Human Rights Watch

Les Commissions gouvernementales des droits de l'homme en Afrique : Protecteurs ou Pretendus Protecteurs?
Résumé








Présentation Générale

Résumé

Normes Iinternationales: les Principes de Paris

Facteurs Importants

Etat des Lieux

Contributions Innovatrices et Positives des Commissions

Les Iniatives Régionales

Le Role de la Communauté Internationale

Conclusion

Recommandations

Abréviations

Remerciements





    Résumé


    Les commissions nationales des droits de l'homme commanditées par l'Etat sont en vogue actuellement au sein des gouvernements, particulièrement en Afrique où leur nombre s'est multiplié au cours des dix dernières années. Alors qu'en 1989, il n'y en avait qu'une seule, en 2000, on en compte vingt-quatre en fonctionnement ou en formation. Cette tendance a été alimentée par l'appui financier et technique provenant des gouvernements bailleurs de fonds et des Nations Unies (ONU), qui semblent considérer la création de ces commissions nationales comme une contribution manifeste à la promotion et à la protection des droits de l'homme. Le Haut Commissariat de l'ONU aux Droits de l'Homme a fait des institutions nationales des droits de l'homme une priorité majeure de sa politique. La prolifération des commissions nationales des droits de l'homme, dont beaucoup sont établies dans des Etats répressifs, pose un dilemme aux militants des droits de l'homme qui sont davantage habitués à remettre en question l'Etat sur les questions des droits de l'homme qu'à collaborer avec lui. Pour eux comme pour d'autres, la question qui se pose est la suivante : ces organes des droits de l'homme commandités par l'Etat doivent-ils être regardés avec suspicion et méfiance ou leur développement devrait-il au contraire être encouragé et soutenu ? Alors que bon nombre de militants des droits de l'homme et d'organisations non gouvernementales (ONG) regardent les commissions nationales des droits de l'homme avec scepticisme, l'ONU et les gouvernements bailleurs de fonds ont activement promu leur création. Face à ces divergences d'opinion et à l'importance croissante des commissions des droits de l'homme commanditées par l'Etat, Human Rights Watch s'est penchée sur les activités menées par les diverses commissions nationales des droits de l'homme en Afrique au cours des dix dernières années. Il faut toutefois noter que la présente analyse est uniquement axée sur les commissions nationales des droits de l'homme et non sur d'autres institutions telles que les ombudsmans, les task forces spéciales ou les commissions pour la vérité qui ont également joué un rôle important sur le plan du respect des droits de l'homme. Ce rapport examine comment, et si, les diverses commissions des droits de l'homme instituées par les gouvernements africains contribuent à la protection et à la promotion des droits de l'homme dans leurs pays respectifs. Bien que bon nombre de commissions soient récentes, on constate déjà à la fois leurs potentiels et leurs lacunes. Par conséquent, nous incluons dans le rapport des recommandations à l'intention des gouvernements africains pour qu'ils renforcent les commissions existantes afin de mieux promouvoir et protéger les droits de l'homme définis par le droit international. Par ailleurs, nous espérons que les bailleurs de fonds se serviront de nos recommandations pour adapter et conditionner leur aide plus soigneusement afin de promouvoir des commissions plus efficaces, et que le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme reconsidérera ce qui semble être actuellement une acceptation totale et inconditionnelle de ces institutions. Le rapport est divisé en deux parties : une présentation analytique comprenant des recommandations, suivie par une série de chapitres sur les pays où sont examinées plus en détail les commissions nationales des droits de l'homme de dix-sept pays d'Afrique sub-saharienne, notamment leur origine et mandat, leurs procédures de recrutement et de nomination, leurs activités et leur financement. Une courte évaluation finale conclut chaque chapitre. Nous avons tenté de standardiser le contenu des chapitres sur les pays mais ils varient en fonction du contexte du pays et de la quantité d'informations disponibles sur les diverses commissions, dont certaines ont été créées relativement récemment. Human Rights Watch/Afrique n'a pas été en mesure de fournir, dans le présent rapport, un chapitre sur les commissions des droits de l'homme algérienne, marocaine et tunisienne. Le rapport reflète en général la situation qui prévalait au début de l'année 2000. Au début de l'an 2000, vingt-quatre pays africains avaient dans leur législation des dispositions relatives à l'établissement d'un type ou l'autre de commission nationale des droits de l'homme : l'Algérie, le Bénin, le Cameroun, la République Centrafricaine, le Tchad, l'Ethiopie, le Ghana, le Kenya, le Liberia, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Maroc, le Niger, le Nigeria, le