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QUESTIONS DE PROCEDURE: ACCES A L'INFORMATION, AU CONSEIL, A L'INTERPRETATION, A UN EXAMEN INDIVIDUALISE DU DOSSIER ET A L'APPEL

L'enquête réalisée par Human Rights Watch a montré que les problèmes évoqués ci-dessus sont largement aggravés par des vices de procédure dans la prise de décision des autorités. La loi espagnole stipule que des services juridiques, d'interprétation et de traduction gratuits doivent être proposés à tous les migrants (n'ayant pas de moyens économiques suffisants) confrontés à des "procédures administratives ou judiciaires risquant d'entraîner un refus d'entrée, un rapatriement ou une expulsion hors du territoire espagnol, ainsi que dans toutes les procédures d'asile"58. Les migrants ont un droit non équivoque à une décision judiciaire individualisée et à un contrôle judiciaire lorsqu'ils doivent être privés de liberté pendant plus de soixante-deux heures59 et ont également le droit de faire appel ou de contester un ordre d'expulsion, de rapatriement ou de détention60. La législation espagnole stipule en outre que les migrants détenus pour avoir violé la loi sur les étrangers doivent avoir accès à des informations sur les décisions administratives et judiciaires qui les concernent, dans une langue qu'ils comprennent61.

Le droit international et régional, tout comme la législation espagnole, prévoient que les migrants soumis à une détention bénéficient de droits procéduraux de base, afin de garantir que nul ne fasse l'objet d'une détention arbitraire, en ce compris le droit à une assistance judiciaire et à des services de traduction et d'interprétation. La loi interdit la détention de personnes n'ayant pas eu réellement et rapidement la possibilité d'être entendues par une autorité judiciaire ou autre ainsi que la possibilité de contester la légalité de leur détention, en ce compris l'accès à l'assistance judiciaire62. Les directives internationales et la loi nationale sur les procédures d'asile exigent également l'offre de services juridiques, de traduction et d'interprétation aux personnes souhaitant introduire une plainte auprès des autorités63, ainsi que l'accès à des informations sur leurs droits dans une langue qu'ils comprennent64. Le droit européen et international stipule que tous les migrants ont droit à une décision individualisée concernant leur expulsion65.

Comme nous l'expliquons de manière plus détaillée ci-dessous, les enquêteurs de Human Rights Watch ont mis à jour des lacunes dans le système espagnol, dans tous les aspects de ces droits procéduraux. Cette situation crée un environnement propice aux types de décisions arbitraires et abusives décrites ci-dessus.

Accès à l'information, à l'assistance judiciaire et aux services de traduction et d'interprétation
Les migrants, et notamment les sans-papiers ou les "clandestins", qui arrivent en Espagne sont confrontés à un véritable manque d'informations, d'assistance judiciaire et de services de traduction et d'interprétation. Ces problèmes se posent avec une acuité particulière dans le cas des migrants détenus et de ceux confrontés à un rapatriement par devolución ou à une expulsion technique à Ceuta et dans certaines villes le long de la côte andalouse. D'autres parties du système en font également les frais.

Parmi les dizaines de migrants interrogés par Human Rights Watch, aucun ne comprenait clairement le système d'immigration, ses droits ou sa situation juridique en Espagne. Les migrants se trouvant sur la côte andalouse et à Ceuta par exemple, confondaient ordre d'expulsion et permis de travail: dans les îles Canaries, des migrants ont signé leur propre ordre d'expulsion, pensant qu'il s'agissait de nouveaux documents d'identité leur donnant le droit de séjourner en Espagne.

Hamid R.66, un migrant de Ceuta ayant reçu un ordre d'expulsion illustre bien ce que pensent un grand nombre de migrants que nous avons interrogés. Il nous a confié qu'il était très "heureux" et "chanceux" car "il ira demain à Algeciras [sur la péninsule]" où il reverrait ses amis et trouverait un emploi67. Hamid R. a raconté à nos enquêteurs que la police lui avait expliqué qu'il devait trouver un emploi ou quitter l'Espagne dans les quinze jours et qu'il pourrait passer quelques jours à Algeciras après avoir pris le ferry. Les policiers ne lui ont donné aucune autre explication sur sa situation juridique en Espagne et sur son droit à s'opposer à l'ordre d'expulsion. Il n'a reçu aucune information lui permettant d'avoir accès à une assistance judiciaire ni sur l'effet à long terme de cet ordre d'expulsion sur ses droits en Espagne et dans d'autres pays de l'espace Schengen .68

