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RAPPELS

Le Grand Darfour, territoire composé de trois Etats (le nord, le sud et le Darfour occidental) est situé dans le nord-ouest du Soudan, bordé par le Tchad à l’ouest, la Libye au nord-est et la République centrafricaine au sud-ouest.1 Les populations vivant de part et d’autre des 1.000 km de frontières communes entre le Tchad et le Soudan ont beaucoup en commun. Cette région frontalière est divisée en trois ensembles géographiques : le désert au nord, qui appartient au Sahara, est le moins densément peuplé des trois mais aussi le plus fragile au plan écologique ; une ceinture fertile au centre, qui englobe les montagnes du Djebel Marra, constitue le plus riche ; enfin, la zone du sud, bien que plus stable que le nord, est elle aussi soumise à la sécheresse et à des précipitations irrégulières.

Plusieurs des groupes ethniques vivent à cheval sur la frontière entre le Tchad et le Soudan et il y a toujours eu, dans l’histoire, des migrations et des échanges commerciaux entre les deux pays. Bien que les populations de la région soient surtout musulmanes, elles sont d’ethnies, de langues et de cultures diverses. Les gens du Darfour ont deux façons de se définir ethniquement : par leur langue et par leur profession. Ainsi, à l’origine, les autochtones non-arabes ou les populations africaines ne parlent pas arabes chez elles et sont arrivées au Soudan il y a plusieurs siècles en provenance de la région du Lac Tchad ; ceux qui se revendiquent d’ascendance arabe, en revanche, sont arabophones. Mais ces descriptions méritent d’être nuancées.

Les cultivateurs sédentaires du Darfour regroupent généralement des ethnies non arabes connues sous le nom de “Zurga”, les « noirs » et comprennent des groupes comme les Four, les Massalit, les Tama, les Tunjur, les Bergid et les Berti, qui vivent et travaillent la terre dans la zone centrale. Les régions d’élevage sont, elles, surtout peuplées de descendants d’Arabes et la ceinture nord, la zone la plus aride, est peuplée par des tribus nomades et semi-nomades d’éleveurs de chameaux, dont des groupes arabes comme les Rizeigat dans le nord, les Mahariya, les Irayqat et les Beni Hussein, ainsi que les Zaghawa, qui eux sont africains. Les zones méridionale et orientale sont encore largement peuplées par des tribus arabes d’éleveurs connues comme les Rizeigat du sud (du Baggara), les Habbaniya et les Beni Halba.2

Au cours de l’année écoulée, alors que le conflit dans le Darfour s’intensifiait, les tribus visées comme les Four, les Masaslit et les Zaghawa ont commencé à se présenter d’elles-mêmes comme des « Africains » et des « marginaux », à l’inverse de leur définition initiale en tant que Soudanais ou Darfouriens. De plus en plus, elles ont considéré les attaques du Gouvernement soudanais contre leurs communautés comme des attaques ethniquement et racialement motivées.

Les origines historiques du conflit

Depuis plusieurs décennies, le Darfour connaît des phases intermittentes de conflit. Les pasteurs du nord, dont les Rizeigat, les Mahariya, les Zaghawa et autres, descendent traditionnellement vers le sud en quête d’eau au moment de la saison sèche (théoriquement de novembre à avril). A partir du milieu des années 80, alors que le Sahel était en grande partie frappé par des épisodes récurrents de sécheresse et une désertification galopante, ces migrations vers le sud des pasteurs arabes ont provoqué des conflits de terres avec les communautés de cultivateurs. Ces querelles éclataient généralement quand les chameaux ou le bétail des nomades arabes piétinaient les champs des fermiers non-arabes dans les zones centrales et méridionales du Darfour.

