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Canada

Événements de 2018

Le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, à côté de la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland, lors d’une conférence de presse tenue à Ottawa, le 1er octobre 2018.

© David Kawai/Bloomberg via Getty Images

Depuis sa prise de fonctions en 2015, le gouvernement du Premier ministre Justin Trudeau s’est activement employé à faire progresser les droits humains au Canada. Sur le plan intérieur, ce gouvernement s’est fait l’ardent défenseur d’une société pluraliste et multiculturelle qui respecte les droits des immigrants comme ceux des lesbiennes, des homosexuels, des bisexuels et des transgenres (LGBT) ainsi que ceux d’autres minorités.

Malgré ces efforts, le Canada éprouve encore des difficultés à remédier à des problèmes, comme la discrimination à l’encontre des peuples autochtones et les abus commis par des entreprises canadiennes exerçant leurs activités à l’étranger. Le gouvernement Trudeau n’a pas non plus suspendu ses ventes d’armes à l’Arabie saoudite et sa coalition malgré les directives insistant sur une étroite surveillance des exportations d’armes vers les pays connus pour leurs atteintes aux droits humains.

Droits des peoples indigènes

Le Premier ministre, Justin Trudeau, a promis de « renouveler » les liens du Canada avec les peuples autochtones, sur la base d’« une relation nation à nation », mais il reste extrêmement difficile de réparer les torts causés par des décennies de discrimination institutionnelle. En février 2018, le gouvernement a annoncé des changements fondamentaux à la manière dont le gouvernement fédéral reconnaît les droits des peuples autochtones et les titres fonciers et promis d’établir en collaboration avec les communautés autochtones du Canada, un cadre légal destiné à faire progresser les droits à l’auto-détermination et à l’autogouvernance. En mai, le Parlement a voté un projet de loi d’initiative parlementaire visant à harmoniser les lois du Canada avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Cependant, la crise de l’eau dans les collectivités des Premières Nations entrave toujours les efforts visant à faire progresser les droits des autochtones au Canada. Alors que le gouvernement Trudeau levait les avis à long terme de faire bouillir l’eau (diffusés lorsque l’eau potable est ou risque d’être contaminée) entre novembre 2015 et octobre 2018, 68 collectivités des Premières Nations du pays restaient soumises à des avis sur la qualité de l’eau, dont plusieurs étaient nouveaux au moment de la rédaction de ce chapitre.

Le budget de 2018 prévoit un investissement complémentaire de 172,6 millions de dollars canadiens sur trois ans destiné à des projets d’infrastructure nécessaires pour rénover les réseaux d’eau à hauts risques. Le gouvernement s’est engagé à éliminer tous les avis concernant la qualité de l’eau potable dans les réserves des Premières Nations d’ici mars 2021. La crise de l’eau potable dépasse ces avis. Il faut y inclure les problèmes liés aux puits, au financement insuffisant de l’exploitation et à l’absence de protection des eaux de source.

Violence à l’encontre des femmes autochtones

En 2016, le gouvernement Trudeau a annoncé l’établissement d’une commission d’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées chargée d’examiner les causes systémiques de la violence à l’encontre des femmes autochtones et de recommander des mesures concrètes pour y remédier.

Depuis son instauration, l’enquête a été marquée par des retards et des plaintes de familles des victimes concernant le manque de communication et de transparence. En mars, les commissaires de l’enquête ont demandé une prolongation de deux ans pour mener leur tâche à bien. En juin, le gouvernement a annoncé qu’il n’accorderait que six mois de prolongation pour terminer les travaux, le rapport définitif de l’enquête devant être remis en avril 2019.

En avril, à la suite d’une visite précédemment menée au Canada, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence à l’encontre des femmes a demandé des améliorations dans le cadre juridique du pays, ainsi que la prise de mesures urgentes contre la violence systémique à l’encontre des femmes autochtones.

Responsabilité des entreprises

Depuis 2011, Human Rights Watch ne cesse d’exhorter le gouvernement canadien de mettre en place un poste d’ombudsman chargé d’enquêter de manière indépendante et de rendre compte publiquement des atteintes aux droits humains perpétrées par les entreprises extractives canadiennes. En janvier, le gouvernement Trudeau a annoncé la création d’un nouveau poste, celui d’Ombudsman canadien pour la responsabilité des entreprises (Canadian Ombudsperson for Responsible Enterprise, CORE), chargé d’enquêter sur « les allégations de violations des droits de la personne en lien avec les activités d’entreprises canadiennes à l’étranger ». L’Ombudsman fera porter son attention sur les secteurs des mines, du pétrole et du gaz et de l’habillement. Le gouvernement a annoncé qu’il pourrait retirer son soutien, notamment financier, aux entreprises reconnues coupables d’atteintes aux droits humains.

En mars et avril, Citizen Lab, groupe de recherche technique basé à l’université de Toronto, a publié deux rapports prétendant que la technologie canadienne pour le filtrage Internet est exportée à plusieurs gouvernements répressifs dans le monde qui l’utilisent pour censurer le discours politique, les informations et les sites des dissidents ainsi que pour bloquer les recherches de mots-clés liés aux identités LGBT.

