Rapports de Human Rights Watch

VII. Action récente du gouvernement

Le projet de code pénal

Au moment de la rédaction du présent rapport, des propositions d’amendements au code pénal, déjà approuvées par le conseil des ministres, étaient à l’étude au parlement burundais. Préparées par des experts juridiques burundais conjointement avec du personnel du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, ces propositions visent à s’attaquer aux inégalités et aux lacunes présentes dans le code pénal actuel, qui date de 1981.121

Les amendements proposés apportent quelques profonds changements au niveau du traitement des enfants en conflit avec la loi. Ils feraient passer l’âge de la responsabilité pénale de 13 à 15 ans et réduiraient les peines d’emprisonnement encourues par les jeunes de 15 à 18 ans à un quart de la peine réservée à un adulte reconnu coupable du même délit.122 Mais le plus important, c’est que les propositions d’amendements prévoient des alternatives à l’incarcération dans les prisons, notamment la possibilité de placer les enfants en conflit avec la loi dans des familles d’accueil ou des institutions spécialisées. Elles demandent qu’en lieu et place d’une incarcération, un enfant condamné à un an de prison ou moins doive réaliser un travail d’intérêt général, dont la nature serait déterminée par un juge en fonction de l’âge et du milieu social de l’enfant.123

S’ils venaient à être adoptés, ces amendements pourraient constituer un progrès considérable dans le sens d’une meilleure gestion du problème des enfants en conflit avec la loi au Burundi. Apporter des modifications à la loi n’est toutefois que le premier pas. Encore faut-il mettre en œuvre effectivement les dispositions prévues, notamment les alternatives à la prison. Des institutions spécialisées devraient être créées ainsi que des services chargés de trouver et de superviser les familles d’accueil et de contrôler les conditions dans lesquelles s’opèrent les travaux d’intérêt général.  Pour ce faire, un soutien considérable des bailleurs de fonds serait nécessaire.

Initiatives présidentielles pour libérer des prisonniers

Le président a récemment annoncé deux mesures visant à réduire la surpopulation carcérale et à s’attaquer au problème de la période excessivement longue de détention préventive. Le 22 décembre 2006, le Président Nkurunziza a ordonné la libération de plusieurs catégories de prisonniers, notamment ceux reconnus coupables et condamnés pour des délits commis lorsqu’ils étaient âgés de moins de quinze ans.124 

Cette mesure affectera un nombre relativement faible d’enfants étant donné que seuls 83 des 401 enfants emprisonnés en décembre 2006 avaient été jugés, et pas tous pour des délits commis lorsqu’ils avaient moins de 15 ans.125 Le Ministère de la Justice a mis sur pied une commission chargée de dresser une liste des prisonniers remplissant les conditions mais on ignore quand et selon quelle procédure les enfants seront libérés.126

Dans le cadre de la seconde mesure annoncée le 31 décembre 2006, le président a donné pour directive aux autorités judiciaires d’identifier les prisonniers qui se trouvent en détention préventive depuis longtemps, en violation de la loi. A l’occasion d’un discours de Nouvel-An à la nation, il a déclaré que ces prisonniers bénéficieraient d’une liberté provisoire en attendant leur procès.127 Le ministre de la justice et garde des sceaux a par la suite fait savoir que les personnes accusées de crimes violents, notamment de meurtre, de viol et d’attaque à main armée, seraient exclues de cette mesure.128 Au moment de la rédaction du présent rapport, des fonctionnaires de la justice identifiaient les prisonniers satisfaisant aux conditions et les libérations devaient commencer incessamment.129

La seconde mesure mettra fin à la détention illégale de certaines personnes, enfants comme adultes, emprisonnées bien au-delà des limites prescrites par la loi. Elle devrait en outre réduire la population carcérale et par voie de conséquence, améliorer, ne fût-ce que légèrement, les conditions d’incarcération. Le degré d’amélioration dépendra, du moins en partie, du nombre de nouvelles personnes arrêtées et placées en détention. Selon les données recueillies par une organisation locale, en 2005, les autorités avaient libéré 2 796 prisonniers mais à la fin de la même année, elles avaient incarcéré 2 568 nouveaux détenus, minant ainsi considérablement les améliorations résultant des libérations antérieures.130

Certes, ces deux initiatives constituent des mesures importantes en soi, mais elles n’abordent guère le problème des violations des droits de l’enfant qui surviennent régulièrement dans le système judiciaire. Elles ne débouchent pas non plus sur une réforme systématique de l’appareil judiciaire, nécessaire pour se conformer aux normes internationales relatives à la justice pour mineurs.




121 « Le Burundi envisage d’abolir la peine de mort », AngolaPress, 8 février 2007 ; « Termes de référence pour la rédaction des avant-projets de lois portant révision intégrale de Code Pénal et Harmonisation du Code de procédure pénale” », p. 1 (Document disponible auprès de Human Rights Watch). La prochaine tâche de ce groupe sera de commencer à travailler à la révision du Code de procédure pénale.

122 Avant-projet de loi portant code pénal du Burundi (Avant-projet), novembre 2006, art. 28. et 29.

123 Avant-projet, art. 51,  98-100. La loi stipule que chaque mois de prison est équivalent à 20 heures de travaux d’intérêt général et que le temps consacré à effectuer des travaux d’intérêt général ne peut pas dépasser 240 heures.

124 Décret no. 100/360 « portant mesures de grâce », 22 décembre 2006. Ce décret commue également les peines des condamnés à mort en 15 ans de prison et réduit les peines de diverses catégories de prisonniers.

125 Chiffres fournis par le Directeur Général des Affaires Pénitentiaires au 31 décembre 2006.

126 Création d’une commission chargée de la mise en application de la grâce présidentielle, Agence France Presse, 18 janvier 2007.

127 « Message du chef de l’Etat à la Nation », Agence Burundaise de Presse, 1er janvier 2007.

128 Lettre circulaire, No. 550/73/CAB/2007 du Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Clotilde Niragira, à tous les responsables de la justice et des prisons, 9 février 2007 (Document disponible auprès de Human Rights Watch).

129 Ibid.

130 Entretien de Human Rights Watch avec Pierre-Claver Mbonimpa, 22 février 2006.