Le plus souvent, ces disputes se résolvaient par la négociation entre les chefs traditionnels des deux côtés, le versement d’une compensation pour les cultures perdues et un accord sur le calendrier et les routes empruntées pour la migration annuelle. Au milieu des années 80, cependant, les conflits sont devenus progressivement plus sanglants à cause de l’irruption des armes automatiques. En 1987, la plupart de ces incidents n’impliquaient plus seulement les tribus arabes mais aussi les pasteurs Zaghawa, qui essayaient de réclamer des terres aux cultivateurs Four ; certains leaders Four furent même tués. L’éclosion du banditisme armé dans la région date lui aussi de cette période, en partie parce que de nombreux pasteurs ont perdu leur bétail lors de la sécheresse qui a dévasté le Darfour en 1984-1985 et qu’ils ont alors mené des raids contre les troupeaux des autres pour tenter de reconstituer le leur.3

Par ailleurs, plusieurs contentieux politiques couvaient au Darfour. Les tribus arabes considérant qu’elles n’étaient pas assez représentées au sein de l’administration locale, dominée par les Four, plusieurs d’entre elles ont formé en 1986 ce qui est devenu « l’Alliance arabe » (Tujammo al Arabi), visant à asseoir leur domination politique et leur contrôle sur la région. Dans le même temps, les chefs Four se méfiaient de la tendance croissante du gouvernement fédéral à favoriser les Arabes. Les Arabes de la vallée du Nil contrôlent de fait le gouvernement central depuis l’indépendance.

Cette crainte de la domination arabe fut exacerbée par la politique du gouvernement de Sadek al Mahdi (1986-89) consistant à armer les milices des arabes Baggara du Darfour et du Kordofan, connues comme les “murahelin.” Semblables à celles actuellement en cause dans le conflit du Darfour, les murahelin constituaient une milice basée utilisée dans le Darfour par le gouvernement d’El Mahdi et par les gouvernements militaires successifs, pendant près de vingt ans, pour contrer la rébellion du sud, l’Armée populaire de libération du Soudan (SPLA). Initialement, les murahelin s’en prenaient surtout aux civils Dinka et Nuer vivant en zone SPLA, qu’ils attaquaient, pillaient, déplaçaient, réduisaient en esclavage, les forces de la SPLA provenant essentiellement de ces deux communautés.4  L’une des différences notables cependant de ce conflit est que le gouvernement central recrutait des volontaires pour les combats dans le sud au nom du Jihad, la guerre sainte, contre les populations méridionales non musulmanes. Dans le Darfour en revanche, les communautés qui subissent les attaques sont, elles aussi, musulmanes.  Mais ceci n’a pas semblé devoir les protéger des mêmes tactiques abusives.

En 1988-1989, les affrontements sporadiques dans le Darfour ont cédé la place à un conflit à grande échelle entre les Four et les communautés arabes. La situation a pris également un tour plus politique pour plusieurs raisons. Conformément à un schéma qui devait être reproduit à de multiples reprises au cours des années 1990, le Gouvernement de Khartoum, au lieu d’œuvrer à réduire les tensions et à mettre en place des accords de paix, les a alimentées en armant les tribus arabes et en négligeant de traiter les questions-clé à l’origine du conflit : la nécessaire promotion d’un état de droit et le développement socio-économique de la région.

Le conflit en 2003: les antagonismes se creusent

Le conflit actuel dans le Darfour a de vieilles et profondes racines et n’est que le dernier avatar d’un problème récurrent. Pourtant, plusieurs différences importantes distinguent le conflit de 2003-2004 des précédentes flambées de violence. Le conflit, dans sa forme actuelle, a pris une grave tournure raciale et ethnique et menace clairement de mettre en péril le fragile modèle traditionnel de coexistence. Plusieurs groupes ethniques, neutres auparavant, prennent maintenant position pour ou contre les Arabes ou les Africains, s’alignant et coopérant soit avec des groupes rebelles soit avec le gouvernement et ses milices. Rester neutre ou hors du conflit devient impossible, bien que certaines communautés essaient encore.

Le conflit du Darfour oppose ouvertement le Gouvernement du Soudan et ses milices alliées, les  “janjawids,”5 aux insurgés regroupés en deux mouvements : l’Armée/Mouvement pour la libération du Soudan (A/MLS) et le Mouvement pour la Justice et l’Egalité (MJE).  A l’origine, les groupes rebelles étaient surtout composés de trois groupes ethniques : les Zaghawa, les Four et les Massalit. Cependant, au fil des derniers mois, des tribus plus modestes comme les Jebel et les Dorok ont, elles-aussi, rejoint les rébellions après avoir été attaquées par les milices janjawids.6  D’autres tribus arabes et même quelques unes non arabes ont également rejoint les rangs de la milice pro-gouvernementale.

