Africa - West

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IV. RÉACTION DES AUTORITÉS RWANDAISES

Le gouvernement rwandais professe son engagement de vouloir faire respecter tant le droit national que le droit humanitaire international. Le Rwanda a ratifié les Conventions de Genève, en particulier le Protocole Additionnel II relatif à la protection des victimes. L'Article général 3 des Conventions de Genève et les principes du Protocole II s'appliquent à ce conflit et lient les deux parties qui y sont impliquées.

Le système de justice militaire rwandais a poursuivi en justice un certain nombre de cas de graves violations des droits humains. Mais la plupart des condamnations ont concerné de simples soldats ou des officiers de rang inférieur. Les officiers plus haut placés dans la hiérarchie ont rarement été jugés pour de telles accusations et s'ils ont été jugés et condamnés, ils ont généralement reçu des sentences légères. Les très sérieuses allégations de crimes de guerre commis par les troupes du gouvernement rwandais au Congo qui ont été avancées par les organisations de défense des droits humains, tant locales qu'internationales, par le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la République Démocratique du Congo et par l'équipe d'investigation du Secrétaire Général n'ont pas fait l'objet d'enquêtes approfondies, encore moins de poursuites judiciaires de la part des autorités rwandaises.

Durant la rébellion de 1997-1998, dans le nord-ouest, l'armée rwandaise a généralement traité les populations civiles locales comme des collaborateurs des rebelles. Elle a tué des milliers de civils et forcé des centaines de milliers d'autres à rejoindre de misérables camps ou la brousse où beaucoup sont morts de maladie et de malnutrition. Dans le conflit actuel, les autorités rwandaises ont adopté une stratégie différente. Le Brigadier Général Kabarebe aurait déclaré publiquement, à Ruhengeri, que l'armée faisait de son mieux pour éviter de violer les droits des citoyens tandis qu'elle combattait contre l'ALIR.60 Selon des informations accessibles à Human Rights Watch, début décembre, les soldats du gouvernement rwandais ne se sont pas lancés dans des opérations de représailles contre les habitants du coin. Les seuls cas connus, à ce jour, de civils habitant dans la zone, tués ou blessés par des tirs des troupes gouvernementales rwandaises semblent avoir été le fait d'accidents.

Action militaire

L'armée rwandaise a rapidement renforcé la zone nord-ouest après les affrontements de mai, augmentant le nombre de soldats dans les bases d'importance et établissant plusieurs postes plus petits. A plusieurs reprises, lorsque des combattants de l'ALIR étaient repérés en nombres importants, des unités de l'APR ont répondu rapidement et leur ont infligé de lourdes pertes. Lors d'un affrontement majeur le 6 juin, une force de plusieurs centaines de combattants de l'ALIR tenta d'avancer en traversant les districts de Mutura et Cyanzarwa mais fut stoppée par les forces rwandaises qui utilisèrent contre eux, des blindés et des hélicoptères de protection. Au cours de la bataille, l'ALIR perdit un certain nombre de combattants mais l'ALIR aurait aussi apparemment tiré et endommagé un hélicoptère de l'armée rwandaise, le forçant à un atterrissage d'urgence dans un camp militaire. L'armée rwandaise a rapporté avoir tué 400 rebelles et en avoir capturé 150 autres ce jour là.

Le 21 juin, il y eut des heurts importants dans les districts de Bugarula (anciennement Cyabingo et Ruhondo) et Bukonya (anciennement Ndusu et Gatonde). Des témoins localement ont estimé que 500 combattants de l'ALIR avaient été impliqués. Vingt d'entre eux seraient morts ainsi que quinze soldats du côté des forces gouvernementales. Les témoins ont dit qu'une bombe de l'APR était tombée sur une maison dans la cellule de Munyana, secteur de Munanira, district de Bukonya, tuant l'homme qui l'habitait et blessant sérieusement son épouse. Dans un autre incident, ce même jour, une femme aurait été blessée par un tir du gouvernement rwandais dans le secteur de Muhaza, Bugarula.61

En plus de ces cas où des habitants du coin qui n'étaient pas apparemment délibérément visés sont morts ou ont été blessés, un certain nombre de personnes semblant être des civils voyageant avec l'ALIR ont été tuées lorsque les troupes du gouvernement rwandais ont tiré sur l'ALIR. D'après les récits des survivants, par exemple, il semble que des civils et notamment des jeunes femmes appartenant à un groupe de prières, accompagnaient des combattants de l'ALIR qui ont été entraînés par les soldats des forces gouvernementales dans l'affrontement majeur qui s'est produit à Cyanzarwe, le 5 et 6 juin. Au moins huit jeunes femmes et un certain nombre d'enfants y furent tués.62 Fin juin, les soldats des forces gouvernementales ont donné la chasse aux pillards dans la cellule de Nyarwaya, district de Mutobo et ont tué vingt-sept personnes. Un témoin a raconté que le groupe pouvait avoir comporté des enfants et des personnes autres que des combattants qui accompagnaient ces derniers pour porter le butin.63

