Résumé
Au cours des quinze dernières années, le Maroc a opéré d'impressionnants progrès en matière de droits humains. Un plus grand respect des droits civils et politiques fondamentaux, notamment de la liberté d'expression et d'association, compte au nombre de ces avancées. Au cours de cette période, en particulier depuis l'accession au trône du Roi Mohammed VI en 1999, des efforts ont été faits pour s'attaquer au problème de l'impunité pour les crimes graves et systématiques commis dans le passé, spécialement les "disparitions" et la torture.
Toutefois, au nom du contre-terrorisme, la protection des droits civils et des libertés fondamentales connaît un recul partout dans le monde et le Maroc n'y fait pas exception. D'importants progrès opérés pendant les quinze années écoulées sont à présent menacés par l'attitude des autorités qui multiplient les rafles et jettent en prison des milliers de Marocains accusés de liens avec le terrorisme. Les témoignages dignes de foi dénonçant des actes de torture et des mauvais traitements à l'encontre de ces suspects, ainsi que la privation manifeste de leurs droits civils lors de la procédure judiciaire, donnent à entendre que les libertés plus nombreuses dont les Marocains ont pu jouir au cours de la dernière décennie et demie pourraient bien leur être retirées. Les enjeux de la répression actuelle sont importants, non seulement pour les personnes soupçonnées d'appartenir à des groupes radicaux ou extrémistes, mais pour tous les Marocains qui ont bénéficié de ces réformes.
Le présent rapport, fruit d'une mission de recherche effectuée au Maroc en janvier et février 2004, analyse tout d'abord les mesures prises par le gouvernement pour combattre le problème de l'impunité pour les crimes perpétrés dans le passé contre les droits humains. Il accorde une attention spéciale au rôle de l'Instance Equité et Réconciliation mise sur pied en janvier 2004 et aux limites structurelles et politiques dans lesquelles elle opère. Il examine ensuite les violations fondamentales du droit à une procédure équitable dont sont victimes les détenus qui ont été arrêtés lors de la répression menée par les autorités contre les personnes soupçonnées d'activisme islamiste. Ces arrestations ont débuté après les attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington et se sont intensifiées considérablement au cours des semaines et des mois qui ont suivi le 16 mai 2003, date à laquelle douze kamikazes avaient causé la mort de trente-trois personnes, en plus d'eux-mêmes, et blessé 100 autres personnes lors d'attentats coordonnés menés à Casablanca, la plus grande ville du pays.
Human Rights Watch condamne sans réserve les attentats de mai 2003. Les attaques aveugles contre des civils sont l'antithèse des valeurs que sont les droits humains et le gouvernement marocain, à l'instar de tous les gouvernements, a le droit et le devoir de prévenir de tels crimes et de traduire en justice ceux qui les commettent.
Les mesures antiterroristes mises en œuvre doivent toutefois respecter les obligations qui incombent au Maroc aux termes du droit international des droits humains. Les personnes soupçonnées de comploter ou de perpétrer des actes de violence doivent pouvoir jouir de leurs droits fondamentaux en tous temps. Un gouvernement peut, en cas d'extrême urgence pour le pays, suspendre certains droits ou y déroger pendant une période limitée et strictement en fonction des exigences posées par la situation mais il ne peut en aucune circonstance déroger à son obligation d'interdire la torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants. La détention ne peut être arbitraire et doit être soumise à un examen judiciaire. Par ailleurs, les normes les plus fondamentales en matière de procès équitable doivent être respectées.
Comme le montre ce rapport, les forces de sécurité marocaines et l'appareil judiciaire du pays n'ont pas respecté les droits des personnes arrêtées lors de la répression menée contre les activistes présumés suite aux attentats du 16 mai 2003. La police a effectué des arrestations et des perquisitions massives sans permis, la plupart du temps dans des quartiers pauvres soupçonnés d'être des bastions islamistes. Selon les organisations de défense des droits humains, au moins 2.000 personnes ont été appréhendées au cours des mois qui ont suivi les attentats. Beaucoup ont dit qu'elles avaient ensuite été transférées au centre de détention de Temara situé en dehors de Rabat et administré par la principale agence de services secrets nationaux, la Direction Générale de la Surveillance du Territoire (DGST), mieux connue sous son ancien nom, Direction de la Surveillance du Territoire (DST). Bien que les autorités marocaines nient l'existence d'un centre de détention dirigé par la DGST, les témoignages que nous avons recueillis confirment les récits antérieurs d'islamistes présumés qui disaient avoir été interrogés par la DST dans ce centre. Ces déclarations ont été publiées par les journaux marocains et par d'autres organisations de défense des droits humains marocaines et internationales.
Dans les cas que nous avons examinés, la police a maintenu en garde à vue des activistes islamistes présumés au delà de la période autorisée par la loi avant de les faire comparaître devant un juge. Elle a ensuite falsifié la date d'arrestation des détenus de façon à faire croire que la durée de la garde à vue respectait le délai fixé par la loi.
De nombreux détenus ont déclaré avoir été soumis à des actes de torture mentale et physique lors de leur interrogatoire afin de leur arracher des aveux ou les forcer à signer une déposition qu'ils n'avaient pas faite. Lors de la garde à vue, ils n'ont pas eu accès à un avocat et la police n'a pas révélé à leurs proches l'endroit où ils se trouvaient. Dans certains cas, les avocats n'ont pas bénéficié de suffisamment de temps pour étudier les dossiers et préparer la défense de leurs clients. Bon nombre de suspects ont été reconnus coupables et condamnés avant le 1er octobre 2003, date de l'entrée en vigueur d'un amendement au Code de procédure pénale octroyant aux défendeurs le droit de faire appel de leur condamnation pour les faits reprochés.