L’A/MLS est apparu en février 2003. Initialement appelé Front de libération du Darfour, il a pris la ville de Gulu et, peu après, est devenu l’A/MLS.  Ses revendications politiques initiales concernaient le développement socio-économique de la région, le démantèlement des milices tribales et le partage du pouvoir avec le gouvernement central.  Mais pour Khartoum, ces gens étaient des « bandits » et il n’était pas question de négocier.  En avril 2003, l’A/MLS a lancé une attaque surprise contre El Facher, capitale du Darfour nord et endommagé plusieurs avions Antonov et hélicoptères appartenant au gouvernement, pillé des entrepôts de carburants et des dépôts d’armes. Les rebelles, qui avaient capturé un colonel des forces aériennes soudanaises, ont exigé de pouvoir donner un entretien à la chaîne d’information télévisée arabe par satellite al- Jezzira. Cet épisode fut suivi par une autre attaque d’envergure sur Mellit, deuxième ville du Darfour nord, où les rebelles du A/MLS pillèrent là aussi les stocks de vivres et d’armes. En mai 2003, le Gouvernement soudanais limogea les gouverneurs des provinces du Darfour nord et du Darfour occidental ainsi que plusieurs responsables de haut rang et renforça sa présence militaire dans la région.

Le conflit s’est intensifié en juillet 2003, avec des combats concentrés dans le Darfour nord. Le gouvernement a lancé des offensives contre l’A/MLS à Oum Barou, Tine et Karnoi, dans le Darfour nord, en représailles aux attaques de l’A/MLS sur El Facher, Mellit, autour de Kutum et Tine (cette ville se trouvant à cheval sur la frontière avec le Tchad le long d’une route commerciale importante avec la Libye).  La réponse du Gouvernement a consisté en bombardements depuis des avions Antonov et à des offensives terrestres menées par les troupes gouvernementales lourdement équipées, notamment de chars. L’armement du gouvernement s’est substantiellement amélioré depuis 1999, date à laquelle il a commencé à exporter le pétrole soudanais et il était d’autant plus en mesure de se déployer dans l’ouest qu’il avait signé un accord de cessez-le-feu dans le sud avec la SPLA à la fin 2002.7

Les milices janjawids ont été également utilisées, mais dans une moindre mesure comparé à la deuxième moitié de l’année 2003, à la fois dans le Darfour nord et dans le Darfour occidental. Les vagues de bombardements dans le Darfour nord ont amené des milliers de civils à fuir la région pour gagner le Tchad qui, en août 2003, accueillait 65.000 réfugiés soudanais.8 

Les liens avec le Tchad

Si le Gouvernement du Soudan, ses milices et les groupes rebelles sont les principaux acteurs du conflit, il faut aussi compter avec plusieurs influences et implications extérieures. Parmi elles, les communautés civiles tchadiennes alignées sur chacun des deux camps, les autorités tchadiennes, les membres des forces armées tchadiennes et certainement d’autres acteurs voisins ou régionaux, des groupes armés agissant sur la frontière et profitant du délitement de la loi et de l’autorité pour piller et voler, notamment le bétail et les animaux.

Traditionnellement, le Darfour a servi de base aux coups d’Etat et insurrections au Tchad.9 Le Président tchadien Idriss Deby, lui-même issu du clan Bideyat des Zaghawa, dans le nord-est du Tchad, est arrivé au pouvoir en 1990 grâce à une insurrection armée fomentée dans le Darfour, avec le soutien de Khartoum, qui a renversé l’ex-président Hissène Habré. Les groupes rebelles de l’A/MLS et du MJE étaient initialement dominés par les Zaghawa et bénéficiaient du soutien des Zaghawa du Tchad : ainsi, nombre de Zaghawa ont été incorporés officieusement aux forces armées tchadiennes par Idriss Deby et ont ensuite joué un rôle important dans chacun des deux mouvements. La SPLA aurait aussi apporté un soutien important à l’A/MLS à ses débuts, même si ce soutien s’est sans doute beaucoup atténué depuis le début des pourparlers de paix entre la rébellion du sud et les autorités soudanaises.10