Les gens qui ne font pas parti des forces armées mais qui accompagnent des combattants dans des fonctions de porteurs, aumôniers ou aides en tout genre sont des civils - et sont protégés comme tels - s'ils ne participent pas eux-mêmes aux hostilités. Mais les civils qui de leur plein gré restent à proximité des combattants ont accepté un niveau accru de danger et sont exposés à de possibles blessures et décès accidentels, même s'ils ne sont pas expressément pris pour cibles. Selon les principes généraux du droit international humanitaire, les deux parties dans un conflit ont le devoir de fournir aux civils la plus grande protection possible contre les dangers causés par des opérations militaires. Les troupes ne doivent pas se servir des civils comme de boucliers humains. De la même façon, des forces adverses doivent tenter de minimiser les dommages causés aux civils, même dans le cas où ceux-ci seraient utilisés comme boucliers humains. Juger dans de tels cas est chose complexe.

Certains habitants du coin se sont plaints que les soldats du gouvernement rwandais n'avaient pas répondu à leurs appels à l'aide lorsque les pillards étaient venus pour saccager leurs biens. Les soldats de l'armée n'ont repoussé qu'une des quatre attaques de l'ALIR sur les centres de santé. Les familles habitant près des bases de l'ALIR ont le plus souffert. Les gens du secteur de Bisate, adjacent à la forêt de Virunga, par exemple, ont vu leurs maisons et leurs champs pillés durant quatre nuits consécutives, mi-juin.64

Traitement des prisonniers

Par le passé, l'armée rwandaise a capturé relativement peu d'ennemis mais dans une démonstration supplémentaire de la différence de politique poursuivie dans le conflit actuel, l'armée rwandaise a capturé ou accepté la reddition de plus de 1800 personnes. Beaucoup d'entre elles étaient des combattants et les autres, des civils qui avaient accompagné les troupes.

Dans l'ensemble, il ne semble pas que les prisonniers qui étaient dans les camps de solidarité de Mudende et Nkumba, au nord-ouest aient été maltraités. Mais dans trois cas, des captifs non armés auraient été tués par des forces du gouvernement rwandais. Fin juin, six combattants de l'ALIR ont été trouvés cachés dans des buissons, juste après une escarmouche entre leur groupe et l'APR. Le berger qui les a découverts les a conduits auprès des soldats du gouvernement rwandais à Gikombe, entre les cellules de Karara et Rusengye, dans le secteur de Kareba, district de Buhoma. Quand les soldats de l'APR leur ont demandé ce qu'ils faisaient, ils ont répondu qu'ils avaient juste attendu que la fusillade cesse pour se rendre. Les quatre personnes qui, sur les six, avaient des armes les ont remises. Un officier, soit disant nommé Capitaine Mutabazi, prit l'une de ces armes et tenta de tuer l'un des combattants de l'ALIR qui s'était rendu. Le coup ne partit pas. Le capitaine se serait alors emparé de l'arme de l'un de ses gardes et aurait tué les six hommes de l'ALIR. Des habitants du coin ont reçu l'ordre d'enterrer les morts mais ils ont refusé dans un premier temps. Lorsque le capitaine a insisté, ils ont enterré les corps dans une fosse commune, dans la cellule de Rusengye, à Kareba. Ce même capitaine aurait aussi été impliqué dans des actes de violence contre les membres de la Force de Défense Locale, tel que décrit plus bas.65

Au cours d'un autre incident, les soldats du gouvernement de l'ALIR auraient tué sept combattants de l'ALIR non armés, à un poste entre Nyabirehe, district de Mutobo et Musomba, district de Buhoma. Dans le troisième cas, des membres de la Force de Défense Locale auraient exécuté deux combattants qui s'étaient rendus au bureau de district de Kanama.66

L'un des enfants maintenant aux mains des Rwandais déclare avoir été battu lorsqu'il a été capturé, au Congo, par des soldats du gouvernement rwandais. Un autre a raconté que des enfants et des adultes avaient été battus après avoir été capturés au Rwanda, le 21 mai. Par ailleurs, personne parmi les deux douzaines d'adultes et enfants interrogés par les enquêteurs de Human Rights Watch ne s'est plaint de mauvais traitements et plusieurs ont déclaré qu'ils avaient été bien soignés.67

