Africa - West

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III. VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS L'OUEST DU CONGO

Beaucoup des problèmes chroniques dont souffre le Congo en matière de respect des droits de l'homme se sont aggravés depuis le début du conflit. Des problèmes supplémentaires sont également apparus, suite aux opérations militaires menées par les Forces armées congolaises (FAC) et ses alliés. L'impunité chronique, les fissures qui sont apparues tant au sein de l'armée que du gouvernement, le contrôle exclusif sur le pays dont jouit un groupe de dirigeants de plus en plus isolé et la désorganisation administrative générale ne sont pas des éléments qui laissent espérer voir se produire des progrès en matière de respect des droits de l'home et de l'autorité de la loi. Ces facteurs ont non seulement contribué à l'aggravation de la situation générale mais ont également, à plusieurs reprises, réduit à néant les efforts personnels de certains membres du gouvernement qui souhaitaient agir afin d'assurer le respect de ces droits.

Arrestations Arbitraires, Détentions Illégales et Cour d'Ordre Militaire
Les civils et militaires sont souvent l'objet d'arrestations arbitraires et placés en détention prolongée, sans jugement, dans certaines régions contrôlées par le gouvernement. La Cour d'ordre militaire, établie en 1997, était en pleine expansion à la fin de 1998. De nouveaux tribunaux militaires locaux avaient ainsi été créés à Lubumbashi, Kananga, Mbuji-Mayi, Kamina, Matadi, Likasi, et on prit également la décision d'établir des tribunaux itinérants (1).

La compétence du Tribunal Militaire fut élargie le 2 janvier 1999 dernier, lorsque fut proclamé le Décret-Loi 171 instaurant l'état d'urgence ("état de siège") dans plusieurs provinces, à savoir celles d'Équateur, du Katanga, du Nord Kivu, du Sud Kivu, de Maniema et la Province orientale. Cette décision fut prise, officiellement, à cause du "danger que représentait l'agression et l'invasion de la République Démocratique du Congo par des armées étrangères" et en tenant compte du fait que "cette guerre barbare et injuste plaçait la nation congolaise en danger et empêchait le bon fonctionnement de l'état et du Gouvernement de salut public." (2) Le décret-loi n'a attiré qu'une attention internationale très limitée, alors qu'il accorde aux militaires un pouvoir quasi total sur l'administration civile. Le décret 172 définit lui la manière dont l'état de siège est pratiquement mis en œuvre, il donne aux militaires la capacité de remplacer les autorités civiles, de s'approprier des biens privés et de recruter de force des civils si cela "bénéficie, de manière directe ou indirecte, à la défense nationale et à la sauvegarde de la sécurité et de l'intérêt public." (3) Conformément au nouveau décret, toutes les affaires normalement traitées par la justice civile sont aujourd'hui de la compétence des tribunaux militaires, en tout cas dans les provinces où l'état de siège a été déclaré. Des avocats spécialisés dans les questions des droits de l'homme à Lubumbashi ont confirmé le fait que les tribunaux civils ne jugeaient plus les affaires pénales. (4) A la fin de l'année, la Cour d'ordre militaire avait compétence sur les dossiers de près de 800 militaires congolais détenus au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (l'ancienne prison centrale de Makala), de 1400 autres détenus au Katanga et, enfin, sur des centaines de dossiers de civils, notamment des criminels de droit commun, des prisonniers politiques et des individus suspectés de collaboration avec les rebelles. (5)

Depuis son établissement, le fonctionnement de cette cour a été marquée par de nombreux retards, le non-respect des normes d'administration de la justice et une propension inquiétante à prononcer des verdicts de peine capitale et à les faire exécuter. (6) Beaucoup des militaires détenus n'ont pas été inculpés. Beaucoup de civils qui ont eu le tort d'être politiquement actifs ont eux à répondre de chefs d'inculpation des plus vagues et généraux, comme peuvent l'être l'atteinte à la sécurité de l'état ou l'association de malfaiteurs. (7)

Le ministère public demande souvent la peine capitale, tant pour des civils que des militaires, et plus de 73 peines de mort ont ainsi été prononcées depuis la création de la Cour. Aucune procédure d'appel n'existe, même pour les individus condamnés à mort, ce qui est en complète violation des normes internationales de justice. (8) Lors d'entrevues avec Human Rights Watch, des responsables du Tribunal, notamment le commandant qui préside la Cour et l'un des procureurs militaires, ont affirmé être tout à fait en faveur de l'utilisation de la peine de mort afin d'éliminer les individus suspectés d'être des rebelles, les criminels de droit commun, les soldats indisciplinés et ceux qui collaborent avec l'ennemi.

