Massacres à Kiwanja

L’incapacité de l’ONU à protéger les civils

Massacres à Kiwanja

L'incapacité de l'ONU à protéger les civils

I. Résumé
II. Contexte
Le processus de paix échoue
Le CNDP prend le contrôle de Kiwanja et de Rutshuru
Les Maï Maï contre-attaquent à Kiwanja
III. Exactions commises par le CNDP
Exécutions sommaires
Violence sexuelle
Recrutement forcé et enlèvement d'adultes et d'enfants
Destruction de camps et retour forcé
Réponse du CNDP
IV. Exactions commises par les Maï Maï
Exécutions sommaires, massacres et enlèvements
Utilisation d'enfants soldats
V. Exactions commises par les soldats de l'armée congolaise
VII. La MONUC : incapacité à protéger les civils
Hostilité envers la MONUC
Problèmes logistiques et techniques
Priorités concurrentes
Conclusion
VIII. Recommandations

I. Résumé

Les 4 et 5 novembre 2008, environ 150 personnes ont été tuées dans la ville de Kiwanja dans l'Est de la République démocratique du Congo, à moins d'un kilomètre des forces de maintien de la paix des Nations Unies. Cet événement constitue l'un des pires massacres au Nord Kivu des deux dernières années. La plupart des personnes tuées ont été exécutées sommairement par les forces du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) du commandant rebelle Laurent Nkunda. D'autres sont mortes au cours des combats entre les forces de Nkunda et les milices Maï Maï, un groupe armé local qui soutient le gouvernement congolais et se bat souvent aux côtés de l'armée nationale (Forces Armées de la République Démocratique du Congo, FARDC). Les milices Maï Maï ont aussi tué des personnes délibérément.

A la suite des massacres de Kiwanja, les combattants Maï Maï et du CNDP continuent de tuer, violer, recruter par la force des enfants, et maltraiter de diverses façons les civils à Kiwanja et dans ses environs, dans la ville voisine de Rutshuru, et dans des zones situées plus au nord. Human Rights Watch a recueilli des preuves sur 18 autres meurtres délibérés en novembre et décembre perpétrés par le CNDP, les Maï Maï et leurs alliés, et a reçu des signalements portant sur 25 autres morts. Toutefois, l'insécurité régnante a  rendu impossible la vérification de toutes ces informations. Human Rights Watch a documenté le viol de plus de 16 femmes et filles et le recrutement de dizaines d'enfants pour le service armé depuis fin octobre. Un cessez-le-feu unilatéral déclaré par le CNDP le 29 octobre  s'est avéré sans effet dans les zones reculées où se poursuivent les combats et les tueries.

 

Le 29 octobre, les forces du CNDP de Nkunda ont pris le contrôle de Kiwanja et Rutshuru après avoir vaincu la veille les soldats de l'armée congolaise dans une bataille au sud de Kiwanja. Dès qu'il a pris le contrôle de la zone, le CNDP a ordonné immédiatement à la population locale de détruire six camps pour personnes déplacées et des sites qui avaient hébergé environ 27 000 personnes. Les déplacés ont alors fui vers des lieux divers et la plupart n'ont toujours pas été localisés cinq semaines après l'attaque.

Pendant et immédiatement après les massacres de Kiwanja, des milliers de civils ont cherché refuge à l'extérieur de la base de la MONUC. Les soldats et les responsables du CNDP ont depuis usé de menaces et d'intimidation pour tenter de forcer les personnes déplacées à rentrer chez elles, même si beaucoup d'entre elles ne pensaient pas que ce soit sans danger.

Au moment du massacre de Kiwanja, la mission de maintien de la paix de l'ONU au Congo, la MONUC, disposait de 120 soldats de maintien de la paix à Kiwanja, l'une de ses bases les plus importantes sur le terrain dans la zone. Du fait de l'importance de Kiwanja et de Rutshuru comme centres de l'assistance humanitaire, la MONUC considérait ces localités comme zone de protection prioritaire. Toutefois, les soldats de maintien de la paix n'ont pas protégé ces villes contre la prise de contrôle des rebelles ni arrêté la destruction des camps pour personnes déplacées. Ils n'ont pas non plus arrêté le massacre des civils à Kiwanja où ils avaient une base de terrain importante.

La MONUC comptait sur la coopération de l'armée congolaise. Cependant, les forces congolaises se sont avérées incapables de protéger les villes et n'ont pas aidé la MONUC à assurer la sécurité de la population civile. L'officier supérieur de l'armée congolaise dans la zone, le Colonel Delphin Kahimbi, était ouvertement hostile envers la MONUC, alimentant le ressentiment de la population locale à l'égard des soldats de maintien de la paix. A une occasion, il a même ordonné à ses troupes de tirer sur des véhicules de l'ONU. De même que d'autres officiers congolais, il a utilisé des troupes de la MONUC pour protéger des forces de l'armée congolaise, mettant délibérément les vies des soldats de maintien de la paix en danger.

Toute possibilité qu'auraient pu avoir les soldats de la MONUC de protéger par eux-mêmes les populations civiles a été contrecarrée par les déficiences logistiques et les priorités concurrentes auxquelles la force de maintien de la paix trop étirée a été confrontée. Les 4 et 5 novembre, la principale priorité de la MONUC à Kiwanja est devenue la garantie de la sécurité des travailleurs humanitaires, d'un journaliste étranger et d'un groupe d'observateurs militaires, plutôt que la protection de la population civile. Alors que le nombre de soldats de maintien de la paix et l'équipement étaient déjà insuffisants, il ne restait presque plus de moyens pour protéger les civils congolais.

Si la MONUC a tenté de répondre plus énergiquement aux menaces contre les civils depuis les massacres de Kiwanja, son objectif principal d'empêcher les attaques contre la capitale provinciale, Goma, et son inaptitude à répondre rapidement à de nouvelles menaces, l'ont rendue incapable d'empêcher les massacres actuels, le recrutement forcé et de nouveaux déplacements de civils. Le maximum qu'a pu faire la MONUC pendant les massacres de Kiwanja -et qu'elle peut faire actuellement-a été de donner refuge dans le voisinage immédiat de sa base aux civils qui étaient le plus en danger.

La MONUC a besoin de toute urgence de troupes supplémentaires d'intervention rapide pour renforcer la protection des civils et empêcher de futurs massacres. Le 20 novembre, le Conseil de sécurité de l'ONU a autorisé une augmentation du nombre de troupes de la MONUC au Congo de 3 100 soldats, mais il faudra probablement au moins quatre mois à ces troupes pour être déployées. Le 4 décembre, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a écrit à Javier Solana, le Haut représentant de l'Union européenne (UE), en exprimant son inquiétude quant au temps requis pour déployer de nouvelles troupes de la MONUC, et il a demandé le soutien et l'assistance de l'UE pour fournir une force «relais» à court terme.

Human Rights Watch exhorte l'UE à agir de toute urgence pour déployer cette force «relais». Avertir qu'une telle force arrivera rapidement pourrait aider à empêcher de nouvelles attaques à court terme et contribuer à la réussite éventuelle des efforts diplomatiques vitaux entrepris actuellement. Les troupes de l'UE à Goma permettraient aussi aux soldats de maintien de la paix de la MONUC de renforcer les bases de terrain dans des zones plus reculées, comme celle de Kiwanja, et aideraient à empêcher de nouvelles atrocitéscontre la population du Congo qui souffre depuis longtemps.

II. Contexte

Le processus de paix échoue

Fin août 2008, des combats intenses ont repris au Nord Kivu entre l'armée congolaise et les rebelles du CNDP de Nkunda, ainsi que d'autres groupes armés, rompant un cessez-le-feu fragile qui existait depuis la signature de l'accord de paix de Goma, le 23 janvier. L'accord avait pour but d'arrêter les hostilités, de conduire au désengagement des forces qui se trouvaient en premières lignes et de rendre possibles des discussions politiques et sécuritaires entre le gouvernement et 22 groupes armés, dont le CNDP était le plus important. En dépit des efforts pour faire avancer le processus de la part de représentants de l'ONU, de l'Union africaine (UA), de l'UE, des Etats-Unis et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, l'accord a commencé à se désagréger en juillet.[1] 

L'armée congolaise a lancé une offensive contre le CNDP le 28 août mais a rapidement perdu du terrain, en dépit de sa supériorité en nombre.[2] Les rebelles du CNDP, mieux organisés, se sont emparés de vastes bandes de territoire dans les zones fertiles et fortement peuplées de Masisi et de Rutshuru, parfois reculant ou stoppant temporairement leur avance pour des raisons stratégiques ou en réponse aux pressions de la communauté internationale.[3] Le 26 octobre, les rebelles se sont emparés du camp militaire de Rumangabo, l'une des plus importantes bases militaires dans l'Est du Congo, pour la deuxième fois depuis le 8 octobre. Après avoir saisi un stock important d'armes et de munitions, les forces du CNDP ont alors fait mouvement simultanément au nord vers Rutshuru et au sud vers Goma. Entre le 26 et le 28 octobre, les rebelles ont pris le contrôle d'un tronçon de route stratégique entre Goma et Rutshuru et ont remporté une autre bataille à Kibumba, à 27 kilomètres à peine au nord de Goma.