Les prisonniers furent d'abord détenus dans des camps militaires proches des endroits où ils s'étaient rendus ou avaient été capturés. En deux semaines, la plupart de ces premiers détenus ont été transférés au camp de Muhoza, un camp militaire à Ruhengeri, dans lequel environ 400 prisonniers, dont deux femmes et cinquante-deux enfants dormaient dans deux pièces surpeuplées.68 La nourriture et le matériel médical étaient insuffisants. Les personnes les plus gravement blessées furent finalement transférées vers des hôpitaux, même si certains n'ont bénéficié de cette attention médicale que plusieurs jours ou plusieurs semaines après avoir été blessés et capturés. Mi-juillet, environ deux douzaines de détenus étaient en cours de traitement à l'hôpital de Ruhengeri.69

Le gouvernement a ensuite transféré environ 1 320 prisonniers, adultes et enfants, dans un "camp de solidarité", à Mudende, Gisenyi géré par la Commission pour l'Unité Nationale et la Réconciliation. Le nombre de détenus a continué d'augmenter et en août, le gouvernement a provisoirement établi un autre camp de solidarité pour plus de 700 personnes à Nkumba, Ruhengeri. Là, les détenus ont suivi un programme de "rééducation" destiné à promouvoir le nationalisme, l'idéologie du RPF (Front Patriotique Rwandais) et à éradiquer les idées de loyauté ethnique. En général, les détenus ont été relativement bien traités, même si le surpeuplement et le manque de biens de première nécessité ont parfois posé problème. Plus de 1 300 personnes à Mudende occupaient des quartiers censés contenir 500 personnes. De telles conditions de surpeuplement ont favorisé la propagation de maladies.70 Début août, un enfant et trois adultes sont morts au camp de Mudende, apparemment des suites de diarrhée.71 Après leur passage dans les camps de solidarité, les détenus devraient être libres de rentrer chez eux. Cependant, l'APR va très certainement "réintégrer" la plupart d'entre eux dans ses forces et les déployer le long des lignes de front, au Congo.

Les autorités rwandaises ont encouragé les prisonniers à prendre contact avec leurs familles. La radio nationale a diffusé les noms des prisonniers et d'autres informations pour les identifier. Les autorités ont aussi présenté certains d'entre eux, lors de réunions publiques, dans le nord-ouest et ailleurs dans le pays. Les familles sont venues de loin et ont eu le droit de visiter leurs proches. Certains prisonniers ont aussi reçu la permission de passer plusieurs jours chez eux avant de retourner en détention.72

Enrôlement de la population

En évaluant la situation, le 30 juin 2001, le Brigadier Général Kabarebe déclara que l'effort contre l'ALIR reposait pour 20 pour cent sur la force militaire de l'armée gouvernementale rwandaise et pour 80 pour cent sur l'assistance de la population locale.73 Pour encourager cette assistance, les personnalités officielles du gouvernement local et national, y compris le Ministre de la Défense et le Ministre de la Sécurité Intérieure, ont tenu fréquemment des réunions publiques (appelées de sensibilisation) dans tout le nord-ouest. Dans certains cas, ils auraient payé les gens du coin qui les ont aidés à capturer des combattants de l'ALIR et ils ont publiquement loué les mérites des autres.74

Les autorités ont aussi rappelé sans relâche aux gens les souffrances des années de guerre précédentes et, en utilisant le proverbe très connu sur l'herbe qui souffre davantage lorsque deux éléphants se battent, ils ont averti les gens des conséquences possibles s'ils encourageaient les forces de l'ALIR. Les habitants du coin se souviennent très bien, en effet, des souffrances et des morts de 1997 et 1998 et il semble qu'ils aient effectivement tenu compte des ordres officiels de fuir les combattants de l'ALIR.

Dans certains endroits, les gens ont interprété les mises en garde officielles comme des menaces directes. Une personnalité officielle locale qui a assisté à un certain nombre de réunions tenues par des officiers de l'armée rwandaise a fait le commentaire suivant :

L'armée dit aux gens qu'ils sont responsables de l'insurrection parce que ce sont leurs enfants qui sont des rebelles. Ces menaces sont fréquemment prononcées. Les gens sont très intimidés. Ils veulent juste survivre... Nous sommes des civils. La politique, c'est pas notre affaire. On vit de nos champs. On n'est jamais allé à l'école. Comment l'armée peut-elle nous considérer comme des opposants politiques ?75

Les autorités rwandaises ont aussi tenu des réunions ailleurs dans le pays, afin d'exhorter les gens à la vigilance face à tout signe d'activité de l'ALIR dans leurs régions.76

