux de sa partenaire bisexuelle, une femme qui voulait divorcer mais n’en avait pas les moyens. Dali, activiste bisexuelle d’un mouvement pour la jeunesse en Indonésie, affirme que sa communauté a perdu « des dizaines de modèles de femmes queers qui ont été contraintes d’épouser un homme ».[9]

Peu de documents rendent compte du mariage hétérosexuel forcé des femmes LBQ+. En 2019, le groupe féministe Mawjoudin[10] a publié une vidéo de trois minutes intitulée Until When?[11]Jusqu’à quand ? ») où l’on voit une Tunisienne se faire épiler et maquiller avant son mariage (vraisemblablement arrangé) à un homme. Elle se rue dehors et déclare, en regardant droit dans la caméra : « J’aime quelqu’un… Et ce n’est pas un homme. »

Ce film est un document d’une grande rareté. En Tunisie et ailleurs, la recherche[12] sur le mariage forcé et les politiques en la matière porte en grande partie sur les discours relatifs aux droits des femmes[13] et des enfants[14], et elle ne reconnaît que rarement, voire jamais, l’existence des personnes queers.[15] Les ONG, les bailleurs de fonds, les gouvernements et les décideurs politiques qui cherchent à mettre fin au mariage forcé se penchent rarement sur les questions liées à la sexualité, ou au mariage forcé des femmes LBQ+ d’une manière spécifique. La présomption d’hétérosexualité dans les études, les politiques et les fonds consacrés au mariage forcé empêchent de voir combien, à cause du mariage hétérosexuel forcé, il est impossible voire dangereux pour une personne LBQ+ de vivre une vie queer.

D’après les entretiens menés par Human Rights Watch auprès de 66 chefs de mouvements, activistes, chercheurs, juristes LBQ+ (lesbiennes, bisexuels et queers) dans 26 pays entre mars et septembre 2022, le mariage forcé est l’une des dix principales problématiques touchant aux atteintes aux droits humains qui affectent le plus la vie des femmes LBQ+. Human Rights Watch a identifié les domaines suivants comme étant ceux qui doivent sur-le-champ faire l’objet d’enquêtes, d’un plaidoyer et d’une réforme politique. Ce rapport étudie la manière dont le déni des droits des personnes LBQ+ dans ces dix domaines impacte leur vie et nuit à leur capacité à jouir des progrès réalisés en matière de droits LGBT et de droits des femmes plus traditionnellement reconnus :

  • Droit au libre et plein consentement au mariage ;
  • Droits fonciers, droits au logement et droits de propriété ;
  • Droit à ne pas être soumis à des actes de violence basés sur l’expression de genre ;
  • Droit à ne pas être soumis à des actes de violence et de discrimination au travail ;
  • Liberté de circulation et droit d’apparaître dans un lieu public sans craindre de faire l’objet de violence ;
  • Droits parentaux et droit de fonder une famille ;
  • Droit d’asile ;
  • Droit à la santé, y compris aux services de santé sexuelle, reproductive et mentale ;
  • Protection et reconnaissance des défenseurs des droits humains ; et
  • Accès à la justice.

Cette enquête avait pour but d’analyser de quelle manière et dans quelles circonstances les droits des personnes LBQ+ sont violés, l’identité LBQ+ étant le principal critère d’inclusion dans ce rapport. Des personnes de genre non conforme, non binaires et transgenres qui s’identifient en tant que LBQ+ ont bien sûr été incluses. Il convient toutefois de préciser qu’une des conclusions clés du rapport est que les catégories figées de type « cisgenres » et « transgenres » se prêtent mal à une étude des atteintes aux droits des personnes LBQ+, de leurs mouvements et de leur combat pour la justice. Comme nous le verrons dans ce rapport, les personnes assignées au sexe féminin à la naissance subissent des atteintes extrêmement genrées, notamment la nécessité de se marier et d’avoir des enfants avec des hommes cisgenres, et elles sont punies de manières très diverses si elles n’y parviennent pas ou refusent de remplir ces attentes. Un grand nombre de personnes LBQ+ écartent délibérément les hommes cisgenres de leur vie personnelle, romantique, sexuelle et économique. Ainsi, l’identité LBQ+ elle-même est une transgression de normes genrées. Qu’une personne LBQ+ s’identifie ou non en tant que transgenre conformément à la conceptualisation populaire, les frontières rigidement binaires (et souvent violemment appliquées) entre les genres en dehors desquelles les personnes LBQ+ vivent déjà, quelle que soit leur identité de genre, peuvent aider à comprendre pourquoi la distinction supposée claire entre les catégories « cisgenres » et « transgenres » ne saurait s’appliquer à un grand nombre de communautés LBQ+. Ce rapport vise à étudier et mettre en évidence cette réalité, plutôt que de nier son existence.

Au-delà des femmes et de l’angle LGBT

L’analyse des documents et les entretiens menés pour les besoins de ce rapport ont révélé que lorsque des expériences de violence LBQ+ sont discutées et documentées, il s’agit dans la plupart des cas d’une sous-violation de droits LGBT plus globaux ou, plus rarement, d’une sous-violation de droits des femmes. Cette conceptualisation présente les femmes LBQ+ comme une simple variation sur un thème qui n’a pas été conçu pour elles. Elle perpétue leur marginalisation pour deux raisons principales :

  • Les politiques et la recherche axées sur les « droits des femmes » portent souvent sur les dix problématiques ci-dessus, mais il est rare qu’elles désignent explicitement les femmes LBQ+ comme étant détentrices de droits ou qu’elles analysent la manière dont leur expérience unique de la violence justifie l’instauration de lois, de politiques et de protocoles plus spécifiques pour les protéger. Plus précisément, la recherche et les politiques relatives aux droits des femmes en matière de mariage forcé et de droits de propriété présument implicitement une hétérosexualité et une structure binaire du genre, et portent rarement sur les abus vécus par les femmes queers.
  • La recherche et les politiques axées sur les droits LGBT sont considérablement plus susceptibles que la recherche sur les droits des femmes de nommer explicitement les femmes LBQ+ en tant que victimes et détenteurs de droits. Cependant, elles sont considérablement moins susceptibles de se pencher sur les restrictions sociétales et juridiques plus générales auxquelles se heurtent les personnes assignées au sexe féminin à la naissance qui les empêchent de bénéficier des progrès réalisés en matière de « droits LGBT ».

En 2017, le Forum économique mondial a publié un article intitulé « What you need to know about LGBT rights in 11 maps » (Ce qu’il faut savoir sur les droits LGBT en 11 cartes).[16] Ce document de référence à codes de couleur présentait les différents statuts juridiques, modes de protection et interdictions des droits LGBT, et comprenait des cartes sur différents sujets tels que les pays où l’homosexualité est érigée en délit, l’égalité face au mariage, le changement de genre aux yeux de la loi, l’adoption légale, la protection face aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, l’interdiction de toute discrimination en matière de logement, les interdictions relatives au service militaire et aux dons de sang, et l’égalité en matière d’« âge du consentement pour les actes sexuels homosexuels ».[17]

Pour reconnaître pleinement les droits des individus et communautés LBQ+, il convient certes d’avancer en matière de droits, mais cela ne saurait suffire. La décriminalisation des pratiques entre personnes de même sexe, par exemple, est susceptible d’avoir un impact relativement faible sur la vie d’une femme queer dans les pays où les lois et politiques sexistes lui interdisent d’hériter de ses parents, de louer un appartement sans la permission d’un tuteur masculin ou de demander le divorce après un mariage forcé.

Les conceptualisations normatives des droits LGBT intègrent mal les thématiques fondamentales ressortant des études et politiques axées sur les droits des femmes, notamment le mariage forcé des femmes et des filles, le droit des femmes à la propriété et leur liberté de circulation. Autrement dit, les restrictions fondamentales de la liberté des femmes, de leur autonomie et de leur émancipation économique, qui sont souvent des obstacles clés aux droits LBQ+, ne sont pas considérées comme étant pertinentes pour promouvoir les droits LGBT. Il faut donc étudier davantage les dix problématiques couvertes par ce rapport, l’objectif étant d’améliorer les droits et la vie des
personnes LBQ+.

En plus d’interroger ou de consulter un nombre croissant de femmes LBQ+ lors de futurs projets de recherche sur les personnes LGBT ou les femmes, les sujets de recherche devraient délibérément être axés sur les problématiques dont les femmes LBQ+ affirment qu’elles les affectent le plus (sections III-X). Cela permettra une analyse plus approfondie et plus complexe de la manière et des circonstances dans lesquelles les droits LBQ+ sont bafoués, et mettra en évidence les diverses façons dont les États échouent à répondre aux besoins des femmes LBQ+.

Politiques et recommandations

Outre ces lacunes dans les travaux de recherche, Human Rights Watch a constaté un manque manifeste de lois et de politiques désignant explicitement les femmes LBQ+ comme étant détenteurs de droits dans les dix domaines couverts par ce rapport. Ce manque de protection juridique et l’« invisibilité » des femmes LBQ+ dans les législations nationales et internationales entravent leur accès à la justice.[18]

Ce rapport constate que les lacunes au niveau de la recherche LBQ+ ont de l’importance car elles entraînent—et sont entraînées par—une série d’insuffisances qui se renforcent mutuellement : manque de recherche sur les violations et les exactions à l’encontre des droits des personnes LBQ+ ; manque de lois et de politiques protégeant explicitement les droits des personnes LBQ+ ; entraves à l’accès à la justice pour les personnes LBQ+ victimes d’atteintes aux droits humains ; et manque de financement des mouvements LBQ+.[19]

Les gouvernements et les bailleurs de fonds, en tant que parties prenantes, devraient donc prendre des mesures spécifiques pour répondre à ces problèmes et protéger durablement les personnes LBQ+ d’une discrimination et d’une violence intersectionnelle. Les principales recommandations sont les suivantes :

  • Les gouvernements devraient élaborer des législations, des politiques et des protocoles qui protègent explicitement les droits des personnes LBQ+. Les autorités devraient aussi réformer les systèmes patriarcaux de contrôle, y compris les lois, politiques et pratiques relatives à la tutelle masculine ; les lois discriminatoires régissant la propriété et la succession ; et d’autres restrictions imposées à l’autonomie, à la circulation et à la liberté des femmes, qui limitent l’accès des femmes LBQ+ aux « droits LGBT » plus traditionnellement conceptualisés.
  • Les bailleurs de fonds devraient financer les mouvements LBQ+ au lieu de soutenir exclusivement les groupes LBQ+ œuvrant sur les « droits LGBT », qui sont normativement conceptualisés. Ils devraient ainsi : 1) Financer les groupes LBQ+ œuvrant dans les domaines des droits fonciers, environnementaux et autochtones, de la réponse humanitaire, des droits des personnes handicapées et du mariage forcé, ainsi que sur la question des femmes LBQ+ qui vivent dans la pauvreté. Ce soutien aidera les activistes LBQ+ à documenter et militer contre la multitude d’exactions subies par leurs communautés et à élaborer des collaborations pour venir à bout des obstacles structurels auxquels elles sont confrontées en matière d’accès à la justice. 2) Financer les groupes LBQ+ œuvrant spécifiquement pour les droits LBQ+, et veiller à ce que les groupes bénéficiaires ne se sentent pas contraints d’élargir leurs activités afin de travailler sur des conceptualisations normatives plus générales des « droits LGBT ».
  • Les chercheur-euse-s devraient mener des enquêtes ciblées sur la manière dont les obstacles à la liberté et à l’autonomie des femmes empêchent les droits LGBT de progresser. Ces travaux devraient être menés en partenariat avec des organisations LBQ+ afin de générer des connaissances sur la violence spécifique dont elles font l’objet. Cela permettra de comprendre quels changements spécifiques doivent être apportés au niveau des lois et des politiques pour renforcer la sécurité, la justice et les droits des femmes LBQ+ dans des contextes particuliers, en complément de ceux qui sont identifiés dans ce rapport.

Mariage forcé et hétérosexualité obligatoire (section III)

L’hétérosexualité obligatoire, les pressions exercées sur les femmes pour qu’elles épousent un homme, et les pratiques telles que le mariage forcé sont les exactions les plus souvent signalées par les personnes LBQ+ que nous avons interrogées, y compris au Canada, en Indonésie, au Kenya, au Kirghizstan, au Liban, au Malawi, au Mexique, en Pologne, au Sri Lanka, en Tanzanie, en Tunisie et en Ukraine. Il est urgent d’élaborer des lois, des politiques et des protocoles qui protègent explicitement les personnes LBQ+ d’un mariage forcé ou de pratiques coercitives en la matière. Les personnes interrogées ont notamment signalé le mariage forcé comme pratique de conversion ; l’imposition de punitions par leur famille si elles ne se conforment pas aux marqueurs hétéronormatifs de l’âge adulte ; des abus psychologiques et des actes d’humiliation comme tactiques coercitives ; l’infantilisation des femmes LBQ+ non mariées ou divorcées ; et des actes de violence à l’encontre des partenaires des femmes LBQ+ mariées à un homme.

Les États devraient élaborer des plans d’action nationaux pour mettre fin au mariage forcé et aux autres pratiques coercitives en la matière en veillant à inclure explicitement une approche intersectionnelle pour éliminer toutes les formes de pratiques de conversion, et collaborer avec les organisations LBQ+ locales et nationales et les collectifs non enregistrés à chaque étape de la conceptualisation, de la rédaction et de l’application de ces plans. Les gouvernements devraient veiller à ce que les représailles et les mesures violentes d’intimidation à l’encontre des personnes qui refusent de se marier soient condamnables et que les survivants aient accès à des services juridiques, médicaux et psychosociaux adaptés et sensibles au genre et aux SOGIE. Enfin, les États devraient abolir les lois discriminatoires sur le divorce qui font qu’il est considérablement plus facile pour un homme de divorcer de sa femme que pour une femme de divorcer de son mari, et qui font donc du tort aux femmes LBQ+ qui souhaitent quitter leur mari sans avoir à craindre des représailles, des violences, ou la perte de la garde de leurs enfants.

Droits de propriété (section IV)

D’après de récentes études menées par le Groupe de la Banque mondiale, les deux-cinquièmes des pays à travers le monde limitent les droits de propriété des femmes, [20] et dans 44 pays, les époux survivants ne bénéficient pas des mêmes droits de succession selon qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme.[21] On constate un manque chronique de recherche sur la manière dont les droits des femmes LBQ+ sont affectés par les lois, politiques et coutumes patriarcales telles que celle-ci, qui limitent le droit des femmes à détenir et gérer des biens.

Dans le cadre de travaux préliminaires, ce rapport révèle que les violations des droits de propriété des femmes sont un problème « queer » car elles affectent la capacité des femmes LBQ+ à vivre une vie queer sans violence ni discrimination. Citons notamment les atteintes suivantes : les forcer à cacher à leur famille leur sexualité, leurs partenaires et leur vie queer afin d’éviter d’autres formes de discrimination au titre des régimes de succession qui privilégient déjà les fils ; exiger des femmes LBQ+ qu’elles épousent un homme pour pouvoir accéder à la terre et à la propriété (ce qui renforce les pratiques matrimoniales coercitives mentionnées ci-dessus) ; empêcher les couples LBQ+ de faire vie commune ; et enfreindre leurs droits en matière de liberté d’association et de réunion, ce qui renforce encore les barrières à l’organisation et au développement d’une communauté queer.

Dans de nombreux pays, les lois discriminatoires qui entravent l’accès des femmes à la propriété sont des reliques de lois coloniales régissant la propriété, ou sont fortement influencées par celles-ci.[22] Souvent, ces lois viennent s’ajouter à des pratiques traditionnelles nocives et à des lois coutumières. Si les études sur les répercussions du colonialisme sur les droits LGBT ont généralement été axées sur la criminalisation des comportements entre personnes de même sexe et sur l’imposition d’une structure binaire de l’orientation sexuelle, de l’identité et de l’expression de genre (SOGIE) en tant que formes de contrôle social,[23] [24] les lois coloniales sur la propriété ont eu un impact au moins aussi important, pour ne pas dire plus important, sur la vie des femmes LBQ+ que les lois coloniales anti-homosexualité.

Les États devraient révoquer les lois discriminatoires sur la propriété, les restrictions en matière de travail des femmes et les codes familiaux sexistes, y compris ceux qui restent en vigueur dans les pays anciennement colonisés. Les États devraient aussi modifier le droit de la famille pour prévoir le concept de biens matrimoniaux et permettre leur répartition égale entre époux, en reconnaissant les contributions financières et autres apportées par les femmes.

Violence envers les personnes LBQ+ d’apparence masculine (section V)

L’expression de genre est cruciale pour comprendre comment, pourquoi et dans quelles circonstances les personnes LBQ+ sont attaquées et voient leurs droits bafoués. Les personnes LBQ+ interrogées pour les besoins de ce rapport ont à maintes reprises signalé que la discrimination de genre à l’encontre des personnes d’apparence masculine assignées au sexe féminin à la naissance était pour toute une vie durant un élément déclencheur de violence économique, sociale, psychologique, physique et sexuelle, ainsi que sur le lieu de travail.