Après que la police ait obtenu les aveux compromettants des détenus, ceux-ci se sont retrouvés devant la justice de façon expéditive et ont ainsi été privés de presque tous les moyens d'exercer leur droit à organiser leur défense lors de l'instruction et du procès proprement dit. Les défendeurs n'ont pas été informés de leur droit à un examen médical, ou s'ils l'ont été, ils n'ont pas été en mesure de l'exercer réellement; ils n'ont pas bénéficié des conseils d'un avocat tout au long de la procédure judiciaire; et les juges ont accepté comme preuves des déclarations émanant de tiers absents lors du procès et des aveux attribués aux accusés alors qu'ils étaient maintenus au secret pendant des périodes prolongées. Les juges ont en outre rejeté les demandes introduites par la défense pour entendre des témoins qui auraient pu disculper les accusés.
Les autorités marocaines ont répondu de façon constructive aux critiques émises en 2004 en matière de respect des droits humains. Elles ont déclaré avoir l'intention de présenter un projet de loi criminalisant la torture et de retirer les réserves qu'elles avaient exprimées lors de la ratification de plusieurs traités internationaux relatifs aux droits humains.
Elles ont promis de mener des enquêtes lorsque les organisations internationales ou nationales des droits humains présenteront des preuves d'actes de torture.
Autre évolution positive: l'Instance Equité et Réconciliation créée par l'Etat a commencé à recueillir des informations sur les graves atteintes aux droits humains perpétrées au cours des dernières décennies, notamment sur les centaines de cas non encore élucidés de disparitions forcées. Elle a le pouvoir de dédommager les victimes et leurs survivants, de recommander des moyens pour les réhabiliter et les aider, ainsi que de préserver la mémoire à propos des injustices que les victimes ont subies.
Cette commission constitue un net progrès par rapport aux initiatives précédentes prises par le Maroc pour combattre les violations passées des droits humains et elle surpasse toutes les autres institutions étatiques établies jusqu'à présent à cet effet dans d'autres pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord. Toutefois, pour pouvoir remplir pleinement sa mission qui est de fixer le niveau et les formes de réparations pour les exactions passées et de présenter un rapport fidèle sur la répression menée par l'Etat dans le passé, la commission devra relever les défis posés par plusieurs facteurs. D'abord et surtout, son mandat l'empêche de désigner les auteurs des violations individuellement et semble se focaliser sur certaines catégories d'exactions au détriment d'autres graves abus. Ensuite, la commission ne dispose d'aucun moyen de forcer les témoignages ou la production d'informations, ce qui soulève la question de savoir si les fonctionnaires ou anciens fonctionnaires coopéreront avec les enquêtes qu'elle mènera.
Human Rights Watch se réjouit des déclarations émanant des autorités marocaines à propos de leur engagement à se conformer aux obligations qui leur incombent en matière de droits humains, de leur reconnaissance des graves exactions commises dans le passé et des réformes juridiques qui ont été adoptées ou sont actuellement en instance. En dépit des mesures positives qui ont été prises, le Maroc doit en faire beaucoup plus pour endiguer la détérioration de la situation des droits humains qui se reflète dans le traitement réservé aux personnes soupçonnées d'implication dans des crimes terroristes. Vu le type de violations résultant de la répression menée à l'encontre des extrémistes islamistes présumés et de l'application de la loi antiterroriste de 2003, les autorités marocaines devraient prendre des mesures immédiates pour que toutes les pratiques et lois soient conformes au Pacte International relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Mais plus que toute autre chose, les représentants de la loi doivent être amenés à répondre de leurs actes lorsqu'ils violent les lois régissant la détention et le traitement des suspects. A cette fin, les tribunaux doivent remplir leur rôle de rempart contre les abus de la police et du ministère public en examinant les faits qui leur sont présentés et en rejetant les preuves obtenues sous la torture, la contrainte exagérée ou autres violations procédurales.
La communauté internationale a un rôle important à jouer car elle peut inciter les autorités marocaines à respecter les obligations qui leur incombent aux termes du droit international des droits humains en ce qui concerne le traitement des personnes soupçonnées de crimes terroristes. En premier lieu, le Maroc, comme les autres pays, est appelé à remettre des rapports périodiques au Comité contre le terrorisme (CCT) du Conseil de Sécurité des Nations Unies, en vertu de la Résolution 1373 dudit conseil (2001), concernant les mesures prises pour combattre et prévenir le terrorisme. Lors de son examen des rapports périodiques des Etats parties, le CCT devrait demander à l'Etat concerné de prendre des dispositions pour veiller à ce que les mesures antiterroristes proposées ou adoptées soient conformes aux obligations du pays en matière de droits humains. En deuxième lieu, le Maroc est l'un des pays vers lequel les Etats-Unis auraient extradé ou refoulé des terroristes présumés. Les Etats-Unis ou tout autre Etat appuyant ou facilitant ce type de transferts ont l'obligation de s'assurer que ces derniers ne violent pas l'interdiction absolue de la Convention contre la torture d'extrader ou de refouler une personne vers un Etat pour y être détenue ou interrogée lorsqu'il y a "des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture."