Les autorités ont sommé les gens de faire plus que de simplement rester aux aguets. Dans de nombreuses communautés, les habitants sont obligés de patrouiller la nuit et occasionnellement, des milliers d'entre eux ont été mobilisés pour chercher dans les champs du coin ou les forêts de Gishwati et Nyungwe des signes de la présence des combattants de l'ALIR.77 Même dans la province orientale de Kibungo, éloignée des troubles du nord-ouest, les autorités ont prévenu que des "sanctions sévères" seraient infligées à tout citoyen ne prenant pas part aux patrouilles de nuit.78 Dans certains cas, des civils ont été contraints d'aider l'armée de façon différente. Les gens qui habitent près du poste militaire, dans le secteur Burambi du district de Bukamba (anciennement Kidaho) sont souvent obligés de fournir de l'eau aux soldats de l'armée rwandaise. Durant la saison sèche, ils devaient marcher six miles aller-retour pour aller chercher de l'eau au lac Bulera. Dans le secteur de Shingiro, district de Bukonya, les habitants sont obligés d'assurer la nourriture des membres de la Force de Défense Locale.79

Au cours des dernières années, des jeunes ont été appelés à servir dans la Force de Défense Locale. Certains le font volontiers, d'autres uniquement sous la contrainte. Ils reçoivent d'ordinaire deux à trois mois de formation dispensée par les soldats du gouvernement rwandais et travaillent sous leur supervision. Ils habitent chez eux et sont supposés protéger leurs communautés locales, activité pour laquelle ils ne reçoivent aucun salaire. Certains membres de la FDL ont moins de dix-huit ans.80 Habituellement, seuls certains des membres de la FDL ont des armes à feu, quand ils sont en patrouille. Le 8 juin, le gouverneur de la province de Gisenyi a annoncé que des armes supplémentaires seraient distribuées aux membres locaux des FDL et que ceux-ci seraient déployés pour patrouiller le long de la forêt de Gishwati.81 Les membres des FDL ont été impliqués dans des escarmouches avec les combattants de l'ALIR, parfois seuls, parfois en compagnie de soldats du gouvernement rwandais. Ils ont tué des membres de l'ALIR et plusieurs d'entre eux ont été tués dans des échanges de coups de feu.82 Leur participation a allégé le poids porté par l'armée du gouvernement rwandais, à la fois au nord-ouest et au Congo. Nombre des premiers membres des FDL ont ensuite été transférés ou recrutés dans l'armée régulière et envoyés au combat de l'autre côté de la frontière.83

Les membres de la Force de Défense Locale suivent d'ordinaire les ordres des soldats du gouvernement rwandais mais le 7 juillet, plusieurs des membres des FDL, dans le secteur de Kareba, ont refusé d'obéir à l'ordre d'envoyer les habitants chez eux, à environ 17 heures 30. Ils ont dit qu'il n'y avait pas de raison apparente pour imposer un couvre-feu à cette heure. Selon des témoins, les soldats avaient bu et une échauffourée a suivi, impliquant les membres de FDL qui refusaient de suivre leurs ordres. L'un des soldats a menacé les jeunes auxiliaires avec son arme. Le capitaine Mutabazi, mentionné plus haut, serait intervenu et aurait ordonné aux soldats de frapper les membres des FDL, ce qu'ils firent. L'un des membres des FDL fut si sérieusement blessé qu'il dut recevoir une assistance médicale. Cet incident, qui s'est produit à peu près une semaine après le meurtre des combattants de l'ALIR qui s'étaient rendus, a suscité un tollé général parmi la population locale. Trois jours plus tard, le capitaine Mutabazi fut apparemment transféré, à Mudende.84

Les enfants soldats

Les officiers de l'ALIR interrogés par les enquêteurs de Human Rights Watch ont reconnu que le droit humanitaire international interdisait que des enfants de moins de quinze ans soient recrutés pour le service militaire ou pour être utilisés dans des hostilités.85 L'un d'entre eux a même cité la limite supérieure de dix-huit ans contenue dans le Protocole Facultatif de la Convention relative aux droits de l'enfant.86 Plusieurs ont déclaré que leurs chefs avaient interdit le recrutement d'enfants, dans un cas par le biais de trois ordres écrits. L'un d'entre eux a mentionné avoir vu un officier punir un soldat pour avoir utilisé un enfant comme porteur.87 Mais les ordres contre le recrutement et l'utilisation d'enfants n'ont, dans l'ensemble, pas été suivis : début août, 280 enfants, qui avaient préalablement appartenu aux forces de l'ALIR, étaient aux mains des Rwandais. Cinquante six de ces enfants étaient congolais et ont depuis été remis au gouverneur du nord Kivu et installés dans un centre de jeunes au Congo.88

Au moins plusieurs douzaines d'enfants accompagnant les combattants de l'ALIR ont été tuées au combat, depuis mai 2001.89 Leur nombre pourrait être beaucoup plus élevé. Trois des quatorze enfants rencontrés par un enquêteur de Human Rights Watch dans un centre de détention à Gisenyi, le 8 juin, souffraient de blessure par balles.