Quand les forces du CNDP ont pris Kiwanja et Rutshuru le 29 octobre, d'autres forces du CNDP menaçaient Goma. Alors que le gouvernement congolais craignait une éventuelle prise de Goma par le CNDP, ses soldats ont fui la ville vers le nord comme au sud, saccageant et pillant sur leur chemin. Le CNDP n'a pas essayé d'entrer dans Goma, et a déclaré un cessez-le-feu unilatéral.

Le gouvernement n'a pas réagi au cessez-le-feu et ses forces ont poursuivi les accrochages avec les forces du CNDP. Ce dernier a aussi occasionnellement livré combat avec des milices pro-gouvernementales, notamment la Coalition des Patriotes résistants congolais (PARECO) et d'autres groupes Maï Maï, de même qu'avec un groupe armé d'opposition rwandais, les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), dont certains dirigeants ont participé au génocide de 1994. Les combats actuels ont permis au CNDP de s'emparer de nouveaux territoires ; à fin novembre, il contrôlait près du double de la zone qui se trouvait sous son commandement à la fin du mois d'août.

Les combats qui ont repris fin août ont ajouté aux nombreuses souffrances déjà vécues par les habitants du Nord Kivu. Au moins 415 civils ont été tués et plus de 250 ont été blessés entre fin août et début décembre. Environ 250 000 ont été forcés de fuir pour sauver leurs vies, portant le nombre total de personnes déplacées au Nord Kivu à plus d'un million, dont beaucoup n'ont reçu qu'une aide limitée des agences humanitaires du fait de l'insécurité régnante. Certaines personnes déplacées ont commencé à rentrer chez elles, devant le manque de nourriture et de sécurité dans les camps ainsi que sous la pression du CNDP pour qu'elles quittent les camps. Toutefois beaucoup de ces personnes retrouvent leurs maisons occupées ou bien sont confrontées à de nouvelles vagues de combat, ce qui les force à s'enfuir encore une fois.

Le CNDP prend le contrôle de Kiwanja et de Rutshuru

Kiwanja et Rutshuru sont des villes voisines, nichées toutes deux dans une vallée fertile en bordure du Parc national de Virunga. Elles constituent l'un des plus importants centres de populations au Nord Kivu, avec environ 70 000 habitants et, au début novembre, au moins 50 000 personnes déplacées vivant dans des camps ou chez des familles d'accueil. La ville de Rutshuru, située sur la route principale, constitue un centre administratif stratégique qui abrite l'un des principaux hôpitaux de la région.

Les rebelles du CNDP sont arrivés à Rutshuru tard le 28 octobre, et dès l'après-midi du 29 octobre ils contrôlaient Rutshuru tout comme Kiwanja. Ils n'ont rencontré aucune résistance de la part des soldats du gouvernement, ou de leurs milices alliées Maï Maï, ou des soldats du maintien de la paix de l'ONU.

Dans les premières 24 heures, le CNDP a ordonné aux populations locales de détruire tous les camps de personnes déplacées de la zone, disant aux gens que le CNDP «ne voulait aucun camp de PDI [personnes déplacées internes].» Certains combattants du CNDP ont aussi participé à la destruction des camps. Le 30 octobre, le CNDP a informé la MONUC qu'il se chargeait de la zone et le 31 octobre le groupe rebelle a nommé son propre administrateur territorial, Jules Simpenzwe.

La rapidité et l'efficacité avec lesquelles le CNDP a pris le contrôle de la zone ont conduit un analyste militaire à conclure que Rutshuru plutôt que Goma avait été son objectif principal au cours de l'offensive de fin octobre. «Tandis que nous étions tous concentrés pour sauver Goma, l'objectif du CNDP était de prendre Rutshuru et nous n'avons pas fait assez pour l'empêcher.»[4]

Les Maï Maï contre-attaquent à Kiwanja

Vers midi le 4 novembre, environ 200 combattants Maï Maï, dont au moins 30 enfants soldats, ont lancé une attaque surprise contre les positions du CNDP à Kiwanja. Habillés de vêtements civils ou en partie militaires, beaucoup portaient des feuillages sur la tête ou les bras. Armés de fusils d'assaut AK-47, de lances, de machettes et de quelques lance-roquettes (RPG), ils ont combattu pendant plusieurs heures avant de repousser le CNDP hors de la ville. Selon un fonctionnaire de la MONUC, les miliciens Maï Maï auraient appartenu au Groupe Jérémie basé dans le nord du territoire de Rutshuru et au groupe des Maï Maï PARECO Kasareka, dont certains étaient basés au Nord de Kiwanja. Les Maï Maï auraient été appuyés par des combattants des FDLR et peut-être par quelques soldats de l'armée congolaise.

Vers 5h30 le matin du 5 novembre, le CNDP a lancé une contre-attaque avec des armes lourdes telles que des mortiers et des roquettes qui s'est poursuivie jusqu'aux environs de midi. Quelques civils ont réussi à fuir, mais la plupart ont été pris au milieu des combats. Au moins plusieurs dizaines de civils ont péri dans les tirs croisés. Une femme a été tuée et sa sœur de 16 ans a été grièvement blessée lorsqu'un obus de mortier est tombé sur leur maison dans le quartier de Mabungo.[5] Un autre homme a été tué aux abords du camp de Nyongera quand une «explosion» a frappé sa maison.[6] Aucun des camps n'a averti les civils des combats imminents ni n'a facilité leur départ de la ville avant le début des combats.[7]

A 2h de l'après-midi le 5 novembre, le CNDP avait repris le contrôle de Kiwanja.[8] Les rebelles ont alors patrouillé dans les rues et ordonné à la population civile de quitter la ville, prévenant que tous ceux qui resteraient seraient considérés comme des combattants ou des sympathisants Maï Maï.[9] Quelques personnes ayant fui ont été arrêtées et renvoyées chez elles par d'autres combattants du CNDP,[10] tandis que d'autres n'ont pas entendu l'ordre on bien ont eu trop peur pour fuir. Des centaines de civils étaient parvenus à Rutshuru et à la base de la MONUC à Kiwanja avant la fin de l'après-midi.

III. Exactions commises par le CNDP

Exécutions sommaires

Après avoir repris le contrôle de Kiwanja, les combattants du CNDP sont allés de maison en maison, à la recherche d'hommes jeunes et d'adolescents qui auraient pu être des combattants Maï Maï. Ils ont choisi plusieurs quartiers, à savoir Buhunda, Buzito, Buturande, Mabungo, Nyongera et Kachemu, peut-être parce que certains des combats les plus intenses avaient eu lieu dans ces zones.

En se basant sur plus de 100 entretiens menés auprès de membres des familles, de personnes qui ont aidé à enterrer les morts et d'autres habitants de Kiwanja, Human Rights Watch estime qu'au moins 150 personnes ont été tuées les 4 et 5 novembre à Kiwanja. La plupart des victimes présentaient des blessures par balle à la tête ou des blessures causées par machette, lance ou gourdin, indiquant qu'elles avaient été exécutées sommairement plutôt que tuées dans les tirs croisés ou par des roquettes et des obus. Au moins 14 des victimes étaient des enfants, 8 étaient des femmes et 7 des personnes âgées.[11]   

Le droit humanitaire international interdit l'exécution sommaire ou les mauvais traitements de toute personne en garde à vue, qu'il s'agisse de civils ou combattants faits prisonniers.[12] Lorsqu'ils sont commis de manière délibérée ou irresponsable, de tels actes sont des crimes de guerre.

Selon des témoins, les soldats du CNDP ont enfoncé les portes, demandant de l'argent et des téléphones portables, puis abattant ou tuant d'autres façons les hommes ou les garçons qu'ils trouvaient. Ils les ont massacrés devant leurs familles dans leurs maisons, devant leurs maisons ou dans les rues avoisinantes. Des femmes, dont certaines qui essayaient de protéger d'autres membres de leurs familles, ont également été tuées.