Rwanda, le Sénégal, la Sierra Leone, l'Afrique du Sud, le Soudan, le Togo, la Tunisie, l'Ouganda et la Zambie. Vingt-deux d'entre elles ont été créées, l'Ethiopie et le Mali étant les deux exceptions. L'augmentation rapide du nombre de commissions des droits de l'homme a constitué une caractéristique marquante des années 90, à l'instar des guerres civiles apparemment insolubles et des régimes autoritaires qui ont affecté de nombreuses régions d'Afrique. La plupart des commissions des droits de l'homme d'Afrique ont en fait été créées au cours des cinq dernières années. Leur apparition semble indiquer que même certains gouvernements africains parmi les plus répressifs paraissent accepter le discours international en matière de droits de l'homme et reconnaître que la protection des droits de l'homme devrait s'inscrire dans leur programme gouvernemental. Aux termes du droit international, la promotion et la protection des droits de l'homme sont des responsabilités importantes des gouvernements. Au niveau national, la protection des droits est assurée, entre autres, par la mise en place et l'imposition de sauvegardes constitutionnelles et légales, par un système judiciaire indépendant et par l'établissement d'institutions démocratiques. Les gouvernements peuvent chercher à protéger les droits de l'homme par un autre moyen, la création d'un organe national autonome tel qu'une commission des droits de l'homme, qui fonctionne indépendamment des autres agences gouvernementales et dont la tâche est de veiller à ce que les lois et pratiques relatives aux droits de l'homme soient appliquées effectivement par le gouvernement. En 1993, l'Assemblée Générale des Nations Unies a adopté ce qui est aujourd'hui connu sous le nom de Principes de Paris, un ensemble de normes internationales pour les institutions nationales des droits de l'homme, notamment les commissions des droits de l'homme. Les Principes de Paris sont maintenant utilisés par l'ONU et d'autres instances pour jauger les institutions nationales des droits de l'homme. Ils mettent notamment en relief l'importance pour ces commissions d'avoir un mandat étendu, d'avoir comme texte fondateur la constitution ou un autre texte législatif et de recevoir un financement adéquat et pour leurs membres d'être nommés dans le cadre d'une procédure de nomination indépendante. Alors que l'objectif des Principes de Paris est de garantir la plus grande autonomie possible par rapport au gouvernement, et surtout par rapport à l'exécutif, dans les faits, la plupart des commissions nationales éprouvent des difficultés à garder leurs distances. Il s'agit, en quelque sorte, à la fois d'une force et d'une faiblesse. En étant proche du gouvernement ou en en faisant partie, une commission peut conférer une légitimité à la notion de droits de l'homme, que ce soit ou non l'intention de l'Etat. Même dans les régimes les plus répressifs, l'établissement d'un organe public officiel consacré aux droits de l'homme peut, à l'occasion, créer un espace officiel pour un discours sur les droits de l'homme et promouvoir un militantisme et une conscientisation plus grands, bien que limités. En outre, une commission nationale des droits de l'homme peut parfois avoir accès à des informations confidentielles ou à des lieux d'accès restreint, tels que les prisons ou les camps de détention qui autrement seraient secrets, et plus que les associations non gouvernementales, elle peut parfois exiger que les forces ou agences gouvernementales répondent de leurs actes. Et si une commission nationale des droits de l'homme commanditée par l'Etat publie une déclaration ou un document sans complaisance, reconnaissant ainsi officiellement l'existence d'un problème particulier ou d'exactions, il peut être beaucoup plus difficile pour un gouvernement de fermer les yeux que si, par exemple, une déclaration ou un rapport similaire était publié par une ONG locale ou internationale. Les commissions des droits de l'homme peuvent également faire office de relais entre le gouvernement et les ONG, offrant ainsi un écran de protection aux membres des organisations de défense des droits de l'homme. Enfin, les commissions des droits de l'homme sont parfois aussi capables de surprendre les gouvernements si leurs membres sont des personnes qui font preuve de détermination et d'intégrité et qui remplissent leurs fonctions avec plus de dévouement que ne l'avait prévu ou espéré le gouvernement. Dans de telles circonstances, une commission nationale des droits de l'homme qui avait surtout été créée pour servir de simple vitrine peut très bien se transformer en important vecteur de changement. D'un autre côté, les faiblesses auxquelles sont sujettes les commissions nationales des droits de l'homme sont évidentes. Elles peuvent présenter des lacunes dès le départ, ou se voir entravées par une loi ou par le contrôle exercé par l'exécutif sur leur financement ou sur leurs membres. Il est évident qu'un certain nombre de commissions des