Le décret-loi 019 stipule que lorsqu'un verdict de peine de mort est prononcé, il doit être suivi immédiatement d'une demande de grâce présidentielle, présentée par le ministère de la justice. Malgré cela, de nombreux condamnés ont été exécutés le jour même de leur condamnation ou très peu de temps après, ce qui permet de douter que la moindre demande de grâce ait réellement été introduite. (9) Étant donné que la procédure de clémence est secrète, il est difficile de savoir combien de demandes ont effectivement été introduites et acceptées. On ne connaît qu'un seul cas de pardon, accordé par le Président Kabila, seul habilité à commuer les peines de mort, à un soldat de treize ans reconnu coupable du meurtre d'un membre de la Croix Rouge à Kinshasa. Condamné à la peine capitale en mars 1998, il fut gracié le 18 avril. L'exécution d'une femme enceinte, condamnée à mort à Uvira, fut elle retardée jusqu'à la naissance de son enfant. 

Le second président de la Cour d'ordre militaire a déclaré à Human Rights Watch qu'en vertu du décret-loi établissant la Cour, les condamnés à mort pouvaient légalement être exécutés juste après le prononcé du verdict. Ceci viole à la fois le code de justice pénale congolais et les dispositions internationales. Le 14 novembre, 13 officiers des Forces armées congolaises accusés de lâcheté et d'avoir fui devant l'ennemi étaient condamnés à mort par le tribunal militaire de Lubumbashi. Les procureurs et avocats de la défense impliqués dans ces 13 cas n'eurent apparemment que 14 heures pour se préparer. Les soldats furent exécutés le jour même où ils furent condamnés. Il est extrêmement improbable que le temps limité qui a séparé le prononcé du verdict et sa mise en œuvre ait été suffisant pour que les procédures administratives de demande de grâce prévues par la loi soient menées à bien. (10)

Les juges et procureurs de la Cour d'ordre militaire eux-mêmes craignent de subir des représailles de la part des soldats si leurs décisions déplaisent à ces derniers. Mukuntu Kiyana, président de la Cour, fut ainsi arrêté le 6 août, relâché quatre jours plus tard et arrêté à nouveau le 28 du même mois, apparemment pour avoir condamné à mort un groupe de 24 soldats. Après leur exécution, il fut accusé "d'intelligence avec l'ennemi", apparemment à la demande des alliés militaires des 24 condamnés exécutés. Il resta détenu jusqu'au début du mois de janvier. Soumis à une forte pression de la part des militaires, les procureurs et juges demandent et condamnent aux peines maximales les individus reconnus coupables des crimes qui leur sont reprochés. Selon plusieurs avocats, le personnel judiciaire hésite également à ordonner ou exécuter les ordres de libération par crainte de voir les individus remis en liberté rejoindre les rangs du RCD.

La remise en liberté effective des détenus reste très incertaine, même pour ceux pour qui elle a officiellement été ordonnée, ceux qui ont été acquittés ou même ceux n'ont été inculpé d'aucun crime. Beaucoup des arrestations semblent basées sur des motifs arbitraires; elles ont pour objectif soit d'éliminer des opposants politiques du régime Kabila ou de régler des comptes et des rivalités ethniques, sur base de prétendues complicités avec les rebelles. Selon un document officiel qu'un procureur militaire a montré à un chercheur de Human Rights Watch, la remise en liberté de deux prisonniers politiques connus, le professeur Kabila Kalele, professeur de sociologie à l'Université de Kinshasa, et son collaborateur Jean-François Kabanda, journaliste free-lance, tous deux membres importants de l'UDPS, avait été ordonné pour la mi-novembre 1998 (11). Kabanda et Kalele avaient été arrêtés le 24 octobre 1997 suite à la publication d'un article dans lequel ils affirmaient que le Président Kabila avait "vendu le pays" aux tutsis ruandais. Malgré cet ordre de remise en liberté, ils étaient toujours détenu au début du mois de janvier 1999.

