Rapports de Human Rights Watch

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Enfants soldats des FNL

Au moins soixante-cinq enfants —et vraisemblablement des dizaines d’autres— ayant déclaré être des combattants ou des partisans des FNL sont détenus par le gouvernement.13 Comme les adultes, certains ont déserté des FNL et se sont rendus aux soldats du gouvernement ou à la police dans l’espoir de pouvoir réintégrer la vie civile. D’autres ont été capturés par les soldats du gouvernement au cours d’opérations militaires ou ont été arrêtés par des policiers qui étaient à la recherche de combattants des FNL.14 Comme les adultes, les enfants se répartissent en deux groupes qui sont traités différemment par le gouvernement.  Environ vingt-cinq sont traités comme des combattants et logés à Randa, tandis que quarante autres au moins sont détenus dans des prisons sous l’accusation de participation à des groupes armés.15  Il n’y a pas d’explication apparente sur les raisons pour lesquelles les enfants sont affectés dans un groupe plutôt que dans l’autre, sauf peut-être que ceux qui ont été arrêtés par la police risquaient davantage d’aboutir en prison.

Les conditions à Randa sont difficiles, mais celles qui règnent dans les prisons sont bien pires que celles du centre d’accueil. De plus, les enfants qui sont sur le site de démobilisation peuvent compter être renvoyés chez eux avec un certain nombre d’avantages tandis que les enfants qui sont en prison s’attendent au mieux à être relâchés et au pire à passer davantage de temps en  prison.

Dans une occasion au moins par le passé, le gouvernement a relâché des enfants qui avaient reconnu être des combattants des FNL ou en avaient été accusés. Au cours d’un précédent cycle de négociations de paix en mai 2005, un nombre important d’enfants avaient rejoint les FNL, certains d’entre eux attirés certainement par l’apparente imminence d’un cessez-le-feu et dans l’espoir de participer à un programme de démobilisation avec ses avantages attendus. A la fin du mois de juin 2005, le gouvernement détenait une centaine de ces mineurs. Après avoir gardé les enfants au camp militaire de Muzinda pendant quelques semaines, il les a renvoyés chez eux. Etant donné qu’il n’y avait pas de programme de démobilisation à cette époque, les enfants n’ont pas reçu d’argent ni d’autres avantages de la part du gouvernement.16

Actuellement, il se peut qu’il y ait des centaines d’autres enfants actifs dans les rangs des FNL qui pourraient avoir besoin d’être démobilisés et réinsérés. Des représentants des Opérations des Nations Unies au Burundi (ONUB), les partenaires du programme de démobilisation du gouvernement et la Banque mondiale ont récemment pressé le gouvernement burundais de clarifier le statut des enfants combattants des FNL, de sorte que les partenaires puissent programmer une future assistance à ces enfants.17

Utilisation d’enfants comme informateurs avant une démobilisation éventuelle

Les soldats du gouvernement et la police utilisent régulièrement des combattants des FNL reconnus ou suspectés, y compris des enfants, pour aider à trouver et à identifier les membres des FNL et leurs partisans.18 Certains reçoivent une petite compensation pour leur aide, sous forme de nourriture, de boisson ou d’argent. Un garçon de dix-sept ans de la commune de Mpanda, dans la province de Bubanza, et actuellement à Randa, avait rejoint les FNL à l’âge de onze ans, mais en 2005  il s’est rendu aux soldats à une position militaire se trouvant sur la commune de Nyabiraba, dans la province de Bujumbura-rural, parce qu’il avait appris que des soldats d’autres forces rebelles avaient été démobilisés. Il a passé cinq mois au poste de Nyabiraba, sortant régulièrement avec des soldats du gouvernement pour chercher des combattants et des partisans des FNL. Il avait seize ans à ce moment-là.  Il a déclaré à un chercheur de Human Rights Watch :

Je travaillais, je montrais aux soldats du gouvernement où se cachaient les FNL et puis ils les attrapaient. Quelquefois, les FNL étaient tués et quelquefois ils étaient juste arrêtés et ramenés au camp militaire. Je n’ai jamais porté une arme quand j’étais avec les soldats du gouvernement mais j’ai transporté des balles et des bombes quelquefois. En échange, je recevais de l’argent et de la nourriture.19

Etant donné qu’ils sont sous la garde du gouvernement, capturés ou détenus, les enfants ne sont pas en mesure de refuser l’ordre de fournir ce type d’aide.



[13] Entretiens de Human Rights Watch avec des enfants détenus et observations faites au cours de la visite sur site, centre d’accueil de Randa, 5 et 10 mai 2006; Entretiens de Human Rights Watch avec des enfants détenus et observations au cours de la visite, prison centrale de Mpimba, 16 mai 2006, prison de Gitega, 23 mai 2006, prison de Ruyigi, 25 mai 2006, prison de Ngozi, 6 juin 2006, et prison de Bubanza, 13 juin 2006.

[14] Entretiens de Human Rights Watch avec des enfants détenus, Centre d’accueil de Randa, 5 et 10 mai 2006; Entretiens de Human Rights Watch avec des enfants détenus, prison centrale de Mpimba, 16 mai 2006.

[15] Notes d’observations de Human Rights Watch, Centre d’accueil de Randa, 5 mai 2006, prison centrale de Mpimba, 16 mai 2006, prison de Gitega, 23 mai 2006, prison de Ruyigi, 25 mai 2006, prison de Ngozi, 6 juin 2006, et prison de Bubanza, 13 juin 2006.

[16] “Burundi : l’armée arrête un grand nombre d’enfants soldats,” IRIN, 1er juillet 2005, [online] http://www.irinnews.org/print.asp?ReportID=47925.

[17] Note verbale de l’ONUB et de partenaires au ministre des Affaires étrangères, 18 mai 2006.

[18] Human Rights Watch, “Dérapages : abus perpétrés au Burundi.”

[19] Entretien de Human Rights Watch avec un enfant soldat, Centre d’accueil de Randa, 5 mai 2006.


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