Human Rights Watch a examiné les documents de Hamid R. Ceux-ci étaient rédigés en espagnol-une langue qu'il ne lit pas. Les documents se limitaient à une copie de son ordre d'expulsion, lui accordant une période de quarante-huit heures pour faire appel et quinze jours pour quitter le territoire espagnol. Lorsque Human Rights Watch lui a lu son ordre d'expulsion, avec l'aide d'un interprète, nous nous sommes aperçus qu'il ne savait absolument pas qu'il avait besoin d'un avocat et encore moins comment trouver une assistance judiciaire et comment faire valablement appel contre cet ordre d'expulsion69.

Des représentants du gouvernement espagnol ont expliqué à Human Rights Watch que leurs juristes étaient en train de remédier aux lacunes concernant les informations fournies aux migrants70. Malheureusement, notre enquête suggère que même lorsque les migrants ont accès à l'information ou qu'ils sont informés de leur possibilité de consulter un avocat, une telle confiance dans la qualité de la représentation juridique du migrant est souvent déplacée. De nombreuses interviews de migrants, de représentants d'organisations d'aide aux migrants, d'avocats et de fonctionnaires ont montré que les avocats ne sont pas toujours présents aux moments clés de l'affaire et que même lorsqu'ils sont présents, ils se contentent le plus souvent d'un rôle superficiel, se limitant à signer les documents administratifs.

Le rôle des avocats apparaît particulièrement limité dans les affaires de devolución. Un activiste de Tarifa nous a expliqué que dans de tels cas, "les avocats nous disent qu'ils ne peuvent en aucune façon aider les migrants"71. A Melilla, il semble que les avocats du barreau local72 qui assurent des services juridiques gratuits aux migrants, ne sont même pas convoqués au commissariat de police dans les cas de devolución73. Lorsque Human Rights Watch a interrogé un officier de la Garde civile de la côte andalouse à propos des services juridiques et de traduction dans les affaires de devolución, il a répondu qu'"[il] n'est pas nécessaire de connaître la langue du [migrant]. . . . Lorsqu'ils ont commis un autre délit, [les migrants] peuvent s'adresser à un avocat et à un juge, mais pas dans ce cas. Vous vous rendez compte si c'était le cas?"74.

A Ceuta, les fonctionnaires de la police nationale remplissent un formulaire-type de devolución, lequel demande des informations personnelles comme le nom, le prénom, les documents en possession et les dates75. Toutefois, les migrants ne reçoivent pas une copie de ce formulaire, pas plus qu'ils ne le complètent eux-mêmes. Au contraire, les interrogatoires sont superficiels et se limitent à la tâche administrative de remplir le formulaire. Il ne s'agit nullement de conseiller les migrants sur leurs droits ou options juridiques, ni de leur offrir la possibilité d'avoir un accès valable à un conseil76.

Le Rapport annuel 2001 du Médiateur indique que son enquête sur les procédures utilisées à Ceuta a révélé qu'"il n'y avait pas de preuve digne de foi de la présence d'un avocat"77 lors des procédures de retour. En outre, toujours selon le rapport, "[d]ans certains cas, on peut voir la signature d'une tierce personne, qui n'est ni le fonctionnaire du gouvernement, ni celle de la partie intéressée. Il pourrait s'agir de la signature de l'avocat, si ce n'est qu'elle ne correspond pas au nom et au numéro d'inscription de l'avocat. Dans d'autres cas, il n'y a tout simplement pas de troisième signature"78. Il n'est donc pas étonnant que le Médiateur ait recommandé que le gouvernement espagnol prenne immédiatement des mesures appropriées pour assurer que :

"l'assistance judiciaire requise par la loi soit une garantie essentielle, liée au droit à la défense, droit qui ne peut en aucune circonstance être négligé ou présumé et que la preuve de la présence de l'avocat doit apparaître clairement, ainsi que son identité, dans toutes les procédures officielles"79.

