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Égypte : Des tentatives de dissimuler la crise des droits humains en 2022

Les abus affectent de larges segments de la société

Sanaa Seif (au centre), sœur de l’activiste égypto-britannique emprisonné Alaa Abdel-Fattah, participait à une marche d’une coalition d’ONG le 12 novembre 2022, lors de la Conférence COP27 de l'ONU sur le changement climatique à Charm el-Cheikh, en Égypte. Alaa Abdel-Fattah avait entamé une grève de la faim pour protester contre l'injustice de son emprisonnement. © 2022 Gehad Hamdy/picture-alliance/dpa/AP Images

(Beyrouth) – En 2022, le gouvernement égyptien n’a ni assoupli la campagne de répression menée contre des détracteurs, ni abrogé les lois restreignant les libertés fondamentales, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans son Rapport mondial 2023. Pendant ce temps, le gouvernement a mené un effort concerté pour blanchir l'image du pays sans adopter de réformes critiques, notamment en organisant un dialogue national parrainé par le président et en accueillant en novembre la COP27, la conférence de l’ONU sur le climat.

Le président Abdel Fattah al-Sissi avait désigné 2022 comme l’« année de la société civile », mais des membres clés de cette même société civile ont fait l’objet d’interdictions arbitraires de voyager, de gels d’avoirs, ainsi que d’enquêtes pénales en représailles pour leur activisme pacifique ou pour leurs critiques. Bien qu'il ait accueilli la COP27, le gouvernement a imposé des obstacles arbitraires au financement, à la recherche et à l’enregistrement qui ont affaibli les organisations environnementales locales, contraignant certains activistes à l’exil et d’autres à rester à abandonner un travail important.

« En 2022, mis à part des changements cosmétiques, le gouvernement du président Abdel Fattah al-Sissi n'a montré aucune réelle volonté politique de mettre fin aux violations systématiques des droits contre de larges segments de la société », a déclaré Adam Coogle, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Les autorités égyptiennes devraient comprendre qu'aucune campagne de relations publiques ne suffira à éclipser la crise des droits humains dans le pays, seules la fin de la répression et de véritables réformes y parviendront. »

Dans son Rapport mondial 2023, sa 33e édition qui compte 712 pages, Human Rights Watch passe en revue les pratiques en matière de droits dans près de 100 pays. Dans son essai introductif, la directrice exécutive par intérim Tirana Hassan explique que dans un monde où l’équilibre des pouvoirs a changé, il n'est plus possible de compter sur un petit groupe de gouvernements, principalement du Nord, pour défendre les droits humains. La mobilisation mondiale autour de la guerre menée par la Russie en Ukraine nous rappelle le potentiel extraordinaire lorsque les gouvernements s’acquittent de leurs obligations en matière de droits humains à l'échelle internationale. Il incombe à tous les pays, grands et petits, d'appliquer un cadre des droits humains à leurs politiques, puis de conjuguer leurs efforts pour protéger et promouvoir ces droits. 

Grâce aux efforts concertés des activistes égyptiens et internationaux, la COP27 est passée d'une opportunité de relations publiques pour le gouvernement à un rare moment de jugement. Le bilan catastrophique de l'Égypte en matière de droits humains a fait la une des journaux mondiaux avant et pendant la conférence. Lors de la conférence, le gouvernement a fait face à de réelles pressions malgré ses tentatives de restreindre la participation locale.

Entre avril et novembre, les autorités ont affirmé avoir libéré 1 000 activistes et journalistes injustement détenus mais des organisations de défense des droits humains ont documenté l'arrestation de nombreux autres, dont les réarrestations de certaines des personnes libérées. Les prisons grouillent encore de milliers de personnes détenues en raison de leur appartenance politique, et le gouvernement garde leur nombre secret. La police du ministère de l'Intérieur et les agents de la Sûreté nationale ont continué à faire disparaître de force les opposants. Des membres des forces de sécurité et du personnel pénitentiaire égyptiens ont maltraité et torturé des détenus, notamment en ayant recours à des violences sexuelles systématiques pour les avilir dans une impunité presque totale.

Dans le Nord-Sinaï, Human Rights Watch a publié des preuves selon lesquelles l'armée égyptienne et ses milices affiliées ont procédé à trois exécutions extrajudiciaires d’hommes menottés ou blessés en détention.

Human Rights Watch a documenté des cas où les forces de sécurité ont utilisé le ciblage numérique, sur la base des dispositions relatives à la « débauche » et de la Loi sur la cybercriminalité, pour piéger des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT), les arrêter et les détenir arbitrairement, sur la base de preuves numériques trouvées sur leurs appareils personnels, et les maltraiter en garde à vue.

En septembre 2022, les procureurs ont convoqué trois journalistes de Mada Masr ainsi que le rédacteur en chef, et les ont inculpés de « diffusion de fausses informations », en raison d’un article de presse. Le rédacteur en chef a également été accusé d’exploiter un site d’information sans licence. Les autorités ont continué de bloquer l’accès à des centaines de sites d’information et de défense des droits humains sans ordonnance judiciaire.

En mars 2022, les autorités ont violé l'interdiction légale internationale du refoulement en expulsant 31 Érythréens, dont 8 enfants, après les avoir détenus dans de mauvaises conditions et leur avoir refusé l’accès au Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) pour déposer des demandes d’asile, selon la Plateforme pour les réfugiés en Égypte.

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