Une femme dont le mari a été tué a expliqué à un chercheur/une chercheuse de Human Rights Watch ce qui est arrivé. Elle a déclaré:

Mercredi [le 5 novembre], dix soldats du CNDP sont apparus devant ma maison dans le quartier de Mabungo. Mon mari ne les a pas vus, et il a voulu quitter la cuisine attenante pour me rejoindre dans la maison principale. Mais dès qu'ila mis le pied dehors, les soldats lui ont tiré dessus, une fois dans l'oeil et une fois dans le ventre. Tous ses intestins sont sortis. Mon mari était fermier. Il avait 50 ans et il n'a jamais aidé les Maï Maï. Il n'avait pas d'arme.[13]

Une autre femme âgée a décrit d'autres massacres. Elle a raconté :

Je me suis enfuie pour me cacher dans une maison voisine quand j'ai vu les soldats arriver. Dans la maison il y avait sept garçons. Certains portaient des feuilles sur la tête [comme le faisaient souvent les Maï Maï ], mais ils n'avaient pas d'armes. Les soldats ont demandé aux garçons d'ouvrir la porte, mais ils avaient peur et n'ont pas répondu. J'ai couru dans la chambre et je me suis recroquevillée en boule sous le lit. J'ai entendu les soldats qui cassaient la porte et ensuite les hurlements des garçons pendant qu'ils leur tiraient dessus. Ils n'ont pas tenté de les arrêter, ils ont  juste tiré – bam, bam, bam. Les soldats sont entrés dans la chambre. Je tremblais de partout. Un des soldats m'a attrapée par une jambe et m'a tirée de sous le lit. Il a levé son fusil pour tirer sur moi, mais un autre a dit de me laisser, que j'étais juste une vieille femme. Quand ils sont partis, je suis allée dans l'autre pièce et j'ai vu les corps de tous les jeunes garçons. Quatre d'entre eux étaient frères. Ils étaient tous morts.[14]

Dans un autre cas, des combattants du CNDP ont tué un couple âgé quand la femme a tenté de sortir de sa maison pour aller aux toilettes.  Le voisin, qui a vu les meurtres, a expliqué:

Je ne pouvais pas m'enfuir de Kiwanja après que le CNDP a dit à tout le monde de partir parce que ma femme était enceinte. Je vis près de l'endroit où se trouvait le camp des CNDP, et je les ai entendu dire que toute personne quittant sa maison était suspecte et que quiconque mettant la tête à la fenêtre devait être tué. Après avoir passé une journée cachés dans nos maisons, j'ai entendu ma voisine dire qu'elle avait désespérément besoin d'aller aux toilettes et elle est sortie de sa maison. Un soldat lui a demandé où elle allait, et quand elle lui a dit qu'elle allait aux toilettes, il lui a tiré dessus. Alors son mari a ouvert la porte pour voir ce qui s'était passé et ils l'ont abattu lui aussi. Ils avaient tous deux environ 60 ans. Ce n'étaient pas des Maï Maï. Ils étaient seulement un vieux couple qui ne pouvait pas s'enfuir. Plus tard j'ai aidé à les enterrer.[15]

Selon plusieurs témoins, les combattants du CNDP ont traîné les corps des personnes tuées dans la rue à l'intérieur des maisons puis ont fermé les portes à clef, dans une tentative apparente pour dissimuler les morts.[16] Des témoins ont aussi indiqué aux chercheurs de Human Rights Watch que des corps avaient été trouvés dans des latrines.[17]

Bosco Ntaganda, le chef d'état-major militaire du CNDP, était chargé des opérations militaires sur l'axe Rutshuru et Kiwanja au moment des massacres.  Il a été filmé à Kiwanja le 5 novembre, le jour du massacre. Ntaganda est sous le coup d'un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre commis en Ituri entre 2002 et 2004.[18]

Après les massacres du 5 novembre, les combattants du CNDP ont continué à exécuter sommairement des habitants de Kiwanja. Des témoins ont déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que les combattants du CNDP avaient tué six personnes entre le 8 et le 16 novembre.[19] La plupart des victimes ont été abattues alors qu'elles se rendaient dans leurs fermes aux alentours de Kiwanja pour chercher de quoi manger, ou alors qu'elles revenaient chez elles à Kiwanja après avoir passé des jours abrités à l'extérieur de la base de la MONUC. Quatre autres personnes ont été exécutées sommairement début décembre à Rutshuru, et une autre à Kiwanja, toutes par des soldats du CNDP.[20]

Violence sexuelle

Comme cela est fréquent au cours des combats dans l'Est du Congo, les femmes et les filles ont été les cibles de violence sexuelle. Des combattants CNDP ont violé au moins 16 femmes et filles dans leurs maisons, leurs fermes ou sur les routes au cours des semaines qui ont suivi la prise de Kiwanja et Rutshuru par le CNDP.[21]

Une jeune fille de 16 ans qui a été violée par un combattant du CNDP a expliqué: 

Le jour où les CNDP sont arrivés à Rutshuru, ils ont pillé mon quartier et ont abattu deux garçons, alors j'ai décidé de m'enfuir à Goma. J'ai couru en traversant les fermes aux abords de Rutshuru et j'ai rencontré deux soldats tutsis[22] avec des fusils et des lances. Ils m'ont arrêtée dans la ferme. J'étais seule. Un des soldats parlait kinyarwanda, et l'autre parlait swahili. Ils ont dit: «On va te tuer.» Puis ils ont mis un couteau sur mon bras. J'ai dit: «Non, épargnez-moi s'il vous plait.» Alors ils ont répondu: «La seule façon de t'épargner c'est de te violer.» Ils ont découpé mes vêtements avec le couteau. Un des soldats m'a violée de 4 h à 7 h de l'après-midi. Il y avait du sang partout. Puis quand le deuxième soldat voulait commencer, il y a eu beaucoup de coups de feu tout près et ils sont partis, disant que si je m'enfuyais ils me tueraient. Après ça, j'ai réussi à m'échapper et je suis arrivée à Kibati [un grand camp de déplacés près de Goma]. J'ai toujours très mal, mais je n'ai aucun médicament et il n'y a personne ici pour me soigner.[23]

Des personnes déplacées et un employé de centre de soins ont dit aux chercheurs de Human Rights Watch que les soldats du CNDP avaient violé six femmes et filles à l'intérieur du camp de déplacés à la base de la MONUC à Kiwanja le 27 novembre.[24]

Recrutement forcé et enlèvement d'adultes et d'enfants

Toutes les parties au conflit au Nord Kivu ont recruté par la force des civils, dont des enfants, et les ont obligés à servir comme soldats. Ces enfants ont été envoyés en premières lignes ou sont utilisés comme porteurs, gardes ou esclaves sexuels. Selon des travailleurs de la protection de l'enfance, nombre de ceux qui ont été recrutés récemment sont des «re-recrues» qui sont déjà passées par des programmes de démobilisation mais qui ont reçu un soutien limité pour se réinsérer dans leurs communautés.[25]

A la suite de sa prise de contrôle de Rutshuru et de Kiwanja, le CNDP a recruté par la force des dizaines de jeunes hommes et garçons pour le service militaire. D'autres hommes et garçons, souvent accusés d'être des sympathisants des Maï Maï, ont été enlevés par le CNDP et n'ont pas été revus depuis.[26]

Le 30 novembre, par exemple, des combattants du CNDP ont enlevé quatre enfants, tous frères, à 3 h du matin dans le quartier de Mabungo à Kiwanja. Ils ont emmené les garçons vers une destination inconnue. Le lendemain, ils ont ramené un enfant qui était malade, mais ont gardé les trois qui étaient en bonne santé.[27]

Des habitants ont dit aux chercheurs de Human Rights Watch que le CNDP se sert des autorités locales pour recruter par la force des jeunes hommes et des garçons pour le service militaire.[28] Selon des fonctionnaires de la MONUC, ils sont intervenus dans plusieurs cas pour obtenir la libération de garçons et d'hommes recrutés par la force par le CNDP.[29]

La crainte constante du recrutement empêche de nombreux habitants de reprendre leurs activités quotidiennes habituelles. Les hommes et les jeunes garçons se cachent souvent dans leurs maisons au lieu de travailler dans les champs ou passent la nuit dehors à proximité de la base de la MONUC à Kiwanja pour éviter d'être contraints au service armé. Beaucoup d'autres se sont enfuis à Goma ou dans d'autres zones hors du contrôle du CNDP.[30]

Le droit humanitaire international interdit à toutes les parties à un conflit armé de priver arbitrairement toute personne de sa liberté, par exemple par le moyen d'enlèvement et de recrutement forcé. Les parties doivent traiter tous les civils humainement, et la privation arbitraire de liberté est incompatible avec cette exigence.[31] Le droit international interdit tout recrutement d'enfants de moins de 18 ans par des groupes armés non étatiques ou la participation d'enfants à des hostilités actives. Le recrutement d'enfants de moins de 15 ans est un crime de guerre.[32]

 

Destruction de camps et retour forcé

Avant la prise de contrôle de la zone par le CNDP, environ 27 000 personnes déplacées étaient recensées dans des camps de personnes déplacées et dans des sites non officiels, tels que des écoles, des églises ou des mosquées à Rutshuru et Kiwanja et à proximité. Plus de 25 000 autres personnes déplacées vivaient chez des familles d'accueil.[33] Beaucoup de ces personnes déplacées ont fui la zone devant l'avancée du CNDP.

