Rapports de Human Rights Watch

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Annexe 2: Fiches individuelles detaillees des anciens responsables et agents de la DDS occupant des postes de responsabilité

Saleh Younouss, Directeur-général adjoint des Postes et Télécommunications, Ministre de la Communication

Pendant le régime de Hissène Habré, Saleh Younouss a été le premier Directeur de la DDS, d’avril 1983 au 30 mai 1987, lorsqu’il a été remplacé par Ghihini Koreï. Il avait auparavant été actif au sein des CCFAN55 et Délégué de la Préfecture du Batha. Après son poste de Directeur de la DDS, il a été nommé Consul général du Tchad en Arabie Saoudite.

Dans le Rapport de la Commission d’Enquête, un ex-agent affirme que Saleh Younouss venait vers minuit et faisait l’appel des détenus (en général six à huit détenus par nuit) qui étaient ensuite emmenés en voiture et exécutés. De plus, selon la Commission d’Enquête, Saleh Younouss aurait ordonné l’arrestation d’ Aboïna Nguelsou et Djilimou Amelle le 10 octobre 1985 ainsi que de douze autres personnes originaires du Sud du Tchad. Ils auraient tous été frappés et torturés.

La Commission montre également que Younouss a reçu une copie d’une lettre envoyée à Habré par le médecin du Comité International de la Croix Rouge (CICR) demandant le transfert de 21 prisonniers à l’hôpital. Ce transfert ayant été refusé, cinq des détenus sont décédés. Saleh Younouss a aussi reçu des lettres du CICR lui étant adressées et demandant des informations concernant des personnes capturées que le CICR ne pouvait retrouver dans les prisons auxquelles il avait accès.

Dans son procès-verbal devant la Commission d’Enquête, Saleh Younouss a déclaré qu’au départ, la mission de la DDS était de s’occuper de la sécurité intérieure et extérieure du Tchad et de contrecarrer les actions des Libyens contre le Tchad. Il a expliqué que son rôle  était d’abord de coordonner les activités de la Direction et notamment d’ordonner les arrestations, de centraliser les renseignements recueillis et de les transmettre à Hissène Habré. Younouss a ajouté que « petit à petit, le Président [Hissène Habré] a donné une nouvelle orientation à la Direction et en a fait un instrument de terreur ».

En ce qui concerne les exécutions des détenus dans les prisons, Saleh Younouss a reconnu devant la Commission d’Enquête que beaucoup de prisonniers étaient morts « d’épuisement ou de maladie » et que d’autres avaient été « enlevés la nuit des geôles ou même de chez eux directement et [disparaissaient] ».

Une ancienne victime a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH qu’un an après son arrestation, à l’âge de treize ans, elle a été emprisonnée dans les locaux de la DDS. Elle y aurait été interrogée par Saleh Younouss en la présence de Abdelkader Hassan dit « Rangers ». Saleh Younouss aurait ensuite donné l’ordre de la torturer. Elle aurait  été torturéeà l’électricité attachée sur une chaise, complètement nue, un sac en fibres sur la tête.

Un ancien gardien de prison à la BSIR a, quant à lui, déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêté pour avoir donné du pain à deux détenus, dont l’un serait décédé à la suite des tortures et l’autre juste après sa remise en liberté. Saleh Younouss aurait surpris ces deux prisonniers avec le pain et ces derniers auraient indiqué le nom de l’ancien gardien. Saleh Younouss aurait alors dit à l’ancien gardien: « Nous on emmène les gens ici pour mourir et toi, tu les nourris. Pourquoi ? »

M’Baikoubou Laoutaye Nestor, ex-Directeur adjoint de la Garde Nationale du Tchad (GNNT), actuel Préfet de Monts de Lam

Sous Hissène Habré, M’Baikoubou Laoutaye a été Chef du Service de Contrôle de la Direction de la DDS (nommé par Habré le 27 juin 1987), puis Directeur par intérim de la DDS, et Directeur adjoint de la DDS jusqu’au 30 août 1990 lorsqu’il a été remplacé par Toké Dady.

Yaldé Samuel, un ancien chef de service eu sein de la DDS, a déclaré devant la Commission d’Enquête que M’Baikoubou était l’informateur privilégié à la DDS des attachés militaires américains.

Ahmat Allatchi, Commissaire Divisionnaire de Police, Chef de Surveillance du Territoire du Chari/Baguirmi 

Sous Hissène Habré, Ahmat Allatchi a été Directeur de la DDS de juillet 1990 au 29 août 1990, lorsque Adoum Galmaye l’a remplacé. Auparavant, Allatchi, qui a été formé à l’École des commissaires de Lyon en France, avait été Commissaire de police stagiaire dans le cadre de la Sûreté Nationale (nommé par Hissène Habré le 25 octobre 1983). Il a ensuite occupé les postes d’Adjoint à la DDS et de Directeur adjoint de la DDS.

Une ancienne victime a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH qu’en 1987 elle a été arrêtée et interrogée par entre autres Ahmat Allatchi. Elle a ensuite été « gravement torturée: électrochocs, torturée à l’eau, matraquée, attachée à l’ « Arbatachar » à plusieurs reprises.

Une autre victime arrêtée en 1989 en République Centrafricaine  a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée à la DDS devant Mahamat Bidon et Ahmat Allatchi. Ces derniers l’auraient menacée de tortures.

Un ancien agent de la BSIR a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que Ahmat Allatchi, lorsqu’il était Chef de service de la DDS, a fait « disparaître » un commerçant dont il avait volé le véhicule. L’agent a ajouté que dans ce genre de règlement de compte, les fiches n’étaient pas toutes transmises à Hissène Habré.

Une personne interrogée par Human Rights Watch et la FIDH explique qu’elle et sa famille ont été forcées d’être présentes lors de l’exécution de son père, un ancien partisan du GUNT. Pour cette opération,  Ahmat Allatchi serait venu accompagné de 8 ou 9 personnes.

Abdoulaye Hassan a déclaré à la Commission d’Enquête qu’Allatchi était présent lors du transfert de Hassane Djamous, alors blessé et sans soins, à la prison de la présidence, où il sera plus tard exécuté. Al Hadj Tobou Djimé a quant à lui déclaré à la Commission d’Enquête que Ahmat Allatchi était présent lorsque Hissène Habré a donné l’ordre d’arrêter la sœur de Djimé, Chedeï.

Rohoua Bourdje Bekonyo, un détenu victime de torture sous Habré, a confié à la Commission d’Enquête avoir été interrogé le lendemain de son arrestation le 8 août 1990 par Allatchi. Allatchi voulait lui faire avouer le nom de l’auteur d’un tract qui critiquait les pratiques du gouvernement de Hissène Habré.

Selon la Commission d’Enquête, alors qu’il était Directeur adjoint de la DDS, Ahmat Allatchi faisait prêter serment à des agents de la DDS de grader le secret sur leurs agissements afin qu’aucune fuite d’information sur les activités de la DDS ne puisse avoir lieu.

Chah Allanga, Commandant d’un groupement de gendarmerie

Sous Hissène Habré, Chah Allanga a été Commandant de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) (nommé par Hissène Habré le 27 juin 1987 et renommé le 20 septembre 1989), poste qu’il quitte le 11 septembre 1990 pour être remplacé par Oumar Souni.

Oumar Souny, Officier Assimilé dans l’Armée Nationale du Tchad, en mission á l’est du pays

Sous Hissène Habré, Oumar Souny a été Commandant adjoint de la BSIR (nommé par Habré le 20 septembre 1989), puis Commandant titulaire de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) (nommé par Habré le 9 novembre 1990). Auparavant, il avait été Commandant de la Sécurité rapprochée. Il a aussi été arrêté puis détenu en 1986 pendant six mois pour avoir, selon lui, oublié d’exécuter les instructions de Hissène Habré.