Des défenseurs des droits LBQ+ en Argentine, au El Salvador, aux États-Unis, en Indonésie, au Kenya, au Kirghizstan, au Malawi, au Sri Lanka et en Tanzanie ont signalé que les parents de filles, même très jeunes, qui s’habillaient d’une manière perçue comme masculine, androgyne on non conforme au genre menaçaient de les déscolariser, aggravant encore le problème de la précarité de l’accès à l’éducation auquel les filles sont confrontées à travers le monde. D’après Rosa, femme lesbienne au El Salvador, défenseuse des droits des travailleurs du sexe, la police est « bien plus brutale » envers les femmes queers d’apparence masculine lors des arrestations et quand elles se font harceler dans la rue, ce qui, selon Rosa, est particulièrement dangereux car la discrimination au travail fondée sur leur apparence masculine est en grande partie l’une des raisons qui poussent un grand nombre de personnes LBQ+ à se prostituer.

La violence envers les personnes d’apparence masculine assignées au sexe féminin à la naissance est évoquée tout au long de ce rapport, d’où la nécessité d’insister davantage sur l’expression de genre lors de l’analyse des exactions, de la violence et des crimes commis sur la base des SOGIE.

Les États devraient adopter une législation antidiscriminatoire exhaustive qui interdit toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou l’expression de genre, et ajouter l’expression de genre de manière explicite à la législation qui interdit déjà la discrimination basée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Les entretiens menés par Human Rights Watch indiquent que les États devraient également introduire une protection juridique pour les élèves du primaire et du secondaire non conformes au genre, faute de quoi des répercussions sous forme de violence et de discrimination pourraient se faire sentir tout au long de la vie des personnes LBQ+ d’apparence masculine ; ils devraient aussi enquêter sans plus tarder sur la violence des pratiques policières et des tactiques d’arrestation qui ont un impact sur leur vie de manière discriminatoire, et y mettre un terme.

Violence et discrimination au travail (section VI)

L’évocation par Rosa de la violence dont font l’objet les travailleuses du sexe d’apparence masculine fait écho à des rapports d’activistes LBQ+ du Ghana, du Kenya et d’un réseau régional d’Asie centrale relatifs aux multiples formes de marginalisation économique qui contraignent les femmes LBQ+, les personnes non binaires et les hommes trans à s’engager dans le travail du sexe, où un grand nombre se voient refuser toute protection basique de leurs droits.[25] Lors d’entretiens menés dans d’autres pays, des activistes LBQ+ ont signalé à Human Rights Watch d’autres formes de violence au travail à l’encontre des femmes LBQ+ et l’absence de moyens de recours, notamment en Argentine, au Kenya et
au Kirghizstan.

Il est impératif d’étudier la violence et le harcèlement des femmes LBQ+, des personnes non binaires et des hommes trans sur le lieu de travail, notamment les abus perpétrés par leurs collègues, employeurs, superviseurs et autres tiers de sexe masculin. Les entretiens indiquent que parmi les groupes qui présentent un risque particulier figurent les personnes d’apparence masculine assignées au sexe féminin à la naissance, les femmes non mariées, les femmes queers féminines au travail, et les personnes LBQ+ qui sont ouvertement dans une relation queer. En collaboration avec les mouvements LBQ+, les futurs travaux de recherche devraient porter sur les atteintes au droit du travail dans les filières que les personnes LBQ+ qualifient d’importantes, de populaires ou de communes parmi les membres de leur communauté. Cela permettra de réformer le droit du travail dans des domaines critiques pour encourager la survie économique des personnes, des couples et des communautés LBQ+, sans nécessiter d’« outing » radical qui rend souvent dangereuse l’inclusion des personnes LBQ+ dans les recherches sur le lieu de travail.

Les États devraient adopter des législations relatives au droit du travail qui protègent explicitement les travailleurs LBQ+ de toute forme de violence, de harcèlement et de discrimination au travail, y compris des lois qui protègent les travailleurs de toute discrimination fondée sur leur orientation sexuelle, leur identité de genre et leur expression de genre.

Liberté de circulation (section VII)

Les personnes LBQ+ interrogées au El Salvador, aux États-Unis, au Kirghizstan, au Liban, au Malawi, au Sri Lanka, en Tanzanie, en Tunisie et en Turquie ont signalé l’existence de contraintes extrêmes et genrées en matière de liberté de circulation des femmes LBQ+. Comme dans d’autres domaines, il est urgent de dédier des recherches intersectionnelles plus poussées, par exemple pour comprendre les implications pour les femmes LBQ+ du fait que « des dispositions juridiques limitant la liberté des femmes à choisir où aller, où voyager et où vivre existent encore dans 30 % des 187 économies étudiées ».[26]

Des défenseurs des droits des femmes ont démontré que les États devraient mettre fin aux systèmes juridiques patriarcaux, notamment aux législations relatives à la tutelle masculine qui limitent le droit des femmes à se marier, à étudier, à travailler, à louer ou acheter un bien immobilier, à accéder aux soins de santé reproductive et à voyager, et ne pas promulguer de lois, de politiques, de décrets ou de mesures d’urgence qui limitent de manière discriminatoire la liberté de circulation des femmes. Les chercheurs et les défenseurs sont encouragés à considérer ces problématiques non seulement en tant que réformes des droits des femmes, mais aussi en tant que questions essentielles pour promouvoir les droits LGBT.

En outre, les personnes interrogées ont déclaré que les restrictions à leur liberté de circulation étaient attribuables non seulement aux régimes juridiques sexistes et patriarcaux qui impactent la capacité des femmes LBQ+ à voyager et à se déplacer librement, mais aussi à la violence dont font l’objet les personnes et couples LBQ+ en public, qui les contraint à limiter la durée et la fréquence de leurs sorties, et a aussi un impact sur leur décision de sortir de leur domicile en compagnie de leur conjoint. Depuis 2015, Human Rights Watch a recensé ne serait-ce que dans cinq pays (Afrique du Sud, États-Unis, Italie, Mexique et Royaume-Uni et) neuf couples LBQ+ assassinés ou victimes d’attaques violentes. Les personnes interrogées affirment que ces attaques les poussent à « s’autoréglementer » au niveau de leurs déplacements, craignant de quitter leur domicile en compagnie de leur conjoint.

Les États devraient enquêter de manière approfondie et transparente sur les signalements de violence à l’encontre d’individus et de couples LBQ+ et instaurer dans les commissariats des bureaux chargés du respect des droits humains afin de conférer aux personnes LGBT un environnement sécurisé dans lequel elles peuvent signaler les exactions perpétrées par la police et où leurs plaintes seront traitées dans les meilleurs délais.

Droits parentaux (section VIII)

Les droits parentaux et les droits reproductifs sont des questions jugées très préoccupantes par les juristes et les organisateurs de mouvements LBQ+ en Argentine, au El Salvador, aux États-Unis, au Kenya, au Malawi, au Mexique, en Pologne et en Ukraine. Les personnes LBQ+ souhaitent fonder une famille et la protéger, quelle que soit la situation dans leur pays en matière de criminalisation des relations ou du mariage entre personnes de même sexe. Les personnes LBQ+ interrogées dans plusieurs pays où les rapports entre personnes de même sexe sont érigés en infraction, notamment au Kenya et au Malawi, ont expliqué à Human Rights Watch que fonder une famille était leur principale priorité mais qu’elles ne savaient pas comment le faire en toute sécurité.

Le rapport exhorte les États à révoquer les lois qui empêchent les femmes célibataires et les couples non mariés d’adopter des enfants, et à promulguer des lois régissant la reconnaissance parentale qui incluent les personnes LGBT, reconnaissent explicitement l’autorité parentale des parents LBQ+ non biologiques et les dispensent de devoir adopter leurs propres enfants, ce qui constitue une exigence discriminatoire. Les États devraient également réformer les lois et politiques discriminatoires sur l’adoption en vertu desquelles l’adoption est injustement plus difficile pour les parents LBQ+ économiquement marginalisés et d’origines ethniques différentes, et introduire une législation antidiscriminatoire interdisant les politiques d’assurance qui défavorisent les couples et individus LBQ+ lors de l’accès aux traitements reproductifs, tels que la fertilisation in vitro (FIV), le gel d’ovocytes et le don de sperme.

Demandes d’asile (section IX)

Les entretiens réalisés pour les besoins de ce rapport indiquent que les parents et couples LBQ+ qui fuient une situation de conflit ou demandent l’asile pour diverses raisons sont confrontés à des obstacles bien spécifiques et susceptibles de mettre leur vie en danger. En outre, les familles LBQ+ font face à des obstacles particuliers lorsqu’elles cherchent à s’installer à l’étranger en tant qu’unité familiale. Concernant les questions de migration et d’asile, ces personnes ont surtout souligné les menaces auxquelles leur unité familiale était exposée lors de leur réinstallation.

Un grand nombre de régimes en matière d’asile exigent des couples réfugiés qu’ils soient mariés, en partenariat civil enregistré, ou qu’ils puissent prouver qu’ils ont fait vie commune d’une manière semblable à un mariage pendant un certain temps avant leur demande de réunification familiale. Cela rend la question de l’unité familiale extrêmement précaire pour toutes les familles LGBT. Qui plus est, le peu de recherche axée spécifiquement sur les obstacles auxquels sont confrontés les individus LBQ+ demandeurs d’asile souligne les difficultés bien spécifiques que rencontrent les familles lorsque les deux parents sont des personnes LBQ+.

Les États devraient élaborer des directives claires pour la réunification des familles réfugiées ou en situation d’asile qui sont dédiées à l’unité familiale LGBT et permettent aux parents et aux familles LBQ+ réfugiés ou bénéficiaires du droit d’asile d’être réunis avec les enfants et d’autres membres de leur famille dont ils ont été séparés. En outre, les États devraient montrer aux décideurs en matière d’asile comment reconnaître les liens entre l’appartenance à un groupe social LBQ+ et le risque de persécution dans le contexte du large éventail de problèmes discriminatoires d’ordre économique, juridique et social auxquels sont exposés les demandeurs d’asile LBQ+ en tant qu’individus, parents
et familles.

Santé (section X)

Les défenseur-e-s des droits LBQ+ ont signalé un manque sévère d’accès fiable et sécurisé à un large éventail de services de santé, notamment en matière de santé mentale,[27] de santé reproductive,[28] de traitements pour la fertilité,[29] de santé maternelle,[30] de tests de dépistage du cancer[31] et d’accès aux services pour personnes vivant avec le VIH.[32] Lors des entretiens qu’elle a menés, Human Rights Watch a constaté que les organisations LBQ+ cherchaient en particulier à répondre au manque de services dédiés aux violences sexuelles et sexistes (VSS) accessibles aux femmes LBQ+, notamment en matière de soins de santé sexuelle et reproductive, de dépistage et de traitement des survivants LBQ+. Tamara, activiste lesbienne intersexe au Malawi qui a créé une fondation queer, a consacré sa vie à la lutte contre les VSS visant les femmes LBQ+, ayant elle-même survécu à ce qu’elle appelle un « viol correctif » à l’âge de 19 ans.[33] Elle a déclaré à Human Rights Watch que les femmes LBQ+ de sa communauté mouraient d’infections sexuellement transmissibles (IST) non traitées et d’autres complications liées à des attaques sexuelles en raison de leur incapacité à recevoir en toute sécurité des soins dans les hôpitaux publics du fait de la lesbophobie de certains membres du corps médical, tandis que les hôpitaux privés sont inabordables pour de nombreuses femmes LBQ+.

Des activistes au Canada, en Indonésie, au Kenya et au Malawi ont souligné l’absence de services de thérapie et de lutte contre la toxicomanie adaptés aux personnes LBQ+. Les États devraient adopter des politiques et des protocoles qui soutiennent les survivants LBQ+ d’attaques sexuelles et introduire des mesures de protection non discriminatoires permettant aux femmes LBQ+ d’accéder aux soins de santé. Les gouvernements devraient aussi collaborer avec les organisations LBQ+ afin d’instaurer une procédure de gestion des plaintes permettant aux femmes LBQ+ qui ont subi des violations ou des atteintes aux droits humains en milieu médical, y compris une discrimination, un refus de service ou des pratiques de conversion visant à modifier leurs SOGIE, de porter plainte et de demander un soutien et un recours. Les bailleurs de fonds sont encouragés à collaborer avec les groupes LBQ+ afin de contribuer à l’instauration à l’échelon communautaire de programmes de santé mentale et de services de toxicomanie adaptés aux personnes queers, en tenant compte des besoins de confidentialité particuliers des femmes LBQ+ mariées à un homme.

Défenseur-e-s des droits humains (section XI)

Les activistes LBQ+ interrogés pour les besoins de ce rapport jouent un rôle de premier plan au sein d’un large éventail de mouvements sociaux, politiques, fonciers, environnementaux, économiques, de genre et de justice raciale, au-delà des travaux typiquement conceptualisés comme portant « sur les droits LGBT ».[34] Ce rapport a identifié trois défis majeurs à la protection des défenseur-e-s des droits humains LBQ+ : des risques associés à leur travail intersectionnel et à leurs identités (y compris la criminalisation des personnes LGBT dans un grand nombre de pays) ; leur manque de visibilité internationale et de légitimité perçue ; et un manque de financement.

Malgré une tendance mondiale vers une promotion de la visibilité et de la protection des défenseurs des droits humains,[35] les activistes LBQ+ ne sont souvent pas reconnus en tant que défenseurs et se voient donc refuser l’accès aux cadres de protection en vigueur. Les États devraient adopter des lois de protection et de reconnaissance des défenseurs des droits humains qui visent explicitement les droits des défenseurs des droits humains LBQ+, et instaurer des mécanismes de protection des défenseurs des droits humains dotés de personnel formé aux risques et besoins spécifiques des défenseurs des droits humains LBQ+. Le personnel travaillant au sein de ces mécanismes devrait mener des actions de proximité auprès des collectifs non enregistrés et des organisations LBQ+, et disposer de structures de soutien en cas de menaces physiques, sexuelles, numériques et verbales envers les défenseurs LBQ+. La police et les forces de sécurité devraient s’assurer que les défenseurs des droits humains LBQ+ qui leur signalent des attaques et des menaces ne soient pas harcelés ou attaqués sexuellement, physiquement ou verbalement par les agents, et les défenseurs devraient pouvoir établir des rapports d’incident sans crainte de représailles.

Les bailleurs de fonds devraient réformer les exigences financières qui contraignent les organisations LBQ+ à démontrer qu’elles travaillent exclusivement sur des questions LGBT, et permettre aux organisations et aux collectifs LBQ+ de demander et recevoir un financement pour des travaux intersectionnels couvrant divers domaines relatifs aux droits humains, y compris : droits des femmes ; droits fonciers, environnementaux et autochtones ; droits des personnes handicapées ; droits des migrants ; questions liées au logement et aux sans-abri ; droit à la santé et accès aux soins de santé ; et aide humanitaire. En outre, les bailleurs de fonds devraient s’assurer que les financements dédiés aux organisations LBQ+ prévoient des lignes budgétaires pour la sécurité des défenseurs des droits humains et couvrent les frais associés aux lieux de réunion physiques nécessaires à la tenue de formations, d’événements de renforcement communautaire et de promotion du bien-être, ainsi que les frais de transport vers ceux-ci. Enfin, les bailleurs de fonds sont encouragés à appuyer les programmes et services dédiés au bien-être et aux soins psychosociaux des personnes LBQ+, et à interroger explicitement les organisations locales sur leurs besoins en matière de santé mentale.

Accès à la justice (section XII)

Les femmes LBQ+ rencontrent de multiples obstacles systématiques lorsqu’elles souhaitent accéder à la justice, notamment ceux auxquels se heurtent d’une manière plus générale les femmes et les personnes non binaires—discrimination fondée sur le genre au sein des institutions étatiques et non étatiques, manque de temps et de ressources du fait de leurs responsabilités familiales, et atteintes à leur droit à l’éducation et à leur liberté de circulation—, mais aussi ceux auxquels sont confrontées plus communément les personnes LGBT—manque de juristes formés et désireux de travailler avec les communautés queers, tribunaux employant des pratiques discriminatoires à l’encontre des personnes et familles LGBT, et diverses lois qui criminalisent les personnes LGBT et rendent dangereuse la signalisation d’un abus à la police.

Outre ces deux séries d’obstacles, le rapport étudie cinq autres difficultés qui entravent l’accès à la justice : manque de lois et de politiques qui protègent les droits LBQ+ ; absence de documents sur la lutte contre la violence à l’encontre des LBQ+ ; mauvaise compréhension de ce qui constitue un acte de violence anti-LBQ+ ; absence de financement durable ; et manque de recherche sur les obstacles structurels spécifiques.

II. Contexte

Cette partie présente les travaux de recherche réalisés par des organisations de défense des droits humains, des universitaires et des bailleurs de fonds sur la question des droits des personnes LBQ+. Outre des rapports spécifiques à certains pays, l’examen des documents disponibles a mis en évidence des travaux portant sur les expériences LBQ+ de la pauvreté et de la marginalisation économique, les attaques contre les personnes LBQ+ qui œuvrent en tant que défenseur-e-s des droits humains et le manque de financement des mouvements LBQ+.

Ce chapitre présente également les grands concepts dont les chercheurs et d’autres parties prenantes doivent tenir compte pour combler les lacunes en matière de recherche, de plaidoyer et de politiques. Plus spécifiquement, il démontre que l’exclusion des personnes LBQ+ de la recherche est perpétuée par des conceptions erronées tenaces relatives à l’« invisibilité » LBQ+ ; des conceptualisations normatives et sexistes de l’« outness » ; et de fausses hypothèses selon lesquelles les personnes LBQ+ subiraient moins de violences que les hommes et garçons queers, et que ces violences se dérouleraient principalement dans la « sphère privée ».