Le 29 octobre, des représentants du CNDP ont déclaré lors d'une réunion publique qu'ils ne tolèreraient pas de camps de personnes déplacées sur leur territoire, que toutes les personnes déplacées devaient rentrer chez elles et que les camps seraient détruits.[34] Les combattants du CNDP sont allés directement dans les camps de Kasasa et de Nyongera et ont ordonné aux habitants de Kiwanja de les démanteler et de garder ce qui restait (bâches plastiques, châssis en bois et affaires abandonnées par les personnes déplacées).[35] Selon des témoins, les combattants du CNDP ont soit participé à la destruction, soit sont restés là à regarder.[36] Certains témoins ont indiqué que les forces du CNDP avaient brûlé des abris à Nyongera, Kasasa, et dans des camps et autres sites à Rutshuru où beaucoup d'abris étaient faits en herbes.[37] Des images satellite de la région de Rutshuru et de Kiwanja prises le 4 novembre confirment la destruction totale des camps.[38]

Un homme qui vivait au camp de Nyongera à Kiwanja a raconté à un chercheur de Human Rights Watch ce qui s'était passé:

J'ai décidé de ne pas m'enfuir quand le CNDP est arrivé, car je ne savais pas où aller. Nous n'étions plus que quelques-uns dans le camp et puis les soldats du CNDP ont encerclé la zone. Ils ont dit aux habitants de les aider à détruire le camp. Je l'ai  moi-même entendu. Les soldats ont allumé des feux. Je ne savais pas quoi faire. Où devions-nous aller ? Nous avons décidé de chercher refuge dans une école mais je ne m'y sentais pas en sécurité alors nous sommes allés à proximité de la base de la MONUC. Nous sommes restés là pendant des jours sans rien, dormand dehors à l'air libre. J'ai l'impression que nous ne sommes que des animaux qui sont poussés d'un endroit à l'autre.[39]

Des soldats et des autorités du CNDP ont usé de menaces et d'intimidation pour tenter de forcer les personnes déplacées à rentrer chez elles, même si beaucoup d'entre elles ne pensaient pas que c'était sans danger. Le 9 novembre, le leader du CNDP, Laurent Nkunda, lors d'un rassemblement au stadium de Rutshuru a déclaré à son public qu'il ne voulait pas de camps dans les zones sous son contrôle parce qu'ils pouvaient fournir des cachettes aux bandits.[40] Selon les témoins interrogés par les chercheurs de Human Rights Watch, les combattants et les autorités locales du CNDP ont dit de partir aux personnes qui se trouvaient au camp improvisé devant la base de la MONUC à Kiwanja, à trois reprises au moins entre le 6 et le 11 novembre. Ils ont déclaré que le CNDP avait le contrôle et qu'elles ne seraient pas protégées ni par le gouvernement ni par la MONUC sur ce site.[41] Au cours d'un de ces rassemblements le 11 novembre, le Chef de Cité Nzaba Matabaro a mis à exécution ses menaces en détruisant deux abris avec une machette. Le CNDP a donné aux personnes déplacées jusqu'à 10 h le lendemain matin pour rentrer chez elles, prévenant qu'elles sentiraient la «pression» du CNDP si elles n'obéissaient pas.[42] Le lendemain, presque toutes les personnes déplacées avaient abandonné le camp.

Mais beaucoup d'entre elles n'avaient aucun endroit où aller et en quelques jours des milliers de personnes étaient revenues à la base de la MONUC. Au 30 novembre, environ 12 000 personnes se trouvaient à la base, dont beaucoup avaient reçu peu d'assistance, voire pas du tout.[43]

Le droit humanitaire international interdit la destruction de biens civils, tels que des maisons et des abris, des écoles et des centres religieux, sauf et seulement pour le temps qu'ils sont utilisés dans des buts militaires.[44]

Réponse du CNDP

Dans un communiqué de presse du 19 novembre faisant état de leurs propres enquêtes, et dans les entretiens ultérieurs avec les chercheurs de Human Rights Watch, les autorités du CNDP ont «réfuté catégoriquement» toutes allégations selon lesquelles leurs soldats auraient exécuté sommairement ou tué des civils à Kiwanja. Ils ont dit que les personnes qui faisaient pareilles affirmations étaient «guidées par des émotions plutôt que par la vérité.»[45] Le CNDP a ajouté que tous ceux qui avaient été tués par ses soldats étaient des «combattants» et que toutes les autres victimes avaient été «liquidées par les milices et les FARDC» ou bien se trouvaient «simplement et malheureusement au mauvais endroit au mauvais moment.»[46] Le CNDP a aussi soutenu que tous les morts étaient des hommes, à l'exception d'une seule femme.[47] Le droit humanitaire international interdit le meurtre ou le traitement inhumain de toute personne se trouvant sous le contrôle d'une partie au conflit, y compris des combattants ennemis.[48] 

Le CNDP a déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que les milices Maï Maï avaient tué les nombreuses personnes dont les corps ont été retrouvés à Kiwanja et qu'en attribuer la faute au CNDP était une tentative pour «ternir» son image.[49] Comme preuve que le gouverneur du Nord Kivu, Julien Paluku, avait participé à cette tentative, les représentants du CNDP ont dit qu'il avait signalé les tueries faites par le CNDP le 4 novembre, alors qu'ils avaient temporairement perdu le contrôle de la ville au profit des Maï Maï.[50] Les chercheurs de Human Rights Watch ont constaté que la date citée dans ce cas était fausse (le gouverneur a fait son rapport le 6 novembre), de même que d'autres dates données par le CNDP dans sa chronologie des événements.[51]  

L'administrateur territorial du CNDP nouvellement nommé, Simpenzwe, a nié que les personnes déplacées aient été forcées de quitter les camps, prétendant qu'elles étaient allées dans les camps uniquement parce que le gouvernement les avait forcées à y vivre. D'autres hauts représentants du CNDP ont déclaré aux chercheurs de Human Rights Watch que les habitants avaient «spontanément» détruit les camps.[52]

IV. Exactions commises par les Maï Maï

Les combattants Maï Maï à Kiwanja ont exécuté sommairement au moins six personnes, dont un garçon de 16 ans. Ils ont aussi tenté de tuer trois autres personnes, dont l'une a été grièvement blessée. Ils ont recruté et utilisé des enfants pour combattre et enlevé des personnes contre rançon.

Des témoins oculaires ont dit aux chercheurs de Human Rights Watch que les Maï Maï, les FDLR, et les soldats de l'armée congolaise étaient souvent vus en train de collaborer entre eux.[53] Un civil, enlevé par les Maï Maï à Kiwanja le 4 novembre, a été emmené dans un camp des FDLR, où ses ravisseurs ont été chaudement félicités, puis dans une base de l'armée congolaise où ils ont été conviés à diner et congratulés pour leurs succès au combat.[54]

Exécutions sommaires, massacres et enlèvements

Durant la brève période des 4 et 5 novembre où les combattants Maï Maï ont contrôlé Kiwanja, ils ont délibérément tué des civils, soit parce qu'ils les soupçonnaient de soutenir le CNDP, soit parce qu'ils voulaient les voler.