Examen individualisé des dossiers
L'enquête de Human Rights Watch a révélé que les migrants nord-africains-Marocains et Algériens-appréhendés alors qu'ils entraient illégalement en Espagne via les villes de Ceuta et de Melilla ou sur la côte andalouse sont fréquemment renvoyés au Maroc par devolución, dans le cadre d'une procédure qui leur refuse l'accès à un examen individualisé de leur dossier, et ce en violation de la législation régionale et du droit international80.

Lors de leur arrestation dans des villes comme Ceuta, Algeciras, et Tarifa, beaucoup de migrants sont détenus dans des cellules du commissariat81, uniquement pendant la période nécessaire pour le traitement de leurs documents et leur rapatriement par devolución-cette période ne dépasse généralement pas vingt-quatre heures82. Un représentant du commissariat de la Police nationale de Melilla a indiqué qu'ils utilisaient des procédures tout aussi rapides pour la devolución, expliquant que les migrants qui viennent s'inscrire au commissariat "doivent juste attendre au poste la décision du délégué gouvernemental, car s'il s'agit de devolución, les choses peuvent aller très vite, en une heure"83. Il est courant que les autorités espagnoles s'occupent en une fois des cas de groupes entiers de migrants, refusant ainsi l'examen individualisé de chaque dossier, et qu'elles omettent régulièrement de proposer aux migrants des services juridiques ou de traduction efficaces. En outre, les méthodes utilisées actuellement pour déterminer la nationalité des migrants-une condition de leur rapatriement-ne sont pas fiables, sont arbitraires et visent essentiellement un seul groupe de migrants: les Algériens.

L'attitude officielle part du principe que ces immigrés sont illégaux et qu'ils doivent rentrer chez eux aussi rapidement et efficacement que possible, par exemple sur le prochain ferry ou en groupes, en fourgonnette de police:

"Officiellement, nous faisons de notre mieux pour organiser les flux migratoires du Maroc vers l'Espagne. L'idée est de mettre fin aux réseaux clandestins de pateras. La Garde civile et la police font de leur mieux pour refuser ces immigrés-pour les renvoyer sur-le-champ"84.

Comme l'a déclaré le chef de la police d'Algeciras dans un entretien avec Human Rights Watch, la procédure de rapatriement des migrants d'Algeciras vers le Maroc est "très simple. Nous mettons en route la procédure de devolución et demandons au sous-délégué du gouvernement de mettre un point final aux documents. Nous informons les migrants et nous les conduisons ensuite au port, puis au Maroc, avant de les remettre aux autorités policières marocaines"85.

Des représentants d'organisations non gouvernementales travaillant avec les migrants à Ceuta et le long de la côte andalouse ont expliqué qu'en outre, toutes les "renvois" sont organisées à la hâte et concernent généralement une groupe entier. Par exemple, selon Algeciras Acoge, principale organisation d'aide juridique et sociale aux migrants à Algeciras, premier port à partir duquel sont organisées les liaisons entre la côte andalouse et le Maroc, les migrants rapatriés au Maroc par devolución "ont tous un seul document et sont considérés comme un groupe. Tout se fait de manière automatique; la police [lorsqu'elle ordonne leur rapatriement par devolución] se contente de changer le nom dans l'ordinateur"86. Des activistes de Ceuta nous ont également décrit des pratiques d'expulsion nous permettant de supposer que les migrants sont expulsés vers le Maroc sans avoir pu bénéficier d'un examen individualisé de leur dossier. Un activiste a expliqué à Human Rights Watch que tous les documents nécessaires pour les retours vers le Maroc sont traités collectivement, qu'il s'agisse d'un seul migrant ou d'un groupe de quinze migrants et que "l'avocat estime que c'est à eux de signer les documents à la fin de la procédure"87. Il semble n'y avoir aucun registre officiel des migrants renvoyés par devolución. Au contraire, "[u]ne fois expulsés, ils n'existent plus. C'est comme s'ils n'avaient jamais mis les pieds en Espagne"88.

L'enquête a révélé que dans le cas des migrants algériens, ces obstacles à l'examen individualisé des dossiers sont encore compliqués par l'absence de procédures officielles d'identification permettant de déterminer la nationalité des migrants. Les autorités espagnoles font couramment appel à des méthodes officieuses pour étiqueter les migrants comme venant d'un pays spécifique; la détermination de la nationalité se fait sur la base de l'apparence physique, des compétences linguistiques et des opinions personnelles de la police frontalière marocaine, qui est en contact étroit avec les migrants d'Espagne. En raison du refus du Maroc à réadmettre des ressortissants non marocains, cette pratique nuit surtout aux migrants algériens identifiés par la police comme étant marocains"89.

