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Chine : Les moyens de subsistance des bergers tibétains en danger

Le gouvernement doit arrêter les déplacements forcés de bergers, et offrir réparation pour les abus commis

(Washington, DC, le 10 juin 2007) – Le gouvernement chinois déplace les bergers tibétains par la force vers des zones urbaines et des terres agricoles, détruisant ainsi leurs moyens de subsistance et leur mode de vie. En outre il leur refuse l’accès à la justice pour les violations de leurs droits, a déclaré Human Rights Watch dans un nouveau rapport publié aujourd’hui.

« Certaines autorités chinoises prétendent que leur urbanisation forcée des bergers tibétains est une forme éclairée de modernisation. »
Brad Adams, directeur pour l’Asie à Human Rights Watch
  

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Depuis 2000, la campagne menée par le gouvernement chinois pour déplacer les bergers tibétains vers des zones urbaines a mis en danger les modes de vie traditionnels et les moyens de subsistance de dizaines, sinon de centaines, de milliers de personnes qui ont été relocalisées dans l’ouest de la Chine. De nombreux bergers ont été contraints d’abattre leur bétail et de déménager dans des colonies de logements nouvellement construits, sans avoir été consultés ni indemnisés.  
 
Le rapport de 79 pages, « No One Has the Liberty to Refuse: Tibetan Herders Forcibly Relocated in Gansu, Qinghai, Sichuan and the Tibet Autonomous Region » (« Personne n’a la liberté de refuser : Les bergers tibétains sont déplacés par la force au Gansu, Qinghai, Sichuan et dans la Région autonome du Tibet »), décrit en détail la façon dont la politique gouvernementale de réinstallation forcée a violé les droits économiques et sociaux des bergers tibétains. Il s’appuie sur des entretiens menés de juillet 2004 à décembre 2006, avec environ 150 Tibétains provenant des zones directement touchées.  
 
« Certaines autorités chinoises prétendent que leur urbanisation forcée des bergers tibétains est une forme éclairée de modernisation », a déclaré Brad Adams, directeur pour l’Asie à Human Rights Watch. « Mais ces mêmes autorités ne se sont pas préoccupées de savoir ce que veulent les Tibétains, et ont eu la main lourde avec ceux qui se sont plaints. »  
 
Le gouvernement explique que les relocalisations forcées sont une politique nécessaire pour protéger l’environnement et pour « développer », « civiliser » et « moderniser » ces zones ainsi que leurs habitants. Certains responsables chinois ont promu la concentration des bergers dans des zones urbaines comme un moyen d’améliorer l’accès de ceux-ci aux services médicaux et sociaux, et aussi de stimuler la croissance des économies urbaines dans les régions plus pauvres de l’ouest de la Chine. Mais d’autres ont selon toute probabilité des motifs moins nobles visant la suppression de la culture tibétaine et l’assimilation par la force des Tibétains dans la société chinoise Han.  
 
Le rapport décrit la façon dont les bergers tibétains réinstallés par la force dans des zones urbaines sont fréquemment incapables d’obtenir un autre emploi que du travail temporaire ou subalterne, en partie à cause de leur incapacité à parler chinois ou de leur manque de capitaux pour démarrer de petites entreprises. Certains bergers tibétains ont été réinstallés sur des terres agricoles, malgré le fait que ces adeptes du pastoralisme ont peu ou pas d’expérience de l’agriculture.  
 
Il est clair que le gouvernement rencontre de graves problèmes environnementaux dans l’ouest de la Chine, et que la pauvreté reste bien plus élevée dans cette région. Mais les causes de ces problèmes et la validité des mesures officielles prises pour y répondre, comme l’enthousiasme du gouvernement pour de vastes projets de développement d’infrastructures dans des zones ayant apparemment besoin de protection environnementale, restent très discutables.  
 