Malgré le fait que le gouvernement congolais ait fait des efforts afin de réformer le système pénitentiaire, en procédant notamment à la rénovation du Centre Pénitentiaire et de Rééducation de Kinshasa (12), les individus placés en détention continuent à être soumis à des traitements durs et arbitraires. Le 19 août, suite à l'évasion d'environ 180 prisonniers, dix-sept détenus et un gardien furent exécutés sommairement par des militaires, à l'intérieur même de l'enceinte de la prison, pour avoir apparemment collaboré à l'organisation de l'évasion. Selon une source, l'une des personnes exécutée était en fait un réparateur de postes de télévision qui fut tué parce qu'un soldat n'avait pas apprécié la façon dont il avait réparé sa télévision. (13)

Persécutions Ethniques
En plus de tous ceux qui sont jugés par les tribunaux militaires, d'autres individus courent également le risque constant d'être exécutés sans raison ou de voir leurs droits bafoués. Il s'agit des civils tutsis vivant dans les zones contrôlées par le gouvernement. Au début du mois de janvier, près de 140 civils tutsis étaient détenus au camp militaire de Kokolo, à Kinshasa, qui est également le quartier général de la 50ème brigade des Forces Armées Congolaises (FAC). D'autres étaient détenus dans divers bâtiments privés, notamment des hôtels et des établissements religieux, utilisés en tant que prisons provisoires. Le gouvernement est conscient de cette situation et l'on estime qu'au début du mois de janvier le nombre de personnes ainsi privées de liberté était d'environ 560 au Katanga et 450 à Kinshasa. Un nombre inconnu d'autres tutsis sont dispersés, souvent sans que leur présence ne soit connue, dans des résidences privées situées un peu partout dans la zone contrôlée par le gouvernement, notamment à Kinshasa et au Katanga.

Malgré certains efforts et diverses déclarations faites par les membres du gouvernement congolais, les tutsis en détention ou internés dans des zones tenues par le gouvernement, y compris ceux officiellement placés sous la protection du gouvernement, ont représenté des cibles faciles pour les militaires et autres agents de l'état congolais. Cette situation était encore vraie en janvier 1999. Le 12 janvier, des soldats de la 50ème brigade se rendaient au Centre catholique Béthanie de Kinshasa pour y rassembler un groupe d'environ 35 personnes. Il s'agissait surtout de femmes tutsies, qui furent emmenées au Camp de Kokolo. Les soldats les accusèrent d'être des rebelles ou de soutenir ceux-ci, menacèrent de tuer l'une des sœurs Catholiques et pillèrent les lieux avant de tout détruire. Il semble que l'opération ait été organisée à l'insu du Ministre des Droits de l'Homme qui, avec d'autres membres du gouvernement, avait pris des mesures visant à assurer la protection des personnes hébergées dans le centre. Parmi les personnes arrêtées se trouvaient deux militants congolais des droits de l'homme et au moins l'un des employés du centre. Apres leur arrestation les militaires du camp de Kokolo affirmaient qu'ils étaient détenus "pour leur protection," mais accordaient un accès limité aux représentants d'associations humanitaires ou d'agences de l'ONU qui cherchaient à assister les prisonniers. 

Cette vague de persécution à l'encontre des tutsis a commencé à la fin du mois de juillet 1998, après l'ordre donné par le Président Kabila d'expulser du Congo de tous les militaires ruandais. (14) De nombreux civils tutsis de nationalité congolaise ou autre fuirent Kinshasa à cette époque. Lorsque les troupes du RCD marchèrent sur Kinshasa en août, le gouvernement congolais exploita les tensions régnant entre les tutsis et les autres groupes ethniques de la capitale, ainsi que le climat général de peur, pour renforcer la défense de la ville et maintenir sa mainmise sur le pouvoir. Pendant cette période de panique quasi générale, des membres du gouvernement congolais firent des déclarations xénophobes et dangereuses, appelant notamment la population à prendre les armes et à tuer "l'ennemi", défini de manière très vague comme les ruandais ou les tutsis, et créant ainsi un environnement dans lequel les civils pouvaient commettre des assassinats en toute impunité. Le 4 août, le directeur de cabinet du président, Abdoulaye Yerodia, fit à la télévision une déclaration publique; il s'exprimait en kikongo, la langue du Bas-Congo, et utilisa des termes relativement limpides pour appeler les habitants de cette région à s'attaquer aux tutsis. Yerodia demanda ainsi à "ses frères" de "se lever comme un seul homme pour jeter hors du pays l'ennemi commun". Il affirma également que la population devait pour cela utiliser toutes les armes à sa disposition, y compris les fusils de chasse, les machettes, les pioches, les flèches, bâtons et pierres. (15) Le 6 août, le Gouverneur de Kinshasa Théophine Mbemba organisait au marché central de Kinshasa une "marche afin d'exprimer sa colère contre l'agression ruandaise". Abdoulaye Yerodia participa à cette marche, ainsi d'ailleurs que le Ministre de l'information Didier Mumengi et le Ministre du transport et des communications Henry Mova Sakanyi. (16) La marche s'accompagna de chansons anti-tutsis et de slogans tels que "Mieux vaut épargner un serpent qu'un ruandais" ou "La population de Kinshasa dit non à la présence de tutsis banyamulengue au Congo." (17) Le 8 août, une radio régionale gouvernementale appelait la population de Bunia, dans l'est, à se servir de "machettes, lances, flèches, houes, pelles, râteaux, clous, matraques, fers électriques, barbelés, pierres et autres outils afin, chers auditeurs, de tuer les tutsis ruandais." Le mercredi 12, un commandant local de l'armée congolaise appelait la population de Bunia à "se montrer féroce" avec les ruandais et à "les massacrer sans pitié." (18)