Lacunes en matière de recherche sur les droits humains

Les expériences des personnes LBQ+ sont sous-représentées dans les enquêtes, rapports et campagnes de plaidoyer sur les droits humains. Les travaux préliminaires et les consultations menées avec des experts en droits humains n’ont mis en évidence que peu de documents qui positionnaient explicitement les personnes LBQ+ en tant que détenteurs de droits subissant des atteintes en vertu du droit international des droits
de l’homme.

Les rapports sur les droits humains qui documentent et analysent les atteintes aux droits des personnes LBQ+ au niveau d’un pays sont peu nombreux. Citons notamment des rapports sur le Burundi,[36] l’Irak,[37] l’Iran,[38] le Kenya[39] et sur les demandes d’asile déposées par des personnes lesbiennes aux États-Unis.[40]

Au niveau régional, des organisations de la société civile ont publié des rapports sur :

  • La violence contre les personnes lesbiennes, bisexuelles et transgenres (LBT) au Japon, en Malaisie, au Pakistan, aux Philippines et au Sri Lanka ;[41] une autre OSC a publié des récits de femmes queers en Algérie, en Égypte et au Soudan ;[42]
  • Les violations et exactions contre les femmes lesbiennes, bisexuelles, queers et transgenres (LBQT+) dans le Caucase du Nord ;[43]
  • Les violences lesbophobes en Europe et en Asie centrale ;[44]
  • Et les droits LBQ+ en Bolivie, en Colombie, en Équateur et au Mexique, recensés dans le cadre d’une série de rapports publiés par un collectif latino-américain.[45]

Au niveau mondial, un rapport de 2016 a analysé pour la première fois la manière dont les lois anti-homosexualité ciblent et impactent spécifiquement les femmes et filles lesbiennes et bisexuelles.[46]

Si plusieurs de ces rapports abordent la criminalisation des relations entre personnes de même sexe en tant que moteur clé de la violence contre les personnes LBQ+, un grand nombre d’entre eux se focalisent sur d’autres restrictions à la liberté des femmes, notamment à leur liberté de circulation, leur autonomie corporelle, leur accès à l’éducation, leurs droits au travail et leur indépendance financière, autant d’éléments clés pour la vie des personnes LBQ+. Ainsi, un rapport consacré aux expériences LBT de la violence en Asie a révélé que, pour progresser en matière de droits LBQ+, il faudrait supprimer les « obstacles émanant à la fois des sphères publique et privée qui empêchent toutes les femmes (personnes ayant un corps de femme, personnes ayant une variance de genre, lesbiennes et bisexuelles) et les hommes transgenres passés du sexe féminin au sexe masculin de jouir d’une vie sans violence ».[47] La recherche axée spécifiquement sur la vie des personnes LBQ+ – plutôt que sur les droits LGBT d’une manière plus générale – dresse systématiquement un portrait plus complexe des droits et des libertés, d’où la nécessité de consacrer des travaux de recherche à ces thèmes.

Les chercheur-euse-s qui travaillent sur les droits LGBT observent depuis longtemps qu’il est plus difficile de recueillir des témoignages de personnes LBQ+ et transmasculines que d’hommes gays cisgenres et de femmes transgenres.[48] [49] [50] Cette différence est aussi la conséquence des recherches sur les droits des femmes qui posent comme postulat que les femmes étudiées sont hétérosexuelles, ce qui empêche souvent toute enquête potentielle sur le vécu spécifique des personnes LBQ+ s’agissant de problématiques plus générales affectant les femmes et les filles telles que la violence domestique, le mariage forcé, la pauvreté sexuée, la mortalité maternelle et les droits reproductifs.[51] Les chercheurs sur les droits LGBT et des femmes choisissent souvent d’examiner des thématiques qui ne sont pas celles qui affectent le plus la vie des femmes queers.

Les cartes et les bases de données dédiées aux droits et lois LGBT à travers le monde indiquent généralement quels sont les pays qui criminalisent l’homosexualité, qui autorisent le mariage entre personnes de même sexe, qui disposent de politiques non discriminatoires stipulant explicitement que l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre (SOGIE) sont des catégories protégées, et, depuis quelques années, elles incluent de plus en plus souvent des informations sur les pays qui autorisent la reconnaissance juridique du genre.[52] [53] [54] Bien qu’importantes, ces questions ne répondent pas au manque fondamental de pouvoir, d’autonomie et de contrôle d’un grand nombre de femmes qui limite leur expression de la sexualité. Par exemple, il est rare que les cartographies illustrant les droits LGBT abordent le droit de propriété, le droit de succession et les droits en matière de location des femmes, questions pourtant cruciales si l’on veut que les personnes LBQ+ disposent d’espaces physiques où faire des rencontres amoureuses, fonder une famille et s’organiser sous forme de collectifs.[55]

On constate également un manque important de documents sur les expériences des personnes LBQ+ en matière de pauvreté, de droits du travail, de crimes environnementaux, de justice reproductive, de droits des personnes LBQ+ autochtones, de violence de la police et de conflit. La représentation est meilleure s’agissant des études sur la migration et sur les droits des personnes handicapées—en grande partie du fait de la forte activité des militants LBQ+ dans ces espaces—mais il reste encore certains points à étudier dans ces domaines.[56] [57]

Les consultations menées avec des chercheurs sur ces différents droits humains indiquent que les lacunes en matière de production de savoir relatif aux droits LBQ+ dans leur domaine de recherche spécifique ne sont pas attribuables au fait que l’on cherche délibérément à fermer les yeux sur les expériences des personnes LBQ+. Elles reflètent plutôt l’idée tenace selon laquelle la sexualité n’est pas pertinente pour de nombreuses enquêtes, ainsi que l’hypothèse d’hétérosexualité des sujets relatifs aux droits humains. Outre cette lacune méthodologique, les intellectuels queers et féministes ont identifié différents facteurs qui contribuent à la sous-représentation des personnes LBQ+ dans les enquêtes sur les droits humains, notamment :

  • Le traitement isolé des différentes thématiques touchant aux droits humains, ce qui limite les analyses des droits des personnes LGBTI+ aux rapports spécifiquement axés sur cette question ;[58] [59] [60] [61]
  • Les systèmes patriarcaux, la dévalorisation de la sexualité féminine et le manque de légitimité accordée aux relations amoureuses et sexuelles des femmes LBQ+ ;[62]
  • Les risques et les obstacles auxquels sont confrontées les femmes et les personnes non binaires dans leur participation à la sphère publique, y compris les lois relatives à la tutelle masculine, la stigmatisation, les pressions familiales, le sexisme et les préjugés sexistes dans l’aménagement urbain et les conceptualisations culturelles de la réputation de la femme comme étant étroitement liée à l’honneur de la famille ;[63]
  • La focalisation sur la programmation VIH/Sida, qui confère depuis fort longtemps aux groupes d’hommes gays un financement et une visibilité plus importants et a eu pour conséquence que les organisations de défense des droits LGBTI internationales, régionales et locales sont principalement dirigées par des hommes ;[64] [65]
  • L’accent placé sur la décriminalisation des relations entre personnes de même sexe et la suppression des lois anti-homosexualité de l’époque coloniale en tant que problématiques centrales pour la lutte LGBT ;[66]
  • L’homophobie, la transphobie, la biphobie et la lesbophobie présentes au sein des mouvements féministes et de défense des droits des femmes ;[67]
  • L’hétéronormativité obligatoire, qui positionne les personnes LBQ+ en dehors de la conception de féminité et d’identité individuelle de la société étant donné qu’elles ne sont pas socialement, financièrement, juridiquement et/ou culturellement identifiables à travers un partenariat hétérosexuel ;[68] [69]
  • Les hypothèses sur la sexualité, y compris celles qui s’appuient sur le partenariat ou le mariage, et le manque de reconnaissance du fait que les femmes et les personnes non binaires, quelle que soit leur sexualité, peuvent être contraintes de conclure un partenariat ou un mariage hétérosexuel ;[70]
  • La violence domestique, associée à la notion populaire selon laquelle la violence contre les femmes se produit en grande partie dans la sphère privée, et la notion connexe selon laquelle toute violence familiale est privée ;[71]
  • La marginalisation économique et un manque connexe d’accès à des ressources financières, juridiques et autres qui font que les personnes LBQ+ ont du mal à documenter et faire connaître leurs problématiques.[72]
     

Recherches universitaires

Les recherches universitaires récentes sur la marginalisation des personnes LBQ+ en matière économique, de santé et de couverture sociale fournissent des indications fiables sur les thèmes à étudier lors de futures enquêtes sur les droits humains, et elles peuvent contribuer à combler les lacunes de recherche LBQ+ dans le domaine des droits humains. Cela vaut particulièrement pour les études qui énoncent et abordent explicitement la sous-représentation des questions LBQ+ dans leur domaine. Par exemple, l’étude Intersectionality and the Subjective Processes of LBQ Migrant Women: Between Discrimination and Self-determination (2021) a examiné le manque d’analyse des sexualités des femmes migrantes par rapport à celles des hommes migrants en Italie :

D’un côté, les études ont de plus en plus mis l’accent sur la sexualité des migrants, notamment sur la condition des hommes gays et bisexuels : Carnassale (2013), Ferrara (2019), Masullo (2015a ; 2015b). De l’autre, cependant, les écrits sociologiques se sont nettement moins intéressés à la sexualité des femmes migrantes, avec une absence relative d’études – à la fois qualitatives et quantitatives – sur les sexualités non normatives. Plutôt que de traduire un manque d’intérêt pour ce sujet, cette absence souligne combien il est globalement difficile d’étudier les femmes dont l’orientation sexuelle est non normative. Si l’on ne considère que les études sur l’Italie, celles qui ont été consacrées aux lesbiennes (sans distinctions ethniques) sont considérablement moins nombreuses que celles consacrées aux gays, et les lesbiennes semblent être nettement moins visibles que la population masculine (Masullo, Coppola, 2020).

Aux États-Unis, le Williams Institute de la faculté de Droit de l’UCLA a publié en 2021 et 2022 deux rapports très complets sur la vie des LBQ+ qui, de façon similaire, abordaient délibérément la question des lacunes de la recherche en matière de personnes LBQ+. Le premier de ces rapports, intitulé System Involvement Among LBQ Girls and Women, a révélé que les femmes et les filles LBQ+ de couleur étaient surreprésentées en milieu carcéral et dans le système de placement en familles d’accueil : « Parmi les 10 % de filles placées en familles d’accueil qui s’identifient en tant que lesbiennes, bisexuelles, queers et en questionnement, près de 90 % sont des filles de couleur, et plus de 30 % sont Noires. »[73]

Concernant les risques associés aux taux d’incarcération élevés, en raison d’un manque de recherche sur la violence contre les personnes LBQ+ en prison, ce rapport fait référence à des éléments tirés d’études antérieures sur la violence contre les personnes transgenres dans les prisons.

La seconde étude de l’UCLA, Health and Socioeconomic Well-Being of LBQ Women in the US, est la plus détaillée et la plus complète jamais dédiée aux droits des personnes LBQ+. Bien qu’elle porte exclusivement sur les États-Unis, les conclusions et suggestions relatives à de futures recherches sont pertinentes sur le plan international. Cela est en partie dû au fait que le rapport adopte un angle délibérément « large » du concept de bien-être, conformément aux réformes méthodologiques suggérées par plus d’une dizaine de défenseur-e-s LBQ+ à travers le monde interrogé-e-s pour les besoins de ce rapport. Cette étude de l’UCLA s’est appuyée sur un large éventail de données et d’enquêtes parmi la population nationale pour analyser les expériences des femmes LBQ+ en matière de discrimination, de santé, de logement, de sans-abrisme, de violence sexuelle, de santé psychosociale, de santé reproductive, de participation au système et de résilience. L’étude conclut que les femmes LBQ+ (cis et trans) représentent 55 % de la population LGBT des États-Unis, sept millions de femmes s’identifiant en tant que LBQ+, et trois millions de filles en tant que LBQ+ ou en questionnement. L’une des autres grandes conclusions du rapport est que près d’un cinquième des femmes LBQ+ signalent qu’elles veulent avoir des enfants mais qu’elles ne peuvent pas en avoir ; les femmes LBQ+ sont plus susceptibles (90 %) de ne jamais se rendre dans un centre de soins de santé LGBT que les hommes GBQ (77 %) ; et près d’un tiers des femmes LBQ+ qualifient leur santé de « mauvaise », contre un cinquième des femmes hétérosexuelles. L’étude révèle aussi que deux fois plus de femmes LBQ+ (46 %) ont reçu un diagnostic de dépression que les femmes hétérosexuelles (23 %), et il est stupéfiant d’apprendre que 44 % des filles LBQ+ ou en questionnement déclarent avoir envisagé de se suicider au cours des 12 derniers mois, contre 18 % des filles hétérosexuelles, 13 % des garçons hétérosexuels et 32 % des garçons gays, bisexuels, queers et en questionnement.

Ces données viennent appuyer les appels lancés par des défenseur-e-s au Canada, en Indonésie, au Liban, au Malawi, en Tanzanie et en Tunisie afin qu’une recherche plus approfondie et de meilleure qualité soit réalisée sur la santé psychosociale de leurs communautés. Les dirigeants LBQ+ de la diaspora noire et brune ont spécifiquement demandé à ce que des études soient faites sur les liens entre l’« outness » obligatoire au sein des organisations Pride dirigées par des personnes blanches et les taux de dépression et d’anxiété parmi les femmes noires et brunes dans ces espaces.

Les taux de suicide au sein de notre communauté sont extrêmement élevés, mais nous n’avons aucune recherche ou preuve concrète de cela. La plupart des femmes queers d’Asie du Sud que je connais ont fait au moins une tentative de suicide. Nous essayons de mener un plaidoyer auprès des organisations Pride de premier plan pour voir comment les rendre plus inclusives et moins dangereuses pour nous, mais des travaux de recherche sur l’immense stress psychosocial dont nous faisons l’objet nous aideraient à prouver ce phénomène et à nous faire prendre plus au sérieux.[74]

Pauvreté et marginalisation économique

[Un couple de lesbiennes travailleuses du sexe de notre communauté] vit à une vingtaine de minutes du Centro. Là où elles sont actuellement, il y a beaucoup de descentes de police, qui se rend dans les quartiers pauvres. Les deux femmes sont obligées de louer un logement auprès des gangs du quartier car c’est le seul endroit où elles peuvent se permettre d’avoir une maison suffisamment grande pour loger les membres plus jeunes et plus âgés de leurs familles dont il est attendu qu’elles, en tant que femmes, s’occupent. Des gangs occupent les logements sans prévenir et restent aussi longtemps qu’ils le souhaitent. Les deux femmes gagnent très peu d’argent, et comme elles sont pauvres, il est logique qu’elles s’attendent à des descentes de police.[75]


– Rosa, lesbienne et défenseure des droits des travailleuses du sexe au El Salvador

La pauvreté parmi les femmes LBQ+, même si elle n’est pas toujours explicitement qualifiée d’atteinte aux droits humains, est une constante dans la majorité des travaux de recherche sur la violence contre les personnes LBQ+. Les personnes LBQ+—femmes, queers, entretenant des relations avec des femmes ou avec des personnes queers, membres de groupes racialement et ethniquement marginalisés, et autochtones—se situent à différents niveaux de marginalisation économique, à l’instar des membres d’un grand nombre de groupes confrontés à des formes structurelles de discrimination qui se rejoignent et se multiplient.[76] Cependant, les données économiques ventilées en fonction de l’orientation sexuelle sont rares ; les études et rapports qui évoquent explicitement la position précaire des femmes LBQ+ ont tendance à porter sur les États-Unis, sur le Royaume-Uni et sur la situation à un échelon « international », comme le montrent des rapports des Nations Unies couvrant la pauvreté des personnes LBQ+ en des termes généraux. Dans la plupart des régions du monde, on constate un manque significatif d’études publiées sur la pauvreté LBQ+ aussi bien à l’échelle des pays que des régions.[77]

Une étude de 2009 a révélé que les couples de lesbiennes aux États-Unis se heurtaient à une pauvreté plus prononcée que les couples mariés ou les couples d’hommes gays.[78] En 2013, une mise à jour de cette même étude a conclu que les enfants de parents de même sexe étaient pratiquement deux fois plus susceptibles d’être pauvres que les enfants issus d’un ménage hétérosexuel. Elle a également souligné que le taux de pauvreté parmi les couples de femmes homosexuelles était deux fois plus élevé que chez les couples d’hommes homosexuels.[79] D’après un rapport des Nations Unies de 2019 sur la marginalisation économique et l’inclusion des communautés LGBT :

Outre la discrimination fondée sur le genre infligée aux femmes, qui subissent les effets d’un écart de rémunération et supportent le fardeau des soins non rémunérés, la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre à laquelle sont exposées les femmes lesbiennes rend leur situation encore plus défavorable. Les écarts de rémunération se traduisent par des cotisations moins élevées aux régimes de retraite et donc par une pauvreté accrue plus tard dans la vie.[80]

Le rapport Paying an Unfair Price: The Financial Penalty for LGBT Women in America (2015) a révélé que la discrimination envers les femmes LBQ+ dans leur travail, au sein de leur famille et dans le secteur de la santé avait un impact négatif sur leur sécurité économique. L’insécurité de leurs cadres de travail et la discrimination à l’embauche engendrent une rémunération plus faible et moins de possibilités de promotion, et la discrimination au niveau des assurances et l’inégalité de l’accès aux soins de santé reproductive entraînent des complications onéreuses et de longue durée sur leur santé, qui affectent encore davantage leur capacité à trouver du travail.[81] Entretemps, le rapport Disaggregating the Data for Bisexual People (2018) conclut que les femmes bisexuelles se trouvent dans une situation économique particulièrement précaire, les femmes bisexuelles âgées de 18 à 64 ans étant moins susceptibles que les femmes lesbiennes d’avoir un travail.[82]

Bien que n’étant pas spécifiquement axée sur les femmes LBQ+, une étude de 2021 sur les expériences LGBT dans le secteur du bâtiment au Royaume-Uni apporte des conclusions édifiantes sur les différentes manières dont les personnes LBQ+ et les hommes gays cisgenres font l’expérience de l’homophobie, et sur le fait que l’homophobie a un impact direct spécifique sur la sécurité économique des femmes LBQ+ :

Pour la carrière d’une femme [par opposition aux hommes gays cisgenres], le genre est un obstacle plus important que sa sexualité. Les participantes cis-féminines (autrement dit assignées au sexe féminin à la naissance) qui s’identifient en tant que lesbiennes ont déclaré que leur genre avait un impact plus important que leur sexualité sur la façon dont on les traitait au travail. Une participante a ainsi commenté : « Je peux cacher que je suis gay, mais je ne peux pas cacher que je suis une femme. » L’omniprésence de la discrimination de genre a également été soulignée lors de discussions en ateliers avec les parties prenantes. La domination du secteur du bâtiment par des hommes hétérosexuels blancs, surtout au sommet de la hiérarchie, est considérée comme un obstacle plus important à leur progression de carrière que leur identité LGBT. Le terme « old boys club » est revenu à maintes reprises lors des entretiens pour décrire le sexisme de ce secteur.