Une jeune fille âgée de 12 ans a raconté aux chercheurs de Human Rights Watch ce qui était arrivé à sa famille:

Il y avait beaucoup de combats autour de notre maison dans le quartier de Kasasa mardi [le 5 novembre], et vers 2 h de l'après-midi, des hommes sont venus jusqu'à notre maison et ont enfoncé la porte. Deux soldats sont entrés. Ils portaient des pantalons civils et des chemises militaires. Ils ont demandé à ma mère de leur donner de l'argent. Mais elle a dit qu'elle n'en avait pas et alors ils l'ont tuée. Ils l'ont poignardée avec un couteau, puis ils l'ont abattue d'une balle. Pour sauver sa vie, mon père a quitté la maison pour essayer de trouver de l'argent. Il est allé chez un voisin … Je n'ai pas vu ce qui lui est arrivé mais j'ai bien entendu un coup de feu. [Un voisin] est venu nous dire que les soldats avaient abattu mon père et toutes les autres personnes dans cette maison aussi.[55]

Des journalistes ont aussi fait état de meurtres commis par les Maï Maï, par exemple celui d'un homme qui est mort quand les Maï Maï ont mis le feu à sa maison. Les auteurs de l'incendie ont ensuite battu deux jeunes, de 16 et 19 ans, et exécuté le garçon de 16 ans et grièvement blessé l'autre en lui tirant une balle dans la gorge.[56]

Les Maï Maï ont enlevé six civils qu'ils accusaient d'être du côté du CNDP et ils ont aussi fait prisonniers deux combattants du CNDP. Parmi les civils, se trouvait un représentant du CNDP, Théophile Mpabuka, et un journaliste étranger, Thomas Scheen, qui travaillait pour le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung. Les Maï Maï ont exécuté deux de leurs prisonniers, tenté d'en tuer deux autres qui ont réussi à leur échapper et relâché Mpabuka contre une promesse de rançon. Scheen ainsi que son chauffeur et son interprète ont été finalement transférés aux soldats de l'armée congolaise puis  remis à la MONUC.[57]

Après avoir perdu le contrôle de Kiwanja, les Maï Maï se sont retirés vers des zones situées au nord de la ville. Le 29 novembre, des assaillants non identifiés dans cette région ont tué sept personnes de la même famille, dont trois femmes et un garçon de 13 ans, qui étaient apparemment en quête de nourriture. Ils ont violé une quatrième femme appartenant à la même famille. Etant donné la région où l'agression a eu lieu et la description des assaillants qui portaient des vêtements civils, il semble probable qu'ils étaient des Maï Maï ou des combattants des FDLR.[58]

Utilisation d'enfants soldats

Fin octobre, des agences de la protection de l'enfance ont signalé que les Maï Maï avaient recruté au moins 36 enfants pour le service miliaire dans le territoire de Rutshuru.[59] Le 4 novembre, des témoins ont indiqué avoir vu au moins 30 enfants -et peut-être bien plus- parmi les combattants Maï Maï qui ont attaqué Kiwanja. Des journalistes étrangers voyageant au nord vers Kanyabayonga après la défaite des Maï Maï à Kiwanja ont aussi vu de nombreux enfants parmi les Maï Maï, dont certains étaient très jeunes et semblaient avoir moins de 12 ans.[60]

V. Exactions commises par les soldats de l'armée congolaise

Le 28 octobre, les soldats de l'armée congolaise ont abandonné leurs positions au sud de Rutshuru et ont fui vers le nord en direction de Kanyabayonga, passant par Rutshuru et Kiwanja, mettant à sac les villes et les villages. Ils ont pillé les maisons, les magasins, les centres de soins, les camps de personnes déplacées et les bureaux des organisations humanitaires internationales. Dans leur fuite, les soldats ont laissé derrière eux des fusils et d'autre matériel militaire, les jetant parfois le long de leur route.[61]

Craignant une attaque du CNDP, les habitants des villes tout comme de nombreuses personnes déplacées ont fui avec les soldats de l'armée congolaise. Les troupes ont même volé les biens de ces civils en fuite, parfois battant ou tuant ceux qui refusaient de se séparer de leurs possessions. Dépouillées même des biens minimes avec lesquels elles avaient prévu de subsister, certaines des victimes n'ont eu d'autre choix que de rentrer chez elles.[62]

Les soldats ont aussi forcé les civils à transporter les biens pillés. Selon un habitant de Kiwanja, des soldats de l'armée congolaise ont forcé un homme de 25 ans à transporter leurs bagages. Lorsqu'il n'a plus pu supporter le poids, les soldats lui ont tiré une balle dans la tête, le tuant.[63]

VII. La MONUC : incapacité à protéger les civils

La MONUC a établi à Kiwanja l'une de ses plus vastes bases de terrain, disposant  de 120 soldats de maintien de la paix, pour protéger les civils et les nombreuses agences humanitaires internationales installées à cet endroit et fournissant leur assistance dans la région. Pourtant, la MONUC n'a pas réussi à empêcher le CNDP de prendre Kiwanja et Rutshuru le 29 octobre, ni à empêcher les massacres et autres exactions commises par le CNDP et les combattants Maï Maï début novembre.

La MONUC comptait sur la coopération des forces de l'armée congolaise pour protéger les villes, mais les soldats de l'armée congolaise se sont avérés incompétents et leur officier supérieur hostile. Toute possibilité qu'aurait pu avoir la MONUC par elle-même a été contrecarrée par les déficiences logistiques et les priorités concurrentes auxquelles la force de maintien de la paix a été confrontée.

 

Hostilité envers la MONUC

En tant que force de maintien de la paix opérant au Congo avec l'accord du gouvernement, la MONUC est censée coopérer avec l'armée congolaise et, à vrai dire, son mandat lui commande de le faire dans les opérations contre des groupes armés. Toutefois, l'armée et les dirigeants politiques congolais n'ont pas apporté à la MONUC leur total soutien.

 

Selon un haut fonctionnaire de l'ONU, certains fonctionnaires congolais prétendent que l'assistance de la MONUC contre le CNDP n'est pas à la hauteur, se servant parfois de cette explication pour couvrir leurs propres échecs au combat.[64] Lors d'une réunion à Goma le 6 septembre, le ministre congolais de la Défense et le ministre de l'Intérieur auraient prévenu des fonctionnaires de la MONUC que si celle-ci ne luttait pas contre le CNDP plus énergiquement, ils lanceraient la population contre les soldats de maintien de la paix.[65] Par la suite, des foules au Nord Kivu ont jeté des pierres sur les véhicules de la MONUC et de l'ONU, dressé des barricades pour les empêcher d'avancer et manifesté devant les bases de la MONUC. Des soldats de l'armée congolaise ont été vus en train d'organiser pareilles actions «populaires» et d'y participer. Depuis fin août, ces manifestations se sont intensifiées et ont provoqué 20 blessés parmi les soldats de maintien de la paix de l'ONU et endommagé au moins 25 véhicules de la MONUC.[66]

Le Colonel Delphin Kahimbi,[67] commandant en second de l'armée congolaise au Nord Kivu et chargé du commandement opérationnel de la région de Kiwanja et Rutshuru, est l'un des officiers à avoir manifesté une hostilité considérable envers les troupes de la MONUC. A l'occasion, des soldats de l'armée congolaise ont installé leurs positions à proximité des postes de la MONUC, mettant sciemment les soldats de maintien de la paix, et les civils qui  se regroupent près de leurs bases, en danger d'être pris dans des tirs croisés.[68] Le fait d'utiliser intentionnellement des civils, y compris les soldats de maintien de la paix non impliqués dans les combats, pour protéger un emplacement ou des forces militaires contre des attaques est considéré comme «usage de bouclier humain», ce qui est un crime de guerre.[69]

Au cours d'un incident de ce type début octobre, les forces de la MONUC ont essayé d'évacuer une position près de Ntamugenga où elles étaient prises dans les tirs croisés après que les soldats de l'armée congolaise aient lancé une offensive contre les positions du CNDP, utilisant délibérément la base de la MONUC pour se couvrir. Quand elles ont cherché à quitter la zone de de tir, Delphin a tenté d'empêcher leur départ en autorisant ses soldats à tirer sur leurs véhicules.[70] Delphin semble aussi avoir été impliqué dans l'instigation de manifestations anti-MONUC à Rutshuru et aux alentours en septembre et octobre, parfois en coopération avec Dominic Bufondo, l'administrateur territorial de Rutshuru.[71]

Du fait de cette incitation à l'hostilité populaire, les patrouilles de l'ONU dans la région ont été limitées et ont exigé davantage de gardes qu'auparavant. Les restrictions de patrouilles à Kiwanja les 4 et 5 novembre ont signifié que les soldats de maintien de la paix étaient fréquemment absents quand les habitants étaient attaqués.[72]

Avec 120 soldats seulement, la force de la MONUC à Kiwanja comptait sur la coopération avec l'armée congolaise dans l'éventualité d'une attaque du CNDP. L'hostilité du Colonel Delphin à l'égard de la MONUC a compliqué ces efforts de coopération. Alors que le CNDP avançait sur Rutshuru le 26 octobre, les fonctionnaires de la MONUC ont averti Delphin de renforcer ses forces à Rugari près de là et ils ont proposé un soutien supplémentaire de la MONUC. Delphin a refusé cette assistance et peu après il est devenu injoignable en éteignant son téléphone portable. Lorsque Delphin a été à nouveau en contact avec la MONUC deux jours plus tard, le CNDP avait pris Rugari et les forces de l'armée congolaise avaient pris la fuite. Delphin et ses troupes ont fait retraite vers le nord, laissant la MONUC toute seule pour protéger Rutshuru et Kiwanja contre des attaques.[73]