Comme les adultes de l'ALIR, certains des enfants rwandais étaient au Congo depuis 1994 et avaient subi, dans la souffrance, les attaques et la dispersion des camps de réfugiés. D'autres avaient fui au Congo avec les réfugiés, en 1997 et 1998. Un jeune orphelin de quatorze ans, originaire de Gisenyi a déclaré qu'il n'avait jamais appartenu à l'ALIR. Sa tante et sa grand-mère ont été tuées durant les combats de 1997 à Giciye, au Rwanda et il n'a pas d'autre famille. Il vivait dans un camp de réfugiés improvisé dans une forêt à Walikale. Un jour en mai 2001, il partit avec un autre garçon chercher de la nourriture et à son retour, il découvrit que les autres habitants du camp étaient partis. Seuls dans la forêt, ils rencontrèrent des soldats du gouvernement rwandais qui les accusèrent d'appartenir à l'ALIR. Selon l'enfant, les soldats ont refusé de croire qu'ils étaient des réfugiés et les ont battus. Les soldats ont emmené les enfants en détention à Goma et ensuite au Rwanda. L'enfant pensait qu'il serait remis aux responsables de l'ONU en charge des réfugiés et il fut surpris de se retrouver dans un camp de détention de l'armée.90

Les plus jeunes enfants rencontrés par les enquêteurs de Human Rights Watch avaient dix et onze ans. D'autres plus âgés étaient extrêmement petits en taille, probablement à cause de malnutrition et maladies fréquentes. L'un des enfants qui semblait avoir sept ans en avait, en fait, deux fois plus. Il a ainsi expliqué : "Je suis petit parce que je n'ai pas bien mangé."91 Tous étaient sales et mal habillés. L'un d'entre eux a demandé qu'on excuse son apparence en disant qu'il n'y avait pas eu d'eau ce matin là pour qu'il se lave le visage. Tous semblaient complètement épuisés. Durant les deux jours pendant lesquels les enquêteurs de Human Rights Watch ont conduit leurs entretiens, dans le camp où étaient détenus les enfants, des douzaines d'enfants sont restés debout ou passivement assis dans un champ proche. Plusieurs se sont endormis au soleil.

Les jeunes prisonniers ne se livraient à aucun des bavardages ou joyeuses bousculades caractéristiques des enfants de cet âge. Même assis en groupe, la plupart d'entre eux semblaient solitaires et comme coupés des autres. Beaucoup étaient orphelins. D'autres ne savaient pas si leurs parents ou d'autres membres de leurs familles étaient en vie et s'ils l'étaient, les enfants ne savaient pas où ils pouvaient se trouver. Un enfant sans nouvelles de son père depuis trois ans l'a retrouvé au camp militaire dans lequel ils étaient tous les deux détenus. Tout d'abord, son père ne l'a pas reconnu. Lorsqu'on demanda à un autre petit enfant d'où il venait au Rwanda, il répondit avec les noms de ses parents et un endroit à Kigali-rural. Il ajouta qu'il n'était pas certain de cette information mais que c'était ce que les autres, dans la forêt, lui avaient dit.92

La plupart des enfants les plus petits avaient été affectés à un combattant précis qui les nourrissait et pour lequel ils travaillaient. Mais souvent, ils ne connaissaient cette personne que par son rang, non pas par son nom. Un enfant fier d'avoir reçu un tee shirt bleu et orange désignait la personne qui le lui avait remis par le nom de "sergent". Beaucoup ne connaissaient pas les noms des autres enfants avec lesquels ils avaient passé des jours ou des semaines, comme s'ils pensaient qu'ils ne resteraient pas ensemble suffisamment longtemps pour qu'apprendre les noms de chacun vaille la peine. Un enfant de onze ans à qui l'on demanda d'identifier les autres enfants de son unité qui avaient été tués au combat deux semaines auparavant, répondit qu'il ne se souvenait plus de qui ils étaient.93