droits de l'homme ont été créées uniquement pour donner l'apparence d'un souci des droits de l'homme et pour anticiper les pressions et critiques internes ou internationales. D'autres jouissent de pouvoirs limités, sont poussées au silence par le pouvoir exécutif ou manipulées pour servir de porte-parole au gouvernement. Un contrôle politique de la sélection des commissaires, de leur nomination et de leur révocation peut facilement amener à avoir des personnes dociles, qui se sentent obligées, et sans expérience ou intérêt en matière de droits de l'homme. Dans des cas plus extrêmes et plus abjects, les commissions des droits de l'homme peuvent en fait miner le travail des ONG des droits de l'homme, en dénonçant ou en désavouant publiquement le résultat de leurs recherches, ou en gardant un silence déterminant face aux attaques de l'Etat contre les défenseurs des droits de l'homme. Comme le démontre le présent rapport, les commissions des droits de l'homme d'Afrique forment un ensemble éclectique. Etant donné les besoins de leurs sociétés, la prestation de la plupart d'entre elles s'est avérée décevante. Beaucoup ont en effet été formées par des gouvernements qui présentent un maigre bilan sur le plan des droits de l'homme, possèdent des institutions étatiques faibles et ont peu ou pas d'expérience en matière d'organes publics autonomes. Certaines semblent fortement destinées à détourner les critiques internationales face aux atteintes aux droits humains plutôt que de s'attaquer à ces atteintes et à leurs causes. Beaucoup ont reçu à leur création des mandats lacunaires et rien qu'un pouvoir limité qui réduit leur capacité effective à enquêter, superviser les abus ou faire des déclarations publiques. D'autres ont été minées par la nomination de commissaires qui ne veulent pas ou ne peuvent pas protester face aux exactions par crainte ou dans l'espoir de bénéficier des faveurs du gouvernement. D'autres commissaires peuvent être bien intentionnés mais ils n'ont eu que peu ou pas d'expérience ou de formation dans le domaine du travail des droits de l'homme, et la plupart des commissions d'Afrique ne sont pas financées suffisamment et sont basées dans les villes. Certaines commissions travaillent presque exclusivement à huis clos et leurs déclarations publiques ou autres documents émanant d'elles ne sont pas disponibles ou sont difficiles à obtenir. Plusieurs commissions d'Afrique doivent encore à ce jour se mettre pleinement en place, des problèmes législatifs restant à résoudre, la nomination des commissaires ou du personnel logistique ayant pris du retard, ou leur financement étant insuffisant. Malheureusement, même là où les commissions des droits de l'homme d'Afrique fonctionnent raisonnablement bien, elles ont malgré tout leurs limitations. Certaines se concentrent sur l'aspect certes important mais néanmoins « soft » des droits de l'homme, mettant l'accent sur la promotion et l'éducation mais évitant ou minimisant les questions de protection des droits de l'homme, plus sensibles et plus provocatrices au plan politique. On peut remarquer en fait que les commissions nationales du Cameroun, du Tchad et du Togo, entre autres, se sont faites plus discrètes au fil du temps en raison des pressions du gouvernement et que les commissions du Bénin et du Sénégal, par exemple, ont été moins actives que prévu en dépit du climat politique généralement positif dans lequel elles peuvent opérer. Paradoxalement, certaines autres commissions sont parvenues à mener des activités relativement importantes dans des conditions politiques beaucoup moins favorables. Les limitations que s'imposent les membres des commissions des droits de l'homme dans leur travail sont d'autant plus flagrantes lorsqu'on les compare aux activités de beaucoup d'ONG des droits de l'homme qui doivent souvent opérer dans des conditions beaucoup plus difficiles. Quelques commissions nationales parmi les plus progressistes, notamment au Ghana, au Sénégal et en Afrique du Sud, travaillent en étroite collaboration avec la communauté des ONG de leurs pays. Mais elles sont encore rares. Ailleurs, les commissions ont parfois cherché à saper la crédibilité des ONG locales en les critiquant publiquement ou en gardant le silence lorsque les défenseurs des droits de l'homme étaient la cible d'attaques ou de dénonciations de leurs gouvernements, comme cela a été le cas au Togo et au Kenya. Néanmoins, les activités des commissions les plus prometteuses prouvent que ces organes étatiques ont le potentiel nécessaire pour contribuer positivement au renforcement de la culture des droits de l'homme et pour obtenir une meilleure protection contre les exactions. A cet égard, les commissions ghanéenne, sud-africaine et ougandaise se distinguent nettement. Dans chaque cas, leurs commissaires sont des personnes intègres qui n'ont pas peur de s'élever vigoureusement contre les exactions perpétrées par le gouvernement et de démontrer leur indépendance dans un souci de protection