Un ancien agent de la BSIR a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que Oumar Souny était la personne responsable des arrestations à la BSIR.

Abderamane Yomdi Djarsia, Direction du Génie Militaire et de l’Incendie, Armée Nationale Tchadienne

Sous Hissène Habré, Abderamane Yomdi Djarsia a eu les grades de Sous-Officier assimilé puis d’Officier assimilé à la BSIR, ainsi que de Chef du Service Fichier et Chef du service Effectifs à la BSIR.

M’bang Elinan Jérémie, Coordinateur de l’ANS à N’Djaména.

Sous Hissène Habré, Mbang Elinan Jérémie a été Chef du service Formation et Recrutement de la DDS, Secrétaire de permanence de la DDS (nommé le 26 juillet 1985), et Agent au service de Recherches.

Abbas Abougrene, un ancien chef de service au sein de la DDS, a déclaré devant la Commission d’Enquête que Mbang Elinan Jérémie faisait partie de la Commission chargée de l’arrestation et de l’exécution des Zaghawa en 1989 et l’a accusé d’avoir participé aux tortures pendant les interrogatoires de la DDS. Abougrene a précisé que c’était le service d’Exploitation, dirigé par Mahamat Djibrine et Mahamat Bidon, qui s’occupait des interrogatoires à la DDS et qu’une commission au sein de ce service était chargée des tortures. Mbang Elinan Jérémie aurait fait partie de cette commission.

Selon la Commission d’Enquête, Mbang Elinan Jérémie, lorsqu’il était Chef du service Formation et Recrutement, était membre d’une commission devant laquelle les agents de la DDS devaient prêter serment de ne rien révéler sur leurs agissements afin qu’aucune fuite d’information sur les activités de la DDS ne puisse avoir lieu.

Un document retrouvé dans les archives de la DDS montre que Mbang Elinan Jérémie a suivi avec succès une formation en photographie et en explosifs dispensée par deux fonctionnaires français, du 12 juin au 22 juillet 1988 à N’Djaména.

Yalde Samuel, Chef de Sécurité de l’Agence de Sécurité pour la Navigation Aérienne (ASECNA) de  l’aéroport international de N’Djaména, ex-Agent de la Gendarmerie Nationale affecté à l’Agence Nationale de Sécurité (ANS).

Sous Hissène Habré, Yalde Samuel a été Chef du service Formation et Recrutement (nommé par Habré le 15 décembre 1988 puis à nouveau le 20 septembre 1989), puis Chef du service Exploitation (nommé le 4 novembre 1989) chargé de transmettre à Habré les informations en provenance de l’intérieur et de l’extérieur sous forme de fiches. Auparavant, il avait été détaché au HCFANT, le service de Renseignements militaires pour les deux Logones et la Tandjilé dont la mission était de renseigner les chefs militaires sur les activités des rebelles CODOS, puis Adjoint au Chef du service de Recherches de la DDS (nommé le 27 juin 1987) chargé de collecter les informations à N’Djaména par le biais de ses antennes auprès des arrondissements municipaux.

D’après la Commission d’Enquête, Yaldé Samuel aurait aussi été, avec Mahamat Djibrine, Mahamat Saker, Warou Ali Fodou et le lieutenant Bandjim, le Directeur de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) chargée des arrestations.

Dans sa plainte déposée à N’Djaména contre Yalde Samuel, Aldoumngar Mbaidje Bouka a déclaré avoir été arrêté le 8 août 1989 pour avoir distribué des tracts dénonçant le régime de Habré. Ses deux enfants, âgés de trois et treize ans, auraient été tués lors de son arrestation. Aldoumngar a déclaré avoir été torturé pendant trois jours sous la direction notamment de Yalde Samuel. Les méthodes de torture utilisées ont été: le supplice de la baguette qui consiste à serrer fortement la tête entre deux baguettes entraînant des douleurs insupportables et des hémorragies nasales, le supplice de « l’Arbatachar », la bastonnade, l’ingurgitation forcée d’eau jusqu’à suffocation et la torture à l’électricité sur les parties génitales. Aldoumngar a déclaré avoir ensuite été enfermé à la « Piscine » de la DDS pendant six mois, sous-alimenté et sans soins pour ses blessures.

Dans sa plainte déposée à N’Djaména contre Yalde Samuel, Souleymane Guengueng a déclaré avoir été interrogé le 3 août 1988 par Yalde Samuel et Doudet Yalade. Selon Souleymane Guengueng, « ils s’attendaient à ma mort ». Souleymane Guengueng a aussi déclaré avoir été placé en détention à la DDS par Yalde Samuel et Moussa Adoum Seid.

Kenoue Tchoungre a, quant à, lui déclaré à la Commission d’Enquête avoir été dépourvu de son argent et de ses biens, puis attaché et battu au camp des Martyrs sur les ordres de Yalde Samuel, après son arrestation par Yalde le 26 novembre 1987.

Une personne a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été déshabillée, placée dans un bain d’eau puis électrocutée et frappée à la tête par des agents de la DDS, le jour de son arrestation en 1986 à N’Djaména, en présence notamment de Yalde Samuel. Une autre personne, arrêtée en novembre 1987, a dit à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été torturée avec des électrochocs au sexe dans un local de la Présidence en présence d’agents de la DDS, dont Yalde Samuel.

Un ancien agent de la DDS a confié à Human Rights Watch et à la FIDH que le recours à la torture était courant à la DDS et que Yaldé Samuel était l’un des agents qui torturaient.

Mahamat Djibrine, dit « El-Djonto », Chef de Cabinet du Directeur général de la Sûreté Nationale (renvoyé en janvier 2005 de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI)).

Sous Hissène Habré, Mahamat Djibrine a été Agent de la DDS, Chef du service Contre-Espionnage, et Coordonnateur de la Documentation de la DDS chargé entre autres de centraliser toutes les fiches et rapports avant de les transmettre au Directeur et à Hissène Habré. Mahamat Djibrine a aussi été Commissaire à la Commission d’Investigation de la DDS, Chef du service Mission Terroriste chargé de persécuter et de liquider physiquement les opposants tchadiens se trouvant à l’étranger et, auparavant, Détaché de la BSIR à Mani et Sentinelle à la prison des « Locaux » à N’Djaména.

Selon le Rapport de la Commission d’Enquête et selon la déclaration d’Abbas Abougrene, un ancien chef de service au sein de la DDS, devant cette Commission d’Enquête, Mahamat Djibrine a également fait partie de la commission chargée de l’arrestation  des membres de l’ethnie Hadjaraï en 1987 et de celle chargée des membres de l’ethnie Zaghawa en 1989.

Mahamat Djibrine a d’ailleurs déclaré devant la Commission d’Enquête que Hissène Habré n’aimait pas les Arabes et les Zaghawa et que « chaque fois qu’il y a des problèmes les concernant, [il] ordonne leur arrestation » souvent au Directeur de la DDS et parfois aux autres agents directement. Djibrine a ajouté que « c’est le Chef de l’Etat en personne qui donne l’ordre des liquidations » et que « quand le Président ordonne d’arrêter quelqu’un il nous dit de ramasser tout chez lui. Je fais l’inventaire et je lui transmets. (…) C’est le Président qui ordonne l’occupation des maisons. Pour les voitures pillées la répartition se fait au niveau de la Présidence ».