Recommandations
Au Gouvernement marocain
Pour s'attaquer aux violations des garanties internationales de procédure équitable
·Amender le Code de procédure pénale de façon à y inclure toutes les garanties de procédure équitable reconnues au niveau international; adopter une loi visant à raccourcir la durée maximale de la garde à vue prévue à douze jours aux termes de la loi antiterroriste de 2003. La loi devrait se conformer à la résolution du Comité des Droits de l'Homme de l'ONU selon laquelle un suspect doit être déféré devant un juge ou un autre magistrat autorisé afin que le pouvoir judiciaire soit exercé dans un délai de "quelques jours". Elle devrait accorder aux détenus le droit de bénéficier de la présence d'un avocat lors de leur premier interrogatoire de police et veiller à ce que la police les informe de ce droit et de leur droit à garder le silence; ceux qui ne peuvent se payer un avocat devraient bénéficier des services d'un avocat nommé par la cour. Faire respecter le délai légal de garde à vue; et faire en sorte que les juges mènent une enquête lorsque tout semble indiquer que la police a inscrit une fausse date d'arrestation dans son registre.
·Amender le Code de procédure pénale de façon à ce que les juges d'instruction et les juges d'instance soient obligés d'accorder aux défendeurs davantage de possibilités de citer à comparaître des témoins qui pourraient les innocenter et de faire subir un contre-interrogatoire aux témoins à charge.
·Permettre à tous les défendeurs reconnus coupables en vertu du Code de procédure pénale antérieur à octobre 2003, à une époque où les accusés n'avaient pas le droit de faire appel de leur condamnation pour les faits reprochés, d'exercer ce droit d'appel.
Pour mettre fin à la torture et autres formes de mauvais traitements
·Conformément à la recommandation du Comité des Nations Unies contre la torture, adopter une loi qui "prévoie une définition de la torture strictement conforme aux dispositions des articles 1 et 4 de la Convention."
·Veiller à ce que toutes les allégations de torture et de mauvais traitements, notamment le recours à la force, les menaces et les intimidations, fassent sans délai l'objet d'une enquête indépendante, et si des preuves recevables sont rassemblées contre des représentants de la loi, les traduire en justice.
·Veiller à ce que les détenus soient immédiatement informés de leur droit à un examen médical et qu'ils puissent exercer ce droit effectivement et sans délai.
·Faire appliquer l'Article 293 du Code de procédure pénale amendé, qui garantit l'inadmissibilité des aveux arrachés "par la violence ou sous la contrainte", et mettre en œuvre la recommandation du Comité des Nations Unies contre la torture d'"intégrer une disposition interdisant que toute déclaration obtenue sous la torture soit invoquée comme élément de preuve dans une procédure."
·Retirer toutes les réserves que le Maroc a émises lors de la ratification de la Convention contre la torture et faire les déclarations nécessaires prévues aux Articles 21 et 22 de ladite Convention afin de reconnaître la compétence du Comité contre la torture (CAT) pour procéder à des enquêtes confidentielles et examiner les plaintes individuelles.
Pour prévenir les détentions secrètes:
·Emprisonner tous les détenus dans des lieux de détention officiellement reconnus et mettre fin à toutes les détentions secrètes, même si elles ont lieu dans les installations d'un centre de détention officiellement reconnu; amender l'Article 67 du Code de procédure pénale de façon à garantir que les autorités transmettent sans délai à la famille des informations précises concernant le lieu où se trouve le détenu et sa situation légale et qu'elles lui permettent d'avoir rapidement accès au détenu.
·Veiller à ce que les détenus ne soient placés en détention préventive que sur base d'un mandat d'arrêt délivré par un juge (sauf s'ils sont réellement arrêtés en flagrant délit).
·Permettre aux organisations non gouvernementales nationales et internationales de défense des droits humains d'avoir accès immédiatement et librement au centre de détention de Temara.
Pour améliorer l'efficacité de l'Instance Equité et Réconciliation
·Déclarer que les agents de l'Etat qui entravent le travail de la Commission ou refusent de coopérer avec elle feront l'objet de sanctions.
·Déclarer que bien que le mandat de la commission l'empêche d'identifier les auteurs d'exactions individuellement, elle devrait remettre au pouvoir judiciaire marocain les éléments d'enquête qui aideront les tribunaux à remplir leur devoir et à traduire en justice les auteurs de graves violations.
·Déclarer qu'aucune amnistie ou prescription ne sera appliquée pour les personnes impliquées dans des actes de "disparition" ou autres atteintes abjectes aux droits humains; et que toute affaire de disparition forcée que la commission n'aura pas totalement élucidée au terme de sa mission continuera à faire l'objet d'une enquête aussi longtemps que le sort de la victime n'aura pas été clarifié.
A l'Instance Equité et Réconciliation
·Révéler publiquement le degré de coopération reçue de la part des agents de l'Etat actuels et passés lors de ses enquêtes. Cette coopération sera mesurée sur base des témoignages oraux, documents, notamment les rapports médicolégaux et les comptes rendus des tribunaux, et autres preuves qu'elle recevra. La commission devrait également révéler l'impact que le manque de coopération a sur le rapport circonstancié et fidèle qu'elle doit fournir à propos de la période concernée.
·Réaffirmer publiquement le besoin d'établir les responsabilités dans les graves exactions qui ont été commises, même si la commission elle-même ne peut désigner les auteurs individuellement.
·Demander que toute "disparition" non élucidée totalement par la commission continue à faire l'objet d'une enquête jusqu'à ce que le sort de la personne disparue soit pleinement clarifié, et qu'aucune amnistie ou prescription ne soit appliquée aux personnes impliquées dans des "disparitions" ou autres atteintes atroces aux droits humains.