Suite à ces appels du gouvernement, un grand nombre de tutsis furent massacrés dans les régions sous contrôle gouvernemental, tant par des civils que des militaires, parfois après avoir été arrêtés par des militaires. Le nombre total de civils ainsi tués ne sera probablement jamais connu, mais on estime que pour la seule ville de Kinshasa il s'élève probablement à plusieurs centaines. (19) Les victimes furent surtout des tutsis, mais les ONG congolaises de défense des droits de l'homme ont noté que des personnes sans domicile fixe, des handicapés mentaux et des personnes n'ayant pour seul tort qu'une vague ressemblance avec les tutsis avaient également été tués. D'autre part, certains profitèrent du climat d'impunité générale régnant dans le pays pour régler leurs comptes personnels. (20) Plusieurs personnes, y compris des anciens détenus, ont décrit à Human Rights Watch comment des dizaines de personnes arrêtées par les militaires et amenées au camp de Kokolo avaient été tuées pendant les massacres du mois d'août. (21) Ces témoins, ainsi que des soldats du camp de Kokolo, ont non seulement témoigné de ces faits mais également dessiné des plans indiquant les endroits où avaient eu lieu les exécutions, ainsi que ceux où avaient été brûlés et enterrés les corps, dans l'enceinte même du camp. Certains témoins indiquèrent qu'il existait des fosses communes ailleurs à Kinshasa, notamment sur le site de l'ancien parlement, où sont aujourd'hui situés les bureaux de la présidence. L'épouse d'un détenu tutsi qui, le 5 août, s'était rendue au camp de Kokolo afin de retrouver son mari, s'entendit dire par un officier qu'elle "perdait son temps en le cherchant" et que "nous les liquidons du côté des bureaux du président et les mettons dans un grand trou là-bas." (22) D'autres sources ont indiqué à Human Rights Watch que des personnes exécutées sommairement en août avaient effectivement été enterrées dans des fosses communes à cet endroit. Malheureusement, la zone étant fortement militarisée, aucune vérification n'a pu avoir lieu.

Les déclarations virulentes et incitant à la violence faites par des agents de l'état, parfois sur les ondes de la télévision ou de la radio nationale, ne cessèrent qu'à la mi-août, lorsque la pression de la communauté internationale força le gouvernement à modérer ses prises de position publiques. A la mi-août, le président Kabila donnait une conférence de presse et appelait à la protection des civils. De nombreux congolais affirmèrent cependant que le ton de son discours différait beaucoup de celui employé par les membres de son gouvernement lorsqu'ils avaient appelé la population à user de violence à l'encontre des tutsis. (23) Les appels à la violence furent ainsi remplacés par un discours plus subtil, mais les tutsis continuèrent à être décrits comme étant "le mal" et "l'ennemi commun". Le ministre du transport et des communications, par exemple, publia en octobre 1998 un document établissant un parallèle entre le phénomène "hima-tutsi" de la région des Grands Lacs et le nazisme pendant les années 30 et 40. (24) Même si le nombre de personnes tuées diminua nettement après le discours de Kabila, le gouvernement n'a à l'heure actuelle pris aucune mesure afin de punir les individus ayant lancé des messages de haine et d'incitation à la violence. De nouvelles violences sont donc toujours à craindre.

Les femmes tutsies ont elles aussi été arrêtées, et maltraitées ou violées pendant leur détention. Une veuve vivant dans le quartier de Kintambo à Kinshasa fut arrêtée le 7 août et détenue dans les locaux de la Police d'intervention rapide (PIR) connus sous le nom de "ex-Circo". (25) Au moment de son arrestation, elle fut tabassée par la police, tout comme ses deux enfants de 13 et 15 ans, qui les accusa d'être des "ruandais". Elle était pourtant née au Congo, de parents l'un tutsi et l'autre bango, un groupe ethnique indiscutablement indigène au Congo. Pendant sa détention, elle fut violée par un membre de la PIR et affirme qu'au moins une autre femme, qui était dans sa cellule, en fut retirée par la police et revint par la suite en larmes, fut soumise au même traitement.