Selon le Rapport de la Commission d’Enquête, Mahamat Djibrine faisait partie de la commission à la DDS chargée de l’interrogatoire des détenus et recourrant à la torture pour faire avouer. Yalde Samuel a confirmé devant la Commission d’Enquête l’existence de cette commission qui était « dans la routine » composée entre autres de Djibrine. D’ailleurs, dans la plainte qu’il a déposée, Ismael Hachim, arrêté en mai 1989, a déclaré avoir été interrogé et menacé au moyen d’un revolver par Djibrine qui voulait lui faire avouer son implication dans la tentative de coup d’Etat du 1er avril.

Mahamat Djibrine a confirmé devant la Commission d’Enquête l’utilisation de la torture durant les interrogatoires: « Je sais qu’il a des attachés et qu’on chicotte. J’ai vu Mahamat Bidon utiliser le fil de rallonge branché au bout nu avec lequel il touchait les prisonniers. (...) Pour les tortures tout dépend des agents. C’est souvent une commission qui est chargée des interrogatoires ».

Plusieurs personnes ont mis en cause Mahamat Djibrine devant la Commission d’Enquête. Abdallah Hassaballah, arrêté en avril 1989 parce que suspecté d’être en contact avec les Zaghawa, a déclaré que, lors de son interrogatoire par Mahamat Djibrine, ce dernier aurait ordonné « à ce [qu’il fut] retiré quelque part par les agents pour que la vérité se manifestât ». Trois agents l’auraient alors ligoté et fouetté à l’aide d’un fil de fer puis lui auraient infligé une décharge électrique sur presque toutes les parties du corps.

Abdelramane Nahadjé Yacoub, arrêté en avril 1989 et d’ethnie Zaghawa, a quant à lui déclaré devant la Commission d’Enquête qu’après avoir été interrogé une première fois par Mahamat Djibrine, ce dernier aurait fait comprendre à ses agents de le ligoter et de le battre pour le faire parler. Il aurait ainsi été ligoté à « l’Arbatachar » et soumis à des décharges électriques sur les côtes et la poitrine. Au cours d’un troisième interrogatoire, Djibrine l’aurait fait ligoter et fouetter.

Brahim Kosse Abakar a mis en cause Djibrine devant la Commission d’Enquête concernant le pillage de ses biens — argent, pistolet, carabine et deux voitures — lors de son arrestation en mai 1988.

Plusieurs témoignages ont été réunis par Human Rights Watch et la FIDH sur la responsabilité de Mahamat Djibrine dans les tortures sous le régime Habré. Une ancienne victime a ainsi déclaré avoir été interrogée par Djibrine et torturée au fouet et à l’électricité sous ses ordres. Djibrine aurait sorti son arme, l’aurait chargée et placée dans la bouche de la victime en la menaçant de la tuer. La victime aurait été déshabillée, attachée à « l’Arbatachar », torturée à l’électricité par Abakar Torbo sur les ordres de Djibrine, et forcée d’avaler des quantités énormes d’eau jusqu’au gonflement de son ventre.

Une personne a témoigné à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été enfermée à la « Piscine » après son arrestation en 1989, puis interrogée entre autres par Mahamat Djibrine. Elle aurait « été chicotée pendant longtemps, jusqu’à ce que sa robe [colle] dans le sang ».

Un autre ancien détenu a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogé et fortement giflé par Djibrine, au point d’en perdre connaissance pendant plus de dix minutes. Sur l’ordre de Djibrine, le détenu aurait été torturé à l’éléctricité et à la technique du piment, laquelle consiste à mettre la tête du supplicié dans un trou à même le sol et de souffler de l’air dans du feu qui se trouve dans un autre trou communiquant avec le premier.

Un individu arrêté en 1989 a dit à Human Rights Watch et à la FIDH que lors de son interrogatoire notamment par Mahamat Djibrine à la BSIR, il a été torturé à « l’Arbatachar » et à l’électricité.

Une autre personne arrêtée en 1989 a témoigné à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée à trois reprises par Mahamat Djibrine et torturée à « l’Arbatachar » et à l’eau. Après trois mois de détention au Camps des Martyrs, elle a demandé un entretien avec Mahamat Djibrine pour lui demander de remettre à ses collègues les bons de caisse qu’on lui avait saisi lors de son arrestation. A cette occasion Mahamat Djibrine lui aurait demandé « Comment est-ce que vous arrivez à tenir comme ça ? »

Un ancien prisonnier a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été déshabillé, placé dans un bain d’eau puis électrocuté et frappé à la tête par des agents de la DDS, le jour de son arrestation en 1986 à N’Djaména, en présence notamment de Mahamat Djibrine.

Un ex-détenu a dit à Human Rights Watch et à la FIDH qu’après son arrestation par Mahamat Djibrine en 1990, il aurait été torturé à « l’Arbatachar », à l’eau, puis pendu et ligoté avec une corde au plafond.

 

Une ex-victime a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêtée chez elle en 1983 notamment par Mahamat Djibrine puis frappée à la jambe avec des crosses notamment par Mahamat Djibrine devant Habré lors d’un interrogatoire.

Une autre personne a confié à Human Rights Watch et à la FIDH qu’après avoir été interrogée par Mahamat Djibrine à la DDS, ce dernier aurait fait comprendre à ses agents qu’il était souhaitable de l’emmener dans la « salle des tortures » où elle aurait alors reçu des décharges électriques sur le cou, sur le dos et sur les parties intimes, puis aurait subi juste après un second interrogatoire mené par Mahamat Djibrine.

La femme d’un ex-détenu a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que quelques jours après l’arrestation de son mari en 1986, des agents, dont Mahamat Djibrine, sont venus perquisitionner leur maison et ont pris armes et argent. L’ex-détenu aurait subi des tortures durant son emprisonnement.

Un témoin a confié à Human Rights Watch et à la FIDH que Mahamat Djibrine aurait pillé sa maison avec un autre agent de la DDS après l’arrestation de ce témoin.

Djadda El Hadj Mallah, Direction Protocole du Ministère des Affaires Étrangères et de l’Integration Africaine;  ex-Chef de service du Salon d’honneur de l’Aéroport international de N’Djaména, ex-Sous-Directeur de la zone Asie-Océanie au Ministère des Affaires Étrangères.

           

Sous Hissène Habré, Djadda El Hadj Mallah a été Officier de Sécurité de la DDS, Secrétaire de permanence de la DDS, puis Responsable du service de Recherche de la DDS (nommé par Habré le 12 octobre 1985) et Chef du service Mission Terroriste de la DDS (nommé le 15 décembre 1988). Djadda El Hadj Mallah a ensuite été le Chef Adjoint du Service Administratif et Financier de la DDS (nommé le 20 septembre 1989) et le Chef du service de Surveillance de la ville (nommé par Habré le 5 mai 1990).

D’après la Commission d’Enquête, El Hadj Djadda a été Président de la commission chargée par Hissène Habré de l’arrestation  des Hadjaraï en 1987.

Le service Mission Terroriste, dont il fut le chef, a été chargé de persécuter et d’exécuter  physiquement les opposants tchadiens se trouvant à l’étranger. Ce service, selon la Commission d’Enquête, compte à son actif des dizaines d’assassinats et d’enlèvements, surtout dans les pays limitrophes au Tchad.

Abbas Abougrene a mis en cause Djadda El Hadj Mallah devant la Commission d’Enquête pour sa participation aux tortures pendant les interrogatoires à la DDS. Abougrene a indiqué que le service d’Exploitation, dirigé par Mahamat Djibrine et Mahamat Bidon, s’occupait des interrogatoires à la DDS et qu’une commission du service, dont Al Hadj Djada faisait partie, était chargée des tortures.