des droits de leurs concitoyens. Bien qu'il soit encore trop tôt pour le dire, les commissions malawienne et sénégalaise semblent également pleines de promesses. Mais parfois aussi, à quelque chose malheur est bon. Dans les endroits les plus inattendus, Human Rights Watch a parfois constaté que des commissions avaient été un facteur de changement. Au Togo, la commission des droits de l'homme la plus ancienne d'Afrique passe pour avoir été un catalyseur du processus de démocratisation qu'a connu le pays au début des années 90, même si aujourd'hui, elle n'est guère plus qu'un porte-parole du gouvernement. De même, bien que créée sous le régime militaire autoritaire et violent du Général Sani Abacha, la commission nationale nigériane des droits de l'homme, qui était peu crédible en tant qu'organe de supervision indépendant, a réalisé un travail utile dans le domaine des conditions carcérales et elle a été à l'origine de certaines mesures de protection pour les défenseurs locaux des droits de l'homme qui faisaient l'objet de menaces de la part du gouvernement militaire. En Zambie, malgré des limitations structurelles et financières imposées par le gouvernement, la commission des droits de l'homme a de plus en plus prouvé qu'elle prenait son mandat au sérieux. Depuis bon nombre d'années, les ONG des droits de l'homme ont adopté une approche pragmatique envers les commissions des droits de l'homme et ont tendance à les prendre au cas par cas, louant leur travail lorsqu'elles s'engagent dans la promotion active des droits de l'homme et les désavouant lorsqu'elles servent simplement les intérêts d'un gouvernement répressif. Au niveau international, néanmoins, l'approche a plutôt été d'apporter un soutien et d'encourager la création de commissions nationales des droits de l'homme dans tous les pays. Cet appui international a été un facteur important qui a incité les gouvernements africains à créer des commissions. Il est donc d'autant plus important d'analyser le rôle de la communauté internationale. Sur le plan régional, la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples encourage de plus en plus les Etats membres à créer des institutions nationales des droits de l'homme et elle est en train d'établir des règles concernant l'octroi d'un statut d'observateur aux commissions gouvernementales des droits de l'homme. De leur côté, les commissions nationales des droits de l'homme se réunissent au niveau régional afin de coordonner et d'échanger leurs idées. Bien que cette initiative régionale émergente soit un fait positif qui devrait être encouragé, elle pourrait être utilisée de façon plus efficace pour être davantage source d'avis, de soutien, voire de protection pour les groupes qui en font partie. Sur le plan international, le Haut Commissariat de l'ONU aux Droits de l'Homme s'est notamment fixé comme priorité la création et la promotion de commissions nationales. Un conseiller spécial est chargé d'apporter des avis techniques et une assistance matérielle aux gouvernements en ce qui concerne la formation et le développement des institutions nationales des droits de l'homme. Cette contribution de l'ONU est davantage concentrée aux étapes de formation, encourageant les Etats qui envisagent de mettre en place une commission des droits de l'homme et prodiguant des conseils utiles aux commissions qui démarrent. Les critiques de l'ONU relèvent souvent sa tendance à promouvoir l'éducation aux droits de l'homme et la « coopération technique » aux dépens de rapports critiques et cela s'est reflété dans son approche des commissions nationales des droits de l'homme. Jusqu'à présent, l'enthousiasme de l'ONU pour leur création n'est pas allé de pair avec une vigilance vis-à-vis du rôle spécifique qu'elles jouent par la suite. Et même si, à l'occasion, elle montre un empressement bienvenu à critiquer publiquement les gouvernements qui bafouent les droits de l'homme, le Haut Commissaire de l'ONU aux Droits de l'Homme ne désigne ni ne critique publiquement les commissions des droits de l'homme qui se montrent faibles et dociles face aux souhaits de leurs gouvernements. La plupart des commissions des droits de l'homme en Afrique ont été subsidiées par des financements bilatéraux provenant de gouvernements et de fondations indépendantes. Cependant, l'aide internationale accordée aux commissions existantes se fonde rarement sur les états de service d'une commission et est rarement subordonnée à la création d'une commission indépendante forte. Les gouvernements bailleurs de fonds ayant accordé la priorité aux droits de l'homme dans l'après-guerre froide, l'octroi de financements aux institutions nationales des droits de l'homme est devenu une façon acceptable d'apporter un soutien direct aux gouvernements, quelles que soient leurs exactions, tout en faisant montre d'appuyer les droits de l'homme. Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), une agence qui travaille généralement en étroite collaboration avec les gouvernements pour promouvoir le développement durable, est également devenu un bailleur de fonds important en finançant les commissions nationales des droits de l'homme suite à un changement récent opéré dans sa politique qui vise à incorporer plus activement les droits de l'homme dans ses projets. Cependant, à ce jour, les financements octroyés par le PNUD aux commissions des droits de l'homme semblent être quelque peu tributaires des circonstances, dépendant du représentant du PNUD dans le pays concerné, au lieu d'être le résultat d'une stratégie plus globale qui viserait à consolider les commissions des droits de l'homme qui font un travail crédible et à refuser d'apporter un soutien aux commissions qui sont inactives ou simplement trop accommodantes. Un examen de la grande diversité des commissions des droits de l'homme existant en Afrique et de leurs expériences différentes empêche toute conclusion définitive ou toute faite. Chacune doit réellement être évaluée séparément, en tenant compte du contexte particulier dans lequel elle existe, et il ne serait pas raisonnable de se hasarder à de grossières généralisations ou comparaisons ni de chercher à dégager des critères clairs pour garantir l'efficacité d'une commission. Certaines variables ressortent toutefois : le degré d'indépendance financière et politique ; l'étendue des pouvoirs légaux d'une commission ; le dynamisme de ses dirigeants et la diversité et représentativité de ses membres ; la transparence de ses opérations, la publicité donnée à ses actions ; et surtout, le courage et l'engagement dont elle fait preuve pour s'attaquer aux violations commises par le gouvernement de son pays. Dans chaque pays, le mélange différent de ces variables et d'autres facteurs a conduit à des situations uniques qui peuvent ou non évoluer au fil du temps. Human Rights Watch espère que la mise en lumière des contributions positives de certaines commissions des droits de l'homme africaines servira à la fois à informer d'autres commissions moins actives ou moins énergiques et à les encourager à devenir plus efficaces. Nous espérons également que notre rapport aidera l'ONU, les gouvernements bailleurs de fonds et d'autres à identifier les commissions nationales des droits de l'homme qui, vu les résultats obtenus ou leur potentiel futur, méritent un soutien international soutenu ou plus large, notamment un soutien financier. Comme nous le démontrons, le simple fait de créer une commission nationale des droits de l'homme ne peut ni ne doit être assimilé à un plus grand respect des droits de l'homme ni même à un engagement sincère sur cette voie. Par conséquent, les défenseurs des droits de l'homme doivent réfléchir attentivement aux points forts et aux points faibles de ces organes et pour chaque pays, la communauté internationale devrait évaluer plus en profondeur si la création ou le soutien d'une commission nationale des droits de l'homme est le moyen le plus efficace de promouvoir les droits de l'homme dans le contexte politique et culturel en question. Davantage d'efforts devraient être consentis par ces organes influents pour veiller à ce que les commissions nationales des droits de l'homme faibles et dociles assument leurs responsabilités et donnent la priorité à la victime, et non au gouvernement qui commet l'exaction. Même si les normes articulées par le Haut Commissariat de l'ONU aux Droits de l'Homme et les efforts positifs de certaines commissions doivent être accueillis favorablement, l'enthousiasme inconditionnel manifesté clairement par certaines instances face à la formation de commissions nationales des droits de l'homme est déplacé. En effet, pour que le développement de ces institutions contribue de manière durable à la protection des droits de l'homme en Afrique et à la construction d'un mouvement africain autochtone des droits de l'homme, une approche plus nuancée et davantage axée sur la protection doit être adoptée par les gouvernements, les organes régionaux, l'ONU et les financeurs. Le présent rapport donne l'occasion de faire le point et, lorsqu'il y a lieu, d'être plus circonspects dans la défense de ces organes des droits de l'homme commandités par l'Etat. Pour sa part, Human Rights Watch continuera à encourager et à offrir son soutien, s'il y a lieu, aux commissions nationales qui luttent activement et objectivement pour la promotion et la protection des droits de l'homme et à dénoncer celles qui éludent leurs responsabilités. Aujourd'hui malheureusement, à l'heure où les droits élémentaires de millions d'Africains sont mis en péril par la guerre, les conflits politiques ou les divisions ethniques ou religieuses, la triste vérité est que nombreuses sont les commissions nationales africaines des droits de l'homme qui gardent encore le silence alors que les citoyens dont elles sont censées défendre les droits sont quotidiennement victimes d'exactions de la part de leur gouvernement.
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