Ces constats illustrent un aspect des multiples formes de marginalisation économique qui affectent les femmes LBQ+. L’importance d’un autre facteur – la violence contre les personnes LBQ+ sur le lieu de travail – a été maintes fois confirmée dans les consultations menées pour les besoins de ce rapport, y compris par des activistes en Argentine, aux États-Unis, en Indonésie, au Kenya, au Kirghizstan et en Tunisie (voir section VI, Violence et discrimination au travail).

De nombreuses formes de marginalisation économique contribuent à la présence élevée de personnes LBQ+ dans le secteur du travail du sexe dans plusieurs pays, y compris au El Salvador, au Ghana et en Tanzanie, d’après les documents étudiés et les entretiens réalisés.[83] À l’occasion d’un rapport publié en 2018 sur les exactions visant les personnes LGBT au Ghana, une femme lesbienne de 28 ans a déclaré à Human Rights Watch :

Le problème à Accra est que les personnes LGBT ne trouvent pas de travail. Personne ne veut leur en donner. Et puis, quand votre famille l’apprend, elle cesse de payer vos frais de scolarité, alors on n’est pas instruites. Il n’y a aucun soutien pour apprendre un métier. Quand aucune des deux conjointes lesbiennes ne travaille, il est attendu de la partenaire femme qu’elle sorte coucher avec des hommes pour se faire de l’argent—il arrive parfois qu’elles doivent toutes les deux se prostituer pour survivre.[84]

En revanche, deux personnes interrogées au El Salvador ont déclaré que, dans ce pays, le travail du sexe était l’une des rares formes d’emploi auxquelles avaient accès les personnes LBQ+ d’apparence masculine, qui subissent une discrimination à l’embauche généralisée du fait de leur expression de genre.[85] Le lien entre marginalisation économique, travail du sexe et expressions du genre masculin est étudiée à la section V, Violence envers les personnes LBQ+ d’apparence masculine. Si peu de recherches ont porté sur les expériences des travailleurs du sexe LBQ+, l’étude préliminaire et les entretiens suggèrent qu’il est impératif d’enquêter de toute urgence sur leurs expériences spécifiques de la violence.

Attaques visant des défenseur-e-s des droits humains

Entre 2017 et 2022, les risques, menaces et attaques d’activistes LBQ+ ont été davantage documentés et analysés en tant que sous-catégorie des organisations féministes et défenseur-e-s des droits humains des femmes. Aux niveaux régional et local, des rapports et des déclarations sur l’activisme dédié aux droits humains LBQ+[86] ont été publiés au Kenya (2018),[87] en Afrique subsaharienne avec des études de cas au Cameroun et au Togo (2013),[88] en Afrique du Sud (2019) à l’issue de la Global Feminist LBQ Conference[89] et sur l’« état du processus d’organisation des lesbiennes » dans l’UE et les pays candidats à l’accession à l’UE (2020).[90] Au niveau mondial, plusieurs rapports documentant des attaques contre des mouvements féministes de façon plus générale ont mis en évidence les expériences de responsables d’organisations LBQ+. Parmi ces rapports, citons les suivants : Rights Eroded: A Briefing on the Effects of Closing Space on Women Human Rights Defenders (2017) ;[91] The State of Intersex Organizing (2nde édition) et The State of Trans Organizing (2nde édition) (2017) ;[92] et Standing Firm: Women and Trans-Led Organisations Respond to Closing Space for Civil Society (2017).[93]

Les responsables LBQ+ sont présents dans un large éventail de mouvements sociaux, et des organisations de défense des droits humains axées sur la promotion et la protection des femmes ont analysé[94] les liens entre la lesbophobie, les attaques ciblant des mouvements féministes et les propos alarmistes autour de l’« idéologie de genre ».[95] Cependant, si ces rapports abordent l’animosité et la violence anti-LBQ+ en tant que menace au développement du mouvement féministe, la collecte et l’analyse des informations sur la violence anti-LBQ+ ne sont par leur principal objectif. Par exemple, un rapport a conclu que la démonisation des personnes queers faisait du tort aux mouvements féministes ;[96] un autre, que les attaques visant des lesbiennes avaient des répercussions négatives sur le mode d’organisation des femmes, identifiant la lesbophobie « et son impact sur la réduction de l’espace civique » comme une thématique critique à étudier.[97] Cela signifie que les organisations et les organismes de financement qui luttent contre le « rétrécissement de l’espace civique dont dispose la société civile » doivent aussi se préoccuper de traiter l’homophobie et les attaques énoncées en termes d’« idéologie de genre ».

Un grand nombre d’activistes interrogés… font l’expérience de la fermeture de l’espace réservé à la société civile comme étant attribuable, au moins en partie, à une intensification de la rhétorique d’État qui prescrit et applique une identité sexuelle et un comportement genrés patriarcaux et hétéronormatifs restreints.[98]

Défis en matière de financement

Les mouvements LBQ+ souffrent d’un sous-financement très prononcé, ne percevant qu’une infime partie des fonds destinés au mouvement LGBT à travers le monde et une partie encore plus minime des fonds accordés à la défense des droits des femmes à l’échelle internationale.[99] Une activiste LBQ+ déclare ainsi : « Nous nous positionnons clairement dans le portefeuille LGBT de la quasi-totalité de nos donateurs. Les fondations de défense des droits des femmes ne nous contactent pas. Elles considèrent les femmes queers comme une question fondamentalement gay. »[100]

Le rapport Vibrant Yet Under-Resourced (2020) des organisations féministes Astraea et Mama Cash présente les résultats pionniers d’une analyse globale des financements accordés aux communautés LBQ+. Les auteurs ont recueilli des données auprès de 378 activistes de 97 pays ainsi qu’auprès de 67 bailleurs de fonds et analysé les priorités des activistes LBQ+ et le manque critique de financement ciblé pour leurs travaux ; ils ont aussi recensé les domaines dans lesquels les efforts des donateurs étaient alignés sur les stratégies des communautés LBQ+ visant à créer de nouveaux avenirs féministes. Le rapport révèle que les groupes LBQ+ n’ont pas les budgets, les fonds ou l’accès à un soutien externe nécessaires pour mettre en œuvre leurs stratégies de mouvements créatives et diversifiées :

Le budget médian des groupes LBQ en 2017 s’élevait à 11 713 dollars US. Près de trois quarts (72 %) des groupes LBQ fonctionnaient avec un budget annuel inférieur à 50 000 dollars ; en réalité, près de la moitié (40 %) signalent disposer d’un budget annuel inférieur à 5 000 dollars.
Un tiers (34 %) des groupes n’a reçu aucun financement externe, et pour près de la moitié (48 %) de tous les groupes, le financement externe ne dépasse pas les 5 000 euros.
La majorité des groupes LBQ ne comptent qu’un petit nombre de membres du personnel rémunérés, voire aucun, et ils sont fortement tributaires des bénévoles. Un quart de tous les groupes ne compte aucun membre du personnel à plein temps (28 %), et un autre quart (25 %) n’a qu’un ou deux membres du personnel à temps plein.[101]

Parmi les autres conclusions clés, citons les suivantes : les groupes LBQ+ ont des obstacles significatifs à surmonter pour accéder à un financement, ce qui a des répercussions sur leur accès à certains droits, y compris leur accès à la justice ; et les deux stratégies centrales pour l’organisation des mouvements LBQ+—la production de savoir et le bien-être—sont gravement sous-financées.

En 2017, 89 % des donateurs finançaient la communauté, le mouvement et le développement de réseaux [LBQ+], 77 % finançaient le plaidoyer et 73 % finançaient le renforcement des capacités — toutes ces stratégies jouant un rôle de premier plan pour les activistes. Cependant, d’autres stratégies centrales pour l’organisation du mouvement LBQ ont reçu un financement bien moindre. Moins de la moitié (43 %) des donateurs de notre échantillon finançaient la recherche et la production de savoir, tandis que les services directs, notamment la santé psychosociale et le bien-être, étaient financés par le plus faible nombre de donateurs (32 %).[102]

Les consultations menées pour les besoins de ce rapport ont confirmé combien il était important d’accroître immédiatement le niveau de financement à la disposition des groupes LBQ+ pour pouvoir produire du savoir (rapports, vidéos, enquêtes, visualisations) de manière collaborative, ainsi que de former et déployer des services de santé psychosociale et de bien-être dans leurs communautés.

Concepts qui perpétuent l’exclusion des personnes LBQ+

Plusieurs conceptions erronées relatives aux personnes LBQ+ et à leurs expériences de la discrimination et de la violence contribuent à leur exclusion des travaux de recherche : (1) l’hypothèse selon laquelle les lesbiennes sont « invisibles », par nature ou par choix ; (2) l’« outness » est le seul chemin menant à la libération queer, et toutes les personnes queers devraient vouloir être « out » (« sorties du placard ») ; (3) les personnes LBQ+ font principalement l’expérience de la violence dans la « sphère privée » et non publique ; et (4) les personnes LBQ+ s’exposent à des dangers moindres et font l’objet de moins de violences que les hommes et garçons queers.

L’« invisibilité lesbienne »

L’expression « invisibilité lesbienne » fait référence à la dévalorisation des identités, des expériences et des contributions des personnes LBQ+ dans le secteur des arts, le monde politique, les mouvements sociaux et à travers un large éventail de récits bien documentés présentés ci-dessus.[103] Dans le domaine des droits humains, il est crucial de se pencher sur les lacunes radicales au niveau des documents faisant état des expériences des personnes LBQ+ pour pouvoir protéger leurs droits. Cependant, il est important de se demander pour qui les lesbiennes sont invisibles.

Quand cette expression est employée de manière non critique ou sans engagement explicite à combler ces lacunes, l’invisibilité lesbienne présume que les questions LBQ+ sont, en réalité, plus difficiles à documenter et moins accessibles.[104] Elle masque la dévalorisation intentionnelle des questions propres aux femmes, y compris dans les espaces queers, et normalise la primauté accordée aux hommes cisgenres en tant que sujet « naturel » des droits, de la recherche et des études. Les références familières à l’invisibilité lesbienne en font un phénomène naturel et affaiblissent la responsabilité des chercheurs, des défenseur-e-s et des bailleurs de fonds envers le besoin de reconnaître et de chercher à résoudre la nature systémique de la discrimination et de la violence à l’encontre des personnes LBQ+. Ainsi, cette expression sert de prétexte pour ne pas défendre les victimes LBQ+ de violations et d’atteintes aux droits humains.

Plusieurs personnes interrogées ont remis en question l’hypothèse souvent émise par les chercheurs et les ONG selon laquelle le statut de queer est une question « trop dangereuse » ou « trop compliquée » pour être abordée en public et même pour être mentionnée lors des entretiens lors des visites de recherche sur le terrain. S’il est vrai que les défenseur-e-s LBQ+ des droits humains visibles pour leurs communautés courent des risques immenses, et mettent parfois leur vie en danger (voir section XI, Défenseur-e-s des droits humains LBQ+), des activistes LBQ+ ont signalé que les chercheurs, les journalistes, les ONG et d’autres acteurs les privaient de leur capacité d’action et de leur pouvoir de décider ou non de raconter leur histoire. Des activistes LBQ+ en Indonésie, en Tanzanie et en Tunisie ont évoqué des expériences avec des institutions étatiques prétendument alliées qui leur avaient dit qu’il était « trop dangereux » de faire des déclarations en soutien aux groupes de personnes lesbiennes menacées de violence sexuelle, et ce, alors que la communauté elle-même réclamait une solidarité publique. Des chercheurs non LBQ+ ont expliqué qu’ils avaient parfois décidé de ne pas citer les récits de victimes LBQ+, craignant de leur faire courir en risque en divulguant leur statut. Ces récits indiquent combien les chercheurs en droits humains, les défenseur-e-s et les cibles alliées du plaidoyer tiennent tous un rôle dans l’imposition de cette notion infantilisante selon laquelle être « out » est trop dangereux pour les partenaires, les victimes et les personnes LBQ+ interrogées, ce qui perpétue cette prétendue invisibilité des communautés LBQ+ et de leurs problématiques.

Comme nous le soulignons ultérieurement dans ce rapport, les gouvernements contribuent eux aussi à l’« invisibilité lesbienne » et aux atteintes aux droits humains qui en résultent à différents titres, y compris en s’abstenant de nommer explicitement les personnes LBQ+ dans les services, les programmes, le système d’appui social, les lois et les politiques axées sur la promotion et la protection des droits des femmes. Cette omission crée des freins à l’accès à la justice, aux soins de santé et au soutien dédié aux victimes LBQ+ de violences et de discrimination, parce que ces victimes ne sont pas clairement désignées en tant que détenteurs de droits, par exemple dans les politiques antidiscriminatoires en vigueur dans le domaine du travail,[105] les programmes de lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS) ou les directives sanitaires.[106] (Pour de plus amples informations sur l’impact négatif sur les personnes LBQ+ de leur non-inclusion explicite dans les législations et directives relatives au droit du travail des femmes, voir les sections IV, Droits de propriété, X, Santé, et XII, Justice.)

Le concept d’« outness »

Nous n’essayons pas de forcer les gens à sortir du placard. Avant l’époque coloniale, les queers étaient très « out ». Il est recolonisant que des personnes blanches nous demandent de « sortir du placard », elles qui ignorent combien cela est dangereux pour nous dans nos foyers ; les colons ont forcé nos ancêtres queers à rentrer dans le placard et maintenant on veut qu’on en ressorte. Nous, femmes queers d’Asie du Sud, nous voulons divulguer notre identité aux gens avec lesquels nous nous sentons en sécurité. Mais on nous impose de la divulguer à tout le monde.[107]


– Sonali Patel, fondatrice du réseau Queer South Asian Women’s Network

L’expression « invisibilité lesbienne » est d’autant plus problématique en raison de sa connotation négative selon laquelle la visibilité est essentiellement une bonne chose et que le fait d’être « out » est la voie universelle vers la liberté et la libération queer. Lors de son intervention en 2014 à la London School of Economics, l’activiste palestinienne Haneen Maikey, ancienne directrice de l’organisation palestinienne de défense des droits LGBT Al-Qaws, a déclaré que la visibilité n’était pas le but premier de la plupart des queers palestiniens avec lesquels elle travaille. Déplorant que les résultats d’une recherche du mot « gay » sur Google soient principalement des images d’« arcs-en-ciel, de défilés Pride et d’hommes gays en train de faire la fête », elle a affirmé qu’il existait d’autres voies pour sécuriser les droits queers.[108] Haneen Maikey a évoqué un groupe de sauveurs blancs qui cherche uniquement à inciter un sujet brun et queer à sortir du placard et ainsi à gagner une vie queer visible, seule voie véridique vers la libération, mais aussi en mettant de la distance entre ce sujet et sa famille et sa communauté. Elle a expliqué le processus par lequel la communauté d’origine est démonisée pour que les activistes LGBT blancs « puissent avoir la satisfaction de sauver d’autres personnes », et elle décrit la violence et le traumatisme qui en découlent :

La dynamique entre colon et colonisé, on peut la voir sous l’angle du complexe du sauveur, ces activistes blancs occidentaux qui vont sauver différentes communautés LGBT. … Mais pour que moi [sauveur blanc hypothétique], je vous convainque qu’il faut que je vous sauve, je dois vous convaincre de détester votre propre communauté. C’est seulement alors que l’on pourra vous sauver.[109]

De même, le Marigold Seeds Collective, une organisation de proximité qui crée « des espaces propices où les Asiatiques du Sud et les Indo-Caribéens LGBTQ+ peuvent former des amitiés », a qualifié dans un de ses rapports le « coming out » de concept « occidental ».[110] L’organisation encourage plutôt les personnes queers à envisager « d’inviter les personnes à rejoindre » un espace créé pour elles, dont elles décident elles-mêmes des limites. Cette invitation devrait être traitée comme un privilège, si et quand la personne queer veut que certains membres de sa famille ou communauté connaissent certains aspects de son identité, et de quelle manière. Tout comme l’expression « invisibilité lesbienne » appelle la question « invisible pour qui ? », l’expression « sortir du placard » soulève la question de savoir « sortir pour qui ? ». Le concept d’invisibilité lesbienne est ancré dans l’idée qu’il existe une compréhension universelle de ce que signifie être « out ». Or cela ne tient pas compte de la réalité des personnes LBQ+ qui ont divulgué cet aspect de leur identité à certains membres de leur famille, à leurs groupes d’amis et aux cercles d’activistes queers après avoir mûrement réfléchi à la manière, au moment et aux conditions dans lesquelles elles décidaient de divulguer cela auprès d’un public plus large.