Recrutement des enfants

Certains des enfants ont été enlevés par des combattants de l'ALIR ; ils ont généralement été capturés chez eux au cours de raids et immédiatement contraints de servir de porteurs du butin. Un enfant congolais fut ainsi enlevé de chez lui à Kinigi, Bunyana, nord-Kivu pas plus tard que début juin 2001.94 D'autres enfants ont suivi les troupes à la recherche de nourriture et protection souvent après la mort de leurs parents ou après avoir été séparés de leurs familles. Un autre enfant a fui le Rwanda, avec sa mère, en 1998 et a vécu avec elle dans la forêt, de l'autre côté des volcans qui marquent la frontière avec le Congo. Un jour, alors qu'il était sorti pour chercher de la nourriture et du bois de feu, les soldats du gouvernement rwandais sont venus et ont forcé sa mère à rentrer au Rwanda. Il est rentré et a découvert qu'elle était partie. Il décida alors de se rendre dans un camp de l'ALIR proche. Après avoir passé quelque temps avec les combattants, il est tombé malade et a été laissé aux soins d'une famille congolaise. Ils sont revenus plus tard le reprendre et l'emmener afin qu'il serve de porteur.95 Comme l'illustre ce récit, les combattants pouvaient souvent trouver d'autres solutions que d'incorporer dans leurs rangs les enfants dans le besoin. Mais dans l'ensemble, ils ont plutôt choisi de les garder afin d'exploiter leur force de travail.

Formation des enfants

Pratiquement tous les enfants rencontrés par les enquêteurs de Human Rights Watch avaient appris le maniement des armes. L'un d'entre eux avait refusé d'apprendre "parce qu'il ne voulait pas répandre le sang."96 Un enfant de quatorze ans a déclaré avoir été sévèrement battu lorsqu'il a refusé d'apprendre à tirer mais à la fin, il n'a pas été forcé à le faire.97 Un enfant de treize ans a raconté qu'il n'avait pas appris à manier les armes parce qu'il avait été jugé trop jeune pour le faire. Ceci est inhabituel : des enfants de onze ans seulement ont appris à tirer. Beaucoup ont appris de façon informelle dans de petits groupes, habituellement dix par dix, dans les camps où ils vivaient. Un seul a dit avoir suivi trois mois de formation militaire avec cinquante-six autres enfants dans le camp de Kingingo, dans la forêt. En plus du maniement de plusieurs armes, il a appris des tactiques d'autodéfense et des régulations militaires. Selon cet enfant qui n'a que onze ans, l'entraînement a cessé un matin et les enfants sont partis ensemble pour le Rwanda, l'après midi même.98

Les enfants interrogés par les enquêteurs de Human Rights Watch avaient tous une compréhension différente de ce que signifiait cette guerre. Plusieurs pouvaient énoncer les buts politiques également cités par les combattants adultes : renverser un gouvernement répressif et mettre un terme à l'injustice. D'autres ont parlé en termes ethniques plus flagrants, disant que les Tutsi étaient plus "cruels" que les autres personnes. Un autre a déclaré qu'on lui avait appris que "les Hutu et les Tutsi sont des groupes ethniques différents et qu'il n'y aura jamais de bonnes relations entre eux." Un autre a raconté qu'il avait entendu des officiers à des postes de commandement dire que les Tutsi tuaient et emprisonnaient des gens au Rwanda. D'autres ont simplement dit qu'ils ne savaient pas à quoi servait cette guerre ou qu'ils étaient encore à la recherche d'une réponse à cette question.

Services rendus par les enfants

Il apparaît qu'en général l'ALIR n'a pas utilisé d'enfants de moins de seize ans dans les combats. Tant les enfants combattants que les adultes combattants ont indiqué que des enfants plus jeunes n'étaient pas officiellement enregistrés comme remplissant une fonction précise pour l'ALIR. Cependant, l'unité avancée connue sous le nom de Commando Recherche et Action Intensive semble avoir intégré des enfants plus jeunes dans ses rangs, peut-être parce qu'on pensait qu'ils seraient utiles dans la collecte d'informations, l'un des objectifs de cette unité. Des jeunes de dix-sept et dix-huit ans ont apparemment servi comme soldats réguliers. Selon un officier, il y avait trois enfants de ce type parmi ses quatre-vingt-un combattants.99

L'ALIR a utilisé les enfants les plus jeunes pour aller chercher de l'eau, remplir d'autres corvées domestiques et pour transporter des charges, certaines extrêmement lourdes. Un enfant qui a passé approximativement un an avec l'ALIR se souvient avoir changé de camp dix fois, au Congo avant de venir au Rwanda.100 Selon un jeune enfant, l'ordre leur a aussi été donné de crier et faire du bruit afin de distraire et effrayer leurs opposants, au cours des batailles. Un témoin qui a vu l'arrivée des premiers combattants, le 20 mai a dit qu'il y avait dix enfants qui transportaient des pots vides parmi un groupe de soixante-dix. Selon des récits de batailles au Congo, les enfants frappaient parfois sur des pots afin de faire diversion.101