Les autorités espagnoles de Ceuta, Melilla et de la côte andalouse ont répété à plusieurs reprises à Human Rights Watch que de nombreux migrants qui se prétendent algériens sont en fait des Marocains qui tentent de s'introduire clandestinement en Espagne. La déclaration d'un officier de la Garde civile de la côte andalouse illustre clairement cette situation :

"Il est clair [que les migrants qui se prétendent algériens] mentent. La police n'est pas bête. Admettons qu'une personne sur les soixante passagers d'une patera déclare être algérien, c'est très bien mais comment être sûr de la nationalité des autres migrants? Ce genre de choses, ce n'est pas à l'université qu'on vous l'apprend, on l'apprend sur le tas" 90.

Lorsque Human Rights Watch a demandé s'il était possible que des migrants algériens soient pris à tort pour des Marocains et expulsés vers le Maroc dans le cadre de la procédure de devolución, les fonctionnaires ont reconnu que:

"[o]ui, il arrive que l'on commette des erreurs, mais nous leur donnons à manger, contrairement à d'autres pays. L'Espagne n'est pas prête sur le plan économique à accueillir tous ces migrants. Vous vous souvenez de ce qui s'est passé avec l'Australie? Les autorités australiennes ne les ont même pas autorisés à débarquer en Australie. Si c'était arrivé en Espagne, ces réfugiés auraient été autorisés à débarquer et ils auraient reçu à manger. Une procédure judiciaire serait plus normale-ou plus appropriée-mais ce n'est pas possible"91.

Le délégué gouvernemental de Ceuta a formulé des inquiétudes devant la vente de faux passeports, qui complique encore la détermination de la nationalité des migrants. Il incombe donc aux experts de la police espagnole de Ceuta de déterminer si un migrant est de nationalité algérienne ou marocaine : "[ils] doivent déterminer-c'est ça leur boulot-s'ils viennent d'Algérie. En cas de doute, nous les conduisons auprès des autorités marocaines et avec leur aide, nous pouvons déterminer s'ils sont de nationalité marocaine ou algérienne. Dans 90 pour cent des cas, il se confirme qu'ils sont Marocains"92. De même, le directeur-adjoint de la délivrance des documents du commissariat de Ceuta a expliqué que les interprètes de la police établissent la nationalité des migrants "en parlant avec eux et en écoutant leur accent ou leur dialecte. Si quelqu'un les soupçonne d'être marocains, nous essayons de les renvoyer au Maroc. La police les interroge, et si elle pense qu'ils sont de nationalité marocaine, elle les réadmet"93.

Human Rights Watch s'inquiète de l'absence d'une procédure officielle-prévoyant des directives appropriées pour la police et autres autorités de l'immigration responsables-permettant d'établir la nationalité. Les procédures informelles d'identification décrites ci-dessus ne sont pas fiables, elles sont arbitraires et sans doute discriminatoires. Dans l'état actuel des choses, les Algériens peuvent être pris à tort pour des Marocains et expulsés vers le Maroc sans avoir eu l'occasion de prouver leur nationalité.

Il apparaît que le rapatriement de migrants par devolución, tel qu'il se pratique actuellement, ne permet pas aux migrants de bénéficier d'un traitement individualisé de leur dossier, ni des garanties procédurales nécessaires prescrites par la législation nationale et régionale et le droit international. Au contraire, Human Rights Watch s'inquiète du fait que la politique de devolución espagnole est mise en _uvre d'une façon telle que les migrants sont presque immédiatement expulsés vers le Maroc, au terme d'une procédure de décision inadéquate. Cette procédure ne leur donne pas correctement accès aux garanties procédurales, comme l'accès à des services d'assistance judiciaire et d'interprétation, à des informations sur leurs droits et, dans le cas des migrants algériens, à une procédure juste et prévisible pour déterminer leur identité et leur nationalité.