Une étude réalisée en 2006 par des universitaires chinois, Li Jiacaidan et Yang Hude, a conclu que « Si nous ne pouvons pas trouver une méthode efficace pour résoudre ces problèmes, alors les conflits relatifs aux prairies entraînés par l’aggravation de l’environnement pourraient redoubler, et affecter gravement la stabilité sociale et politique du Qinghai et même de toutes les régions du nord-ouest. »  
 
« Plusieurs études chinoises reconnaissent que la perte des droits sur la terre a lésé les intérêts des bergers tibétains, mais la politique persiste », a affirmé Adams. « Ces études montrent aussi comment cette politique accroît l’éventualité d’un conflit social dans l’ouest de la Chine. »  
 
Human Rights Watch a demandé au gouvernement chinois d’imposer un moratoire sur toutes les réinstallations jusqu’à ce qu’il mette en place un mécanisme efficace pour examiner la politique de réinstallation et son impact négatif sur les droits des bergers. Le gouvernement devrait aussi prendre toutes les mesures appropriées, par exemple la possibilité de retourner au mode de subsistance de berger, et de s’assurer que des alternatives convenables sont accessibles aux personnes qui ont été déplacées et ne peuvent plus subvenir à leurs propres besoins. Dans les cas où les consultations et les compensations ont été inadéquates, les autorités locales devraient offrir aux bergers la possibilité de retourner, d’être réinstallés à proximité ou dans un endroit semblable à celui d’où on les a fait partir, et octroyer un juste dédommagement comme l’impose la nouvelle loi chinoise.  
 
« Les responsables chinois prétendent favoriser le développement économique et la protection de l’environnement, mais il est difficile de voir ces objectifs réellement atteints ou bénéficiant aux bergers tibétains », a dit Adams. « Si le gouvernement chinois ne réexamine pas cette politique, ses justifications devront être remises en cause. »  
 
Témoignages de Tibétains interrogés pour le rapport :
     
    « Ils détruisent nos communautés tibétaines [de bergers] en ne nous laissant pas vivre dans notre région et donc en détruisant complètement nos moyens de subsistance, nous rendant difficile la survie dans ce monde, car nous sommes [bergers] depuis des générations. Les Chinois ne nous laissent pas continuer nos activités et nous forcent à vivre dans des villes construites par les Chinois, qui vont nous laisser sans bétail et nous ne serons pas capables de faire un autre travail, alors nous serons sûrement mendiants. »  
    —F.R., Tibétain de Machen (Maqin), province de Qinghai, novembre 2004  
     
    « La terre qui est bonne pour la forêt devrait être plantée d’arbres, et la terre bonne pour l’herbe devrait être plantée d’herbe, et la politique d’abandonner l’agriculture pour la forêt et d’abandonner l’élevage pour l’herbe devrait être poursuivie assidûment et continuée. Les moyens de subsistance traditionnels des [bergers] devraient être remplacés par l’économie de marché et la prospérité devrait être adoptée. »  
    —F.H., du comté de Pema (Banma), préfecture de Golok, décrivant la politique chinoise dans son district natal, janvier 2006  
     
    « Parce qu’il n’y a pas de Chinois qui vivent dans les régions pastorales lointaines du Tibet, beaucoup de gens pensent que la politique consistant à mettre les bergers tibétains dans les villes a pour but de contrôler ces régions, et après que la vieille génération aura disparu, nous serons assimilés petit à petit dans les villes... »  
    —A.M., du comté de Machen, province de Qinghai, septembre 2005  
     
    « Il n’y a pas eu de nouvelles maisons construites, ils ont juste mis de nouvelles portes et fenêtres aux bâtiments de la vieille prison. Le gouvernement a fait beaucoup de publicité sur l’installation de l’eau et de l’électricité, mais ceux qui ont emménagé là disent qu’il n’y en a pas. Le gouvernement parle de donner de l’aide alimentaire, mais pour le moment ils n’ont rien eu... »  
    —Z.R., du comté de Chabcha, province de Qinghai, janvier 2005

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