Des enfants se sont plaints que les combattants de l'ALIR les battaient sévèrement s'ils faisaient mal quelque chose ou si les combattants étaient en colère pour une toute autre raison. Ils ont déclaré que certains enfants étaient morts de ces coups. D'autres ont affirmé qu'on les avait prévenus que quiconque essayant de s'échapper serait repris et tué.102

Un pas vers la réintégration: "Comme des fleurs arrosées"

Heureusement, la majorité des enfants de l'ALIR maintenant aux mains des autorités rwandaises ne sont pas des soldats endurcis. Bien qu'ils aient souffert de graves privations et aient vu beaucoup de morts et de malheurs, la plupart n'ont effectivement participé à des combats qu'à deux ou trois reprises. A la différence des tragiques enfants de Sierra Leone ou de ceux de la Lord's Resistance Army dans le nord de l'Ouganda et le sud Soudan, ils n'ont pas été formés à commettre des atrocités et n'ont pas commis de tels actes.

A la mi-août, les autorités rwandaises ont déplacé les enfants vers le centre de Gitagata, au sud de Kigali où ils vont passer une année à être "rééduqués", à aller à l'école ou à apprendre un métier. Selon une annonce faite par le gouvernement le 13 août, le centre fournira aussi des services aux centaines d'enfants des rues récemment rassemblés dans la capitale et dans d'autres villes ainsi qu'aux enfants de moins de quatorze ans qui ont été reconnus coupables de crimes.103

A peu près un mois après la prise en charge des premiers enfants, l'UNICEF a commencé à fournir de la nourriture, des vêtements et des médicaments pour les enfants et continué à apporter son assistance au centre de Gitagata.104

Un enquêteur de Human Rights Watch qui a rendu visite aux enfants à Gitagata, fin août, a constaté qu'ils mangeaient régulièrement et qu'ils dormaient dans des lits avec des draps. Ils avaient accès à des soins médicaux plus complets que ceux disponibles dans les camps où ils étaient préalablement logés. Des services en matière d'enseignement, de conseil et d'appui psychosocial étaient en cours de planification par les agences humanitaires internationales. Ces services n'étaient pas encore disponibles mais un groupe artistique était présent pour chanter, danser et jouer du tambour avec les enfants. Selon le commentaire d'un observateur, les enfants "ressemblaient à des fleurs arrosées."105

Début décembre, les familles de plus d'une centaine d'enfants avaient été localisées et étaient prêtes à réintégrer leurs fils mais le gouvernement insista pour que les garçons restent à Gitagata. Un enfant seulement, la seule fille sur plus de 200 enfants, fut autorisé à rentrer dans sa famille. Elle a déclaré être réfugiée et n'avoir jamais participé aux forces de l'ALIR. Peu après son arrivée à Gitagata, elle a été harcelée par des garçons du camp. Fin août, après de fortes pressions de l'UNICEF, les autorités rwandaises lui ont permis de rejoindre sa mère, à Gisenyi.

La plupart des enfants viennent du nord-ouest du Rwanda. S'ils ont encore des membres de leurs familles, ceux-ci sont susceptibles de vivre là-bas, loin de Gitagata. Cette distance va compliquer la mise en place de contacts réguliers entre les enfants et les membres de leurs familles, contacts qui sont pourtant nécessaires pour préparer la réintégration de ces enfants dans leurs communautés. L'UNICEF fait pression sur le gouvernement pour qu'il permette les visites des familles et fournissent d'autres activités qui rendront plus facile la réintégration des enfants dans leurs familles, après leur départ du camp.

Le nombre d'orphelins au Rwanda est estimé à 400 000. Ils vivent dans des ménages dont le chef de famille est un enfant, dans des familles d'accueil, chez leurs patrons comme domestiques ou dans les rues. Beaucoup d'entre eux sont victimes de graves abus et exploités. Le défi pour le gouvernement rwandais et pour la communauté internationale sera de trouver des solutions durables pour ces enfants dans le besoin, nouvellement arrivés et pour tous les autres qui vont, sans aucun doute, les suivre si la guerre continue.

60 Radio Rwanda, Journal du soir, 10 juillet 2001.

61 Entretien téléphonique conduit par Human Rights Watch, Kigali, 29 juin 2001.

62 Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001.

63 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 10 juillet 2001.

64 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin et Kigali, 22 juin 2001.