L'absence de poursuites judiciaires à l'encontre des assassins de tutsis, les attaques verbales impunies et l'existence d'un "modèle" de génocide dans le Ruanda voisin ont contribué à créer une atmosphère de danger constant et réel pour les tutsis. Les pénuries et les souffrances dues au conflit commençant à se faire ressentir de plus en plus parmi la population congolaise, les tutsis devinrent rapidement la cible privilégiée des discours de haine du gouvernement, de ses appels à la défense populaire et même de ses invitations au meurtre. Lors d'entretiens avec des représentants de Human Rights Watch, des congolais de diverses origines, vivant dans l'ouest et l'est du pays (y compris des membres du gouvernement), firent allusion aux graves dangers que pouvaient courir les civils tutsis si la guerre n'évoluait pas en faveur du gouvernement congolais. Plutôt que d'agir avec fermeté afin de protéger les tutsis, certains responsables gouvernementaux affirmèrent que d'autres meurtres de tutsis, qualifiés d'actes "spontanés" de la population, étaient sans doute inévitables. Lors d'un entretien avec Human Rights Watch, un responsable de la Cour d'Ordre Militaire déclara que:

Si les rebelles arrivent ici, il pourrait y avoir un autre génocide, une rébellion spontanée. Ils arrivent avec un virus. Nous savons qui sont les ruandais juste en les regardant. S'ils gagnent, la vie pour eux sera impossible. Vous pourriez voir se passer quelque chose qui n'était pas du tout prévu. (26)

Dans un environnement d'une telle volatilité, toute incitation supplémentaire à la violence de la part du gouvernement ou du public pourrait provoquer de nouveaux massacres de tutsis, tant par la population civile que par les militaires. D'autre part, des déclarations publiques suggérant ou invitant à de tels actes pourraient être émises en réaction à des revers militaires pour le gouvernement sur le champ de bataille. Ceci pourrait donc contribuer à la mise en place de conditions préalables à un massacre ethnique des plus graves, une partie de la population congolaise étant en quelque sorte prise en otage par le gouvernement et dépendant totalement des fortunes ou infortunes militaires de celui-ci.

Certains membres du gouvernement et de l'armée ont pris des mesures afin de protéger les droits des tutsis et d'autres groupes ethniques, en prenant parfois des risques personnels relativement élevés. Ceci démontre que le gouvernement congolais est en fait composé d'individus dont les opinions sur la question des droits de l'homme sont parfois très différentes. Le 21 novembre, le Ministre des droits de l'homme Léonard Okitundu escortait personnellement jusqu'à l'aéroport de Kinshasa un groupe d'environ 19 ressortissants ruandais devant être évacués vers Kigali. Monsieur Okitundu expliqua dans une interview qu'il s'agissait d'une procédure de rapatriement volontaire soutenue par le gouvernement congolais, basée sur la décision prise par ce même gouvernement d'aider tous les tutsis désirant quitter le pays à le faire, quelle que soit leur nationalité. Lors d'une entrevue avec Human Rights Watch, Okitundu expliqua que cette procédure avait été mise en place par les ministères de l'intérieur et des droits de l'homme. De nombreux militaires et responsables civils contribuèrent à la protection des tutsis en les hébergeant chez eux ou ailleurs. 

Les initiatives mises en œuvre par d'autres gouvernements (de la région ou d'ailleurs), des organisations internationales ou des ambassades afin d'aider, de protéger ou d'évacuer les tutsis furent peu cohérentes. En août et en septembre, quelques diplomates, des membres de groupes religieux ou d'organisations locales de défense des droits de l'homme, ainsi que des représentants d'organisations internationales prirent des mesures afin de protéger et d'aider à évacuer les tutsis des zones contrôlées par le gouvernement. Au début du mois de janvier 1999, cependant, de nombreux tutsis vivaient encore dans la crainte à Kinshasa, attendant avec impatience la chance de pouvoir quitter le pays mais incapables de le faire suite à des problèmes de visa ou parce que ne disposant pas des ressources financières nécessaires afin de survivre à l'étranger. Plusieurs diplomates en poste à Kinshasa -dont certains jouèrent d'ailleurs un rôle actif dans la protection des tutsis en août- ont affirmé à Human Rights Watch que leur lenteur ou leur incapacité à délivrer des visas étaient dues aux politiques et aux procédures de leurs gouvernements respectifs. 