Le Queer South Asian Women’s Network est une organisation LBQ+ qui soutient les personnes queers des communautés de la diaspora.[111] Basé à Toronto, au Canada, le réseau a été fondé pour « remettre en question notre invisibilité collective en tant que femmes queers d’Asie du Sud et que personnes de genre non conforme ». Tout en étant axée sur la lutte contre cette invisibilité, ses principes directeurs sont : « Pas besoin d’être ‘out’ pour vivre la meilleure vie de queer desi qui soit. Redéfinissez le placard, ou du moins, faites-en un lieu de vie fabuleux » et « Rejetez les discours queers coloniaux blancs. Refusez d’assimiler les normes LGBTQ+ occidentales. Revendiquez la queerness et la fluidité de genre des groupes de la diaspora d’Asie du Sud ».[112]

La « revendication de la queerness et de la fluidité de genre » pour contourner les notions d’« outness » est un objectif central de nombreux mouvements LBQ+. Des activistes au Canada, aux États-Unis, en Indonésie, au Kenya et au Mexique ont mentionné les efforts consentis pour étudier, revendiquer, raviver et faire connaître les points de vue plus larges en matière de genre et de non-binarité qu’avaient leurs ancêtres autochtones avant que les colons ne viennent imposer des systèmes de genre binaire rigides.

Si l’on veut que la recherche dans le domaine des droits humains encourage ces mouvements, au lieu de leur nuire, les sujets des études devraient être identifiés et reconnus selon des modalités et dans des espaces instaurés par cette recherche—des espaces vers lesquels la recherche « fait venir l’autre »—au lieu d’exiger d’eux qu’ils expriment les conceptualisations populaires de l’« outness ». Cela vaut particulièrement dans le contexte des femmes queers, pour plusieurs raisons. Premièrement, la personne queer telle qu’elle est personnifiée est traditionnellement de sexe masculin, d’où une prolifération de travaux de recherche et de plaidoyer axés sur les hommes gays et les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes. Les conceptualisations de l’outness sont associées à des idées normatives de l’humain et de l’identité de queer, qui elles-mêmes privilégient les individus blancs, cisgenres et de sexe masculin. Elles ignorent la réalité de ce qu’être « out » signifie pour une femme queer qui vit dans une favela de la banlieue de Rio ou au sein d’une communauté adivasi dans l’est de l’Inde. L’échec à reconceptualiser une notion des droits queers répondant moins aux stéréotypes « out » fait que l’on continue d’exclure de nombreuses personnes LBQ+ de la recherche, des enquêtes et du plaidoyer en matière de droits humains.

Deuxièmement, les personnes assignées au sexe féminin à la naissance font l’objet de pressions considérables au sein de leur famille et ont un important devoir de soin à leur égard. Par conséquent, une « sortie du placard » radicale et une distanciation de leur famille (pour pouvoir être un sujet queer légitime) sont non seulement traumatisantes, mais aggravées par le poids associé à l’abandon de leurs responsabilités en tant que femme, mère, sœur, fille et personne donnant des soins. L’application d’une idée simplifiée de l’outness est donc souvent inadaptée, potentiellement violente et en porte-à-faux avec la primauté de la famille pour de nombreuses femmes.

Une conceptualisation plus nuancée de la lutte contre l’invisibilité consisterait à ne pas forcer les personnes LBQ+ en tant qu’individus à se rendre visibles pour devenir des sujets légitimes des études sur les droits humains.

Pour ce faire, ce rapport cherche délibérément à :

  • Reconceptualiser une notion des droits queers répondant moins aux stéréotypes « out » afin de mieux cerner les expériences d’un grand nombre de personnes LBQ+ ;
  • Étudier les atteintes aux droits LBQ+ à travers la réglementation des relations, des désirs, des marqueurs physiques, des actes politiques, des pratiques sexuelles, des structures familiales et des groupes sociaux ;
  • S’orienter vers une identification des façons spécifiques dont les droits des personnes LBQ+ sont bafoués ou abusés sans exiger des individus affectés qu’ils s’identifient systématiquement en tant que « personnes LBQ+ » ;
  • Analyser les obstacles qui rendent la vie des personnes LBQ+ particulièrement difficile, et étudier les différents concepts, identités, étiquettes et cadres qui n’exigent pas d’« outness » monolithique mais bénéficieraient de faire l’objet de rapports et de travaux de plaidoyer ;
  • Identifier les thèmes LBQ+ qui ne sont pas mis en avant dans les conceptualisations normatives des cadres de référence relatifs aux droits des femmes ou LGBT : par exemple, les chercheurs sur les droits des femmes devraient inclure l’expression de genre, et les chercheurs sur les droits LGBT devraient s’intéresser aux droits de propriété.

Concept binaire public/privé

En mai 2016 au [Ghana], la mère d’une jeune femme a organisé le passage à tabac de sa fille et d’une autre femme, soupçonnant qu’elles soient lesbiennes et qu’elles entretiennent une relation homosexuelle. Les deux jeunes femmes ont dû fuir le village.


– « No Choice but to Deny Who I Am »: Violence and Discrimination against LGBT People in Ghana[113]

Grâce à plusieurs décennies de plaidoyer au nom des défenseur-e-s, organisations et chercheurs en matière de droits des femmes, il est désormais reconnu que les abus d’ordre « privé »– les actes de violence commis au sein du foyer– constituent des atteintes aux droits humains que la loi devrait condamner. Cela représente un progrès clé pour la lutte en faveur des droits des femmes. L’élaboration et la prolifération d’un soi-disant concept binaire entre les sphères publique et privée ont toutefois entravé la recherche et le plaidoyer sur les droits des femmes, y compris sur les droits LBQ+.

Les récits recueillis pour les besoins de ce rapport ont systématiquement réfuté l’hypothèse parfois émise par les chercheurs selon laquelle la violence contre les femmes LBQ+ se produit principalement dans la sphère privée. Le concept de violence « dans la sphère privée » en tant que principal angle sous lequel étudier les atteintes aux droits LBQ+ pose problème, et cette hypothèse a permis aux ONG, aux institutions gouvernementales, aux familles, à la police, aux voisins et aux médias d’ignorer les violences perpétrées contre les personnes LBQ+.

En réalité, les exactions qui visent les femmes LBQ+ sont souvent publiques et visibles. La violence traditionnellement considérée comme « privée » revêt souvent des dimensions publiques. Les familles attaquent bel et bien les femmes LBQ+ en public. Les attaques contre les personnes LBQ+ ne se limitent pas forcément à la sphère privée pour la simple raison que leur auteur était une connaissance ou un membre de la famille de la victime. La binarité publique/privée est un défi non seulement pour les femmes LBQ+, mais également pour les femmes qui ne s’identifient pas en tant que telles. Au moins deux rapporteurs spéciaux des Nations Unies sur la violence contre les femmes ont affirmé à maintes reprises que cette dichotomie entre sphère publique et privée en droit international des droits humains était « l’un des principaux obstacles à la protection des droits des femmes ».[114]

Dans son rapport de 2006, Yakin Ertürk, alors Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, écrivait :

La codification en droit international de ce qui relève du domaine public et du domaine privé n’a pas seulement été un obstacle idéologique à l’évolution du discours des droits de l’homme dans de nombreuses sociétés, elle a aussi servi à s’en protéger. Dans de nombreuses parties du monde, la lutte pour les droits de l’homme s’arrête sur le seuil du foyer.

Dans son rapport de 2013, Rashida Manjoo, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, rebondissait sur les travaux d’Ertürk :

L’un des principaux problèmes [qu’Ertürk a] identifiés était que le critère de la diligence due était essentiellement axé sur la violence contre les femmes en tant qu’acte isolé et ne tenait pas compte des liens entre la violence et les atteintes aux autres droits humains, y compris les principes généraux d’égalité de genre et de non-discrimination. Elle évoque aussi la nécessité de s’éloigner d’une dichotomie publique/privée lorsque l’on considère la violence contre les femmes. Elle fait ainsi valoir que le fait de catégoriser certaines formes de violence contre les femmes dans la sphère privée tend à normaliser ce phénomène, et implique une intervention différente de la part des États, ce qui n’est pas le cas pour les incidents de violence « publique ».[115]

Parmi les abus et les atteintes aux droits humains commis contre les personnes LBQ+ à l’intersection de la binarité publique/privée figurent les agressions de lesbiennes d’apparence masculine et de personnes transmasculines perpétrées par les maris de leurs partenaires queers ;[116] le harcèlement des femmes employées en dehors du foyer ;[117] des attaques violentes contre des couples LBQ+ perpétrées par des membres de leurs familles ;[118] et le harcèlement sexuel de défenseur-e-s des droits humains LBQ+ par la police qui accuse les femmes vivant en dehors de leur ville d’origine d’avoir fui leur foyer en s’appuyant sur des notions sexistes selon lesquelles la vie « privée » d’une femme se situe auprès de ses parents ou de son mari.[119]

Le fait de considérer ces formes de violence anti-LBQ+ comme relevant principalement de la sphère privée revient à dispenser l’État d’assumer des responsabilités en matière de protection constante des victimes et survivants LBQ+. Ce rapport étudie les réformes pertinentes qui pourraient éviter l’adoption de narratifs nocifs et simplistes autour des concepts d’« outness », d’invisibilité et de domaines public/privé.

Le mythe de la sécurité et de la liberté des personnes LBQ+

Bien que les couples et individus LBQ+ soient la cible d’une multitude d’exactions, le mythe persiste selon lequel les femmes et filles queers bénéficient au sein de la société d’un espace, d’une sécurité et d’une liberté plus importants que les hommes et garçons queers, y compris pour explorer leur sexualité. Ce concept est étayé par l’existence de lois anti-sodomie qui ne condamnent pas explicitement les relations homosexuelles entre femmes (voir section II, Contexte juridique et du plaidoyer). Plus des deux tiers des personnes LBQ+ que nous avons interrogées ont évoqué et critiqué ce mythe, observant que cette soi-disant liberté était le résultat de la dévalorisation des femmes, de leur sexualité et de leur vie intime.

À travers le monde, les systèmes juridiques refusent aux femmes le droit d’être une personne à part entière ; on pourrait même aller jusqu’à dire que le manque de criminalisation explicite du comportement sexuel des femmes queers en constitue la preuve. Les relations sexuelles LBQ+ décentrent la prédominance traditionnelle des hommes ; elles sont donc délégitimées au point de ne même plus constituer des relations sexuelles. Elles n’entrent pas dans le cadre des limites connues de la criminalisation dans de nombreux contextes homophobes, non pas parce que les femmes LBQ+ sont acceptées, mais parce qu’elles sont radicalement dévalorisées.

Plus concrètement, cela implique que la vie d’une personne LBQ+ serait « plus simple » car elle n’est ni assez visible ni assez légitime pour être criminalisée ou réglementée. Cependant, cette croyance dissimule la vulnérabilité des femmes LBQ+ face à la violence homophobe et lesbophobe, qui se manifeste différemment selon que l’on est femme/fille queer ou homme/garçon queer.

On m’a surprise en train d’embrasser ma petite amie. Le policier a demandé mon numéro. Un autre jour, je nageais les seins nus quand un policier est arrivé. Il ne voulait pas partir tant que je ne lui avais pas donné mon numéro. Je lui ai dit que j’acceptais de sortir avec lui ; il a appelé mon téléphone devant moi pour être sûr que c’était mon vrai numéro. J’ai dû changer de numéro. Cette anxiété ne me quitte pas.
Un policier ne va pas m’arrêter, mais il va venir près de moi, essayer de me caresser, de me toucher le bras. Comment peut-on dire que je suis plus en sécurité dans la sphère publique si, pour éviter la prison, il me faut accepter d’être harcelée et violée ? Comment cela affecte-t-il la capacité des femmes à se montrer en public ?[120]

Ce mythe de la liberté et de la sécurité dont jouiraient les personnes LBQ+ fait abstraction des restrictions sociales et juridiques à la liberté de circulation des femmes et à leur capacité à apparaître en public en toute sécurité qui jouent un rôle primordial dans la vie des personnes LBQ+. Lisa Davis, conseillère spéciale pour les persécutions sexistes du Procureur de la Cour pénale internationale et co-directrice de la permanence Human Rights and Gender Justice (HRGJ) à la City University de New York (CUNY), a replacé les expériences comme celles de Nadia dans le contexte global du pouvoir des hommes, du manque de pouvoir des femmes et de la nécessité de rendre compte de cet aspect des droits humains pour mettre en évidence ce déséquilibre, au lieu de le prendre pour acquis :

Le droit pénal international reconnaît que les personnes de tous les genres et orientations sexuelles peuvent être visées par une persécution sexiste, et la reconnaissance de ces délits peut refléter le continuum de la discrimination structurelle historique et ancienne et des privations fondamentales des droits dont font l’objet les femmes, les filles et les personnes LGBTQI+. Mais il peut parfois être difficile de mettre en évidence cette discrimination car les personnes qui détiennent le pouvoir au sein de la société sont souvent considérées comme plus dangereuses pour le groupe qui essaie de contrôler le pouvoir que celles qui ne détiennent pas de pouvoir mais sont considérées comme des transgresseurs. Par exemple, les Nazis criminalisaient les rapports sexuels entre hommes gays, mais pas les relations lesbiennes. Pourquoi ? Parce que les femmes n’étaient pas perçues comme une menace.
On croit souvent qu’il n’y a jamais eu de persécution des personnes LBTQI+, que la persécution n’a ciblé que les hommes gays. C’est en partie parce que l’oppression des femmes était déjà une réalité avant l’arrivée des Nazis, et la plupart des historiens n’ont tout simplement pas cerné de manière fiable dans quelle mesure ce phénomène était venu aggraver les crimes commis contre elles susceptibles de s’apparenter à une persécution sexiste.
Il est important que les actes violents à l’encontre des hommes gays aient été reconnus en tant qu’atrocités, mais nous n’avons pas rendu compte de la violence sexiste contre les femmes qui se déroulait en toile de fond. Il nous faut rendre justice pour la persécution sexiste de toutes les victimes – hommes, femmes et/y compris les personnes LGBTQI+ – si nous voulons réussir à éliminer la discrimination qui alimente cette violence. Nous devons comprendre que la discrimination est à la base de l’oppression, faute de quoi nous risquons de passer à côté des doubles voire triples formes de discrimination dont les personnes LBTQI+ sont susceptibles de faire l’objet dans ce contexte. Autrement, ces victimes risquent de rester invisibles.[121]
 

III. Bonheur et luttes non linéaires en matière de droits

De nombreux thèmes évoqués dans ce rapport par les personnes LBQ+, notamment ceux qui, selon elles, devraient faire l’objet d’études plus poussées, soulignent la nécessité de mener un travail de recherche et de plaidoyer dans le domaine des droits humains qui soit axé sur le bonheur et la libération des personnes LBQ+ plutôt qu’uniquement sur la violence, les violations et les exactions.

La lutte pour promouvoir l’accès des personnes LBQ+ aux services de santé sexuelle et reproductive ne concerne pas que leur accès à l’avortement, sans lequel elles pourraient mourir ; elle comprend également un accès non discriminatoire aux traitements pour la fertilité des couples ou individus LBQ+ qui souhaitent fonder une famille (section VIII).

De même, les activistes ont insisté sur le fait que les trousses de soin en cas de viol, le dépistage des IST et la nécessité de veiller immédiatement à ce que plus aucune personne LBQ+ ne meure des suites d’infections post-viol non soignées (section IX) sont des réformes à mettre en œuvre qui constituent le strict minimum pour appuyer les femmes LBQ+ dans les services VSS. Ils réclament des services VSS pour les personnes LBQ+, y compris un accès à des services de santé psychosociale sensibles aux queers et pris en charge par des queers, des soins de suivi de longue durée et un financement des espaces communautaires des personnes LBQ+, autant d’éléments importants pour répondre à une crise et assurer une prise en charge adaptée des survivants pendant leur processus de guérison.

La violence contre les femmes LBQ+ d’apparence masculine (section V) a été un thème critique sous-jacent à nos entretiens. Les personnes interrogées ont également évoqué la « liberté », la « paix » et l’« enthousiasme » qu’elles éprouvaient dans leur manière dite masculine de s’habiller et de se coiffer. Plusieurs témoignages soulignent que des femmes LBQ+ refusent de renoncer à ce bonheur pour faire plaisir à leurs professeurs, à leur famille et même à la police. De même, les femmes LBQ+ d’apparence féminine ont parlé non seulement d’invalidation, d’invisibilité, de harcèlement sexuel et d’intimidation, mais aussi de pouvoir et de revendication de l’identité queer en tant que présentation d’un genre traditionnellement interprété comme signalant une hétérosexualité. Il faut protéger le droit d’exprimer son genre librement et en toute sécurité, non seulement pour prévenir la violence, mais aussi pour promouvoir le bonheur.