·Veiller à ce que la commission ou un autre organe de l'Etat accorde la même attention à toutes les formes de violations graves des droits humains – et pas seulement aux détentions arbitraires et aux disparitions forcées – pour déterminer les indemnisations, l'assistance et toute autre mesure que la commission prendra en faveur des victimes.
·Etant donné la nature contestée des événements au Sahara occidental, les conditions de sécurité renforcées dans cette région et le grand nombre de cas qui s'y produisent, faire en sorte que lors de ses travaux, la commission accorde la même attention aux victimes ouest-sahariennes de violations des droits humains et à la population du Sahara occidental en général.
·Utiliser pleinement le mandat de la commission pour proposer des sauvegardes visant à empêcher que les abus du passé ne se reproduisent et souligner que des exactions graves, et en quelque sorte similaires, ont lieu aujourd'hui; recommander des mesures concrètes pour mettre fin aux fréquentes violations des droits des suspects retenus en garde à vue par la police et à l'aval donné dans ces cas de violations par un pouvoir judiciaire qui n'exerce pas l'indépendance qui lui est garantie par la constitution.
Aux Nations Unies
Au Rapporteur Spécial sur la Torture
·Solliciter une invitation pour se rendre au Maroc afin d'y effectuer une enquête sur les témoignages et accusations de torture et autres mauvais traitements sur les détenus.
Au Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire
·Solliciter une invitation pour se rendre au Maroc afin d'y effectuer une enquête sur les témoignages et accusations de détention illégale et arbitraire de détenus marocains.
Au Comité Contre la Torture du Conseil de Sécurité des Nations Unies (CAT)
·Demander que dans son prochain rapport au CAT, le Maroc inclue des informations sur les mesures antiterroristes prises suite aux attentats de mai 2003 à Casablanca.
·Sur base de l'examen des nouveaux rapports et des rapports antérieurs présentés par le Maroc, identifier les points qui suscitent des inquiétudes, en particulier par rapport au respect par Rabat de la disposition de la résolution 1456 du Conseil de Sécurité qui exige que les mesures antiterroristes adoptées par les Etats soient en conformité avec le droit international humanitaire et des droits humains. Demander de plus amples informations en fonction des exigences posées par la situation.
·Etablir un plan à long terme avec le Maroc pour mettre en place des mécanismes permettant de combattre le terrorisme tout en protégeant les droits humains.
Au gouvernement américain
·Dans toutes les communications de toutes les agences gouvernementales américaines au gouvernement marocain, faire clairement et immanquablement passer le message que le respect des droits humains doit faire partie intégrante de toute politique en matière de sécurité, notamment lors des opérations antiterroristes.
·Prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que l'aide antiterroriste apportée par les Etats-Unis au Maroc n'est pas utilisée pour violer les droits humains.
·Lors de toutes les rencontres officielles, soulever avec le gouvernement marocain le problème du traitement des suspects arrêtés dans le cadre de la campagne antiterroriste et s'assurer que toute coopération en matière de politique de sécurité et de lutte antiterroriste soit en conformité avec les normes internationales relatives aux droits humains.
·Aider le gouvernement marocain à réformer le système judiciaire et à organiser des programmes de formation pour policiers, procureurs et juges mettant l'accent sur la protection du droit de tous les détenus à une procédure équitable. Cette assistance devrait être subordonnée à la volonté politique dont feront preuve les autorités marocaines pour exécuter les réformes et faire de l'indépendance de la justice une réalité.
·Ne pas extrader ou refouler vers le Maroc des personnes soupçonnées d'infractions liées à la sécurité ou au terrorisme avant que le gouvernement n'ait apporté des garanties vérifiables que ces personnes ne seront pas soumises à la torture ou à des mauvais traitements en détention et pendant les interrogatoires; prendre des mesures pour vérifier que les suspects déjà remis entre les mains du Maroc n'ont pas été soumis à la torture ou à des mauvais traitements.
A l'Union européenne et à ses Etats membres
·Dans toutes les communications de toutes les agences de l'Union européenne et de ses Etats membres au gouvernement marocain, faire clairement et immanquablement passer le message que le respect des droits humains doit faire partie intégrante de toute politique en matière de sécurité, notamment lors des opérations antiterroristes.
·Lors de toutes les rencontres officielles, soulever avec le gouvernement marocain le problème du traitement des suspects arrêtés dans le cadre de la campagne antiterroriste et s'assurer que toute coopération en matière de politique de sécurité et de lutte antiterroriste soit en conformité avec les normes internationales relatives aux droits humains.
·Aider le gouvernement marocain à réformer le système judiciaire et à organiser des programmes de formation pour policiers, procureurs et juges mettant l'accent sur la protection du droit de tous les détenus à une procédure équitable. Cette assistance devrait être subordonnée à la volonté politique dont feront preuve les autorités marocaines pour exécuter les réformes et faire de l'indépendance de la justice une réalité.
·Ne pas extrader ou refouler vers le Maroc des personnes soupçonnées d'infractions liées à la sécurité ou au terrorisme avant que le gouvernement n'ait apporté des garanties vérifiables que ces personnes ne seront pas soumises à la torture ou à des mauvais traitements en détention et pendant les interrogatoires; prendre des mesures pour vérifier que les suspects déjà remis entre les mains du Maroc n'ont pas été soumis à la torture ou à des mauvais traitements.