Certains membres de la communauté diplomatique de Kinshasa et des représentants d'organisations internationales ont déclaré, en privé, qu'ils craignaient de participer à un "nettoyage ethnique" si l'aide qu'ils étaient susceptibles d'apporter en matière d'évacuation n'était pas accompagnée de l'engagement, par le gouvernement, de garantir aux tutsis congolais leur droit de rentrer au Congo en tant que citoyens à part entière. Ceci peut également expliquer la lenteur des procédures de délivrance de visa aux tutsis désirant quitter le pays. Divers efforts ont été réalisés par des ambassades, des représentants de l'église et des organisations internationales, notamment le Bureau au Congo du Bureau du haut-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, afin de protéger sur place les tutsis et/ou de faciliter leur départ, mais malgré cela nombre d'entre eux continuent aujourd'hui à vivre cachés, ou sont en détention, et ne reçoivent pas la moindre assistance. 

L'une des principales initiatives prises par les institutions mentionnées ci-dessus afin de protéger des tutsis à Kinshasa a été la tentative de déplacer les quasi 140 d'entre eux vivant au camp Kokolo vers un lieu plus sûr et d'accès plus facile, à Kinshasa. Ce plan, bien qu'ayant été approuvé par plusieurs représentants gouvernementaux haut placés, n'avait toujours pas été mis en œuvre à la mi-janvier, le président Kabila n'ayant pas encore, à cette date, signé l'ordre officiel de placement sur le site d'un personnel chargé d'assurer la sécurité de ces personnes. 

Violations Commises dans les Zones de Combat
Ces vingt dernières années, sans prendre position sur la raison qui pousse certains pays à faire la guerre, Human Rights Watch a examiné l'application du droit international humanitaire et des règles ayant cours en temps de guerre dans de nombreux conflits. Au Congo, bien que plusieurs rébellions internes fassent rage simultanément, les hostilités impliquent différents états de la région, ce qui fait de la guerre dans ce pays un conflit international armé aux termes de l'Article 2 commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949. Par conséquent, la conduite d'opérations militaires par tous les états impliqués dans le conflit est régie par les Conventions de Genève, ainsi que par le droit coutumier de la guerre.

Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la Protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I) contient des règles détaillées, principalement des réaffirmations ou des éclaircissements du droit coutumier existant, qui appliquent les principes coutumiers selon lesquels il convient d'établir une distinction entre les combattants, les civils et que des biens de caractère civil ne peuvent être la cible d'attaques militaires. (27) L'Article 51(2) réaffirme en particulier que "ni la population civile en tant que telle ni les personnes civiles ne doivent être l'objet d'attaques."

De plus, l'Article 57(2) du Protocole I stipule que ceux qui planifient ou décident d'une attaque doivent faire tout ce qui est pratiquement possible pour vérifier que les objectifs à attaquer ne sont ni des personnes civiles, ni des biens de caractère civil, et ne bénéficient pas d'une protection spéciale, mais qu'ils sont des objectifs militaires au sens du paragraphe 2 de l'article 52, et que les dispositions du Protocole n'en interdisent pas l'attaque. Dans Nouvelles règles pour les victimes de conflits armés, Michael Bothe affirme que "faire tout ce qui est possible" pour s'assurer que les cibles choisies sont des objectifs militaires implique "une obligation permanente de considérer comme hautement prioritaire le rassemblement, l'évaluation et la dissémination des informations adéquates relatives aux cibles." (28)

Les Articles 51(5)(b) et 57(2)(a)(iii) et (b) reprennent la première codification de la règle coutumière de proportionnalité relative aux victimes civiles collatérales et aux dommages causés à des biens de caractère civil. L'Article 51(5)(b) formule cette règle comme suit:

les attaques dont on peut attendre qu'elles causent incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil, ou une combinaison de ces pertes et dommages, qui seraient excessifs par rapport à l'avantage militaire concret et direct attendu.

Selon le commentaire autorisé de Bothe sur le protocole, cette règle:

Exige clairement que ceux qui planifient ou décident d'une attaque tiennent compte de la population civile dans les estimations qui la précèdent. Ils doivent déterminer si ses conséquences sont excessives par rapport à l'avantage militaire concret et direct attendu. Il est évident que cette décision doit se baser sur un équilibre entre:

une prévision du nombre de victimes accidentelles ou collatérales, de l'étendue des dégâts et

de l'importance relative des objectifs militaires en tant que cibles à atteindre. (29)

Selon des témoignages recueillis de gens venants des zones de combat, il semblerait que le comportement adopté par les forces alliées (30) du Congo du mois d'août à la mi-janvier 1999 suggère que ces règles n'auraient pas été respectées. Alors qu'il était parfois difficile de vérifier les informations reçues des régions touchées par les combats ou les bombes, on enregistrait régulièrement des dénonciations de violations du droit humanitaire. Les ONG, les journalistes et les missionnaires présents sur les lieux ont fourni à Human Rights Watch des témoignages des dommages causés aux victimes et aux infrastructures humanitaires à la suite du bombardement des zones contrôlées par le RCD par les FAC et ses alliés, l'Angola, le Zimbabwe, la Namibie et le Tchad. La plupart des dénonciations de violation sont arrivées des zones de combats pendant ou peu après les conflits.