65 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 10 juillet 2001.

66 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 10 juillet 2001.

67 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin 2001 et Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

68 Entretiens conduits par Human Rights Watch et notes de terrain, Gisenyi, 8 juin 2001 ; Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

69 Entretiens conduits par Human Rights Watch et notes de terrain, Gisenyi, 8 juin 2001 ; Ruhengeri, 18-19 juin 2001 et 9 juillet 2001.

70 Radio Rwanda, Journal du soir, 16 juillet 2001.

71 Entretien téléphonique conduit par Human Rights Watch, Gisenyi, 14 août 2001.

72 Entretiens conduits par Human Rights Watch et notes de terrain, Gisenyi, 8 juin 2001 ; Ruhengeri, 18-19 juin 2001 et 9 juillet 2001.

73 Bar, "La victoire par les mots : le Rwanda se renforce contre les ennemis de l'autre côté de la frontière".

74 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001.

75 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 10 juillet 2001.

76 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 23 mai 2001 et Gisenyi, 24-25 mai 2001 ; Hervé Bar, "La victoire par les mots : le Rwanda se renforce contre les ennemis de l'autre côté de la frontière", Agence France Presse, 30 juin 2001 ; Radio Rwanda, Journal du soir, 21 mai, 12 juin et 7 juillet 2001, Journal du matin, 8 juillet 2001.

77 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 23 mai 2001 et Gisenyi, 8 juin 2001.

78 Radio Rwanda, Journal du soir, 7 juillet 2001.

79 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 25 mai et 18 juin 2001.

80 Voir Human Rights Watch, « Rwanda : De la recherche de la sécurité aux abus des droits de l'homme, » vol. 12, no. 1, avril 2000. Le Rwanda est partie au Protocole Additionnel I des Conventions de Genève qui interdit, dans l'article 77, le recrutement des enfants de moins de dix-huit ans et exige que toutes les mesures possibles soient prises pour s'assurer que les enfants de moins de quinze ans ne prennent pas directement part aux hostilités. Le Rwanda a ratifié la Convention relative aux droits et à la protection de l'enfant qui contient des interdictions similaires dans son article 38. Le Rwanda a signé mais non ratifié la Charte africaine relative aux droits et à la protection de l'enfant qui exige des états parties qu'ils ne recrutent pas d'enfants, définis comme personnes de moins de dix-huit ans et qu'ils prennent toutes les mesures nécessaires pour s'assurer qu'aucun enfant ne participe aux hostilités. En recrutant des enfants pour les Forces de Défense Locale, le Rwanda viole ces conventions et règles internationales.

81 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin 2001, et Ruhengeri, 19 juin 2001

82 "A Gisenyi, les Infiltrés ont tué un 'Local Defense'," Umuseso, No. 47, 25 juin-1er juillet 2001.

83 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 25 mai et 9-10 juillet 2001.

84 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 10 juillet 2001.

85 Article 4(3) (c-d), Protocole II des Conventions de Genève qui s'applique à toutes les forces dans un conflit armé non international.

86 Résolution 44/25 de l'Assemblée Générale en date du 20 novembre 1989, 44 U.N. GAOR Supp (No. 49) à 167, U.N. Doc. A/44/49 (1989) entrée en vigueur le 2 septembre 1990. Le Protocole Facultatif à cette Convention fixe à dix-huit ans l'âge minimum pour le recrutement ou l'utilisation d'enfants dans des hostilités, que ce soit par des acteurs non-gouvernementaux aussi bien que par des forces gouvernementales.

87 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 19 juin 2001.

88 Entretien téléphonique conduit par Human Rights Watch, Gisenyi, 14 août 2001.

89 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin 2001 et Ruhengeri, 18-19 juin, 9-10 juillet 2001.

90 Entretien conduit par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin 2001.

91 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001.

92 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001

93 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

94 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin et Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

95 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001.

96 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18 juin 2001.

97 Entretien conduit par Human Rights Watch, Gitagata, Kigali-rural, 23 août 2001.

98 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin et Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

99 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Ruhengeri, 18-19 juin 2001 et 9 juillet 2001 ; Kigali, 24 juillet, 2001.

100 Entretien conduit par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin 2001.

101 Entretien conduit par Human Rights Watch, Ruhengeri, 23 mai 2001.

102 Entretiens conduits par Human Rights Watch, Gisenyi, 8 juin et Ruhengeri, 18-19 juin 2001.

103 Radio Rwanda, Journal du matin, 13 août 2001.

104 Entretien conduit par Human Rights Watch, Kigali, 28 juin 2001.

105 Human Rights Watch, notes de terrain, Gitagata, 23 août 2001.

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