Malgré son implication dans cette situation complexe, les premières négociations internationales se sont tenues au Tchad et sous médiation tchadienne en septembre 2003, après plusieurs tentatives internationales ratées de lancer une médiation soudanaise. Les pourparlers d’Abéché – du nom de la capitale régionale tchadienne la plus proche du Darfour – avaient abouti à un accord entre le Gouvernement du Soudan et l’A/MLS prévoyant un cessez-le-feu, le déplacement  des forces, le contrôle de milices et l’engagement d’accélérer le développement économique et social de la région.  Bien que les combats entre les forces gouvernementales et l’A/MLS cessèrent temporairement après l’accord signé en septembre 2003, les attaques des milices  janjawids se poursuivirent dans  les régions de Zalingei, dans le Darfour occidental et près de Nyala, capitale du Darfour sud, au début septembre et en octobre 2003.  Le cessez-le-feu fut prolongé d’un mois au début novembre mais, au même moment, l’activité des milices augmenta avec des attaques d’envergure dans le Darfour Occidental, rendant l’accord caduque.

La réponse musclée de Khartoum

Les autorités civiles et militaires du Gouvernement actuel considèreraient la rébellion du Darfour comme une « menace au régime » en place. Les rebelles du Darfour constituent une menace bien plus sérieuse à leur maintien au pouvoir que la rébellion de la SPLA, confinée au sud, ne l’a jamais fait. Le MJE, l’A/MLS et la perspective de leur coalition unie au Darfour qui pourrait gagner le soutien d’autres tribus dans l’ouest et d’Etats comme celui de Kordofan, inquiètent profondément Khartoum étant donné que ces populations sont musulmanes et, par conséquent, ne peuvent être aussi facilement désignées ou invectivées comme les « infidèles » du sud.

Les rebelles et les communautés dont ils sont issus pensent pour leur part que le fondement réel de ce conflit est la volonté profonde d’arabisation de ce gouvernement du Soudan et des précédents. Les rebelles ne sont pas arabes et ils ont été considérés à Khartoum, où ils avaient fui les sécheresses du Darfour au début des années 80, comme une présence incontrôlable et menaçante et comme des citoyens de seconde zone dans une ville arabe.

Sur la réponse de Khartoum aux événements du Darfour plane, en filigrane, le spectre du Dr Hassan al-Tourabi,11 éminence grise et initiateur du mouvement islamiste au Soudan. Si ses relations directes avec les rebelles du MEJ, dont beaucoup étaient membres du parti politique de Tourabi, sont troubles et s’il dément tout lien avec eux,  le Gouvernement redoute que le politicien roué qu’il est trouve un moyen de revenir au pouvoir par le biais du conflit au Darfour : des rumeurs circulent déjà affirmant que, selon de récentes découvertes, Tourabi, n’est pas un véritable arabe. 

Une autre ombre plane sur le gouvernement soudanais, celle des Zaghawa, moins menaçante cependant que celle de Tourabi.  Il est difficile encore d’établir si certains éléments ou si la totalité des Zaghawa participent à la rébellion dans le Darfour pour des raisons purement locales ou pour parvenir au pouvoir à Khartoum, comme ils l’ont fait au Tchad. La communauté Zaghawa, bien que pauvre, comprend beaucoup de commerçants transfrontaliers et est davantage organisée que d’autres au Soudan.