Comme un haut fonctionnaire de l'ONU l'a déclaré à Human Rights Watch : «Le plan pour maintenir le CNDP hors de Rutshuru reposait si  lourdement sur la coopération des FARDC que lorsque nous l'avons perdue, nous n'avions pas d'autre plan.»[74]

Problèmes logistiques et techniques

Début novembre, les forces de l'ONU à la base de la MONUC à Kiwanja étaient en transition avec des troupes uruguayennes se préparant à remplacer les soldats de maintien de la paix indiens. Les Uruguayens avaient envoyé en avance un détachement de deux divisions, chargées de préparer la base pour l'arrivée du reste du bataillon.[75]

A partir du 26 octobre, deux jours avant que le CNDP n'arrive en ville, les troupes indiennes n'avait accès qu'occasionnellement à un interprète qui travaillait pour le programme de désarmement et démobilisation. L'absence d'un interprète à plein temps parlant français ou swahili jusqu'au 11 novembre a nui à la communication des forces de la MONUC avec la population locale, rendant difficile une réaction rapide aux événements.[76] De même, le manque de données de renseignement et de capacité à les analyser a compliqué la planification de l'action militaire et une protection suffisante des civils.[77]

Priorités concurrentes

Le 29 octobre, jour où le CNDP a avancé sur Rutshuru et Kiwanja, les forces de Nkunda faisaient aussi mouvement au sud vers Goma. Avec des «instructions paniquées venant de New York et de Kinshasa pour 'sauver Goma'», comme l'a exprimé un fonctionnaire de l'ONU, peu d'attention était dirigée sur ce qui se passait à Rutshuru.[78] Assurer la sécurité des villes isolées et de leurs habitants constituait clairement une priorité moins haute que protéger la capitale du Nord Kivu.

A Kiwanja une semaine plus tard, assurer la sécurité des travailleurs humanitaires, d'un journaliste étranger et d'un groupe d'observateurs militaires est devenu la priorité. Dans une situation où les ressources étaient insuffisantes, pratiquement aucunes n'étaient consacrées à la protection des civils congolais.

Les troupes indiennes disposaient de quatre véhicules de combat russes BMP (Bronevaya Maschina Piekhota), des véhicules plus efficaces que les blindés pour le transport de troupes dont disposaient les troupes uruguayennes. Mais quand le CNDP a attaqué, deux des quatre BMP avaient été envoyés à Kalengera (à 7 kilomètres environ au sud de Rutshuru) et étaient dans l'incapacité de revenir en ville.[79] Les deux autres BMP ont été initialement envoyés au sud pour bloquer l'avance du CNDP mais ont dû ensuite se détourner pour aider à porter secours à des travailleurs humanitaires dont le convoi en dehors de la ville avait été caillassé par des habitants mécontents de leur départ. Les Uruguayens avaient amené les travailleurs humanitaires à la base de l'agence de l'ONU aux réfugiés (le HCR), située entre Kiwanja et Rutshuru, mais la base a été aussitôt incendiée par des soldats de l'armée congolaise qui battaient en retraite. Les BMP indiens ont été nécessaires pour dégager les travailleurs humanitaires et les ramener sains et saufs à la base de la MONUC à Kiwanja.[80]

La MONUC n'avait aucun autre véhicule disponible à envoyer au sud de Rutshuru pour bloquer le CNDP. De plus, les forces du CNDP s'étaient dispersées en petites unités mobiles et mélangées aux masses de civils en fuite, utilisant de fait les civils comme boucliers humains de façon à ne pas pouvoir être attaquées, en violation du droit humanitaire international.[81]

Le CNDP a progressé sur les deux villes en petits groupes de 10 à 12 combattants chacun, avançant à travers les plantations de chaque côté de la route principale. Selon un haut fonctionnaire de l'ONU, la MONUC, du fait qu'elle est actuellement structurée comme une force de maintien de la paix plutôt que comme une force pour faire appliquer la paix, n'a pas la capacité de mener ce type de guerre de guérilla.[82]

Devant la réalité des troupes du CNDP prenant le contrôle de Kiwanja et Rutshuru, les forces de la MONUC n'ont pas essayé de s'opposer à la mise en place par le CNDP d'une administration dans ces villes.[83] 

Une semaine plus tard, quand les Maï Maï ont attaqué Kiwanja, les soldats de maintien de la paix de la MONUC ont encore une fois donné la priorité à la protection d'autres personnes que la population locale. Ils ont affecté quatre patrouilles à la recherche du journaliste étranger enlevé mentionné précédemment, deux autres pour porter secours à des travailleurs humanitaires, et une autre pour délivrer une équipe d'observateurs militaires. En conséquence, il restait trop peu de soldats de maintien de la paix pour protéger la population locale.[84]

Après avoir reçu les rapports sur les tueries le lendemain, les forces uruguayennes et indiennes ont envoyé une patrouille chacune vers 4h de l'après-midi, chacune pour patrouiller sur l'une des deux routes principales menant hors de Kiwanja. Les Uruguayens ont vu cinq corps et une partie d'un autre sur le kilomètre et demi qu'ils ont parcouru le long de la route principale menant au nord-est vers Kinyandonyi. Les Indiens ont vu sept corps au cours de leur patrouille sur la route principale allant au nord-ouest vers Kanyabayonga. Les patrouilles sont ensuite rentrées à la base, tandis que les massacres se poursuivaient dans la ville jusqu'au soir. Aucune autre action n'a été entreprise par la MONUC pour arrêter les massacres ou pour renforcer la protection des civils dans la ville. Au cours d'une patrouille le lendemain, le 6 novembre, les Uruguayens ont trouvé trois autres corps, deux hommes et un enfant, tous tués par balle, à l'intérieur d'une maison entre Nyongera et Kinyandonyi.

Le 7 novembre, la MONUC a envoyé à Kiwanja une équipe pluridisciplinaire, comprenant des observateurs des droits humains, pour entamer le processus de renforcement de la protection des civils et pour documenter les violations des droits humains. Au moment où nous écrivons, aucun rapport n'a encore été publié.  

Conclusion

Quand les tueries et autres exactions ont commencé à Kiwanja et Rutshuru, la MONUC n'avait pas la capacité de sortir activement pour protéger la population civile attaquée. Tout ce qu'elle s'est avérée capable de faire a été d'offrir un refuge aux personnes qui sont venues se regrouper à l'intérieur et autour de ses bases.

 

Les officiers militaires supérieurs de la MONUC focalisés sur la protection de Goma contre les attaques ne disposaient plus de moyens pour protéger les villes du nord. L'armée congolaise censée collaborer avec la MONUC a pris la fuite, après avoir au cours des semaines précédentes monté la population locale contre les soldats de maintien de la paix. La force de la MONUC était réduite et mal équipée, divisée en deux unités nationales différentes de commandement, n'ayant pas la  capacité de recueillir des renseignements ni même de communiquer avec la population congolaise.

Après avoir mis en place une administration locale à Kiwanja, le CNDP a riposté à une attaque Maï Maï en tuant, violant et terrorisant les civils à Kiwanja. Pendant ce temps, les forces de la MONUC ne sont pas sorties pour se rendre dans les quartiers où les rebelles du CNDP commettaient des atrocités, mais sont restées dans leur base.

Le maximum que la MONUC pouvait faire alors -et actuellement- était de donner refuge dans le voisinage immédiat de la base aux personnes les plus en danger. Toutefois, même juste devant les grilles de la MONUC, la sécurité est limitée.

La MONUC a besoin de toute urgence de troupes supplémentaires ayant des capacités d'intervention rapide pour renforcer la protection des civils et empêcher de futurs meurtres et viols. Le Conseil de sécurité a autorisé des troupes supplémentaires mais estime que l'arrivée de ces renforts pourrait prendre jusqu'à quatre mois. Entre-temps, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a demandé à l'Union européenne (UE) de fournir d'urgence une force relais à court-terme pour protéger les civils jusqu'à ce que des troupes supplémentaires de l'ONU soient en place.   

Human Rights Watch exhorte l'UE à déployer rapidement une telle force dans l'Est du Congo. Les troupes de l'UE permettraient aux soldats de maintien de la paix de la MONUC de renforcer les bases dans les zones les plus reculées, comme Kiwanja, et pourraient aider à empêcher de nouvelles exactions. Cela fait beaucoup trop longtemps que le peuple de l'Est du Congo souffre. La communauté  internationale ne peut pas attendre une autre vague de tueries et de viols, et de nouveaux recrutements d'enfants soldats, pour donner à l'ONU l'aide dont elle a besoin pour protéger les civils.