Appels
Bien qu'en vertu de la législation espagnole, les migrants aient le droit de faire appel lorsqu'ils ont reçu un ordre d'expulsion94, les obstacles pratiques un appel "réussi" rendent pratiquement impossible aux migrants l'exercice de ce droit.

L'enquête de Human Rights Watch a révélé, par exemple, qu'à Ceuta, peu de migrants sont conscients du fait que les documents qu'ils ont reçus sont des ordres d'expulsion, et encore moins de leur droit à interjeter appel. Ils ne sont pas suffisamment au courant de leur situation légale et des moyens leur permettant d'obtenir une assistance judiciaire. En outre, il semble que dans certains cas, la police leur délivre leurs documents après les quarante-huit heures durant lesquels un appel peut être introduit ou au début d'un week-end, lorsqu'il n'est pas possible d'obtenir une assistance judiciaire ou de faire appel95. Lorsque Human Rights Watch a fait part de ses inquiétudes auprès du délégué gouvernemental de Ceuta, celui-ci nous a informé qu'il existe beaucoup de "bureaux d'avocats d'Algeciras prêts à prendre en charge des dossiers d'[expulsion]. [Les Algériens] ont amplement le temps de faire appel dans les quarante-huit heures. Ils ont déjà les documents nécessaires sur eux"96.

Les avocats qui travaillent avec des migrants, à Ceuta comme à Melilla ont, indiqué que même si les migrants réalisent qu'ils peuvent et qu'ils doivent faire appel contre un ordre d'expulsion, ils restent confrontés à de nombreux obstacles à une révision valable de leur cas97. Un avocat du barreau de Melilla par exemple a expliqué qu'à Melilla "les avocats interjettent appel dans les quarante-huit heures mais qu'il ne s'agit pas d'un véritable appel. C'est juste une façon de dire que vous n'êtes pas d'accord. La police ne répond même pas, elle poursuit la procédure comme avant"98.

La procédure suivie pour les appels dans les cas de devolución souligne encore davantage la futilité de tels efforts. A Ceuta par exemple, si un migrant fait appel contre son renvoi par devolución, il sera transféré à la frontière où il devra attendre une heure ou plus la réponse du délégué gouvernemental à sa demande d'appel99. L'appel est purement administratif est examiné par la même autorité que celle qui a ordonné la devolución du migrant100.

En outre, l'appel n'a aucun effet sur la procédure d'expulsion en l'absence d'un ordre judiciaire distinct suspendant l'expulsion jusqu'à ce que l'appel ait été rendu101. Comme l'a fait observer Manuel Prieto, Responsable du Département des étrangers et de la délivrance des documents du quartier général de la Police nationale espagnole à Madrid, l'appel dans des cas de "devolución est plus difficile pour des raisons de temps"102. En fait, il est pratiquement impossible pour un migrant d'interjeter appel et de recevoir une suspension judiciaire d'expulsion en attendant qu'une décision soit prise, dans les quarante-huit heures habituellement nécessaires pour le rapatriement par devolución vers le Maroc. Dès lors, le droit technique d'interjeter appel contre un ordre de devolución est purement symbolique.

58 Voir article 22(1) de la loi 8/2000 (concernant les droits et les libertés des ressortissants étrangers vivant en Espagne et intégration sociale). Voir également section 5.a, articles 137(2) et 138(2) des règlements d'application de la loi espagnole sur les ressortissants étrangers. La législation espagnole spécifie que les migrants doivent avoir accès à un conseil, non seulement pendant les procédures judiciaires, mais également lors d'une détention administrative prolongée. Voir article 63(2) de la loi 4/2000 (concernant les droits et les libertés des ressortissants étrangers vivant en Espagne et leur intégration sociale) amendée par la loi 8/2000, ainsi que la section 2.a (Centres d'internement pour Etrangers), article 128(1) des règlements d'application de la loi espagnole sur les ressortissants étrangers. Voir également la loi espagnole sur les centres d'internement (publiée au Boletín Oficial del Estado, n° 47, pp. 7681-7688), 24 février 1999.

59 Article 62 de la loi 8/2000 (concernant les droits et les libertés des ressortissants étrangers vivant en Espagne et leur intégration sociale), ainsi que la section 2.a (centres d'internement pour étrangers), article 127(1) des règlements d'application de la loi espagnole sur les ressortissants étrangers.