Le MJE, dominé par les Zaghawa et apparu en 2003 après l’A/MLS, aurait un agenda politique solide alors que l’MLS pèserait surtout par sa force militaire. Le MJE n’était pas signataire de l’accord d’Abéché et aurait eu plusieurs affrontements sévères avec les milices janjawids pendant la période de cessez-le-feu.  Ce groupe a également accru ses forces, en partie par le recrutement de membres de l’A/MLS mécontents des concessions consenties par leurs dirigeants. Pour certains analystes, les divergences entre le MJE et l’A/MLS portent plus sur les tactiques de négociations que sur l’idéologie ; néanmoins, récemment, les deux groupes ont paru coordonner de plus en plus leurs activités ce qui a laissé penser qu’ils pourraient être en train ou ont déjà commencé de fusionner.12

Au début décembre 2003, toute prétention à maintenir le cessez-le-feu s’était évanouie et les pourparlers prévus dans la capitale tchadienne, N’Djamena, avaient échoué sans qu’un dialogue sérieux n’ait été amorcé.  Peu après, le président soudanais Omar al Bechir jura d’écraser la rébellion13 et à la mi-janvier 2004, le Gouvernement lança une offensive d’envergure contre les fiefs rebelles dans le Darfour Nord, misant sur une solution militaire. Parallèlement, en décembre 2003, les attaques des milices janjawids sur les villes et villages du Darfour occidental augmentèrent également, suscitant de nouveaux mouvements de déplacés le long et au sud de la route reliant Geneina à Nyala. 

A la fin février 2004, les estimations sur le nombre de déplacés du Darfour s’élevaient à plus de 750.000, dont la plupart restaient exposés aux attaques et aux pillages mêmes après avoir fui leurs foyers.14 Au Tchad, le nombre de réfugiés a presque doublé pour atteindre 110.000, dont 30.000 nouvellement arrivés en décembre 2003 et plus de 18.000 à la fin janvier, suite à l’offensive gouvernementale.15

Le 9 février 2004, le Président al Bechir a annoncé la victoire et déclaré que la guerre était terminée et que les réfugiés pouvaient être promptement rapatriés. A ce jour, cependant, les combats entre les forces gouvernementales et les groupes rebelles se poursuivaient et de nouveaux affrontements étaient signalés en mars 2004 autour de Nyala, Kubum, El Facher et dans d’autres zones.




[1] Le Darfour est une immense région, de la taille de la France environ, dont la population est estimée à quatre ou cinq millions de personnes.

[2] Chaque groupe de population autochtone a un “dar,” un territoire. Par exemple, Darfour signifie le Territoire des Fours, principal groupe ethnique de cette province, qui réside dans le centre autour des monts du Djebel Marra. Le Territoire des Four a été administrativement subdivisé entre le Darfour nord, le Darfour occidental et le sud Darfour par le gouvernement fédéral dans les années 1990. Le territoire des Massalit, est situé principalement dans le Darfour occidental, autour de Geneina et Adré dans l’est du Tchad (la frontière entre Tchad et Soudan passe au milieu du territoire Massalit). Enfin, le territoire Zaghawa se situe dans le Darfour nord.

[3] Africa Watch (devenu Human Rights Watch/ Division Afrique), “The Forgotten War in DarFour Flares Again,” A Human Rights Watch Report, Vol. 2, No. 11(A), Avril 1990. Ce rapport note que “en janvier 1988, le journal al Ayyam estimait à 50.000 environ le nombre d’armes modernes disponibles au Darfour, soit une arme pour seize adultes mâles.”(p.3) Actuellement, après vingt ans de guerre au sud Soudan et plusieurs décennies de conflit au Tchad, il n’y a aucun doute que bien davantage sont en circulation..

[4] Les muraheleen étaient en grande partie issue des communautés Rizeigat et Miserriya Baggara du Darfour sud et de Kordofan ; ils ont commencé à s’en prendre aux Four dans le Darfour à la fin des années 80.  Le Front national islamique (FNI, rebaptisé Congrès National) au pouvoir a incorporé un grand nombre de miliciens muraheleen dans les Forces de défense populaires, groupes paramilitaires connus pour leurs atrocités rapportées par de nombreuses organisations.

[5] De nombreuses orthographes circulent pour les “janjawids”. Le terme fait référence à des cavaliers armés. Un arabophone a expliqué à Human Rights Watch que “jan” évoquait le fusil et “jawid” le cheval. Un Darfourien érudit spécialiste du Darfour a fait valoir que « janjawid » était aussi le terme utilisé pour parler des hors-la-loi. (Dr Ali Dinar, Washington, DC, février 2004.)