VIII. Recommandations

Au gouvernement congolais

  • Mener des enquêtes et traduire en justice tous les militaires, quel que soit leur rang, impliqués dans de graves violations du droit humanitaire international, notamment l'utilisation des soldats de maintien de la paix de l'ONU comme «boucliers humains».

Au CNDP

  • Faire rendre compte à tous les individus, y compris les gradés, responsables de graves violations du droit humanitaire international, tels que des meurtres, des viols et autres exactions commises à Kiwanja les 4 et 5 novembre.
  • Offrir des zones sûres et protégées aux personnes déplacées et permettre la liberté de mouvement pour tous les civils.

A la MONUC

  • Eviter de coopérer avec les unités de l'armée congolaise et ses commandants militaires qui ont été impliqués dans des graves violations du droit humanitaire international. 
  • Organiser les troupes de la MONUC de sorte qu'elles puissent réagir rapidement et avec un support logistique suffisant afin de protéger efficacement les civils en danger.

A l'Union européenne

  • Fournir d'urgence une force «relais» suffisamment équipée pour aider à protéger les civils dans l'Est du Congo jusqu'à l'arrivée de troupes supplémentaires de la MONUC.
  • Dénoncer publiquement les graves violations du droit humanitaire international commises par toutes les parties au conflit et exiger que les auteurs de crimes de guerre soient tenus pour responsables de leurs actes.

Au Conseil de sécurité de l'ONU

  • Garantir que le mandat de la MONUC est renouvelé et que les 3100 soldats supplémentaires pour la MONUC sont déployés aussitôt que possible, avec les moyens de réagir rapidement et avec un support logistique suffisant afin de protéger efficacement les civils en danger.

Au Secrétaire général de l'ONU Et aux facilitateurs  internationaux du processus de paix dans l'Est du Congo

  • Réitérer les appels urgents pour une «force relais» de l'UE qui aide à protéger les civils dans l'Est du Congo jusqu'à l'arrivée de troupes supplémentaires de la MONUC.
  • Nommer d'urgence un conseiller spécial de haut niveau sur les droits humains pour l'Est du Congo pour aider à garantir que les préoccupations de droits humains sont au cœur du processus de paix et pour aider à empêcher de futures atrocités.

[1] Le conflit impliquant les forces du gouvernement congolais et les milices pro-gouvernementales contre les groupes armés non étatiques est considéré comme un conflit armé non-international au regard du droit humanitaire international, ou des lois de la guerre. Le droit applicable inclue l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949, le deuxième Procotole facultatif de 1977 aux Conventions de Genève de 1949 (Protocole II), et le droit humanitaire international coutumier. L'article 3 prévoit des normes minimum pour le traitement de toute personne prisonnière, notamment les interdictions de meurtre, de torture et autres traitements cruels, et de la prise d'otages. Le droit humanitaire international coutumier établit, entre autres, des règles portant sur les moyens et les méthodes de la guerre, notamment les interdictions des attaques délibérées, indiscriminées ou disproportionnées contre les civils. Le droit international relatif aux droits humains, tel qu'il est traduit dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, est aussi applicable.

[2] Les FARDC auraient plus de 22 000 soldats au Nord Kivu, alors que les rebelles du CNDP disposeraient de 4000 à 6000 combattants.

[3] Il est arrivé que le CNDP se soit retiré parfois de certaines zones quelques jours après les avoir conquises, afin de renforcer ses troupes en d'autres endroits.

[4] Entretien de Human Rights Watch avec un analyste militaire de l'ONU, Goma, 3 décembre 2008.

[5] Entretien de Human Rights Watch par téléphone avec un travailleur d'une ONG congolaise qui a participé aux inhumations à Kiwanja, Goma, 7 novembre 2008. Entretien de Human Rights Watch avec un habitant de Kiwanja qui a participé aux inhumations, Kiwanja, 29 novembre 2008. Entretien de Human Rights Watch avec un voisin de la victime à Kiwanja, Kiwanja, 29 novembre 2008.

[6] Entretien de Human Rights Watch avec un voisin de la victime qui a été témoin du massacre, Kiwanja, 29 novembre 2008.

[7] Le droit humanitaire international coutumier exige que toutes les parties à un conflit prennent toutes les  précautions réalisables pour protéger la population civile sous leur contrôle contre les effets des attaques. Voir Comité international de la Croix Rouge (CICR), Droit humanitaire international coutumier (Cambridge, UK: Cambridge University Press, 2005), règle 22. Les parties doivent aussi, quand les circonstances le permettent, prévenir suffisamment à l'avance s attaques qui peuvent affecter les populations civiles. Ibid., règle 20.

[8] Entretien de Human Rights Watch avec un fonctionnaire de la MONUC, Nord Kivu, 29 novembre 2008.

[9] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja, Goma, 8 novembre 2008 ; et Kiwanja, 26 et 29 novembre 2008.

[10] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja n'ayant pu fuir Kiwanja le 5 novembre, Goma, 8 novembre 2008.

11 Entretiens de Human Rights Watch à Goma, Kibati et Kiwanja, novembre et décembre 2008.

[12] Voir l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 ; Protocole II, art. 4.

[13] Entretien de Human Rights Watch avec un témoin, Kiwanja, 30 novembre 2008.

[14] Entretien de Human Rights Watch avec un témoin, Kiwanja, 30 novembre 2008.

[15] Entretien de Human Rights Watch avec un témoin, Kiwanja, 29 novembre 2008.

[16] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja, Goma, 27 novembre 2008.

[17] Entretiens de Human Rights Watch avec des personnes déplacées internes de Kiwanja à Goma, 11 novembre 2008, et à Goma et Kibati, 27 novembre 2008.

[18] Entretien de Human Rights Watch avec un journaliste étranger, Goma, 21 novembre 2008. Enregistrement archivé par Human Rights Watch.

[19] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja à  Kibati, 11, 24 et 25 novembre ; Entretiens de Human Rights Watch avec des représentants d'ONG de Kiwanja, Goma, 13 et 22 novembre 2008; communication officielle de la MONUC à Laurent Nkunda, 18 novembre 2008, archivé par Human Rights Watch.

[20] Entretiens de Human Rights Watch par téléphone avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja et des représentants d'ONG, Goma, 7, 8 et 9 décembre 2008.

[21] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja, à Kibati, 11, 24 et 25 novembre 2008; à Kiwanja, 29 et 30 novembre 2008; et à Goma, 8 décembre 2008.

[22] Bien que tous les combattants du CNDP n'appartiennent pas au groupe ethnique tutsi, et que certains soldats de l'armée congolaise soient tutsi, les habitants du Nord Kivu désignent souvent les combattants du CNDP comme des «soldats tutsi».

[23] Entretien de Human Rights Watch avec une victime, Kibati, 25 novembre 2008.

[24] Entretien de Human Rights Watch avec des personnes déplacées et un employé de centre de soins, Kiwanja,  29 novembre 2008 et 8 décembre 2008.

[25] Entretiens de Human Rights Watch avec des travailleurs de la protection de l'enfance, Goma, 5 novembre 2008 et 8 décembre 2008.

[26] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja, à Goma, Kibati, et Kiwanja, novembre 2008. Entretiens de Human Rights Watch avec un travailleur de la protection de l'enfance, Goma, 8 décembre 2008.

[27] Entretien de Human Rights Watch avec un travailleur de la protection de l'enfance, Goma, 8 décembre 2008.

[28] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja, Kiwanja, 30 novembre 2008.

[29] Entretien de Human Rights Watch avec un fonctionnaire de la MONUC, 29 novembre 2008.

[30] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja et des personnes déplacées internes, Goma, Kibati et Kiwanja, novembre 2008.

[31]Voir l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 ; voir aussi CICR, Droit international humanitaire coutumier, règle 99 et texte d'accompagnement.

[32] La République démocratique du Congo est un Etat partie au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, adoptée le 25 mai 2000. G.A. Res. 54/263, Annexe I, 54 U.N. GAOR Supp. (No. 49) à 7, U.N. Doc. A/54/49, Vol. III, entrée en vigueur le 12 février 2002. Le protocole a élevé les normes établies par la Convention relative aux droits de l'enfant en fixant à 18 ans l'âge minimum pour toute conscription ou recrutement forcé ou participation directe aux hostilités. L'article 4 stipule que «Les groupes armés qui sont distincts des forces armées d'un État ne devraient en aucune circonstance enrôler ni utiliser dans les hostilités des personnes âgées de moins de 18 ans.»