Les conclusions de ce rapport soulignent aussi que les futurs travaux devront éviter l’orientation normative des droits LGBT et mieux s’aligner sur les questions prioritaires propres aux personnes LBQ+. Une telle démarche est tout à fait envisageable : le rapport annuel 2020 de l’ILGA a démontré que des lois interdisant la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ont été adoptées avec succès dans de nombreux pays qui continuent de criminaliser les relations entre personnes de même sexe.[122] Ainsi :

On pourrait penser que dès lors qu’un pays décriminalise les relations sexuelles consensuelles entre personnes de même sexe, la prochaine étape consiste à adopter des mesures de protection contre les crimes de haine, l’incitation à la haine et la discrimination. Par ailleurs, si un pays dispose déjà de mesures de protection contre la discrimination et les crimes de haine, on pourrait présumer que le but final des activistes serait d’entériner ces protections dans la constitution du pays, a priori une démarche naturelle pour avancer vers une égalité juridique totale.
Il en est tout autrement… La complexité des contextes locaux montre que les situations peuvent évoluer de manières non conformes à cette trajectoire linéaire théorique.
Aussi paradoxal que cela puisse sembler, dans plusieurs pays qui disposent de lois criminalisant ces actes, les activistes ont pu plaider en faveur de lois qui protègent contre une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. Par exemple, bien que la Barbade, Kiribati, Sainte-Lucie, Samoa et Tuvalu appliquent des législations qui protègent de la discrimination à l’embauche, leurs cadres juridiques continuent de criminaliser les activités sexuelles entre personnes de même sexe … [ce qui montre] qu’il faut s’abstenir d’aborder cette problématique sous un angle « universel ». [123]

Les dirigeant-e-s LBQ+ interrogé-e-s pour les besoins de notre rapport, ainsi que les études de fond sur leurs mouvements et leurs rapports, ont affirmé que, dans un grand nombre de pays, la lutte pour les droits LGBT n’était pas « linéaire ». Ce type de compréhension linéaire n’est même aucunement en phase avec la manière dont les personnes LBQ+ comprennent et protègent leur vie, leur famille et leur communauté. C’est notamment ce que l’on constate dans les appels lancés par les personnes LBQ+ pour la mise à disposition de ressources de planning familial et de droits parentaux dans des pays où le contexte juridique est diamétralement opposé à l’existence LGBT, sans même parler de la reproduction et de la sécurité familiale (voir section VII, Droits parentaux).

Les luttes sociales et juridiques pour la décriminalisation de l’homosexualité, pour l’abolition des lois anti-sodomie de l’époque coloniale et pour la légalisation de l’égalité devant le mariage des couples queers ne sont pas des conditions préalables à l’obtention de droits parentaux, y compris le droit d’adopter et d’accéder à un traitement pour la fertilité, deux points extrêmement importants pour les personnes LBQ+ interrogées. La recherche et les orientations politiques élaborées par des collectifs queers proposent des stratégies pour venir à bout de l’ordre normatif présumé des droits LBQ+. Le rapport Research on the Lived Experiences of LBQ Women in Kenya[124]—le Kenya étant un pays où les relations entre personnes de même sexe sont encore interdites—exhorte le gouvernement et les autorités de la santé publique à « informer les femmes LBQ sur les différents moyens dont elles disposent pour fonder une famille en tant que femmes LBQ+ au Kenya », quel que soit le statut des efforts de décriminalisation des rapports entre personnes de même sexe. La vie des personnes LBQ+ à travers la monde serait nettement améliorée s’il existait un programme d’éducation reproductive axée sur les personnes LBQ+ ; si le Japon abolissait les lois discriminatoires qui n’autorisent que les couples à adopter ; si l’Argentine instaurait des services de santé reproductive compétents permettant aux personnes LBQ+ quel que soit leur genre de jouir des législations modèles sur la fertilité de ce pays ; et si l’on menait campagne pour déstigmatiser l’adoption en général au Zimbabwe. Aucune de ces démarches ne nécessite ou ne devrait requérir la décriminalisation des rapports entre personnes de même sexe.

Il est essentiel de faire preuve de créativité, et de bousculer délibérément la présumée progression linéaire des droits LBGT si l’on veut faire avancer la recherche axée sur les personnes LBQ+ et améliorer leur capacité à vivre une vie heureuse et comblée.

 

IV. Recommandations

Aux bailleurs de fonds qui soutiennent des initiatives de la société civile

  • Veiller à ce que les organisations et collectifs LBQ+ qui soutiennent les survivants à un mariage forcé et œuvrent à éliminer cette pratique reçoivent et aient accès à un financement leur permettant de mettre un terme au mariage forcé, y compris au mariage des enfants, et chercher à aider ces groupes de manière proactive.
  • Encourager les gouvernements à instaurer un plan d’action national exhaustif pour proscrire le mariage forcé qui stipule explicitement l’élimination de toutes formes de pratiques de conversion au moyen d’un large processus de consultation.
  • Participer au développement, et soutenir la mise en œuvre, de plans d’action nationaux gouvernementaux pour mettre fin au mariage forcé et aux pratiques coercitives en la matière.
  • Réformer les exigences financières restrictives selon lesquelles un projet LBQ+ doit servir des populations s’identifiant en tant que LGBT, et permettre aux organisations et collectifs LBQ+ de demander et recevoir un financement pour des travaux intersectionnels couvrant divers domaines relatifs aux droits humains, y compris : droits des femmes ; droits fonciers, environnementaux et autochtones ; droits des personnes handicapées ; droits des migrants ; questions liées au logement et aux sans-abri ; droit à la santé et accès aux soins de santé ; et aide humanitaire.
  • S’assurer que les financements dédiés aux organisations LBQ+ prévoient des lignes budgétaires pour la sécurité des défenseurs des droits humains, et consulter les organisateurs de mouvements LBQ+ locaux sur leurs risques et leurs besoins de protection.
  • Si la situation sécuritaire le permet, prendre en charge ou couvrir les frais associés aux lieux de réunion physiques nécessaires à la tenue de formations, d’événements de renforcement communautaire et de promotion du bien-être, ainsi que les frais de transport vers ceux-ci.
  • Appuyer les programmes et services dédiés au bien-être et aux soins psychosociaux des personnes LBQ+, et consulter les organisations locales sur leurs besoins en matière de santé mentale.
  • Soutenir les démarches gouvernementales nationales visant à instaurer des services de santé mentale communautaires volontaires, adaptés et de qualité.
  • Soutenir les services communautaires, y compris les services de santé mentale, et veiller à ce que ces programmes soient sensibles au genre.
  • Financer les initiatives LBQ+ et les projets de la société civile visant la mise à disposition de services à leurs communautés, y compris en matière d’emploi, de soins médicaux, et d’assistance financière et juridique.

Aux gouvernements

  • Élaborer un plan d’action national pour proscrire le mariage forcé et les pratiques coercitives en la matière qui stipule explicitement l’élimination de toutes formes de pratiques de conversion. Collaborer avec les organisations LBQ+ locales et nationales à chaque étape de la conceptualisation, de la rédaction et de l’application de ces plans pour veiller à offrir un soutien de proximité utile aux victimes LBQ+ du mariage forcé.
  • Veiller à ce que les mesures violentes d’intimidation et de représailles à l’encontre des personnes qui refusent de se marier soient condamnables et que les survivants aient accès à des services juridiques, médicaux et psychosociaux adaptés et sensibles au genre et aux SOGIE.
  • S’abstenir de renforcer les discours selon lesquels les personnes LBQ+ peuvent ou devraient changer d’orientation sexuelle, d’identité de genre ou d’expression de genre, et condamner publiquement ces propos préjudiciables et leurs auteurs.
  • Éliminer les lois, politiques et pratiques qui exigent qu’un homme donne son accord dans des décisions relatives aux droits des femmes, y compris les règles qui limitent le droit des femmes à se marier, à étudier, à travailler, à louer ou acheter un bien immobilier et à voyager sans la permission d’un tuteur masculin.
  • Instaurer des mécanismes de protection des défenseurs des droits humains dotés de personnel formé aux risques et besoins spécifiques des défenseurs des droits humains LBQ+, à la disposition des défenseurs LBQ+, où ils obtiendront un soutien dédié en cas de menaces physiques, sexuelles ou verbales.
  • Organiser des formations SOGIE complètes et obligatoires pour les éducateurs et autres personnels d’établissements scolaires à tous les niveaux afin de former les enseignants à la lutte contre les violences de genre envers les femmes LBQ+, les personnes non binaires et les hommes trans ainsi qu’aux concepts liés à l’orientation sexuelle, à l’identité de genre et à l’expression de genre.
  • En collaboration avec les organisations communautaires, veiller à fournir aux professionnels des services de santé, y compris aux psychologues, aux psychiatres et aux praticiens généralistes, une formation sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre ainsi que sur les besoins spécifiques et les droits des patients LBQ+.
  • Veiller à ce que le système de santé publique donne accès aux soins de santé reproductive, ou à ce que les coûts soient pris en charge ou remboursés par des régimes d’assurance santé privés et publics.
  • Mettre au clair le droit aux biens matrimoniaux qui doivent au moins être gérés de manière conjointe pendant la durée du mariage, répartis de manière équitable après un divorce, et obligatoirement transmis à l’époux survivant au décès du conjoint, et prévoir des moyens communs de protéger les droits à la propriété des femmes, conformément aux obligations internationales prévues par l’article 16 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) qui « a pour objet de faire disparaître la discrimination dont les femmes sont victimes au moment de la conclusion du mariage, pendant la durée du mariage et après sa dissolution, que celle-ci soit le résultat d’un divorce ou d’un décès ».
  • Dès l’adoption d’une législation du travail qui protège contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre, diffuser une circulaire indiquant aux employeurs que toute discrimination envers les employés LBQ+ sera punie par la loi et allouer un budget adapté pour donner effet à ces stratégies.

Aux législatures nationales

Droit de ne pas être victime de discrimination

  • Adopter une législation antidiscriminatoire exhaustive qui interdit toute discrimination fondée sur le genre, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou l’expression de genre et comprend des mesures efficaces pour identifier les actes de discrimination et y remédier.
  • Ajouter de manière explicite l’expression de genre à la législation interdisant la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.
  • Introduire une protection juridique pour les élèves du primaire et du secondaire non conformes au genre, faute de quoi des répercussions sous forme de violence et de discrimination pourraient se faire sentir tout au long de la vie des personnes LBQ+ d’apparence masculine.
  • Ratifier les traités internationaux relatifs aux droits humains qui confèrent une protection contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et l’expression de genre, y compris :
    • Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
    • Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
    • La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
    • La Convention (n° 190) sur la violence et le harcèlement de l’Organisation internationale du travail.
  • Aligner les lois nationales sur les obligations juridiques internationales, notamment en rédigeant et proposant des réformes législatives visant à décriminaliser la diversité de genre et les relations entre personnes de même sexe.
  • Modifier le droit de la famille en supprimant les références au devoir d’obéissance des femmes envers les hommes.
  • Adopter une législation qui interdit aux employeurs, y compris aux institutions et ministères gouvernementaux, d’exiger des femmes qu’elles obtiennent la permission d’un tuteur masculin pour pouvoir travailler ou mener toute activité professionnelle, et imposer des pénalités aux employeurs qui enfreignent cette législation.
  • Adopter des législations du travail qui confèrent une protection contre la discrimination, le harcèlement et la violence sur la base du genre, du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre et de l’expression de genre sur le lieu de travail.

Droit au libre et plein consentement au mariage

  • Élaborer des lois, des politiques et des protocoles qui protègent les personnes LBQ+ d’un mariage forcé ou de pratiques coercitives en la matière.
  • Fixer clairement l’âge minimum du mariage à 18 ans, quel que soit le genre de la personne et sans exceptions, et veiller à ce que les personnes victimes d’un mariage forcé, quel que soit leur âge, puissent en demander l’annulation.
  • Veiller à ce que les femmes disposent du même droit de divorcer que les hommes.
  • Modifier le droit de la famille pour que les femmes puissent, sur un pied d’égalité avec les hommes, contracter un mariage et y mettre fin, y compris en supprimant l’obligation d’avoir la permission d’un tuteur masculin lorsqu’une femme désire se marier ou divorcer.

Droits de propriété

  • Révoquer les lois discriminatoires sur la propriété, les restrictions en matière de travail des femmes et les codes familiaux sexistes, y compris ceux encore en vigueur dans les pays anciennement colonisés.
  • Modifier le droit de la famille pour prévoir le concept de biens matrimoniaux et permettre leur répartition égale entre époux au moment de la dissolution du mariage pour toutes les communautés, en reconnaissant les contributions financières et autres apportées par les femmes.

Droit au travail

  • Adopter des législations du travail qui confèrent une protection contre la discrimination, le harcèlement et la violence sur la base du genre, du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre et de l’expression de genre sur le lieu de travail.
  • Décriminaliser le travail du sexe, une profession vers laquelle les personnes LBQ+ d’apparence masculine, les personnes non binaires et les hommes trans s’orientent parfois en raison des pratiques d’embauche discriminatoires dans d’autres secteurs.

Droit à la santé

  • Adopter des politiques et des protocoles qui soutiennent les survivants LBQ+ de violence sexuelle.
  • Introduire des politiques qui renforcent la disponibilité, l’accessibilité et la qualité des services psychosociaux et de santé mentale sans discrimination, y compris des services spécialisés et un accompagnement psychologique pour les survivants de violence sexuelle.
  • Introduire des mesures de protection non discriminatoires pour permettre aux personnes LBQ+ d’accéder aux soins de santé.
  • Introduire des politiques qui renforcent la disponibilité, l’accessibilité et la qualité des services de santé sexuelle et reproductive sans discrimination.
  • Instaurer des services communautaires volontaires et accessibles de soutien et de santé mentale sensibles aux SOGIE, y compris par le biais de services de soutien psychosocial et l’intégration de services de santé mentale dans le système de santé de soins primaires, en consultation avec les communautés LBQ+ qui ont une expérience personnelle des troubles mentaux et avec le soutien des bailleurs de fonds et des partenaires internationaux.
  • Décriminaliser l’avortement en toutes circonstances et le réglementer en faisant en sorte qu’il respecte pleinement l’autonomie de toutes les personnes enceintes.
  • Élargir l’éventail des praticiens habilités à pratiquer des avortements en incluant, par exemple, les infirmiers auxiliaires, les infirmiers, les sage-femmes et les médecins non cliniciens, afin d’accroître l’accès à des professionnels du corps médical sensibles aux besoins des personnes LBQ+.

Liberté de circulation

  • Rédiger et adopter une législation qui fixe clairement la pleine capacité juridique des femmes à 18 ans et qui exige que toutes les règles et pratiques gouvernementales reflètent la capacité juridique des femmes comme étant égale à celle des hommes.
  • Ne pas promulguer de lois, de politiques, de décrets ou de mesures d’urgence qui limitent la liberté de circulation des femmes et lutter concrètement contre la discrimination dans le contexte de la liberté de circulation des femmes.

Droit à la vie familiale et à l’unité familiale

  • Révoquer les lois qui empêchent les femmes célibataires et les couples non mariés d’adopter.
  • Promulguer des lois régissant la reconnaissance parentale incluant les personnes LGBT qui reconnaissent explicitement l’autorité parentale des parents LBQ+ non biologiques, et les dispenser des exigences discriminatoires en vertu desquelles ils doivent adopter leurs propres enfants.
  • Réformer les lois discriminatoires sur la fertilité et introduire une législation antidiscriminatoire interdisant les politiques d’assurance qui créent des entraves disproportionnées pour les individus et couples LBQ+ souhaitant accéder à un traitement reproductif, tel que la FIV, le gel d’ovocytes et le don de sperme.
  • Veiller à ce que les parents LBQ+ soient traités en tant que tuteurs de leurs propres enfants, sur un pied d’égalité avec les hommes, afin qu’ils jouissent de la capacité juridique pour ouvrir un compte en banque pour eux de manière indépendante, les inscrire à l’école, prendre des décisions de santé à leur égard ou voyager avec eux.

Droits des défenseur-e-s des droits humains

  • Adopter des lois de protection et de reconnaissance des défenseur-e-s des droits humains qui visent explicitement les droits des défenseurs des droit humains LBQ+.
  • Instaurer des mécanismes de protection des défenseur-e-s des droits humains dotés de personnel formé aux risques et besoins spécifiques des défenseur-e-s des droits humains LBQ+, à la disposition explicite des défenseur-e-s LBQ+, et prévoir un soutien pour traiter les menaces physiques, sexuelles, numériques et verbales les ciblant.
  • Veiller à ce que les défenseur-e-s des droits humains LBQ+ qui signalent des attaques et des menaces à la police ne soient pas harcelé-e-s ou agressé-e-s sexuellement, physiquement ou verbalement par les agents, et à ce que les défenseur-e-s puissent établir des rapports d’incident sans crainte de représailles.
  • Faire participer les activistes LBQ+ vivant avec un handicap, et plus particulièrement celles et ceux qui sont affecté-e-s par la privation de leur capacité juridique, à l’élaboration et à la mise en œuvre de réformes sur la capacité juridique, ainsi qu’aux mesures spécifiques nécessaires pour accélérer ou assurer l’égalité de fait des personnes LGBT vivant avec un handicap, comme défini à l’article 5 de la CDPH.