L'armée du RCD et ses alliés ont également commis des abus lors de l'attaque lancée à l'ouest du Congo. En août et en septembre, au Bas-Congo, les forces du RCD ont commis des pillages extensifs, particulièrement de véhicules et de matériel de communication, des viols et des meurtres arbitraires. (31) Plus tard, en août, les forces du RCD ont pris possession du barrage hydroélectrique de Inga, dans le Bas-Congo, et ont privé la capitale d'électricité à plusieurs reprises. L'arrivée de l'eau courante vers la population a été perturbée, ce qui a, entre autres, eu des effets néfastes sur les services médicaux de la capitale. En s'enfuyant de Kinshasa, les forces du RCD ont également pillé des hôpitaux, des écoles et la mission catholique de Kisantu. (32)

A la mi-août, au début de l'offensive sur la région de Boma, et lors de la reconquête progressive de certaines villes du Bas-Congo, les forces angolaises et les FAC auraient tué et violé des civils alors qu'elles fouillaient une par une les maisons de Boma et de Moanda pour y trouver des soldats du RCD. (33) Human Rights Watch a également reçu des témoignages crédibles de pillages extensifs perpétrés par les forces angolaises au Bas-Congo dans des hôpitaux de Kangu et Kuimba, où même les meubles des bureaux ont été emportés. (34) Après que les Angolais aient repris possession de la ville de Boma le 26 août, leurs troupes ont participé à un large pillage pendant lequel elles ont cambriolé des résidences privées, volé du bétail et des véhicules, la plupart desquels ont été emmenés en Angola. (35)

A la mi-septembre, après la fin des combats au Bas-Congo, la situation humanitaire est restée préoccupante jusqu'à la fin du mois de novembre en raison des pillages extensifs, de la destruction des infrastructures et d'autres abus commis auparavant. Il était également difficile pour les ONG humanitaires d'accéder à la région. Lors d'une visite de la province du Bas-Congo réalisée en novembre, un travailleur humanitaire local a qualifié les barrages routiers des FAC de "barrières économiques" en se référant aux grand nombre d'extorsions flagrantes perpétrées par les FAC. (36) Les restrictions du Gouvernement interdisaient l'accès de la région aux agences humanitaires internationales jusqu'au mois de novembre. Passé ce délai, des exigences administratives peu claires et de multiples interlocuteurs gouvernementaux continuaient à ralentir l'arrivée de l'aide. Plusieurs groupes humanitaires de Kinshasa ont exprimé leur frustration de ne pouvoir compter sur les autorisations du gouvernement car elles n'étaient pas prises en compte aux barrages routiers établis par les FAC.

Certains membres du gouvernement congolais ont suspecté des membres de la communauté internationale qui se trouvaient au Congo, tout particulièrement des travailleurs humanitaires étrangers, d'être des espions ou des sympathisants du RCD et ont donc limité davantage l'accès aux régions où l'aide humanitaire faisait défaut. Un membre d'une ONG humanitaire a même été interpellé et arrêté pendant plusieurs jours car il possédait un rapport dans lequel il était écrit: "il n'est pas certain que la population de Mbjuji-Mayi soit hostile aux rebelles, même s'ils devaient occuper la ville." (37) De réelles questions de sécurité ont également empêché d'accéder à de nombreuses régions nécessitant de l'aide humanitaire, spécialement celles qui se trouvaient près des lignes de front. 

Même si les niveaux élevés d'extorsions commises par les FAC et de harcèlement des travailleurs humanitaires sont probablement similaires à ceux de l'avant-guerre, les habitants de Kinshasa affirment que leurs effets pourraient être potentiellement plus graves pendant la guerre en raison de la plus forte pression socio-économique qui pèse sur la population civile et d'un besoin grandissant d'aide humanitaire.