Brahim Kosse Abakar a déclaré devant la Commission d’Enquête avoir été interrogé par Djadda El Hadj Mallah à la DDS. Durant ses interrogatoires, il aurait été torturé à l’électricité dans la position de « l’Arbatachar » et à l’eau. Mahamat Moussa Djame a quant à lui déclaré devant la Commission d’Enquête avoir subi « un interrogatoire musclé » par Al Hadj Djadda après son arrestation.

Une personne a indiqué à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée et torturée à « l’Arbatachar », par ingurgitation d’eau et par électrocution pendant six heures par Issa Arawai assisté entre autres de Djadda El Hadj Mallah.

Un autre individu a confié à Human Rights Watch et à la FIDH que Djadda El Hadj Mallah a ordonné à un subalterne de lui asséner cent coups de fouet avec un fil électrique. Djadda El Hadj Mallah l’aurait lui-même torturé à l’électricité sur la main en lui demandant « Est-ce que ça fait mal ? », puis sur la poitrine jusqu’à ce qu’il perde connaissance.

Abbas Abougrene, Chef de service de Contre Espionnage de l’Agence Nationale de Sécurité (ANS).

Sous Hissène Habré, Abbas Abougrene a été Chef de service de la Sécurité fluviale (nommé le 15 décembre 1988 puis renommé le 20 octobre 1989). Il avait auparavant été Agent du Service de Recherche de la DDS et Chef de service adjoint de la Sécurité fluviale de la DDS (nommé le 12 octobre 1985). Il a aussi travaillé à la Commission de la Sécurité Intérieure et Extérieure.

Abbas Abougrene a déclaré devant la Commission d’Enquête que le 1er avril 1989, lui et les autres chefs de service ont reçu l’ordre de l’ex-Directeur de la DDS Guihini Koreï de procéder à l’arrestation des ressortissants Zaghawa sans distinction. Selon Abbass Abougrene, Guihini Koreï aurait précisé que ces instructions étaient celles du Président Hissène Habré.

Dans un entretien accordé à Human Rights Watch et à la FIDH, un ancien détenu explique qu’Abbas Abougrene l’a arrêté et ensuite interrogé avec un autre agent de la DDS sur ses liens avec la rébellion. Il aurait été torturé en étant attaché à « l’Arbatachar » et aurait reçu des coups de bâtons dont il porte encore les cicatrices.

Adoum Mahamat Moussa, Chef de service adjoint de l’Agence Nationale de Sécurité (ANS) pour la ville de N’Djaména, ex-employé du Centre de Recherches et de Coordination des Renseignements (CRCR).

Sous Hissène Habré, Adoum Mahamat Moussa a été Chef du service Contre Espionnage (nommé le 20 septembre 1989). Il a aussi occupé le poste de Chef du service de Sécurité de la DDS à Moundou (nommé le 21 novembre 1985), puis de Chef du service de Sécurité de la DDS du Guerra (nommé le 23 août 1986). Auparavant, il avait été détaché à la DDS en tant que Chef du service Sécurité de Mao.

Selon le Rapport de la Commission d’Enquête, Adoum Mahamat Moussa faisait partie du groupe ayant arrêté Garsouk Gody le 11 juin 1987 à cause de son appartenance à l’ethnie Hadjaraï. Adoum Mahamat Moussa aurait volé pour son usage personnel la mobylette de Garsouk Gody, lequel serait mort peu après son arrestation.

Un ex-Sergent Chef de l’armée du GUNT a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogé à deux reprises sur les raisons pour lesquelles il était en rébellion, une fois à la DDS par Mahamat Bidon et une fois par les agents du deuxième bureau de l’État Major, dont Mahamat Moussa. L’ex-Sergent aurait reçu des coups de matraque durant ses interrogatoires.

Un ancien détenu a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêté et interrogé en 1990 par entre autres Mahamat Moussa. Il a dit avoir subi de nombreuses séances de tortures au cours desquelles il a, entre autres, été attaché à « l’Arbatachar » et brûlé aux organes génitaux avec des cigarettes. Il aurait aussi subi des décharges électriques sur la cuisse et des bastonnades, et aurait été torturé à l’eau.

Hissène Chahadé, Commandant, en service à la Direction du Personnel de la Direction Générale de la Garde Nationale; ex-Commandant adjoint de la gendarmerie du Chari-Bagiurmi.

Sous Hissène Habré, après avoir été « chargé des auditions » (nommé le 9 mai 1983) au Service Exploitation des Renseignements et Interrogatoires de la DDS sous la responsabilité de Mahamat Saker dit « Bidon », Hissènee Chahadé a été Chef du Service Exploitation de la DDS (nommé le 29 mars 1985). Hissènee Chahadé a ensuite été Chef du Service Administratif et Financier de la DDS chargé de gérer le personnel et le matériel de la Direction.

Lorsqu’il était Chef de Service Exploitation de la DDS, Hissènee Chahadé était chargé d’exploiter toutes les informations en provenance de l’intérieur comme de l’extérieur, lesquelles étaient ensuite transmises sous forme de fiches à Hissène Habré.

Aboulaye Djadar, ancien Chef de la Brigade Territoriale d’Ati, a déclaré à la Commission d’Enquête avoir été arrêté le 1er janvier 1984 parce qu’il avait refusé d’établir un procès verbal de condamnation à mort de deux combattants. Djadar a dit avoir été torturé par Hissènee Chahadé dans les locaux de la DDS. Parmi les tortures qu’il a subies, Djadar a mentionné avoir reçu de multiples coups sur la tête et s’être fait pulvériser du gaz dans les yeux. Il aurait aussi été ligoté et suspendu la tête vers le bas à l’aide d’une poulie puis battu jusqu’à perdre connaissance. Ses tortionnaires lui auraient mis des électrodes aux parties les plus sensibles du corps, notamment sur les organes sexuels.

Une ancienne victime arrêtée en 1984 a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH qu’elle avait été emprisonnée et frappée pendant sa détention par plusieurs agents de la DDS dont Hissène Chahadé.

Un ancien agent de la DDS a soutenu lors d’un entretien avec Human Rights Watch et la FIDH que le recours à la torture était courant à la DDS. Cet agent a affirmé que Hissène Chahadé était l’un de ceux qui torturaient.

Une troisième victime a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêtée en 1987 par Hissène Chahadé qui l’a emmenée à la DDS devant Guihini Korei. Elle aurait été torturée à « l’Arbatachar » et à l’eau.

Abdelkader Hassan dit « Rangers », Officier de liaison, au Ministère de la Sécurité Publique et Immigration; ex-Service de Législation au Ministère de la Sécurité publique, ex-Chef de Sécurité du Premier Ministre, ex-Attaché de Sécurité du Ministre de la Sécurité publique.

Sous Hissène Habré, Abdelkader Hassan a été Chef du Service Exploitation étrangers (nommé par Habré le 20 septembre 1989). Il avait auparavant été Adjoint du Chef de Service Formation/Recrutement sous la direction de Yaldé Samuel (nommé le 15 décembre 1988).

Selon un document de la DDS, Abdelkader Hassan a suivi un stage de formation du personnel de la DDS en photographie et en explosifs, dispensé par deux fonctionnaires français de la DGSE, du 12 juin au 22 juillet 1988 à N’Djaména.