A la Ligue Arabe
·Appeler le gouvernement marocain à respecter et observer pleinement les principes et obligations stipulées aux termes des Articles 7, 8 et 13(a) de la Charte arabe des droits de l'homme (1994), lesquels énoncent le droit à la présomption d'innocence, le droit à ne pas être arrêté et détenu arbitrairement et l'interdiction de la torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Appendix I: Human Rights Watch Letter to Moroccan Ministry of Justice
His Excellency Mr.Mohamed Bouzoubaâ
Minster of Justice
Ministry of Justice
Rabat
Morocco
VIA FACSIMILE: 011- 212-37-773-0772
Your Excellency,
As you may know, Human Rights Watch conducted a research mission to Morocco from January 27 to February 13, 2004. One objective of our visit was to gather information about arrests and trials of terrorism suspects following the Casablanca bombings of May 16, 2003.
As the first anniversary of those terrible events approaches, we wish to express our solidarity with the victims, their families, and all Moroccans who expressed their revulsion at those crimes. The perpetrators of all such acts must be brought to justice.
At the same time, the mass arrests that followed the attacks gave rise to concerns about ill-treatment and unfair trials, and about Morocco's compliance with its international human rights commitments in these areas.
We regret that we did not have the opportunity to meet with you or any other official from the Justice Ministry during our visit, despite our formal request for such a meeting. We did, however, have the pleasure of being received by Human Rights Minister Mohamed Aujjar on February 5, 2004.
Our purpose in writing to you today is to share our preliminary findings and invite your comments. We will ensure that our final report reflects pertinent official information, as long as it is received by June 7, 2004. You are welcome to respond in English, French, or Arabic.
- Our initial findings point to a pattern of human rights violations committed during the pre-trial and trial phase against suspects accused of being linked to terrorist acts. In several cases that we studied, there were allegations of physical torture and ill-treatment as well as threats of violence. To the best of our knowledge, these allegations were not investigated by the prosecutor's office and were not seriously addressed by the trial courts.
- In some cases the detainees did not have access to a lawyer during the pre-trial proceedings and complained that they were forced to sign forced confessions while blindfolded and unable to read. In several cases, detainees alleged that their statements were falsified. Lawyers described to us how the actual date of arrest was falsified by the police in order to cover up garde à vue detentions that lasted long beyond the period allowed by law.
- We have also documented cases in which detainees were blindfolded during their entire interrogation as well as during their first encounter with the public prosecutor representative, and thus answered questions without understanding that they had passed into a new phase of the judicial process.
- In some cases detainees said they were transferred to the interrogation and security compound in Temara where they were subject to abusive methods of investigation. The existence and the use of an unacknowledged place of detention would be a violation of both Moroccan and international law.
- In some cases, we found that lawyers were not allowed to call defense witnesses or to cross-examine witnesses and testimonies that were used by the prosecution and the investigative judge to charge defendants.
The following are summaries of few cases that highlight the above mentioned violations of basic human rights:
- Abdelghani Ben Taous, 45 years old and disabled, who was convicted and sentenced to twenty years in prison for terror charges, cites numerous instances of torture and sexual abuse during his detention. He alleged that while he was in Direction de la Surveillance du Territoire (DST) custody during the month of June 2003 in the Temara secret detention center, security forces beat him with a stick and tortured him with electric shocks. The physical abuse he described also included being suspended from the floor, choked and slapped on the face. Ben Taous stated that he was deprived of sleep and that lights were left on in his cell both day and night. (Court File Number: 22-2003-622, Rabat Criminal Appellate Court)
Ben Taous' lawyer also alleged that he has been a victim of sexual abuses and sodomy by several security officials during the same period. Security forces stripped him, and one of his torturers twice inserted his fingers in Ben Taous' anus and threatened to rape him.
Ben Taous' lawyer told HRW that his client was deprived of counsel for a significant period of time and forced to sign a confession. His lawyer, who was hired by family members, could not see him for 18 days. On July 23, 2003, DST took Ben Taous from pre-trial detention in Salé prison to the DST interrogation compound at Temara after he refused to sign a retroactive agreement consenting to a search of his house that had already taken place. During his second detention at Temara, he was again subject to torture. His lawyer was able to see him on July 31, 2003, only after the head of the Rabat Bar intervened.
At the trial, Ben Taous' lawyer raised complaints of torture and forced confession. His lawyer also noted that the date of his arrest was forged and changed to June 23, 2003. However, the trial judge ordered no investigation, and the court record does not accurately and adequately reflect these complaints.
- Danbat Moustafa, 33 years old and from Casablanca (prisoner number 26385 in Kenitra prison, where he is now serving a life sentence), turned himself in to the police on June 16, 2003. He alleged that he was sent to the secret security compound of Temara and held there for five days, where interrogators stripped him and inserted a bottle into his anus and threatened to rape him. According to his wife, Khadija, marks of torture and abuse were still apparent when her husband first appeared in Court, limping and unable to sit normally. The judicial panel refused the lawyer's request to investigate these allegations of torture and to allow a medical expert to examine his client.
·Ahmad Chikou, who was arrested on June 6, 2003 in Casablanca, said that during his interrogation he was blindfolded and that he was forced to sign a false statement that he had never read before. His interrogators threatened to rape his wife. The police recorded his date of his arrest as July 20, 2003, rather than the true date of June 6, in order to cover up the illegally long garde à vue detention. (Court File Number: 22-03-687, Rabat Criminal Appellate Court).