[6] Pour compliquer encore davantage les lignes de partage ethniques et raciales, certains groupes africains, comme les Gimr, sont alliés au Gouvernement et certains groupes arabes auraient plutôt des sympathies pour l’A/MLS et auraient refusé de collaborer avec les janjawids.

[7] Human Rights Watch, Sudan, Oil, and Human Rights (Human Rights Watch, New York 2003).

[8] Note de briefing de l’UNHCR, 30 janvier 2004 – voir: http://www.reliefweb.int/w/rwb.nsf/3a81e21068ec1871c1256633003c1c6f/08fcc96a2b272b0dc1256e2b0052fbe3?OpenDocument (consulté le 26 mars 2004).

[9] Plusieurs groupes ethniques sont à cheval sur la frontière, comme les Zaghawa dans le nord-est, les Massalit autour et au sud d’Adré, ainsi que les nombreux sous-clans de tribus arabes comme les Iraygat, les Rizeigat et les Misseriya, ce qui constitue un élément important dans les événements politiques de part et d’autre.  Le clan d’Idriss Deby est modeste mais si d’autres groupes Zaghawa sont plus importants, ils restent malgré tout minoritaires au Tchad.

[10] Entretien téléphonique avec Human Rights Watch, 10 mars 2004. La SPLA a été mise en garde par les médiateurs américains contre toute implication au Darfour, lors des pourparlers de paix avec Khartoum qui se tiennent au Kenya depuis juin 2002 sous les auspices de l’Autorité inter-gouvernementale de développement (IGAD, sept pays).

[11] Tourabi, leader du mouvement islamiste au Soudan et ancien responsable de l’Assemblée nationale, a été le mentor du président al Bechir jusqu’à ce qu’il tombe en disgrâce fin 1999, pour avoir voulu arracher le pouvoir au chef de l’Etat au moyen de machinations à l’Assemblée nationale. Ses anciens alliés, peut-être parce qu’ils sentaient qu’il était temps de mettre de côté cet homme de 70 ans, l’ont laissé tomber. Le président al Bechir a décrété l’état d’urgence et suspendu l’Assemblée nationale pendant quelques années. Hassan Tourabi a alors formé son propre parti  avec ses partisans islamistes, le Congrès national populaire (CNP) et a commencé à défier le gouvernement en lançant des grèves de professeurs dans les capitales régionales ou autres, prétendant représenter le véritable courant islamiste. Mais quand Tourabi a signé un accord avec le colonel John Garang qui dirige la SPLA, en février 2001, ses ennemis au sein du gouvernement en ont profité pour le jeter en prison en l’accusant de « trahison ». Bien que la Cour constitutionnelle ait ordonné sa remise en liberté l’année suivante, le gouvernement l’a maintenu en prison en vertu d’un ordre exécutif, en contradiction avec les normes nationales et internationales de protection des droits humains. Il demeura donc en prison et des centaines de ses partisans du CNP avec lui, jusqu’à la fin 2003.  Le 31 mars 2004, le Gouvernement du Soudan a de nouveau arrêté Tourabi et  au moins six responsables du CNP, accusés de préparer un coup d’Etat. Le 31 mars correspondait à l’ouverture des pourparlers de paix avec les rebelles au Tchad. Le Gouvernement ne s’y présenta pas.

[12] Entretien téléphonique avec Human Rights Watch, 10 mars  2004.

[13] Agence France-Presse, “Le président soudanais veut anéantir la rébellion au Darfour”, 31 décembre 2003.

[14] Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), “Relief Supplies being stolen from recipients in DarFour,” 27 février 2004.

[15] Notes de briefing de l’UNHCR, 30 janvier 2004 – voir: http://www.reliefweb.int/w/rwb.nsf/3a81e21068ec1871c1256633003c1c6f/08fcc96a2b272b0dc1256e2b0052fbe3?OpenDocument (consulté le 26 mars 2004).


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