60 Se référer, d'une manière générale, à la loi 8/2000, article 21.

61 Article 63(2) de la loi 4/2000 (concernant les droits et les libertés des ressortissants étrangers vivant en Espagne et leur intégration sociale) amendée par la loi 8/2000, ainsi que la section 2.a (centres d'internement pour étrangers), article 127(1) des règlements d'application de la loi espagnole sur les ressortissants étrangers. Voir également la loi espagnole sur les centres d'internement (publiée au Boletín Oficial del Estado, n° 47, pp. 7681-7688), 24 février 1999. Les autorités sont également tenues de fournir aux migrants se trouvant en détention des informations sur leur lieu de détention ainsi que sur leurs droits. Voir article 62 de la loi 4/2000 (concernant les droits et les libertés des ressortissants étrangers vivant en Espagne et leur intégration sociale), amendée par la loi 8/2000, ainsi que la section 2.a (centres d'internement pour étrangers) de l'article 129 des règlements d'application de la loi espagnole sur les ressortissants étrangers. Voir également la loi espagnole sur les centres d'internement (publiée au Boletín Oficial del Estado, n° 47, pp. 7681-7688), 24 février 1999.

62 L'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) garantissent le droit à la liberté et à la sécurité des personnes, et prévoient entre autres, que toute personne privée de liberté doit avoir une possibilité réelle de contester la légalité de sa détention devant un tribunal. Dans son observation générale n°8, la Commission des droits de l'homme des Nations unies (NU) interprète l'article 9 du PIDCP comme incluant "tous les cas de privation de liberté, qu'il s'agisse d'infractions pénales ou autres, comme.... le contrôle de l'immigration". Instruments des droits de l'homme, Récapitulation des observations générales ou recommandations générales adoptées par les organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, HRI/GEN/1/Rev.4, 7 février 2000, p. 88, para. 1. La Cour européenne des droits de l'homme a décidé que les migrants en détention jouissent des garanties procédurales de base consacrées par l'article 5 de la CEDH, y compris le droit d'introduire un recours devant le tribunal afin qu'il statue sur la légalité de sa détention. Voir Dougoz v. Grèce, 40907/98, 6 mars 2001. Voir également l'ensemble de principes des NU pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement (Ensemble de principes), adopté par la Résolution 43/173 de l'Assemblée générale des Nations Unies, le 9 décembre 1988.

63 Loi espagnole 9/1994 (19 mai) (publiée au Boletín Oficial del Estado, n° 122 et 131), amendant la loi 5/1984 (26 mars) régissant le statut des réfugiés et le droit d'asile, chapitre deux, article 4(1); arrêté royal 203/1995 (10 février) approuvant le règlement d'application [ci-après "arrêté d'exécution"] de la loi 5/1984 (26 mars) régissant le statut de réfugié et le droit d'asile, amendée par la loi 9/1994 (19 mai) (publiée au Boletín Oficial del Estado, n° 52, 2 mars 1995), articles 8(4) (requête introduite dans le territoire espagnol ) et 19(2) (requêtes introduites aux points frontaliers); Haut-Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés, Guide des principes et des critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié (Genève, HCR, 1992), para. 192. Pour en savoir plus sur les normes internationales et régionales relatives au traitement des demandeurs d'asile et sur la possibilité pour les migrants arrivant sur les îles Canaries de demander le droit d'asile, voir Human Rights Watch, "L'autre visage des îles Canaries : violations des droits des migrants et des demandeurs d'asile," Un Rapport de Human Rights Watch, vol. 14, n°1 (D), février 2002.

64 Voir arrêté d'exécution de la loi 5/1984 (26 mars) régissant le statut de réfugié et le droit d'asile, amendée par la loi 9/1994 (19 mai), Section 1, article 5(1).

65 Voir article 13 du PRDCP; article 32 de la Convention relative au statut des réfugiés; Protocole n°4, article 4 et Protocole n°7, article 1 de la CEDH; et article 19 (1) de la Charte européenne des droits fondamentaux. Voir: http://www.europarl.eu.int/comparl/liber:elsj/charter/art19/default_en.htm#2.