·Abderrezaq Ertaoui, who was arrested on May 18, 2003 and sentenced on August 18, 2003 to 30 years by the Casablanca Criminal Appellate Court (and currently held in Kenitra prison), alleged that while in police custody, he was blindfolded and pressured to sign his statement. He also claimed that he was stripped, tortured by electroshocks, and deprived of sleep. (Court File Number: 26406/03, Casablanca Criminal Appellate Court).
·Aziz Chafai, who was arrested in his house in Casablanca on May 18, 2003, had no access to a lawyer during his pre-trial proceedings. The first time he saw a lawyer was after the investigative judge concluded his investigation report. Aziz' lawyer, Maitre al-Ftouhi Abd al-Haq, said that his client was held in incommunicado detention with no access to a lawyer until he was brought before a trial panel. The trial panel refused to call witnesses and accepted all the findings that were made by the investigative judge. The lawyer also complained that he could not freely meet and talk to Aziz due to the common practice of close surveillance of lawyer-defendant meetings. Aziz told his lawyer that he knew he was brought before an investigative judge only by reading the sign that was on the judge's table and that he was not told about his right to have an attorney at this stage of the investigation. (Court File Number: 840/2003, Casablanca Appellate Criminal Court).
·Yazghi Abdelhamid, a 46 year-old accountant from Casablanca, was arrested on June 11, 2003, but the recorded date of his arrest was June 27, 2003. He told his family that he spent 17 days in Ma'arif detention in Casablanca and 5 days in the Temara compound, where he was tortured and ill-treated, and blindfolded when he was interrogated.
·Mohammad Shadeli and Nuredin Elgerbaui were arrested by the DST on July 17, 2002 in their homes in Casablanca, and were sentenced to twenty years on July 11, 2003. According to their lawyer, they were held for ten days in Temara, where they were beaten by sticks, tortured by electric shocks, endured verbal humiliation and were forced to take off their clothes. (Court File Number: 2003/5/744, Casablanca Criminal Appellate Court).
·Mohammad Hassan Kittani was tried for inciting violence and for being one of the spiritual leaders who motivated and encouraged the suicide bombing on May 16, 2003. Kittani's defense lawyers asked the trial panel to call the twenty five persons who were also accused of terror charges in separate files and whose testimonies the prosecution and the investigative judge used as the only source of evidence to support the charges against Kittani. The trial panel decided to postpone its decision on calling the prosecutor's witnesses and instead ordered testimony from Kittani first. After hearing Kittani's denial of all accusations against him and of any link to the twenty five persons who allegedly mentioned his name in their statements, the judicial panel once again refused to call these men as witnesses and asked the prosecution and the defense to argue on the substance of the charges. Subsequently, Kittani's defense lawyers decided to withdraw from the case, explaining that they could not properly defend their client without being able to call and cross-examine the prosecution's or defendant's own witnesses. Over Kittani's objections, the Court appointed a state lawyer to defend him, and gave the lawyer only a few hours to prepare. On September 25, 2003, Kittani was convicted and sentenced to 20 years. The Court explained in its verdict that based on article 288 of the Criminal Procedure Code, it had the power to establish its conviction, inter alia, based on statements from other defendants that were taken by the judicial police in separate but related criminal proceedings, without the need to call those defendants and to hear their testimonies in Court. (Court File Number: 2003-5-907, Casablanca Criminal Appellate Court)
Our preliminary findings also include cases of Moroccans living abroad who were sent back to Morocco and upon their arrival were held without due process and with no judicial oversight for several months. For example, Azeddine Sadraoui, Noureddine Lemor and Nabil Hamrad, three Moroccans citizens who were deported from Italy to Morocco on November 19, 2003, were secretly and illegally held incommunicado for two months, without charge and with no legal or judicial process. During their detention, they had no access to a lawyer. Neither their lawyer nor their families could obtain information about their location and their legal status. Even after their release from detention, they continue to be subject to strict surveillance by the security services.
We would appreciate your comments on any or all of the above-mentioned preliminary findings and cases. We also appreciate receiving more information on the following questions:
- What is the number of detainees who were arrested by the judicial police or any other security body since May 16, 2003, in connection with terrorism charges? What is the number of the detainees who have faced terrorism charges and have been brought to trial since May 16, 2003?
- What measures, including investigations and disciplinary measures, have been taken since May 16, 2003 to deter and punish physical abuse committed by members of security forces against persons in custody?
I thank you for your cooperation and welcome any questions or comments you may have. I look forward to your thoughtful and timely reply.
Sincerely,
Sarah Leah Whitson
Executive Director, Middle East & North Africa Division
CC: The Honorable Aziz Mekouar, Moroccan Ambassador to the United States
Appendix II: Response of the Ministry of Justice of the Kingdom of Morocco as provided by the Embassy of Morocco in Washington, DC
Concernant la lettre de Madame la Directrice exécutive
De la Division du Moyen-Orient et de l'Afrique
Du Nord au sein de l'Organisation «Human Rights Watch »
Le Maroc a, dans sa Constitution, adopté les principes des droits de l'homme tels qu'ils sont reconnus mondialement. Cet engagement implique, de sa part, l'observation et le respect de ces principes que ce soit au niveau législatif, juridique ou que ce soit au sein des organisations étatiques a travers l'exercice de leurs fonctions relatives à la protection des libertés individuelles et à la défense de la société des crimes de manière à garantir la stabilité et la sérénité à l'ensemble des citoyens.