Une ancienne victime a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH qu’après avoir été arrêtée à l’âge de 14 ans, elle a été interrogée puis torturée dans les locaux de la BSIR. Lors d’une séance durant laquelle elle a subi la « torture au piment », qui consiste à mettre la tête du supplicié dans un trou à même le sol et de souffler de l’air dans du feu qui se trouve dans un autre trou communiquant avec le premier, Abdelkader Hassan aurait insisté pour que « cela soit bien fait ».

Une autre victime a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH qu’un an après son arrestation à l’âge de treize ans, elle a été emprisonnée ans dans les locaux de la DDS. Elle y aurait été interrogée par Saleh Younouss en la présence d’Abdelkader Hassan. Elle aurait été torturée à l’électricité sur une chaise en fer.

Selon un témoignage fait à Human Rights Watch et à la FIDH, Abdelkader Hassan aurait lui-même été emprisonné dans les locaux de la DDS en 1990.

Khalil Djibrine, ex-Sous-Directeur des Finances à la Manufacture d’Équipements Militaires (MANEM), actuel Préfet du Lac.

Sous Hissène Habré, Khalil Djibrine a été Chef du Service Liaison Militaire et Extérieur (nommé le 29 mars 1985) qui était en étroite collaboration avec les Renseignements militaires, puis Chef du service Sécurité à Abeche (nommé le 21 novembre 1985). Khalil Djibrine a ensuite occupé le poste de Chef adjoint du Service Exploitation de la DDS (nommé le 27 juin 1987 et renommé le 20 septembre 1989), devant informer Habré sous forme de fiches, mais il a été suspendu de ce poste pour « comportement irresponsable et manque de collaboration dans l’exercice de ses fonctions » le 6 novembre 1989. Enfin, il a été Officier de sécurité de la DDS et il apparaît sur des listes comme Secrétaire à la Sécurité Présidentielle.

D’après la déclaration de Mahamat Djibrine à la Commission d’Enquête, Khalil Djibrine était le contact du groupe Mosaïque en République Centre Africaine sous la couverture de « conseiller culturel à l’ambassade tchadienne ». Le groupe mosaïque regroupait les services de renseignement et de sécurité de sept pays — Côte d’Ivoire, Tchad, Togo, RCA, Zaïre, Cameroun et Israël — et visait « l’échange de renseignements et l’organisation des actions combinées pour lutter contre le terrorisme international en Afrique et au Moyen-Orient ». Selon la Commission d’Enquête, ce groupe a détenu et extradé illégalement vers le Tchad de nombreux opposants tchadiens qui ont ensuite été exécutés par le régime Habré.

Un ex-agent de Liaison de l’armée a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que Khalil Djibrine faisait partie du groupe chargé par Habré d’éliminer les cadres du Sud durant « Septembre Noir », en 1984. Il ajoute que Khalil Djibrine était le Responsable de la DDS à Sahr dans le Moyen-Chari où plusieurs cadres Sudistes ont été exécutés. Cet ex-agent soutient qu’en une semaine, plus de 35 cadres ont été arrêtés et exécutés sur place ou à la « villa chinoise ».

Un autre témoin a confirmé à Human Rights Watch et à la FIDH que Khalil Djibrine gérait la DDS à Sahr pendant « Septembre Noir » et a expliqué qu’il « avait une mauvaise réputation, était connu comme très méchant, arrêtait les gens pour un rien et avait le surnom de « l’exécuteur noir » ».

Moussa Outman, Chef de Personnel à la Direction de Renseignements Généraux; ex-Préfet de Tandjile Ouest.

Sous Hissène Habré, Moussa Outman a été Chef du service Secrétariat de la DDS (nommé par Habré le 9 mai 1983, renommé le 29 mars 1985 et le 27 juin 1987), Chef du service de la Sécurité intérieure de la DDS (nommé le 15 décembre 1988), puis à nouveau Chef du service Secrétariat de la DDS (nommé par Habré le 20 septembre 1989).

Un ex-agent de Liaison de l’armée a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que Moussa Outman faisait partie du groupe composé de militaires des FAN envoyé à Sahr par Habré durant « Septembre Noir » et dont la mission était d’éliminer les cadres du Sud. Selon cet ex-agent, en une semaine, plus de 35 cadres ont été arrêtés et exécutés sur place ou à « la villa chinoise » pendant la nuit.

Warou Ali Fodou, Direction de la Sécurité Publique;Commandant du Corps urbain du 6ème arrondissement.

Sous Hissène Habré, Warou Ali Fodou a d’abord été Chef adjoint de la Sécurité Fluviale (nommé le 19 mars 1985), puis Chef de ce service (nommé le 12 octobre 1985) chargé de surveiller les entrées et les sorties le long du fleuve jusqu’au Lac Tchad. Warou Ali Fodou a aussi fait partie du corps de la Sécurité Nationale (intégré le 16 avril 1988) et a été Chef du service de Recherches de la DDS (nommé le 15 décembre 1988 et renommé le 20 septembre 1989) chargé de collecter des informations à N’Djaména par le biais de ses antennes auprès des arrondissements municipaux.

D’après la Commission d’Enquête, lorsqu’il occupait le poste de Chef du service de Recherches, Warou Ali Fodou faisait partie de la Commission devant laquelle les agents de la DDS devaient prêter serment afin d’éviter toute fuite d’information au sujet des activités de la DDS.

La Commission d’Enquête explique également que Fodou a été le Directeur de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) avec Mahamat Djibrine, Mahamat Saker, Yaldé Samuel et le Lieutenant Bandjim, et aurait fait partie de la commission chargée de l’arrestation des membres de l’ethnie Zaghawa en 1989. La Commission d’Enquête décrit Warou Ali Fodou comme l’un des tortionnaires les plus redoutés et « dirigeant personnellement les opérations de massacres ».

L’ex-détenu Gang Tchomba a déclaré devant la Commission d’Enquête que Fodou l’a arrêté en 1985 et s’est emparé de ses 30.000 Frs CFA (≈ US$ 50), de livres et de meubles.

Une ancienne victime arrêtée en 1987 a expliqué à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été torturée directement par Warou Ali Fodou durant son interrogatoire aux « Locaux »: Warou Ali Fodou l’aurait attachée à « l’Arbatachar », lui aurait porté des coups aux côtes, l’aurait « chicoté » avec du fil de fer électrique sur le dos, l’aurait soumis au supplice de la baguette et lui aurait déchiré le muscle de la jambe avec une baïonnette.

Une autre victime a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir subi des décharges électriques directement de Warou Ali Fodou sous les ordres de Mahamat Djibrine, et à une autre reprise avoir été torturée au piment par Fodou.

Une personne a décrit à Human Rights Watch et à la FIDH les mauvais traitements subis par les prisonniers.. Warou Ali Fodou ordonnait « Il faut bien taper, attacher ». Elle-même a été tapée par deux personnes en même temps tandis qu’elle était attachée à l’ « arbatachar ».

Une personne arrêtée avec son bébé a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée et matraquée avec un fil métallique à la DDS à N’Djaména entre autres par Warou Ali Fodou.

Ali Noukouri, ex-Commissaire central pour la ville de Bongor; Commandant de Police Principale (sans poste).

Sous Hissène Habré, Ali Noukouri a été Chef de service de la Sécurité Intérieure (nommé le 5 novembre 1987) chargé de surveiller et contrôler les agents de la DDS, leurs relations, leurs visites privées et de veiller à ce qu’ils ne soient pas à la solde d’une puissance étrangère. Noukouri a aussi été Chef du service Liaison et Surveillance de la ville (nommé le 20 septembre 1989) et Chef du service de Sécurité de l’aéroport (nommé le 7 mars 1990) chargé de surveiller les entrées et les sorties à l’aéroport de même que la piste et les installations aéroportuaires.