66 Nom d'emprunt.

67 Entretiens de Human Rights Watch avec un migrant algérien de vingt-deux ans, Ceuta, 18 octobre, 2001.

68 Ibid.

69 Entretien de Human Rights Watch, Ceuta, 18 octobre 2001.

70 Entretien de Human Rights Watch avec Manuel Prieto, Responsable du Département des étrangers et de la délivrance des documents), avec José García Santalla, Responsable de l'unité centrale des étrangers (Département des étrangers et de la délivrance des documents) et José Ramón Pérez García, Responsable des statistiques, Police nationale espagnole (au sein du ministère de l'Intérieur), Madrid, 14 novembre 2001.

71 Entretien de Human Rights Watch avec l'Asociación Pro Derechos Humanos, Mario Arias, Tarifa, 15 octobre 2001.

72 Nous avons traduit le terme Colegio de abogados par "barreau". Ainsi, bien que les colegios présentent une série de différences par rapport aux barreaux certains pays, le terme "barreau" est utilisé dans le présent rapport pour désigner les avocats du Colegio de abogados. Les colegios de abogados espagnols ne sont pas des associations, mais des entités coopératives jouant un rôle important dans l'administration de la justice. Ils travaillent entre autres directement avec le ministère de la Justice en mettant à disposition des citoyens et des ressortissants étrangers des avocats commis d'office et des avocats de l'aide juridique. Seuls les titulaires d'un diplôme en droit peuvent devenir membres d'un colegio et seuls les avocats officiellement inscrits à un colegio (et pays à ce titre des cotisations et s'acquittant d'autres obligations liées au colegio) peuvent exercer la profession d'avocat en Espagne. Il y a au moins un colegio dans chaque province espagnole. Les colegios comptent une série de départements spéciaux, dont un département des affaires étrangères responsable des questions d'immigration; les avocats du Colegio inscrits auprès d'un département particulier sont appelés lorsque leurs services sont requis. Ils offrent des services gratuits à leurs clients mais sont rémunérés pour leur travail par le colegio.

73 Entretien de Human Rights avec un officier de police, Police nationale espagnole, Melilla, 9 novembre 2001; avec Francisco Javier Arias Herrera, avocat du Colegio de Abogados, Melilla, 9 novembre 2001.

74 Entretien de Human Rights Watch avec un officier de la Garde civile, côte andalouse, 16 octobre 2001.

75 Entretien de Human Rights Watch avec Luis Vicente Moro, Délégué gouvernemental pour la ville autonome de Ceuta, Ceuta, 19 octobre 2001; Entretien de Human Rights Watch avec la Police nationale espagnole à Ceuta, Ramón Capdevila, Directeur-adjoint de la délivrance des documents, Ceuta, 19 octobre 2001.

76 Entretien de Human Rights Watch avec la Police nationale espagnole à Ceuta, Ramón Capdevila, Directeur-adjoint de la délivrance des documents, Ceuta, 19 octobre 2001.

77 Rapport annuel du Médiateur, présenté le 8 octobre 2001 devant le Parlement espagnol, section 3.1.2.2, "Centre de Résidence temporaire pour immigrés (CETI) à Ceuta," p. 64.

78 Ibid.

79 Ibid.

80 Les migrants venant du Maroc et appréhendés lors de leur entrée clandestine en Espagne peuvent être remis aux autorités marocaines en vertu d'un accord de réadmission de 1992, signé entre l'Espagne et le Maroc. Toutefois, étant donné que le Maroc n'accepte pas le retour de ressortissants non marocains, la pratique de la devolución, ou rapatriement immédiat, prévue par l'accord, est réservée aux Marocains et aux Algériens pris pour des Marocains par les autorités.

81 Selon le Médiateur, une série de ces centres ne respectent pas les normes minimales exigées pour la détention. Rapport annuel du Médiateur, présenté le 8 octobre 2001 devant le Parlement espagnol, section 3.1.2.4, "Entrée de sans papiers via le littoral andalou", pp. 65-66.

82 Entretien de Human Rights Watch avec la Police nationale espagnole à Ceuta, Ramón Capdevila, Directeur-adjoint de la délivrance des documents, Ceuta, 19 octobre 2001, faisant remarquer que la police renvoie des groupes de dix-huit migrants ou plus au Maroc "facilement six fois par jour;" entretien de Human Rights Watch avec le Chef de la police, Police nationale espagnole, Algeciras, 15 octobre 2001.