De ce fait, le ministère de la justice œuvre sérieusement à la consécration de ces principes nobles à travers l'élaboration des règles de la politique pénale. Il a ainsi veillé à développer la communication et la coopération avec les organismes nationaux et internationaux actifs dans le domaine des droits de l'homme, en répondant a leurs interrogations périodiques, en échangeant les informations et en leur adressant les renseignements concernant les demandes d'explication sur des cas de violation de la loi, d'abus d'autorité ou d'injustice qui touchent les droits des individus et des groupes.
Et en ce qui concerne votre rapport, il s'est avéré que les observations qui y figurent sont fondées sur les allégations d'un groupe de personnes qui ont prétendu avoir été victimes d'actes de torture, d'agressions sexuelles, d'incarcération dans un centre de détention secret dépendant du service du contrôle du territoire national. Ils prétendent aussi avoir subi les exactions suivantes: Interdiction de se faire répresenter par leur avocat, recueillir leurs dépositions alors qu'ils ont les yeux bandés, signer leurs dépositions sous la menace, le non respect de la durée de leur mise en garde à vue, ainsi que le refus du tribunal de faire comparaître les témoins ou de procéder à une expertise médicale sur certains d'entre eux malgré les marques de torture évidentes. En outre, ils dénoncent également que la majorité d'entre eux n'ont pas été avisés par le juge d'instruction de leur droit à désigner un avocat. Les personnes dont il s'agit sont : Abdelghni Ben Taous, Denbat Mostafa, Ahmed Chiko, Abderrazak Zitouni, Aziz Chafii, Abdlhamid EI Yazghi, Mohamed Chadli, Noureddine El Gharbaoui.
1. La torture physique et morale des inculpés et le traitement inhumain dont ils ont été victimes:
Concernant cette question, il est important de souligner que le code de procédure pénale a investi le ministère public du pouvoir de contrôler les actions de la police judiciaire et de suivre les procédures de détention et de mise en garde à vue, il a également stipulé que les conditions dans lesquelles sont exécutées les arrestations des inculpés, l'enquête les concernant ainsi que les perquisitions soient enregistrées dans les moindres détails.
Ainsi donc, si le Procureur Général du Roi ou le Procureur du Roi observe des marques de violence ou de torture sur l'inculpé au moment de sa comparution devant lui, ou si l'inculpé fait une requête concernant ces actes de torture, le procureur le défère auprès d'un expert médical pour examen et ordonne l'ouverture d'une enquête à ce sujet.
Et dans le but de promouvoir ces dispositions juridiques, le ministère de la justice à envoyé plusieurs lettres périodiques aux responsables judiciaires, il a également tenu plusieurs réunions avec eux pour les sensibiliser sur la nécessité de consacrer les principes des droits de l'homme, de lutter activement contre toutes les formes de violence et de torture quelle que soit la partie mise en cause et de prendre les dispositions juridiques nécessaires dans le cas où ces exactions ont lieu.
II est à signaler que lors de la révision de la majorité des procès-verbaux des interrogatoires du ministère public ou des juges d'instruction, il s'est averé qu'il n'y avait aucune demande, dans le rapport de la police judiciaire, de la part des inculpés précités pour procéder à un examen médical lorsqu'ils étalent en garde à vue. Les organes judiciaires susvisés n'ont pas aussi ordonné d'examen médical faute de motifs. En outre, les personnes concernées n'ont pas signalé ces violations lors de leur première comparution devant le parquet ou devant le juge d'instruction pour que l'organe judiciaire concerné ordonne de procéder à leur examen médical même s'ils sont presque toujours accompagnés de leurs avocats.
2- Violation du droit de se faire représenter par un avocet devant le ministère public et devant le juge d'instruction :
Et en ce qui concerne le non respect du droit de l'inculpé dans la désignation de son avocat, le code de procédure pénale confère au représentant du ministère public en cas de flagrant délit d'aviser l'inculpé qu'il a le droit de désigner un avocat sur le champ, de l'interroger sur son identité et de l'informer sur les faits qui lui sont imputés. Le juge d'instruction s'assure également de l'identité de l'inculpé lorsque celui-ci se présente devant lui pour la première fois, il l'informe sur les faits qui lui sont reprochés et de son droit à avoir un avocat. Si l'inculpé n'utilise pas son droit de choisir son défenseur, le juge d'instruction, sur la demande de celui-ci, lui désigne un avocat et le signale dans le procès-verbal.
Et en révisant les dossiers des personnes qui ont prétendu avoir subi cette injustice, il s'est avéré que ni eux ni leurs avocats n'en ont fait mention auprès du ministère public ou devant le juge d'instruction.
3- L'usage de la violence pour soutirer les aveux et la signature des procès-verbaux sous la menace:
En ce qui concerne les allégations sur l'usage de la violence pour soutirer les aveux des inculpés et sur la signature des procès-verbaux sous la menace, elles sont infondées et ne reposent sur aucune preuve puisqu'i1 n'y a aucune plainte des inculpés ou de leurs avocats déposee a ce sujet devant le parquet ou lors des étapes du procès. Ceci en sachant que le code de procédure pénale stipule clairement que tout aveu ne peut être soutiré par la violence ou sous la menace à peine de nullité. En outre, il met la confession ainsi que toute autre preuve sous l'autorité arbitraire du magistrat.