En réponse à ce rapport, un porte-parole d’Affaires mondiales Canada a déclaré que le gouvernement était « préoccupé par des allégations d’emploi abusif de technologie canadienne, notamment de rapports de son utilisation pour entraver indûment le libre accès à Internet ».

En juin, le comité du Sénat sur les droits humains a publié un rapport concluant que les lois canadiennes régissant les exportations permettent au gouvernement fédéral de placer les intérêts économiques et ceux d’autres politiques étrangères avant les droits humains. Le rapport faisait les recommandations suivantes : modifications de l’Export and Import Permit Act (loi sur les permis d’importation et d’exportation) de 1947 par le ministre des affaires étrangères exigeant du gouvernement de prendre davantage en compte les problèmes de droits humains lors de la délivrance de permis d’exportation. Le rapport demandait aussi à Affaires mondiales Canada de collaborer avec l’industrie et la société civile pour établir un mécanisme de surveillance visant à empêcher les marchandises et services canadiens de se retrouver aux mains d’auteurs d’atteintes aux droits humains.

Orientation sexuelle et identité de genre

Le Sénat a adopté en mai la loi C-66 qui supprime du dossier des personnes, toute condamnation datant de l’époque où l’homosexualité était pénalisée au Canada. La loi suit les excuses présentées en 2017 par le Premier ministre Trudeau devant la Chambre des communes pour les mauvais traitements infligés aux minorités sexuelles par le gouvernement canadien dans le passé.

Politique étrangère

Pendant toute l’année 2018, le gouvernement a activement géré la crise des Rohingya. En mai, il a annoncé qu’il soutiendrait une saisine de la Cour internationale de justice (ICC) et toute mesure visant à préserver la preuve des actes criminels commis par les militaires myanmarais. Dès juin, le Canada avait imposé des sanctions ciblées à l’encontre de huit hauts responsables militaires de Myanmar pour leur participation à la violence et à la persécution des musulmans Rohingya dans l’état de Rakhine.

En août, après un tweet de la ministre des Affaires étrangères du Canada exigeant la libération immédiate des activistes des droits des femmes détenues, l’Arabie saoudite a annoncé l’expulsion de l’ambassadeur canadien à Riyadh, le gel de tous nouveaux échanges commerciaux et investissements avec le Canada, la suspension des vols de la compagnie aérienne nationale saoudienne vers le Canada et le retrait de tous les étudiants saoudiens des universités canadiennes. À cette annonce du ministre des Affaires étrangères saoudien, Chrystia Freeland, la ministre canadienne, a retorqué que « le Canada défendra toujours la protection des droits humains, dont ceux des femmes, et la liberté d’expression dans le monde ».

Malgré les abondantes preuves de violence au Yémen et les directives de politique canadiennes qui insistent sur un contrôle étroit des exportations de matériel militaire aux pays connus pour leurs atteintes aux droits humains, le gouvernement canadien continue de permettre aux fabricants d’armes canadiens de vendre des armes à l’Arabie saoudite et sa coalition. Human Rights Watch a documenté des violations répétées du droit de la guerre par la coalition au Yémen, dont certaines sont vraisemblablement des crimes de guerre et a maintes fois exhorté le gouvernement canadien et d’autres à mettre fin à la vente d’armes à l’Arabie saoudite tant qu’elle n’aura pas enquêté de manière crédible et suspendu ces attaques illicites.

En février 2018, la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland a annoncé qu’une enquête menée par le gouvernement « n’a trouvé aucune preuve permettant de conclure avec certitude que les véhicules de fabrication canadienne ont été utilisés dans des atteintes aux droits humains ». Le gouvernement qui n’a pas communiqué publiquement le rapport de cette enquête a néanmoins annoncé que malgré les conclusions, il modifierait la législation canadienne sur les exportations d’armes pour exiger légalement du ministre des affaires étrangères de refuser la délivrance de permis d’exportation dans les cas où existerait un risque important d’utilisation du matériel pour enfreindre les droits humains.

Principaux acteurs internationaux

En août, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a conclu que le Canada avait violé les droits d’une migrante sans papiers en situation irrégulière en lui refusant l’accès à des soins de santé essentiels. Le Comité a demandé au gouvernement de modifier la législation nationale afin de garantir l’accès aux soins de santé de base aux migrants en situation irrégulière.

En mai, le Canada a fait l’objet de son troisième Examen périodique universel par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Les États ont vivement engagé le Canada à améliorer son traitement des peuples autochtones, notamment des femmes et des filles.

En avril, après une mission précédemment menée au Canada, le Groupe de travail sur les entreprises et les droits de l’homme de l’ONU a noté l’absence de cadre cohérent de politique nationale destiné à « protéger contre les atteintes aux droits humains en lien avec l’entreprise, et à promouvoir un respect effectif des droits humains par les entreprises ». Le rapport du groupe de travail suivait l’expression de préoccupations par plusieurs autres organismes de l’ONU relatives aux atteintes liées aux activités d’entreprises canadiennes à l’étranger et le manque d’accès à des recours pour les victimes.

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