(New York, 12 août 2002) - Le Conseil de sécurité des Nations Unies doit faire valoir sa volonté de rendre justice à toutes les victimes du conflit qui dévasta le Rwanda en 1994, estime Human Rights Watch.
"L'Armée patriotique rwandaise a assassiné des milliers de personnes en 1994, commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Le président du Rwanda, Paul Kagamé, a lui-même reconnu que certains de ses soldats avaient commis des abus. Mais maintenant, le gouvernement rwandais s'oppose à ce que les accusés soient amenés devant la justice internationale".
Kenneth Roth, directeur-exécutif de Human Rights Watch
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Dans une lettre adressée au Président du Conseil de sécurité pour le mois d'août, John Negroponte, Human Rights Watch a fait valoir la nécessité de traduire en justice non seulement les responsables du génocide mais aussi les membres de l'Armée patriotique rwandaise (APR) qui auraient commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité en 1994.
"L'Armée patriotique rwandaise a assassiné des milliers de personnes en 1994, commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité", a déclaré Kenneth Roth, directeur-exécutif de Human Rights Watch. "Le président du Rwanda, Paul Kagamé, a lui-même reconnu que certains de ses soldats avaient commis des abus. Mais maintenant, le gouvernement rwandais s'oppose à ce que les accusés soient amenés devant la justice internationale".
En 1994, le Conseil de sécurité a créé le Tribunal pénal international pour le Rwanda afin de juger les auteurs du génocide et autres crimes contre l'humanité perpétrés au Rwanda. Jusqu'à présent, le Tribunal n'a jugé que des personnes accusées de génocide. Mais le procureur général, Mme Carla Del Ponte, a récemment fait savoir qu'elle inculperait également des membres de l'APR accusés de violations du droit international humanitaire. Ses efforts pour traduire en justice les responsables des pires abus commis par les deux parties au Rwanda rejoignent ainsi ceux qu'elle a engagés en ex-Yougoslavie.
Depuis lors, le gouvernement rwandais a entravé les déplacements des témoins, entraînant la suspension de trois procès pour génocide. Il a également omis de transmettre les documents requis par le procureur. Le procureur a dénoncé ces obstructions devant le Conseil de sécurité à la fin juillet.
Le gouvernement rwandais estime que le Tribunal ne devrait traiter que des affaires de génocide et laisser aux tribunaux rwandais les éventuelles poursuites à l'encontre de membres de l'APR.
Mais les victimes de crimes commis par l'APR en 1994 ont peu de chances d'obtenir justice dans leur propre pays. Les tribunaux militaires rwandais ont jugé très peu de soldats de l'APR pour des crimes datant de 1994 et ceux qui furent condamnés écopèrent de peines légères. Les autorités rwandaises ont également interdit aux gacaca, ces tribunaux populaires récemment créés, de juger les crimes de soldats de l'APR.
En réponse aux accusations du Procureur Carla Del Ponte, le gouvernement rwandais a réitéré ses fréquentes critiques concernant les faibles performances du Tribunal international.
"Les autorités rwandaises déplorent les échecs du Tribunal et il y en a eu", a indiqué Kenneth Roth. "Mais dans ce cas précis de poursuites contre l'APR, le gouvernement rwandais est surtout apparu comme préoccupé par d'éventuels succès du Tribunal".
La lettre de Human Rights Watch à l'Ambassadeur américain John Negroponte, Président en exercice du Conseil de sécurité de l'ONU en août et aux membres du Conseil de sécurité est disponible en anglais à l'adresse suivante: http://hrw.org/press/2002/08/rwanda-ltr0809.htm.
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