4- La garde à vue illégale :
II est à signaler que le code de procédure pénale oblige la police judiciaire d' aviser le ministère public et la famille de la personne mise en garde à vue à l'instant même ou elle procède à son arrestation afin de pouvoir contrôler le respect de la procédure. Et lorsque la police judiciaire présente une demande de prorogation de la garde à vue, la loi impose de faire comparaître la personne concernée devant le Procureur General du Roi ou devant le Procureur du Roi afin d'examiner l'état du détenu et l'écouter dans le but d'estimer la pertinence des causes invoquées dans la demande de prorogation avant de prendre une décision. La police judiciaire est, également, tenue de consigner dans ses registres qui sont contrôlés par le ministère public l'heure la date de la mise en garde à vue et la date de la comparution de l'inculpé devant le ministère public.
Et en révisant les procès-verbaux de la police judiciaire, il s'est averé que les dispositions juridiques régissant la mise en garde à vue ont été respectées. Toutefois, les inculpés ou leurs avocats ne dénoncent, en général, ces exactions devant le ministère public ou devant la commission d'instruction qu'au milleu du procès et non pas au début pour s'assurer de la véracité de ces allégations qui sont, dans la plupart du temps, infondées et utilisées par les accusés et leurs avocats comme moyen de défense.
Et en ce qui concerne les allégations qui prétendent que les détenus sont presentés au ministère public les yeux bandés, elles sont fausses et n'ont aucun fondement juridique. De même qu'elles n'ont jamais été soulevées nidevant le ministère public lors de la premìere comparution des inculpés ni devant le juge d'instruction ni durant les procès. De plus, aucun organe judiciaire n'a reçu de plainte à ce sujet.
Et concernant l'existence d'un centre spécial dépendant du service du contrôle du territoire national et qui serait utilisé comme lieu de détention, les dispositions juridiques prévolent que tous les suspects soient mis en garde à vue dans les postes de police judiciaire ou dans les centres de la gendarmerie royale qui sont soumis à l'inspection du ministère public. Et après leur comparution devant le ministère public et avoir entamé les poursuites judiciaires contre eux, ils sont déférés dans les établissements dépendants de l'administration pénitentiaire et de la réinsertion conformément à la loi organique de l'administration pénitentiaire.
L'affaire du prénommé Mohamed Hassan EL Kettani:
Le rapport a traité quelques points dans cette affaire qui ont suscité beaucoup d'interrogations et en particulier la position adoptée par le tribunal concernant la demande présentée par l'avocat de l'inculpe cité ci-dessus relative à la convocation des personnes qui ont temoigné contre lui pour les entendre et pour débattre au sujet de leurs déclarations, Le tribunal a ordonné de reporter la convocation des témoins afin de pouvoir interroger le prévenu en premier lieu et ce à la demande du ministère public.
Après l'interrogatoire de l'inculpé en présence de sa défense et des autres inculpés impliqués dans la même affaire, le tribunal a délibéré sur la demande de convocation des témoins et a décidé de joindre cette demande au fond. La défense protestant contre le refus du tribunal de convoquer les témoins a annoncé son retrait de l'audience. Le tribunal a aussitôt convoqué un avocat dans le cadre de l'assistance judiciaire de l'inculpé. Ce dernier a refusé et a insisté pour garder son avocat initial qui s'est retiré. Le tribunal a ainsi décidé de poursuivre l'audience sans la présence de la défense sous prétexte qu'il a déployé tous les moyens que lui accorde la loi et qu'il est incapable de demeurer les bras croisés à la disposition des inculpés et de leurs défenses; pour ce faire, le tribunal s'est appuyé sur l'arrêté de la Cour Suprême du 19 mai 1964 sous le numéro 759 L 7 qui se présente comme suit: L 'exactitude des procédures ne peuvent être soumises à la volanté de l'inculpé ou de son avocat, sinon ils seraient capables d'entraver la bonne marche de la justice et ceci ne petit être le but escompté par le législateur.
En conclusion, en ce qui concerne le refus de la demande de convocation des témoins, le tribunal est compétent pour statuer sur cette requête en s'appuyant sur les circonstances de chaque procès.
Quant aux émigres et aux exilés cités dans le rapport, les informations les concernant sont insuffisantes pour pouvoir fournir une réponse à ce sujet.
En reponse aux deux questions posées :
Le rapport a demandé des informations sur deux questions :
La première question concerne le nombre des personnes déferées devant la justice depuis les évènements du 16 mai pour des actes terroristes.
La deuxième question porte sur les mesures prises dans le but d'interdire et de réprimer tout abus de pouvoir commis par la police envers les détenus.
Concernant la première question: Le nombre des personnes poursuivies en justice dans le cadre des affaires liées au terrorisme jusqu'au 3 juin 2004 a atteint 1748 inculpés dont les dossiers de 315 d'entre eux sont toujours en instruction et 199 sont encore dans les chambres pénales ou dans les tribunaux de première instance ou dans les chambres délictuelles au sein des Cours d'appel, 1234 inculpés ont deja été jugés.
Quant a la deuxième question, le code de procédure pénale à autorisé le représentant du ministère public de contrôler les actions de la police judiciaire et de suivre les procédures de détention et de mise en garde à vue. Il a également stipulé qu'en cas de violation des procédures en vigueur, les procès-verbaux dressés par les agents de la police judiciaire sont frappés de nullité et les agents incriminés son soumis à un interrogatoire disciplinaire et peuvent être licenciés, de plus le ministère public est tenu de présenter une requête afin d'ouvrir une enquête sur tout agent de la police judiciaire soupçonné d'avoir commis une infraction. Et si sa culpabilité est prouvée, une action publique est lancée contre lui conformément à la loi.