Auparavant, il avait été Chef de la coordination de la DDS et Coordinateur Recherches (nommé le 10 octobre 1987) d’une équipe spéciale chargée de la sécurité des conférences à N’Djaména. Il devait aussi parfois accueillir à l’aéroport de N’Djaména des étrangers d’origine libyenne, irakienne et soudanaise ayant « une mission officielle à la présidence de la République ».

Chérif Haliki Haggar, Commandant principal de Police (sans poste); ex-Sous-Préfet de Nokou.

Sous Hissène Habré, Chérif Haliki Haggar a été Chef du service de Sécurité de l’aéroport pour la DDS (nommé le 27 juin 1987 puis renommé le 20 septembre 1989) jusqu’à ce qu’il soit remplacé par Ali Noukouri le 7 mars 1990.

D’après la plainte qu’il a déposée à N’Djaména notamment contre Haliki Haggar, Abakar Bourdjo, soldat dans les rangs du Conseil Démocratique Révolutionnaire (CDR), groupe armé membre du GUNT et opposé à Habré, a été capturé le 30 juillet 1983 avec des centaines d’autres combattants du CDR lors de la bataille de Faya Largeau. Durant son transfert vers la DDS de N’Djaména, des dizaines de prisonniers auraient été exécutés sommairement par les FAN de Hissène Habré. À la DDS, Abakar Bourdjo dit avoir été soumis à des interrogatoires et des tortures dans le but de lui faire avouer les plans du CDR. Chérif Haliki Haggar aurait été présent à plusieurs de ces séances de torture — qui consistaient entres autres en l’extraction des ongles et la torture à l’électricité — au cours desquelles il « brandissait son revolver » devant Abakar Bourdjo en le menaçant de le tuer « sur le champs ».

Abderahmane Nigue Yacoub a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêté par Chérif Haliki Haggar à l’aéroport de N’Djaména en mai 1989 et emmenée à la BSIR, où Chérif Haliki et Mahamat Djibrine l’auraient interrogé. Il a été torturé à « l’Arbatachar » puis à l’électricité. Chérif Haliki lui aurait volé les 120 millions de Frs CFA (182,939 Euro) qu’il avait sur lui. Dans le cadre d’une procédure civile contre Haliki pour récupérer son argent, Haliki a déclaré avoir arrêté Abderahmane sur ordre de la DDS et a argumenté que ce dernier devrait réclamer des dommages et intérêts auprès de l’État.

Darkou Ahmat Kalbassou, Ministère de la Défense (toujours au service de l’Agence Nationale de Sécurité).

Sous Hissène Habré, Darkou Ahmat Kalbassou a été Chef Adjoint du service de la Sécurité Intérieure (nommé le 5 novembre 1987).

Gamar Daouro, Chef de service d’Exploitation Étrangère de la Police Nationale.

Sous Hissène Habré, Gamar Daouro a été Chef Adjoint du service de Contre-Espionnage (nommé par Habré le 20 septembre 1989) jusqu’en novembre 1990. Auparavant, il avait été au service de la Brigade d’Intervention Polyvalente (BIP) et son nom figure sur une liste d’une équipe d’interrogation de la DDS.

Mahamat Djibrine a déclaré devant la Commission d’Enquête que Gamar Daouro était l’un de ses collaborateurs au service de Contre-Espionnage, service « chargé de surveiller les personnes des ambassades et de surveiller toutes les personnes qui y entraient surtout les ambassades de Libye, du Soudan (….) on y faisait la filature ».

Zakaria Monone, Chef d’une antenne de l’Agence Nationale de Sécurité (ANS) à Mani.

Sous Hissène Habré, Zakaria Monone a été Chef du Service « Sources ouvertes » de la DDS ayant pour mission de capter les stations de radios internationales, d’analyser les journaux et d’en dresser la synthèse. Il a été de nouveau nommé à ce poste par Habré le 20 septembre 1989.

Mahamat Djoung Djoung, Chef antenne et Coordinateur de l’Agence Nationale de Sécurité à Moundou et à Doba.

Sous Hissène Habré, Mahamat Djoung Djoung a été Chef du service Sécurité de la DDS à Mongo (nommé le 21 novembre 1985) et du Guerra jusqu’au 23 août 1986. Il a ensuite été Chef du service Sécurité à Léré (nommé le 25 février 1987), Chef Adjoint du service Recherche de la DDS (nommé par Habré le 20 septembre 1989) chargé de collecter les informations à N’Djaména par le biais de ses antennes dans les arrondissements municipaux, puis Chef adjoint du service Liaison et Surveillance de la ville, une branche du service de Recherche.

Selon le témoignage à Human Rights Watch et à la FIDH d’un ancien conseiller de l’armée, Mahamat Djoung-Djoung était le Chef de la DDS à Mongo. Il a ajouté que Djoung-Djoung « faisait tuer beaucoup de gens (…) et [qu’] il est très dangereux ».

Mahamat Djoung-Djoung a été arrêté et détenu pour mesure disciplinaire dans le camp des Martyrs avant d’être libéré pour reprendre son travail à la DDS.

Commandant Abdallah Wagadé, Directeur de Contrôle de l’Armée; ex-Chef de division au Contrôle général des armées, ex-Etat Major de l’Armée Nationale Tchadienne.

Sous Hissène Habré, Abdallah Wagadé a été Officier de Sécurité de la DDS, Chef adjoint du Service d’Exploitation (nommé le 12 octobre 1985), Chef du service Sécurité à Moundou dans le Logone Occidental (nommé le 25 février 1987), et enfin Responsable de la Sécurité de Mongo dans la province du Guerra (nommé le 11 octobre 1989).

Nodjinan Jérôme, Commandant Adjoint Corps Urbain à Moundou; ex-Délégué régional de la Police à Bol.

Sous Hissène Habré, Nodjinan Jérôme a été Officier assimilé à la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR), puis Chef adjoint du service « Recherches » (nommé le 15 décembre 1988), et Officier de Sécurité de la DDS.

Selon la Commission d’Enquête, Nodjinan Jérôme faisait partie de la commission chargée de l’arrestation des membres de l’ethnie Zaghawa en 1989.

Ahmat Dari, Directeur adjoint de la Direction de Protection, Sécurité et Défense (DPSD) au Ministère de la Défense.

Sous Hissène Habré, Ahmat Dari, de l’ethnie gorane tout comme Hissène Habré, a eu le grade de Commissaire responsable de la DDS dans la région de Moundou.

Une victime a confié à Human Rights Watch et à la FIDH que durant la période de « Septembre noir » en 1984, quand Ahmed Dari, était Responsable de la DDS à Moundou, elle a vu plusieurs fois des corps être jetés dans le fleuve et des fonctionnaires disparaître durant la nuit. Cette même personne a aussi déclaré qu’après avoir été arrêtée en 1985 pour possession d’armes, le Commissaire Ahmed Dari l’a questionnée. Elle aurait alors été « chicotée » avec des fils électriques parce qu’elle refusait de parler.

Mahamat Seid (Ali Yeg), Police Nationale, Service des Renseignements Généraux.

Sous Hissène Habré, Mahamat Seid (Ali Yeg) a été Chef du service Liaison et Surveillance pour le secteur autonome couvrant Walia, Agueli et Ngoumb. Il a également été Officier à la Sécurité fluviale, Délégué à la Documentation et à la Sécurité du Sous-Comité de Kélo, et Commissaire de police de Kélo.

Il fut aussi agent de la BSIR chargé de recueillir des renseignements dans la zone de N’Djaména rurale.