83 Entretien de Human Rights Watch, Melilla, 9 novembre 2001.

84 Entretien de Human Rights Watch avec Eduardo de Quesada, Directeur-adjoint des affaires étrangères, ministère des Affaires étrangères, Madrid, 13 novembre 2001. Voir également l'entretien de Human Rights Watch avec Rocío Rodríguez Bayón, Chef de cabinet, Bureau du Délégué gouvernemental pour la ville autonome de Melilla, Melilla, 9 novembre 2001. Lorsqu'on lui a demandé d'identifier une procédure claire et cohérente de décision utilisée dans des cas de devolución ou des directives de procédures visant à protéger les droits humains des migrants, le Chef de cabinet M. Rodríguez a expliqué que "[l]ors de la procédure de devolución, des migrants n'ont pas été autorisés à entrer en Espagne. Cela ne veut pas dire que la procédure ait commencé. Ils ne sont pas autorisés à séjourner en Espagne et ils le savent". Ibid.

85 Entretien de Human Rights Watch avec le Préfet de police, Police nationale espagnole, Algeciras, 15 octobre 2001.

86 Entretien de Human Rights Watch, Algeciras Acoge, Hassan Yetefti et Jose Villahoz Rodríguez, 15 octobre 2001.

87 Entretien de Human Rights Watch avec Tomás Partida, Ceuta, 17 octobre 2001.

88 Ibid.

89 Voir également la note en bas de page n° 80.

90 Entretien de Human Rights Watch avec des officiers de la Garde civile, côte andalouse, 16 octobre 2001.

91 Ibid.

92 Entretien de Human Rights Watch avec Luis Vicente Moro, Délégué gouvernemental pour la ville autonome de Ceuta, Ceuta, 19 octobre 2001.

93 Entretien de Human Rights Watch avec la Police nationale espagnole de Ceuta, Ramón Capdevila, Directeur-adjoint de la délivrance des documents, Ceuta, 19 octobre 2001.

94 Loi 8/2000, Article 21.

95 Par exemple, le jour où Human Rights Watch a interrogé Hamid R. (voir note en bas de page n° 67) et son ami-le 18 octobre 2001-des migrants qui se trouvaient dans le centre paroissial où Hamid R. et son ami séjournaient, ont raconté à nos enquêteurs que quatorze Algériens seraient transférés à Algeciras le lendemain. Ces personnes venaient de recevoir leur document d'expulsion mais n'avaient pas encore reçu leur ticket de ferry pour rejoindre la péninsule. Il était prévu qu'ils se réunissent en face du commissariat de Ceuta le lendemain matin et que la police les conduirait alors au ferry et assurerait leur transfert vers le continent. Pourtant, les documents d'Hamid R. et de ses amis étaient tous datés du 17 octobre 2001, ce qui ne leur laissait qu'une partie de l'après-midi du vendredi pour trouver un avocat et faire obstacle à ces expulsions. Entretien de Human Rights Watch avec un migrant algérien de vingt-deux ans, Ceuta, 18 octobre 2001.

96 Entretien de Human Rights Watch avec Luis Vicente Moro, Délégué gouvernemental pour la ville autonome de Ceuta, Ceuta, 19 octobre 2001.

97 Voir par exemple, l'entretien de Human Rights Watch avec Lucrecia de Africa Benzo Montilla, avocat au Colegio de Abogados, Ceuta, 18 octobre 2001, décrivant les problèmes pratiques et logistiques des migrants tentant de faire appel.

98 Entretien de Human Rights Watch avec Francisco Javier Arias Herrera, avocat au Colegio de Abogados, Melilla, 9 novembre 2001.

99 Entretien de Human Rights Watch avec la Police nationale espagnole de Ceuta, Ramón Capdevila, Directeur-adjoint de la délivrance des documents, Ceuta, 19 octobre 2001.

100 Ibid.

101 Entretien de Human Rights Watch avec Manuel Prieto, Responsable du Département des étrangers et de la délivrance des documents, avec José García Santalla, Responsable de l'unité centrale des étrangers et avec José Ramón Pérez García, Responsable des statistiques, Police nationale espagnole (au sein du ministère de l'Intérieur) Madrid, 14 novembre 2001.

102 Ibid.

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