Background Briefing

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Risque accru de guerre

Sur le plan international

Dans les jours qui ont suivi le massacre de Gatumba, le chef d’état major de l’armée burundaise, ainsi que le président et plusieurs autres autorités dirigeantes du Rwanda, ont menacé le Congo de guerre, reprochant à une partie du gouvernement et de l’armée congolais au moins une négligence, voire même une participation délibérée dans le massacre. Soumis à de fortes pressions diplomatiques, ils n’ont pas pris des actions immédiates pour concrétiser leurs menaces – le président du Burundi s’est même démarqué d’eux par la suite -, mais la rencontre entre leurs déclarations a suggéré l’élaboration d’un nouveau type de relation.97

Avant 1994, le Burundi et le Rwanda étaient souvent mis en relation, à cause de leur composition démographique semblable, et parce que les massacres ethniques ou les actes de répression qui agitaient un pays se répercutaient souvent dans l’autre. Après le génocide rwandais et le départ massif de Rwandais au Congo, le Rwanda est devenu beaucoup plus impliqué avec le Congo qu’avec le Burundi, d’abord, en tentant de prévenir une résurgence de militaires de l’ancienne armée rwandaise et d’Interhamwe, ensuite, en nouant des liens politiques et économique avec son voisin, un géant riche mais faible. Le Burundi a collaboré dans les guerres menées au Congo mais a fini par laisser au Rwanda et à l’Ouganda leurs ambitieux desseins, pour focaliser davantage sur le combat contre les groupes rebelles burundais qui trouvaient des bases sur le sol congolais. Concentré sur un objectif militaire plus restreint, le Burundi n’a pas participé à l’exploitation économique illégale et aux ambitions politiques à une aussi grande échelle que ses voisins du nord.  Pendant des années, les militaires rwandais ont fait des incursions régulières au Burundi, soit pour venir en aide à l’armée burundaise dans son combat contre les rebelles, soit pour poursuivre des rebelles rwandais qui opéraient au Burundi. Le massacre de Gatumba pourrait marquer une nouvelle étape dans la coopération entre les armées rwandaises et burundaise. Ce qui a longtemps été un conflit à deux pourrait se transformer en un conflit à trois, avec le risque que la guerre se propage à toute la région.

En RD Congo et au Burundi

Le RCD-Goma a rejoint le Rwanda et le Burundi dans leurs menaces contre le Congo lorsque son président (qui est aussi un des vice-présidents du gouvernement congolais) a mis en cause le bon fonctionnement de la transition et suspendu la participation de son parti. Le Général Nkunda, qui avait attaqué Bukavu avec Mutebutsi, a fait savoir qu’il était prêt à reprendre le combat. Si les menaces avaient été mises à exécution, la guerre aurait, comme par le passé, agité le Congo de l’intérieur mais aussi ses frontières.

Comme le Rwanda, son principal commanditaire, le RCD-Goma a écouté les appels diplomatiques au calme et ses membres ont rejoint le gouvernement. Mais des questions fondamentales continuent de diviser les acteurs principaux de la transition congolaise. Si le RCD-Goma devait décider une fois de plus que s’opposer au gouvernement de transition est la voie qui sert le mieux ses intérêts, il ne manquera pas d’utiliser l’horreur de Gatumba pour rallier ses partisans et influencer l’opinion internationale.

Au Burundi, les dirigeants politiques et militaires demeurés insatisfaits par les accords de partage de pouvoir, ont vu dans le massacre de Gatumba, l’occasion de tenter de renforcer leur position. Dans la lettre qu’ils ont adressée récemment au président du Burundi, les partis politiques dits Tutsi ont évoqué le massacre comme la preuve de la « dérive génocidaire » qui est « toujours une réalité » au Burundi, réclamant implicitement des garanties spéciales de nature à parer ce genre de situation. Même les funérailles des victimes de Gatumba furent transformées en tribune politique, les banderoles politiques impudiquement déployées sur les cercueils et les fleurs.

L’amertume et l’intransigeance affichées par les dirigeants Tutsi et ceux qui les soutiennent, n’ont pas encore mené à la guerre, mais ont déjà suscité des réactions de même genre chez les groupes Hutu et apparentés.




<<précédente  |  index  |  suivant>>septembre 2004