Mahamat M’Bodou, en service au Contrôle général des armes.

Sous Hissène Habré, Mahamat M’Bodou a été Chef du Bureau de Renseignements de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR), collaborateur au sein du service Contre-Espionnage avec Mahamat Djibrine, Détaché à la DDS, puis Chef adjoint du service Liaison militaire et extérieur (nommé par Habré le 20 septembre 1989). Auparavant, il avait été sentinelle aux locaux PMNT, Chef de Poste adjoint aux locaux de la maison d’arrêt, Agent de la Sécurité fluviale, et Détaché à la BSIR de juillet 1987 à septembre 1989.

L’ancien détenu Mahamat Oumar Mahamat a déclaré devant la Commission d’Enquête avoir été extrait de sa cellule par M’Bodou et conduit jusqu’à la DDS où il a été torturé en présence et sous les ordres de M’Bodou. Il a ajouté que M’Bodou était membre d’une commission d’interrogatoire et de torture ayant accès au service pénitencier, fait que M’Bodou a nié devant la Commission d’Enquête en précisant qu’il ne savait rien sur la situation des prisonniers ni des tortures perpétrées dans les locaux de détention.

Mahamat M’Bodou a confirmé à la Commission d’Enquête l’existence des commissions chargées des interrogatoires et l’utilisation de la torture, et a déclaré avoir vécu lui-même les événements du 1er avril 1989 concernant les Zaghawa puisqu’il se trouvait à la BSIR.

Sabre Ribe, Directeur adjoint du Bureau de l’emploi de la Gendarmerie Nationale.

Sous Hissène Habré, Sabre Ribe a occupé les fonctions de Chef du Secrétariat de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR), et de Chef du service Exploitation à N’Djaména. Il a ensuite été Adjudant de la BSIR en mission à Koumra, puis Officier de sécurité, entre autres comme Chef de la Sécurité fluviale de la DDS pour Farcha Nguéli. Sabre Ribe a aussi été désigné Responsable adjoint à la commission de Sécurité intérieure et extérieure d’un congrès et Agent de la DDS chargé de la sécurité à Sarh.

Abbas Abougrène, ex-agent de la DDS et Chef de Service de la Sécurité fluviale, a déclaré à la Commission d’Enquête que l’Adjudant Sabré a participé à la commission chargée de l’arrestation des Hadjaraï en 1987. Les autres membres de cette commission étaient Al Hadj Djada, Mahamat Djibrine, Absakine Abdoulaye (Gade), Mahamat Wakaye et Ketté Maïse.

Abbas Abougrène a également déclaré devant la Commission d’Enquête que l’Adjudant Sabré a été envoyé à l’étranger en tant qu’élément de la DDS afin de procéder à la liquidation physique de certains tchadiens. 

Issa Idriss, Commissaire Divisionnaire, Délégué Régional de Police du Lac à Bol.

Sous Hissène Habré, Idriss Issa a été Agent de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR), laquelle était, selon la Commission d’Enquête, le « bras armé de la DDS, chargé d’exécuter toutes les besognes telles qu’arrestations, tortures, assassinats et massacres à grande échelle ».

Tolba, Régisseur de la Maison d’Arrêt à N’Djaména; ex-Chef de Sécurité du Palais de la Justice.

Sous Hissène Habré, Tolba a été désigné Agent au service de Renseignements de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) à N’Djaména, puis Chef de poste aux « Locaux », un des centres de détention de la BSIR. Il a aussi été Agent à la section de Protection au sein de la DDS, section qui a été créée le 5 septembre 1987. Toloba a également occupé des positions de gardes de prisonniers dans les prisons de la BSIR. Il aurait aussi fait parti d’un groupe d’agents chargés d’exécuter régulièrement des prisonniers, notamment Hadjaraï la nuit.

Selon un témoignage recueilli par Human Rights Watch et la FIDH, Tolba aurait été chargé d’aller chercher le témoin pour l’emmener à ses interrogatoires et aurait été présent lorsque le témoin a été torturé au « piment » sous la direction de El Djonto et de Warou. Cette torture consiste à mettre la tête du supplicié dans un trou à même le sol et de souffler de l’air dans du feu qui se trouve dans un autre trou communiquant avec le premier.

Abdelaziz Philippe, Régisseur de la Maison d’arrêt de Moundou.

Sous Hissène Habré, Abdelaziz Philippe a été Sous officier assimilé de la Brigade Spéciale d’Intervention Rapide (BSIR) et a fait partie du personnel du service Contre-espionnage qui surveillait les ambassades accréditées à N’Djaména, en particulier celle de Libye.

Selon la Commission d’Enquête, Abdelaziz Philippe faisait partie de la commission chargée de l’arrestation des membres de l’ethnie Zaghawa en 1989.

Nodjigoto Haunan, Colonel, ex-Conseiller à la Sécurité du Premier Ministre, actuel Coordinateur national adjoint de la zone pétrolière.

Sous Hissène Habré, Nodjigoto Hauman était Directeur de la Sûreté Nationale. Il avait été auparavant Coordinateur au Service du Secrétariat de la DDS (nommé le 27 juin 1987), puis Lieutenant à la Commission d’Investigation de la DDS chargé de superviser toutes les investigations dans le milieu des opposants ralliés et le personnel du Bureau populaire libyen.

Le rapport de la Commission d’Enquête cite Nodjigoto Hauman comme l’un des « tortionnaires les plus redoutés » et comme faisant partie, en 1989, de la Commission chargée de l’arrestation des membres de l’ethnie Zaghawa.

Le Lieutenant Djember Lamandjou a déclaré devant la Commission d’Enquête qu’après avoir été arrêté en octobre 1987, il a été transféré à la DDS où il a été interrogé et torturé par Nodjigoto Hauman. Hauman lui aurait dit: « Monsieur, vous souffrez moralement mais pas physiquement. (…) Monsieur, dites la vérité car au Commissariat c’est de la blague, mais ici les choses vont commencer et si vous vous entêtez c’est fini pour vous ». Haunan aurait ensuite donné l’ordre à quatre officiers de ligoter le Lieutenant Lamandjou et de lui passer « du courant électrique à la bouche, aux oreilles, dans les narines et même sur les parties intimes ».

Brahim Djidda, Contrôleur Général de Police ex-Inspecteur Général de la Police, Secrétaire Général adjoint du Ministère de la Sécurité publique et de l’Immigration.

Sous Hissène Habré, Brahim Djidda a été Directeur de la Sûreté Nationale. Djidda avait auparavant été Commissaire Central à la Sûreté Nationale (nommé le 17 juillet 1983) et Responsable de la Sécurité du Ouaddaï au Délégué du Gouvernement auprès du Ouaddaï géographique.

Dans une lettre de 1983 retrouvée à la DDS, Brahim Djidda explique qu’il avait été délégué par Hissène Habré « avec les pleins pouvoirs dans le domaine de la sécurité à Abéché » et que ses rapports et comptes-rendus étaient directement adressés à la DDS qui les transmettait à Habré. Dans une autre lettre retrouvée à la DDS, Brahim Djidda explique que la mission du Service de Sécurité était notamment préventive, soit « d’interpeller tout suspect dont les propos ou les actes porteront atteinte à la sécurité de l’Etat, de mener une enquête minutieuse qui déterminera son innocence ou sa culpabilité ».

Une ancienne victime a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée le lendemain de son  arrestation par Brahim Djidda alors Directeur de la Sureté Nationale. Une autre  victime a confié avoir été arrêtée et interrogée par entre autres Brahim Djidda accompagné de plusieurs militaires. Elle a été « gravement torturée » par électrochocs, à l’eau, à la matraque et à « l’Arbatachar » à plusieurs reprises.