[33] En octobre 2008, le HCR gérait six camps officiels pour personnes déplacées à Rutshuru et Kiwanja et aux alentours, avec les populations suivantes : Dumez (2855), Ngwenda (3123), Kasasa (5143), Nyongera (3447), camp anglican de Kinyandoni (5317), camp catholique de Kinyandoni (3244). Statistiques du HCR archivées par Human Rights Watch. OCHA a comptabilisé 3345 autres personnes déplacées internes vivant dans des sites publics non officiels (2190 à Rutshuru et 1225 à Kiwanja). Le HCR estime que le nombre total de personnes déplacées internes vivant dans des sites non officiels était beaucoup plus élevé, près de 25 000, bien qu'il s'agisse seulement d'estimations. En août 2008, l'OCHA avait comptabilisé 25 300 personnes déplacées vivant dans des familles d'accueil dans les villes de Kiwanja et de Rutshuru (12 850 à Kiwanja et 12 450 à Rutshuru). Des dizaines de milliers d'autres vivaient dans des familles d'accueil dans des villages voisins. Le nombre de personnes déplacées vivant dans des familles d'accueil et qui ont fui après la prise de contrôle de la zone par le CNDP n'est pas clair. Entretien de Human Rights Watch avec le Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés (HCR), Goma, 4 décembre 2008; Document de travail du HCR, 31 octobre 2008, http://www.reliefweb.int/rw/rwb.nsf/db900SID/PANA-7KXHVY?OpenDocument; Entretiens de Human Rights Watch avec le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), Goma, 6 novembre 2008 et 9 décembre 2008.

[34] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja et des personnes déplacées à Goma, 6 et 7 novembre 2008; à Kiwanja, 29 novembre 2008; et à Kibati, 25 novembre 2008.

[35] Entretien de Human Rights Watch avec des témoins, à Kiwanja, 29 novembre ; à Kibati, 25 novembre; et à Goma, 6 et 7 novembre 2008.

[36] Entretiens de Human Rights Watch avec des personnes déplacées internes, Kiwanja, 29 novembre 2008. Le HCR a interrogé des représentants du CNDP à Rutshuru le 4 novembre qui ont confirmé qu'ils avaient invité les habitants à démanteler les camps.

[37] Entretiens de Human Rights Watch avec des témoins, Goma, Kibati et Kiwanja, 6, 8, 24, 25, 29 et 30 novembre 2008.

[38] Voir Annexe II.

[39] Entretien de Human Rights Watch avec une personne déplacée du camp de Nyongera, Kiwanja, 29 novembre 2008.

[40] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Rutshuru et de Kiwanja présents au rassemblement, Kiwanja, 29 et 30 novembre 2008.

[41] Entretiens de Human Rights Watch avec des personnes déplacées internes à Kibati, 24 et 25 novembre 2008 ; et à Kiwanja, 26, 29 et 30 novembre 2008.

[42] Entretien de Human Rights Watch avec un membre d'une ONG de Kiwanja, Goma, 13 novembre 2008.

38 Le 30 novembre, le camp disposait seulement de neuf latrines et d'un point d'eau. Il n'y avait pas eu de distribution alimentaire depuis deux semaines.

[44] Voir CICR, Droit international humanitaire coutumier, règle 10.

[45] Entretien de Human Rights Watch avec Jules Simpenzwe, Administrateur CNDP pour Rutshuru, novembre 26 et avec d'autres représentants du CNDP, Rutshuru, 30 novembre 2008. . . Congrès national pour la défense du peuple, «Communiqué de Presse sur les 'Massacres' à Kiwanja», Bwiza, 19 novembre 2008.

[46] Ibid.

[47] Congrès national pour la défense du peuple, «Communiqué de Presse sur les 'Massacres' à Kiwanja», Bwiza, 19 novembre 2008.

[48] L'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 stipule que «les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité,» et ne seront pas soumises à «des atteintes portées à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices.»  Voir aussi, Protocole II, art. 4,

[49] Entretien de Human Rights Watch avec des dirigeants du CNDP, Rutshuru, 30 novembre 2008. Congrès national pour la défense du peuple, «Communiqué de Presse sur les 'Massacres' à Kiwanja», Bwiza, 19 novembre 2008.

[50] Ibid.

[51] Entretiens de Human Rights Watch avec des fonctionnaires de l'ONU, Goma, 2 et 5 décembre 2008. Transcription de la déclaration du Gouverneur, Julien Paluku, le 6 novembre sur Radio Okapi à propos des massacres de Kiwanja archivée par Human Rights Watch.

[52] Entretien de Human Rights Watch avec des dirigeants du CNDP, Rutshuru, 30 novembre 2008.  

[53] Thomas Scheen, «I don't wanna enter voluntarily my own casket» [article en allemand], Frankfurter  Allgemeine Zeitung, 13 novembre 2008. 

[54] Entretien de Human Rights Watch par téléphone avec une personne enlevée, Goma, 4 décembre 2008.

[55] Entretien de Human Rights Watch avec un enfant, Kiwanja, 30 novembre 2008.

[56] Béatrice Petit, «CONGO - Nord Kivu: Voyage au bout de l'enfer»  article inédit, 5 décembre 2008. Archivé par Human Rights Watch.   Font problem

[57] Entretiens de Human Rights Watch avec deux personnes enlevées, Goma, 8 novembre 2008 et 4 décembre 2008. Thomas Scheen, «I don't wanna enter voluntarily my own casket» [article en allemand], Frankfurter Allgemeinen Zeitung, 13 novembre 2008.

[58] Entretien de Human Rights Watch avec un habitant de Kiwanja qui a participé à l'inhumation, Kiwanja, 30 novembre 2008. Entretien de Human Rights Watch avec un employé de centre de soins, Kiwanja, 29 novembre 2008.

[59] Entretiens de Human Rights Watch avec des fonctionnaires de la protection de l'enfance, Goma, 5 novembre et 8 décembre 2008.

[60] Entretiens de Human Rights Watch avec des journalistes étrangers, 28 novembre 2008. Les photos prises par les journalistes montrent clairement les enfants soldats dans les rangs des Maï Maï.

[61] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja et de Rutshuru, des représentants d'ONG congolaises et internationales, et des fonctionnaires de l'ONU, à Goma, Kibati et Kiwanja, novembre 2008.

[62] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants de Kiwanja et de Rutshuru et des personnes déplacées, dont certaines ont été forcées de retourner à Kiwanja et Rutshuru après avoir été volées par des soldats de l'armée congolaise alors qu'elles tentaient de fuir, à Goma, Kibati et Kiwanja, novembre 2008.

[63] Entretien de Human Rights Watch avec un habitant de Kiwanja, Kibati, 25 novembre 2008.

[64] Entretien de Human Rights Watch avec un haut fonctionnaire de l'ONU, 20 octobre 2008.

[65] Entretien de Human Rights Watch avec un diplomate, Goma, 16 septembre 2008.

[66] Entretien de Human Rights Watch avec un fonctionnaire de la MONUC, Goma, 5 décembre 2008.

[67] Le Colonel Delphin a un grave passif d'atteintes aux droits humains, notamment la détention et la torture de personnes dans sa propre maison. Human Rights Watch a demandé à maintes reprises que des enquêtes soient menées sur sa conduite. Human Rights Watch, «République démocratique du Congo – Nouvelle crise au Nord Kivu», 23 octobre 2007,

http://www.hrw.org/fr/reports/2007/10/22/nouvelle-crise-au-nord-kivu

[68] Entretien de Human Rights Watch avec un haut fonctionnaire de l'ONU, 20 octobre 2008.

[69] Voir CICR, Droit humanitaire international coutumier, règle 97.

[70] Entretien de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, Goma, 2 décembre 2008.

[71] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre, 2 décembre et 5 décembre 2008.

[72] Entretien de Human Rights Watch avec de hauts fonctionnaires de l'ONU, Goma, 5 décembre 2008.

[73] Entretiens de Human Rights Watch avec de hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre 2008, et 5 décembre 2008.

[74] Entretien de Human Rights Watch avec un haut fonctionnaire de l'ONU, Goma, 2 décembre 2008.

[75] Entretiens de Human Rights Watch avec de hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre, 2 décembre et 5 décembre 2008.

[76] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre et 5 décembre 2008.

[77] Entretien de Human Rights Watch avec un haut fonctionnaire de l'ONU, Goma, 2 décembre 2008.

[78] Entretien de Human Rights Watch avec un haut fonctionnaire de l'ONU, Goma, 2 décembre 2008.

[79] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, Goma, 5 décembre 2008.

[80] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre, 2 décembre et 5 décembre 2008.

[81] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 5 décembre 2008.

[82] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, Goma, 2 et 5 décembre 2008.

[83] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre et 5 décembre 2008.

[84] Entretiens de Human Rights Watch avec des hauts fonctionnaires de l'ONU, 29 novembre et 5 décembre 2008.