Aux forces de sécurité

  • Enquêter de manière approfondie et transparente sur les signalements de violence à l’encontre d’individus et de couples LBQ+.
  • Instaurer dans les commissariats des « bureaux des droits humains » afin de conférer aux personnes LGBT un environnement sécurisé dans lequel signaler les exactions perpétrées par la police et permettant de traiter et d’enquêter sur les plaintes dans les meilleurs délais, et veiller à ce que le personnel chargé de ces bureaux aient reçu une formation adaptée aux questions propres aux personnes LBQ+, y compris l’expression de genre, le mariage forcé, le viol correctif et les agressions sexuelles.
  • Mettre fin au harcèlement discriminatoire et sexiste des individus, des couples et des défenseur-e-s des droits humains LBQ+, y compris de la part de la police et des forces de sécurité aux postes de contrôle.
  • Mettre fin aux arrestations fondées sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre ou l’expression de genre.
  • Enquêter sans plus tarder sur la violence des pratiques policières et des tactiques d’arrestation qui ont un impact sur la vie des personnes d’apparence masculine assignées au sexe féminin à la naissance.
  • Veiller à ce qu’aucune victime d’un crime ne se voie refuser une assistance, ne soit arrêtée ou harcelée en raison de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son expression de genre ou de son statut de travailleur du sexe. Protéger le droit des personnes LBQ+ à signaler les délits sans risquer de se faire arrêter.
  • Cesser les descentes dans les réunions et les ateliers organisés par les défenseur-e-s des droits et de la santé LGBT.
  • Veiller à ce que les groupes LBQ+ puissent s’organiser sans avoir à subir une ingérence ou des mesures d’intimidation de la part d’agents de l’État.

Aux services de santé publique

  • Veiller à ce que tous les professionnels de la santé aient reçu une formation complète, y compris les professionnels de la santé mentale, les praticiens des services d’avortement et les prestataires de services VSS, sur les problématiques SOGIE et les besoins spécifiques des patients LBQ+, et s’associer aux organisations et collectifs LBQ+ pour délivrer ces formations.
  • Créer une procédure de gestion des plaintes permettant aux victimes LBQ+ d’atteintes aux droits humains commises en milieu médical, y compris une discrimination, un refus de service ou des pratiques de conversion visant à modifier leurs SOGIE, de porter plainte et de demander un soutien et un recours.
  • Collaborer avec les organisations LBQ+ afin d’élaborer des directives complètes sur la garantie et la mise à disposition de services d’avortement gratuits, sécurisés et légaux.
  • Veiller à ce que les documents politiques et stratégiques sanitaires s’appuient sur des preuves, soient alignés sur les meilleures pratiques reconnues internationalement et prévoient explicitement la mise à disposition de services de santé pour les patients LBQ+.
  • Approuver les messages sanitaires adaptés et validés par les communautés visant à éclairer les communautés LBQ+ sur les questions relatives à la santé LBQ+, y compris sur l’accès à des soins complets pour les survivants de violence sexuelle.
  • Soutenir et défendre publiquement la décriminalisation de la diversité de genre et des relations consensuelles entre personnes de même sexe.

Aux responsables des instances judiciaires

  • Élaborer des directives sur la répartition des biens matrimoniaux au moment de la dissolution du mariage, veiller à ce que les juges aient reçu une formation sur ces directives, et collaborer avec les organisations et collectifs LBQ+ sur la conception des directives et des formations à proprement parler.
  • Dans le cadre d’une procédure de divorce, tenir compte des points suivants lors de l’examen des contributions :
    • Durée de la relation ;
    • Impact des responsabilités domestiques et en termes de soins prodigués aux enfants sur la capacité d’éducation et de génération de revenus du conjoint dépendant ;
    • Revenus actuels et estimation des revenus futurs de chaque conjoint ;
    • Capacité du conjoint dépendant à s’assumer financièrement ;
    • État de santé et âge de chaque conjoint ;
    • Besoins et niveau de vie du conjoint dépendant ;
    • Autres formes de soutien dont dispose le conjoint dépendant ; et
    • Contributions apportées par le conjoint dépendant qui ont permis à l’autre conjoint de réaliser son potentiel de carrière.
  • Accélérer la gestion des demandes conjointes de divorce et la répartition des biens matrimoniaux, et limiter la nécessité de visites répétées au tribunal, surtout lorsque les distances ou des contraintes financières rendent ces déplacements difficiles.
  • Cesser de rendre des décisions de justice exigeant des parents non biologiques qu’ils adoptent leurs propres enfants.
  • Former les décideurs en matière d’asile pour qu’ils reconnaissent les liens entre l’appartenance à un groupe social LBQ+ et le risque de persécution dans le contexte du large éventail de problèmes discriminatoires d’ordre économique, juridique et social auxquels sont exposés les demandeurs d’asile LBQ+ en tant qu’individus, parents et familles.
 

Remerciements

Ce rapport a été documenté et rédigé par Erin Kilbride, chercheuse auprès de la division Droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), ainsi qu’auprès de la division Droits des femmes à Human Rights Watch.

Le rapport intégral en anglais a été revu par diverses divisions de Human Rights Watch, avant sa publication. Catherine Dauvergne-Newman a traduit cette version abrégée en français.

 

[1] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Sofía Blanco, femme queer et défenseuse des droits fonciers autochtones, Mexique. 8 août 2022.

[2] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Amani, activiste lesbienne et écrivain, Tunisie. 15 juillet 2022.

[3] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Amani, activiste lesbienne et écrivain, Tunisie. 15 juillet 2022. Le récit d’Amani est présenté dans la section III, Mariage forcé et hétérosexualité obligatoire.

[4] « Tunisie : Attaque contre le directeur d’une organisation LGBT », Human Rights Watch, 28 octobre 2021. https://www.hrw.org/fr/news/2021/10/28/tunisie-attaque-contre-le-directeur-dune-organisation-lgbt

[5] « Tunisie : Arrestations arbitraires d’activistes LGBTI et violences policières », Human Rights Watch, 23 février 2021. https://www.hrw.org/fr/news/2021/02/23/tunisie-arrestations-arbitraires-dactivistes-lgbti-et-violences-policieres

[6] « Tough Territory for Transgender People in the Middle East and North Africa », Human Rights Watch, 8 avril 2022. https://www.hrw.org/news/2022/04/08/tough-territory-transgender-people-middle-east-and-north-africa

[7] Convention sur le consentement au mariage, l’âge minimum du mariage et l’enregistrement des mariages. 7 novembre 1962. https://www.ohchr.org/en/instruments-mechanisms/instruments/convention-consent-marriage-minimum-age-marriage-and

[8] LBQ+ est un acronyme qui désigne les lesbiennes, les bisexuels et les queers. Ce terme englobe les femmes cisgenres, les femmes transgenres, les hommes transgenres, les personnes non binaires et les personnes d’un autre genre qui s’identifient en tant que lesbienne, bisexuel ou queer. Voir glossaire.

[9] Pour lire le récit de Dali, voir la section IX. Droit à la santé.

[10] Initiative Mawjoudin pour l’égalité. https://www.mawjoudin.org/

[11] "لوقتاش؟ " موجودين __ Until When?" Mawjoudin. 18 mai 2019. https://www.youtube.com/watch?v=YgNGSuVpTEk

[12] A/75/262. Rapport du Secrétaire général. Question des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N20/197/93/PDF/N2019793.pdf?OpenElement

[13] Voir par exemple « Marriage and Divorce in Tunisia: Women’s Rights », AWID. 10 septembre 2010. https://www.awid.org/news-and-analysis/marriage-and-divorce-tunisia-womens-rights

[14] Voir par exemple « 2020 Country Reports on Human Rights Practices: Tunisia », Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor. U.S. Department of State. https://www.state.gov/reports/2020-country-reports-on-human-rights-practices/tunisia/

[15] Pour une synthèse et une analyse exhaustives des documents existants, voir section III. Mariage forcé et hétérosexualité obligatoire.

[16] What you need to know about LGBT rights in 11 maps. Forum économique mondial. 1er mars 2017. https://www.weforum.org/agenda/2017/03/what-you-need-to-know-about-lgbt-rights-in-11-maps/

[17] Ibid.

[18] Voir section XII, Justice.

[19] Un rapport publié en 2020 par Mama Cash et Astraea étudiait pour la première fois et de manière globale et approfondie l’absence grave de financements et d’attention philanthropique consacrés aux mouvements LBQ+. Par conséquent, l’enquête de Human Rights Watch ne vise pas à reprendre les conclusions de ce rapport. Elle s’appuie sur ses conclusions et les développe mais, surtout, elle met l’accent sur les trois autres « systèmes » où une réforme LBQ+ est nécessaire : la recherche, la politique et les entraves à la justice. Voir « Background: Funding Challenges » (le présent rapport) et « Vibrant yet Under-Resourced – The State of Lesbian, Bisexual & Queer Movements », Mama Cash et Astraea. 22 juin 2020. fundlbq.org

[20] Nayda L. Almodóvar-Reteguis et Nisha Arekapudi. « Women's property rights are the key to economic development », Banque mondiale. 24 février 2020. https://blogs.worldbank.org/developmenttalk/womens-property-rights-are-key-economic-development.

[21] « Women, Business and the Law 2020 », Banque mondiale, 14 janvier 2020. https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/32639/9781464815324.pdf

[22] Ibid. Page 19.

[23] « This Alien Legacy: The Origins of ‘Sodomy’ Laws in British Colonialism », Human Rights Watch. 17 décembre 2008. https://www.hrw.org/report/2008/12/17/alien-legacy/origins-sodomy-laws-british-colonialism

[24] « Theresa May ‘Deeply Regrets’ Colonial Anti-LGBT Laws », communiqué de presse de Human Rights Watch. 18 avril 2018. https://www.hrw.org/news/2018/04/18/theresa-may-deeply-regrets-colonial-anti-lgbt-laws

[25] Sex Worker Rights Defenders At Risk. Front Line Defenders. 12 août 2022. https://www.frontlinedefenders.org/sex-worker-rights-report/fullreport.html?theme=false#anc2_6a

[26] « Moving freely: Moving closer to gender equality », Banque mondiale. 20 mai 2019. https://blogs.worldbank.org/opendata/moving-freely-moving-closer-gender-equality#:~:text=Freedom%20of%20movement%20may%20be,2019%3A%20A%20Decade%20of%20Reform.

[27] « IDAHOT 2021 - Together: Resisting, supporting and healing! », Hivos. 17 mai 2021. https://hivos.org/news/idahot-2021-together-resisting-supporting-and-healing/

[28] « Human Rights Campaign Fact Sheet: Lesbian, Bisexual, Queer Women Who Have Been Pregnant Are More Likely to Need Abortion Services; Demonstrates Impact Roe Reversal Would Have on LGBTQ+ People », Human Rights Campaign. 2 juin 2022. https://www.hrc.org/press-releases/human-rights-campaign-fact-sheet-lesbian-bisexual-queer-women-who-have-been-pregnant-are-more-likely-to-need-abortion-services-demonstrates-impact-roe-reversal-would-have-on-lgbtq-people

[29] « ‘You Don’t Want Second Best’: Anti-LGBT Discrimination in US Health Care », Human Rights Watch. 23 juillet 2018. https://www.hrw.org/report/2018/07/23/you-dont-want-second-best/anti-lgbt-discrimination-us-health-care#7968

[30] « Health and Socioeconomic Well-Being of LBQ Women in the US. » Williams Institute. UCLA School of Law. Mars 2021. Page 54. https://williamsinstitute.law.ucla.edu/wp-content/uploads/LBQ-Women-Mar-2021.pdf

[31] Greg Hernandez, « Silent No More: Demanding Equity in LBQ Women’s Health Care », LGBT News Now. 23 mars 2019. https://lgbtnewsnow.org/silent-no-more-demanding-equity-in-lbq-womens-health-care/

[32] « Uganda: ‘LBQ Womxn’ need equal access to health », Rights Africa, Equal Rights, One Voice! 9 avril 2021. https://rightsafrica.com/2021/04/09/uganda-lbq-womxn-need-equal-access-to-health/

[33] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Tamara, lesbienne intersexe, défenseuse des droits humains des femmes et dirigeante d’une organisation LBQ+ au Malawi. 15 juillet 2022.

[34] Anya Jabour. « When lesbians led the women’s suffrage movement », The Conversation. 24 janvier 2020. https://theconversation.com/when-lesbians-led-the-womens-suffrage-movement-129867

[35] Voir section X, « Défenseurs des droits humains LBQ+ » pour prendre connaissance d’une liste complète de lois et mécanismes dédiés à la promotion et à la protection des défenseurs des droits humains.

[36] Defiant: Landscape Survey on Violence Against LBQ Women, Trans People, and Female Sex Workers in Burundi. Global Philanthropy Project. 20 déceùbre 2019. https://globalphilanthropyproject.org/2019/12/20/defiant-landscape-survey-on-violence-against-lbq-women-trans-people-and-female-sex-workers-in-burundi/

[37] « "I Need to be Free": What It Means to be a Queer Woman in Today's Iraq. » OutRight International. 23 février 2022. https://outrightinternational.org/our-work/human-rights-research/i-need-be-free-what-it-means-be-queer-woman-todays-iraq

[38] Human Rights Report: Being Lesbian in Iran. OutRight International. 26 juillet 2016. https://outrightinternational.org/our-work/human-rights-research/human-rights-report-being-lesbian-iran

[39] « Research on The Lived Experiences of Lesbian, Bisexual and Queer Women in Kenya. » Coalition of African Lesbians, Gay and Lesbian Coalition of Kenya. Février 2017. https://galck.org/wp-content/uploads/2017/01/Research-on-the-lived-experiences-of-LBQ-women-in-Kenya.pdf

[40] « The Challenges to Successful Lesbian Asylum Claims. » National Center for Lesbian Rights (NCLR). Avril 2013. https://www.nclrights.org/wp-content/uploads/2013/04/Resources_Challenges_Lesbian_Asylum_Claims.pdf

[41] « Violence Through the Lens of Lesbians, Bisexual Women and Trans People in Asia. » OutRight International. 6 mai 2016. https://outrightinternational.org/our-work/human-rights-research/violence-through-lens-lesbians-bisexual-women-and-trans-people-asia

[42] « Queer Women Voices From North Africa. » Bedayaa Organization for LGBTQI in Nile Valley Area Egypt & Sudan, Mesahat Foundation for Sexual & Gender Diversity (Égypte & Soudan), The Transhomos Organization (Algérie). 8 mars 2016. https://www.docdroid.net/igDPp9s/queer-women-voices-from-north-africa-pdf#page=2

[43] « Violence Against Lesbian, Bisexual and Transgender Women in the North Caucasus region of the Russian Federation. » Projet « Queer Women of the North Caucasus » 2018 avec le soutien de la Fondation Heinrich Böll (Moscou). 25 février 2019. https://womenplatform.net/region/violence-against-lesbian-bisexual-and-transgender-women-in-the-north-caucasus/

[44] « Lesbophobia: An Intersectional Form of Violence. » EuroCentralAsian Lesbian* Community. 1er octobre 2021. https://europeanlesbianconference.org/wp-content/uploads/2021/10/Lesbophobia-3.pdf

[45] « Informe Regional sobre la situacion de lesbianas, mujeres bisexuales y queer/cuir. » LESLAC - Red de Organizaciones de Lesbianas y Mujeres Bisexualas y Cuir. 27 juillet 2022. Voir les rapports : https://drive.google.com/drive/folders/11H6A46aatc-stIvf0yxhtGF5j8LXWquN. Voir l’événement de lancement : https://www.facebook.com/LESLAC26A/posts/pfbid02hp1LVyYxq1D6RdRPZ5HPLmqBbyQsyzVKQYJEw9ruD19wboSPtAEWFnbcEjxNNsN8l?__cft__%5b0%5d=AZV0PDEsCeT7j090Q6efQBWOCGMUBN4Xm9xPiZ3OrvRY0isKv7DMZdrxdXGYqIwVmqUNPYHP0Gn9LihBNNxAcUfGDagKUI6wWnZ71tudHoEPiCCovBVz93psDYfwcX_1PkixJOFG4D6EaW1P4cH6MdZjBTQht7Wy-qT9KH1sw-Ztsm6Y7uUl5i-wZUrIxKsXXdxBC9UsZ4myhB26_CB6PIA9FTf1QTqhwLHYwBTl781kYg&__tn__=%2CO%2CP-R. Consulté le 28 juillet 2022.

[46] « Breaking the Silence Criminalisation of Lesbians and Bisexual Women and its Impacts. » Human Dignity Trust. Mai 2016. https://www.humandignitytrust.org/wp-content/uploads/resources/Breaking-the-Silence-Criminalisation-of-LB-Women-and-its-Impacts-FINAL.pdf

[47] « Violence Through the Lens of Lesbians, Bisexual Women and Trans People in Asia. » OutRight International. 6 mai 2016. https://outrightinternational.org/our-work/human-rights-research/violence-through-lens-lesbians-bisexual-women-and-trans-people-asia

[48] « Southern Africa Regional LBQ* Convening. » The Other Foundation. 16-18 mars 2022. https://theotherfoundation.org/southern-africa-regional-lbq-convening/#:~:text=The%20convening%20is%20meant%20to%20strengthen%20leadership%20development,public%20attitudes%20that%20result%20in%20exclusion%20and%20violence.