Mahamat Wakaye, Directeur de la Police Judiciaire; ex-Contrôleur Général de Police; ex-Commissaire Central pour la ville de N’Djaména.

Sous Hissène Habré, Mahamat Wakaye a été Directeur adjoint de la Sûreté Nationale (nommé en juillet 1989). Auparavant, il avait été Commissaire adjoint à l’aéroport, Commissaire de police stagiaire (nommé le 25 octobre 1983), Commissaire au Commissariat du deuxième arrondissement, puis Commissaire central adjoint pour la ville de N’Djaména.

Abbas Abougrene, ex-agent de la DDS, a déclaré devant la Commission d’Enquête que Mahamat Wakaye faisait partie de la Commission chargée de l’arrestation des membres de l’ethnie Hadjaraï en 1987. Les autres membres de cette Commission étaient Al Hadj Djada, Mahamat Djibrine, Absakine Abdoulaye (Gade), Sabre Ribe et Ketté Maïse.

Mohamat Wakaye a déclaré devant la Commission d’Enquête que durant les années Habré, les éléments de la Sûreté Nationale ont prêté main forte à la DDS pour des arrestations, des tortures et des exécutions. Les personnes arrêtées par la Sûreté Nationale étaient transférées aux bureaux de la DDS souvent après interrogatoires et tortures. Mahamat Wakaye a aussi déclaré qu’il savait « comme tout autre citoyen que toute personne arrêtée à la DDS [avait] très peu de chance de sortir… » Il a ajouté qu’il recevait des ordres d’arrestations directement de Hissène Habré.

Touka Haliki, Inspecteur Général de la Police Nationale; ex-Commissaire Central pour la ville de Moundou.

Sous Hissène Habré, Touka Haliki était Directeur de la Police judiciaire, puis Responsable du service des Renseignements généraux qui dépendait de la direction de la Sûreté nationale, poste qu’il a occupé notamment pendant l’arrestation massive des Hadjaraï en 1987. Il a quitté ce poste en 1990. Avant d’être Directeur de la Police judiciaire, Haliki avait été Commissaire de Police stagiaire (nommé le 25 octobre 1983).

Touka Haliki a déclaré devant la Commission d’Enquête que son service devait aider la DDS en ce qui concernait les arrestations des Hadjaraï et se faisait un devoir d’informer le Président en lui adressant des fiches sur les exactions que les agents de la DDS commettaient et dont le service était au courant. Au sujet des Hadjaraï en province, Touka Haliki a dit devant la Commission d’Enquête que son service avait reçu des fiches des brigades de Surveillance du territoire mentionnant une cinquantaine d’arrestations dans le Guerra et plus d’une centaine à N’Djaména.

D’après la plainte déposée contre Haliki à N’Djaména par Mahamat Abakar Bourdjo, ex-soldat du Conseil Démocratique Révolutionnaire (CDR) (groupe armé opposé à Habré), arrêté le 30 juillet 1983, Touka Haliki l’aurait torturé à l’électricité pendant son interrogatoire en lui portant des décharges électriques sur les parties génitales et en le faisant asseoir sur une chaise électrifiée.

Un document, issu de la direction de la Sûreté Nationale et daté de la période durant laquelle Touka Haliki était Chef du service central des Renseignements Généraux, donne une liste des personnes proches de Hassan Djamouss et d’Idriss Déby ayant été arrêtées. Le nom de Ismael Hachim, ex-Directeur du Cabinet de l’Intérieur et de l’Administration du Territoire et aujourd’hui Président de l’Association des Victimes des Crimes et Répressions Politiques (AVCRP), figure sur cette liste. Selon la plainte déposée par Monsieur Hachim, ce serait sur ordre de Touka Haliki que le 2 avril 1989, il a été arrêté et embarqué, sans chaussures ni vêtements, pour le Commissariat central. Ismael Hachim aurait ensuite été torturé et détenu dans différentes prisons, dont la « Piscine ».

Une ancienne victime a dit à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été interrogée par Touka Haliki lors de son transfert à N’Djamena en provenance d’une autre prison. Lors de chaque interrogatoire, soit chacun des 27 jours de détention à N’Djamena, elle a été torturée.

Une autre victime arrêtée en 1983 a confié à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été frappée à la jambe avec des crosses par Touka Haliki et Mahamat Djibrine durant un interrogatoire, après qu’elle ait démenti des accusations portées contre elle.

Un ancien préfet a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH que les exécutions qui avaient lieu dans les prisons étaient le fait de Touka Haliki.

Un ex-détenu a déclaré à Human Rights Watch et à la FIDH avoir été arrêté sur ordre de Touka Haliki et pillé de ses biens, dont une voiture neuve d’une valeur de 3.800.000 Frs CFA (5,793.06 Euro), par Haliki, Mahamat Djibrine et Absakine.

Mahadjoub Djouma, Chef de Service pour la ville de N’Djaména à l’Agence Nationale de Sécurité (ANS).

Sous Hissène Habré, Mahdjoub a été Agent du service de la Sécurité fluviale de la DDS, membre de la Commission de la Sécurité intérieure et extérieure, et a fait partie du service Espionnage et Contre-Espionnage qui avait pour mission de surveiller les ambassades accréditées à N’Djaména, surtout celle de Libye.

Ngarto Rangan Ngaïdet, ex-Directeur Général de la Sûreté Nationale, actuel Conseiller du Ministre de la Sécurité Publique.

Sous Hissène Habré, Ngarto Rangan Ngaïdet a été Directeur adjoint du Service des Renseignements Généraux de la Police Nationale où il avait pour mission d’arrêter les auteurs de détournements des coupons des pensions des retraites de la fonction publique.

Ahmat Abakar Chemi, Ministère de l’Administration du Territoire; ex-Chef de service au Service de la Sécurité Intérieure à la Présidence de la République.

Sous Hissène Habré, Ahmat Abakar Chemi a été Chef Adjoint du service Sécurité à Moundou dans le Logone Occidental du 25 février 1987 au 25 février 1989. Il a ensuite été muté au poste de Responsable de la Sécurité de Sahr dans le Moyen Chari (nommé le 11 octobre 1989).

Djaffi Assali, Directeur du service spécialisé de la Gendarmerie Nationale.

Sous Hissène Habré, Djaffi Assali a été Chef Adjoint du service Liaison et Surveillance de la ville (nommé le 15 décembre 1988 et renommé par Habré le 20 septembre 1989). Selon la Commission d’Enquête, ce service est une branche du service de Recherche de la DDS, lequel est chargé de collecter des informations à N’Djaména par le biais de ses antennes auprès des arrondissements municipaux.

Fatimé Suzanne, Sous-Préfet de Koundoul; ex-Chef du 5ème arrondissement de N’Djaména.

Elle était directrice adjointe de l’animation groupe choc de l’Unir, le parti unique de Hissène Habré. Elle était chargée de recruter les filles pour le groupe choc de l’Unir qui célébrait des cultes en l’honneur de Habré. Ce groupe louait Habré comme un dieu lors de tous ses déplacements: lorsqu’il partait en voyage ou rentrait d’un voyage et pendant toutes les cérémonies. Plusieurs familles ont perdu leur père de famille lorsque ceux-ci s’opposaient au recrutement de leurs filles. Ils s’exposaient directement aux représailles.





[55] Conseil  de commandement des forces armées du Nord, faction du FROLINAT dirigée par Hissène Habré alors qu’il était encore dans l’opposition.


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