[49] Claire Heuchan. « We Need to Talk About Misogyny and the LGBT Community’s Erasure of Black Lesbian History », AfterEllen. 9 juillet 2018.

http://www.afterellen.com/general-news/561237-we-need-to-talk-about-misogyny-and-the-lgbt-communitys-erasure-of-black-lesbian-history#mh3bWJUlD0VaT4KX.99

[50] « Vibrant yet Under-Resourced – The State of Lesbian, Bisexual & Queer Movements. » Mama Cash, Astraea. 2020. Fundlbq.org. Voir plus spécifiquement « History and Current Content ».

[51] Voir par exemple : « How Heteronormative Paradigms Ostracize Queer Populations in Intimate Partner Violence Research. » HuffPost Communities. 9 février 2016. https://www.huffpost.com/entry/how-heteronormative-parad_b_9171030 ; « Naming the violence: speaking out about lesbian battering: Lobel, Kerry. » National Coalition Against Domestic Violence (U.S.). Lesbian Task Force. 1986. https://archive.org/details/namingviolencesp00lobe ; « Lesbian Erasure: A Footnote to Women’s History Month. » Philadelphia Gay News. 10 mars 2021. https://epgn.com/2021/03/10/lesbian-erasure-a-footnote-to-womens-history-month/ ; Everett BG, Kominiarek MA, Mollborn S, Adkins DE, Hughes TL. Sexual Orientation Disparities in Pregnancy and Infant Outcomes. Matern Child Health J., janvier 2019 ; 23(1):72-81. doi: 10.1007/s10995-018-2595-x. PMID: 30019158 ; PMCID: PMC6501574 ; « Poverty and sexuality: what are the connections? », Agence suédoise de coopération au développement international (Sida). Janvier 2010. Disponible à l’adresse : https://www.eldis.org/document/A61881

[52] Max Fisher. « This Map shows how America compares to the rest of the world on gay rights. » The Washington Post. 26 juin 2013. https://www.washingtonpost.com/news/worldviews/wp/2013/06/26/this-map-shows-how-far-america-has-come-on-gay-rights-compared-to-the-rest-of-the-world/

[53] Equality Maps. Movement Advancement Project. https://www.lgbtmap.org/equality-maps

[54] Maps - Sexual orientation laws. International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans and Intersex Association (ILGA). https://ilga.org/maps-sexual-orientation-laws. Consulté le 10 décembre 2022.

[55] Voir la section IV, Droits de propriété

[56] Ezra Kronfeld. « The Intersections of Queerness and Disability. » Out Front Magazine. 16 février 2018. https://www.outfrontmagazine.com/intersections-queerness-disability/

[57] « Human Rights Campaign Fact Sheet: Lesbian, Bisexual, Queer Women Who Have Been Pregnant Are More Likely to Need Abortion Services; Demonstrates Impact Roe Reversal Would Have on LGBTQ+ People », Human Rights Campaign. 2 juin 2022. https://www.hrc.org/press-releases/human-rights-campaign-fact-sheet-lesbian-bisexual-queer-women-who-have-been-pregnant-are-more-likely-to-need-abortion-services-demonstrates-impact-roe-reversal-would-have-on-lgbtq-people

[58] « Intersectionality Resource Guide and Toolkit: An Intersectional Approach to Leave No One Behind. » ONU Femmes. 20 janvier 2022. https://reliefweb.int/report/world/intersectionality-resource-guide-and-toolkit-intersectional-approach-leave-no-one#:~:text=Applying%20an%20intersectional%20lens%20helps%20connect%20human%20rights,fulfil%20the%20pledge%20to%20leave%20no%20one%20behind.

[59] Alan Pelaez Lopez. « 5 Ways the LGBTQIA+ Movement Fails at Intersectionality. » Everyday Feminism. 19 décembre 2016. https://everydayfeminism.com/2016/12/lgbtqia-fails-at-intersectionality/

[60] Juneau Gary, PsyD, et Neal S. Rubin, PhD, ABPP. « Are LGBT rights human rights? Recent developments at the United Nations. » American Psychological Association. Juin 2012. https://www.apa.org/international/pi/2012/06/un-matters

[61] Voir par exemple l’absence de documents sur les droits de propriété des femmes qui incluent explicitement les femmes queers (section IV).

[62] « Is lesbian sex real sex? » Slate. 13 octobre 2013. https://slate.com/human-interest/2013/10/is-lesbian-sex-real-sex.html

[63] Criado Perez, Caroline. Invisible Women: Data Bias in A World Designed for Men. Harry N. Abrams, 2019.

[64] « 2019-2020 Global Resources Report. » Global Philanthropy Project. 8 juin 2022. https://globalresourcesreport.org/wp-content/uploads/2022/06/GRR-2019-2020-Final.pdf

[65] « Vibrant yet Under-Resourced – The State of Lesbian, Bisexual & Queer Movements. » Mama Cash, Astraea. 2020. Fundlbq.org

[66] What you need to know about LGBT rights in 11 maps. Forum économique mondial. 1er mars 2017. https://www.weforum.org/agenda/2017/03/what-you-need-to-know-about-lgbt-rights-in-11-maps/

[67] Rita Nketiah. « Homophobia is a Feminist Issue. » Human Rights Watch. 8 mars 2022. https://www.hrw.org/news/2022/03/08/homophobia-feminist-issue

[68] Pollitt AM, Mernitz SE, Russell ST, Curran MA, Toomey RB. Heteronormativity in the Lives of Lesbian, Gay, Bisexual, and Queer Young People. J Homosex. 23 février 2021 ; 68(3):522-544. doi: 10.1080/00918369.2019.1656032. Epub 22 août 2019. PMID: 31437417 ; PMCID: PMC7035158. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31437417/

[69] Voir section III. Mariage forcé et hétérosexualité obligatoire.

[70] Dean Manning & Chu Kim-Prieto. « Heteronormative Bias in Research. » The SAGE Encyclopedia of Psychology and Gender.

Chapter DOI:https://dx.doi.org/10.4135/9781483384269

[71] « Launching "A Shuttered Public Sphere" Campaign. » Nazra for Feminist Studies. 25 novembre 2019. https://nazra.org/en/2019/11/launching-shuttered-public-sphere-campaign

[72] « Protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre », Nations Unies. 2019. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N19/220/73/pdf/N1922073.pdf?OpenElement

[73] « System Involvement Among LBQ Girls and Women. » Williams Institute, UCLA School of Law. Avril 2022. https://williamsinstitute.law.ucla.edu/publications/system-involved-lbq-girls-women/

[74] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Sonali Patel, fondatrice du Queer South Asian Women’s Network. 26 mai 2022.

[75] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Rosa, lesbienne et défenseuse des droits des travailleurs du sexe auprès de Liquid Ambar, El Salvador, 3 mai 2022.

[76] Pour de plus amples renseignements sur la manière dont la marginalisation économique constitue une violence, voir : « ‘Better to Make Yourself Invisible’: Family Violence against People with Disabilities in Mexico. » Human Rights Watch. 4 juin 2020. https://www.hrw.org/report/2020/06/04/better-make-yourself-invisible/family-violence-against-people-disabilities-mexico ; « Iran: Adopt Draft Law to Protect Women. » Human Rights Watch. 4 décembre 2021. https://www.hrw.org/news/2020/12/04/iran-adopt-draft-law-protect-women ; et « “I Thought Our Life Might Get Better”: Implementing Afghanistan’s Elimination of Violence against Women Law. » Human Rights Watch. 5 août 2018. https://www.hrw.org/report/2021/08/05/i-thought-our-life-might-get-better/implementing-afghanistans-elimination

[77] Voir ci-après une discussion sur l’intersection entre pauvreté et violence envers les lesbiennes au Ghana et au El Salvador.

[78] « Study finds poverty highest among lesbians. » Philadelphia Gay News. 19 mars 2009. https://epgn.com/2009/03/19/2105293-study-finds-poverty-highest-among-lesbians/

[79] « New Patterns of Poverty in the Lesbian, Gay, and Bisexual Community. » Williams Institute, UCLA School of Law. Juin 2013. https://williamsinstitute.law.ucla.edu/publications/lgb-patterns-of-poverty/

[80] A/74/181. Protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

Rapport de l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Transmis à l’Assemblée générale des Nations Unies le 24 octobre 2019. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N19/220/73/pdf/N1922073.pdf?OpenElement

[81] Paying An Unfair Price: The Financial Penalty for LGBT Women in America. Center for American Progress (CAP), Movement Advancement Project (MAP). Mars 2015. paying-an-unfair-price-lgbt-women.pdf (lgbtmap.org)

[82] Disaggregating the Data for Bisexual People. Center for American Progress. 24 septembre 2018. https://www.americanprogress.org/article/disaggregating-data-bisexual-people/

[83] Voir par exemple : « Sex Worker Rights Defenders At Risk. » Front Line Defenders. 12 août 2021. https://www.frontlinedefenders.org/sex-worker-rights-report/fullreport.html?theme=false#anc2_6a

[84] « “No Choice but to Deny Who I Am”: Violence and Discrimination against LGBT People in Ghana. » Human Rights Watch. 8 janvier 2018. https://www.hrw.org/report/2018/01/08/no-choice-deny-who-i-am/violence-and-discrimination-against-lgbt-people-ghana

[85] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Rosa, lesbienne et défenseuse des droits des travailleurs du sexe auprès de Liquid Ambar, El Salvador, 3 mai 2022.

[86] Cela fait référence à des rapports sur l’activisme LBQ+ de manière spécifique, et non à des rapports plus généraux sur l’activisme LGBT ou les droits LGBT.

[87] Tanishtha Bhatia Sen Gupta. « LBQ women and the need for specified activism in Kenya. » Human Rights Consortium, University of London. 14 juin 2018. https://humanrights.blogs.sas.ac.uk/2018/06/14/lbq-women-activism-kenya/

[88] « Between Us: The complexities of Lesbians, Bisexual and Queer Women’s Organizing in Francophone Sub-Saharan Africa. » Qain. Août 2013. https://static1.squarespace.com/static/54191049e4b0677471aa06c9/t/559ab8c8e4b0050728db6a1a/1436203208489/BETWEEN+US-

[89] « Global Feminist LBQ Women's* Conference. » Astraea Lesbian Foundation For Justice. Juillet 2019. https://www.astraeafoundation.org/stories/global-feminist-lbq-womens-conference/

[90] « The State of lesbian organizing and the lived realities of lesbians in the EU and the accession countries. » EuroCentralAsian Lesbian* Community. Novembre 2020. https://europeanlesbianconference.org/wp-content/uploads/2020/11/The-State-of-Lesbian-Organising-1.pdf

[91] « Rights Eroded: A Briefing on the Effects of Closing Space on Women Human Rights Defenders. » Global Philanthropy Project. 16 février 2018. https://globalphilanthropyproject.org/2018/02/16/rights-eroded-a-briefing-on-the-effects-of-closing-space-on-women-human-rights-defenders/

[92] « The State of Intersex Organizing (2nd edition) and The State of Trans Organizing (2nd edition). » Global Philanthropy Project. 31 octobre 2017. https://globalphilanthropyproject.org/2017/10/31/the-state-of-intersex-organizing-2nd-edition-and-the-state-of-trans-organizing-2nd-edition/

[93] « Standing Firm: Women and Trans-Led Organisations Respond to Closing Space for Civil Society. » Global Philanthropy Project. 21 juillet 2017. https://globalphilanthropyproject.org/2017/07/21/standing-firm-women-and-trans-led-organisations-respond-to-closing-space-for-civil-society/

[94] Voir : Rothschild, Cynthia. Written Out: How Sexuality is Used to Attack Women's Organizing (2005). International Gay and Lesbian Human Rights Commission and Center for Women's Global Leadership, 2005. https://www.cwgl.rutgers.edu/docman/violence-against-women-publications/176-written-out-pdf/file ; Weiss, Meredith, Prejudice Before Pride: Rise of an Anticipatory Countermovement (2010). APSA 2010 Annual Meeting Paper, disponible sur : https://ssrn.com/abstract=1642932

[95] L’« idéologie de genre » est un terme fourre-tout qui fait généralement référence aux efforts féministes et « gays » destinés à affaiblir les valeurs « traditionnelles ». Voir : https://www.hrw.org/news/2018/12/10/breaking-buzzword-fighting-gender-ideology-myth

[96] « Rights Eroded: A Briefing on the Effects of Closing Space on Women Human Rights Defenders. » Global Philanthropy Project. 16 février 2018. https://globalphilanthropyproject.org/2018/02/16/rights-eroded-a-briefing-on-the-effects-of-closing-space-on-women-human-rights-defenders/

[97] « Standing Firm: Women and Trans-Led Organisations Respond to Closing Space for Civil Society. » Global Philanthropy Project. 21 juillet 2017. https://globalphilanthropyproject.org/2017/07/21/standing-firm-women-and-trans-led-organisations-respond-to-closing-space-for-civil-society/

[98] Ibid.

[99] « Vibrant yet Under-Resourced – The State of Lesbian, Bisexual & Queer Movements. » Mama Cash, Astraea. 2020. Fundlbq.org

[100] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Joy Chia, Astraea Foundation, 24 mai 2022.

[101] « Vibrant yet Under-Resourced – The State of Lesbian, Bisexual & Queer Movements. » Mama Cash, Astraea. 2020. Fundlbq.org

[102] Ibid.

[103] « Why Are so Many Lesbians Invisible within the LGBT Community? » HuffPost. 8 juin 2017. www.huffpost.com/entry/why-are-so-many-lesbians-invisible-within-the-lgbt_b_5939ded7e4b0b65670e56914 ; « Lesbian Invisibility in Art History | Interview with Ksenia M. Soboleva. » WMN. 2 août 2020. www.wmnzine.com/lesbian-invisibility-ksenia-soboleva/ ; Borah, Rituparna. « Being a Femme Lesbian – “Passing” as Straight vs Invisibility as Queer. » Feminism in India. 25 avril 2017. feminisminindia.com/2017/04/26/femme-lesbian-invisibility-queer/ ; « Older Lesbians Are the Keepers of a Rich History of the Lives of Women Who Love Other Women. » Yahoo News. 14 juin 2022. ca.news.yahoo.com/older-lesbians-keepers-rich-history-150740960.html?guccounter=1 ; Claire Heuchan. « We Need to Talk About Misogyny and the LGBT Community’s Erasure of Black Lesbian History », AfterEllen. 9 juillet 2018.

[104] « Cork project will 'breach the historical invisibility of LBQ relationships and sexual lives'. » Irish Examiner. 15 février 2022. https://www.irishexaminer.com/news/munster/arid-40808721.html ; « Lesbian Invisibility: from AIDS, to Civil Rights, to Marriage Equality. » Maine Archives & Museums event. 29 avril 2021. https://www.mainemuseums.org/eventspublic/10335307

[105] Voir section VI, Violence et discrimination au travail.

[106] Voir section X, Droit à la santé.

[107] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Sonali Patel, fondatrice du Queer South Asian Women’s Network. 26 mai 2022.

[108] Intervention de Haneen Maikey à l’occasion du LGBT History Month et de la Israeli Apartheid Week, organisée par London Palestine Action, No To Pinkwashing, et King’s College London Action Palestine. YouTube. 9 mars 2014. https://londonpalestineaction.tumblr.com/post/79106763011/watch-haneen-maikeys-talk-for-lgbt-history-month

[109] Ibid.

[110] Voir Marigold Seeds Collective post on Instagram, 19 août 2020. https://www.instagram.com/p/CEFkUoAju0A/

[111] Queer South Asian Women's Network. qsawnetwork.com

[112] Ibid.

[113] « “No Choice but to Deny Who I Am”: Violence and Discrimination against LGBT People in Ghana. » Human Rights Watch. 8 janvier 2018. https://www.hrw.org/report/2018/01/08/no-choice-deny-who-i-am/violence-and-discrimination-against-lgbt-people-ghana

[114] Le critère de la diligence due en tant que moyen de mettre un terme à la violence contre les femmes : Rapport de la Rapporteuse spéciale, Yakin Ertürk, sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences.
E/CN.4/2006/61. 20 janvier 2006. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G06/103/51/PDF/G0610351.pdf?OpenElement

[115] Rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, Rashida Manjoo. A/HRC/23/49/Add.3. 4 juin 2003. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G13/143/44/PDF/G1314344.pdf?OpenElement

[116] Voir section V, Violence envers les personnes LBQ+ d’apparence masculine.

[117] Voir section VI, Violence et discrimination au travail.

[118] Voir section VII, Liberté de circulation.

[119] Voir section V, Violence envers les personnes LBQ+ d’apparence masculine, et section XI, Défenseur-e-s des droits humains.

[120] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Nadia, activiste des droits LBQ+. 24 mai 2022.

[121] Entretien vidéo mené par Human Rights Watch avec Lisa Davis. 26 mai 2022.

[122] ILGA World: Lucas Ramon Mendos, Kellyn Botha, Rafael Carrano Lelis, Enrique López de la Peña, Ilia Savelev et Daron Tan, State-Sponsored Homophobia 2020: Global Legislation Overview Update (Genève : ILGA, décembre 2020).

[123] Ibid.

[124] « Research on The Lived Experiences of Lesbian, Bisexual and Queer Women in Kenya. » Coalition of African Lesbians, Gay and Lesbian Coalition of Kenya. Février 2017. https://galck.org/wp-content/uploads/2017/01/Research-on-the-lived-experiences-of-LBQ-women-in-Kenya.pdf

Région/Pays