Des travailleurs humanitaires ont qualifié le comportement des forces namibiennes et zimbabwéennes aux postes de contrôle de "professionnel" dans plusieurs régions. Plusieurs rapports d'organisations humanitaires indiquent que les forces zimbabwéennes ont respecté les normes internationales relatives au traitement des prisonniers de guerre et les avaient parfois protégés des FAC. Un responsable de l'aide humanitaire en charge au Bas-Congo a déclaré que des soldats zimbabwéens étaient intervenus en leur faveur alors que les FAC, peu respectueuses des règles, les harcelaient à un poste de contrôle. (38)

Human Rights Watch a été informé de la mort de civils et de la destruction d'infrastructures médicales et civiles lors des bombardements aériens organisés par les alliés des FAC d'août 1998 à la mi-janvier 1999. La question était de savoir si les bombardements avaient délibérément pris pour cible des biens de caractère civil ou si, dans le meilleur des cas, les responsables n'avaient pas réussi à prendre en compte l'obligation de protéger les civils et les biens de caractère civil. A Shabunda, des témoins ont affirmé qu'à la mi-septembre, des bombes larguées d'avions supposés être pilotés par des alliés des FAC ont touché des cibles civiles dont l'hôpital de la ville. (39) Des rapports de journalistes et d'autres habitants de Kalemie et d'autres villes contrôlées par le RCD à Katanga et Maniema déclarent que des douzaines de civils ont été tués ou blessés par des bombes lancées par les forces aériennes du Zimbabwe. (40) Des sources locales ont confirmé que, dans la nuit du 10 au 11 janvier, les forces alliées des FAC ont bombardé Kisangani et tué au moins seize civils. (41) Ces attaques semblent être lancées au hasard car elles ne différencient pas les objectifs militaires des civils et biens de caractère civil.

Le gouvernement congolais aurait recruté des soldats et une milice accusés d'avoir participé au génocide ruandais de 1994 dans les camps de réfugiés du Congo-Brazzaville, de la République Centrafricaine et probablement dans d'autres pays. (42) Le recrutement de réfugiés organisé par le gouvernement dans les camps a sévèrement miné le caractère strictement humanitaire, civil et pacifique des camps de réfugiés et de la population de réfugiés, qui bénéficient d'une protection internationale. (43) Le gouvernement congolais a la responsabilité d'examiner la conduite passée de tous les combattants, en particulier de ceux que l'on sait être ruandais, c'est-à-dire ceux qui ont été recrutés dans des camps qui accueillaient seulement des ruandais, et spécialement celui de toute personne inscrite auprès des autorités locales comme anciens membres des Forces armées ruandaises. Ceux sur lesquels pèsent des accusations crédibles de génocide ou de crime contre l'humanité ne doivent pas seulement être exclus des forces congolaises mais également être poursuivis ou livrés au Tribunal pénal international - Rwanda.

Human Rights Watch a également interrogé des ougandais détenus à Goma qui ont affirmé avoir été recrutés dans des camps de réfugiés de la région de Juba, située au sud du Soudan. (44) Les détenus parlaient librement et sans avoir l'air d'être intimidés et ont déclaré qu'on leur avait promis d'être rapatriés en Ouganda mais qu'ils avaient été transporté à Kindu, dans la province de Maniema, où ils ont suivi une formation pour devenir membre des FAC. Ils ont déclaré que les membres du Front de la rive occidentale du Nil (FRON) des camps du Soudan avaient également été emmenés volontairement à Kindu pour combattre au nom des FAC. Ils ont par la suite été capturés par les forces du RCD lors de la bataille de Kindu.

Recrutement d'Enfants Soldats
Depuis le début du conflit le 2 août, de plus en plus d'enfants ont été recrutés. Un communiqué officiel diffusé par la radio nationale le 7 août 1998 invitait les enfants et les jeunes de douze à vingt ans à s'engager dans les forces armées, en réponse à l'insurrection du RCD. En plus de Kinshasa, les recrutements auraient également été organisés à l'aéroport de Mbuji-Mayi, à l'ouest du Kasai, à Kamina, Kaniema, à Manono et au Katanga. A Kinshasa, un commandant des FAC a réalisé une enquête informelle parmi les troupes qui s'y trouvaient en novembre 1998 et a découvert qu'un soldat sur quatorze était âgé de moins de treize ans. (45)

Kabila utilise des enfants depuis 1996 pour renforcer son armée. (46) En tant que leader de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), il a recruté des milliers de jeunes enfants soldats, connus sous le nom de "Kadogo," ou "les petits," pour soutenir sa campagne militaire contre le gouvernement de Mobutu. (47) Malgré les promesses faites par le gouvernement congolais de démobiliser les enfant à la fin de la guerre de 1996-1997 et l'élaboration de nouveaux programmes de démobilisation, le gouvernement de Kabila a continué à recruter pour son armée des enfants âgés d'à peine sept ans. (48) Même s'il n'existe pas de statistiques dignes de confiance relatives au nombre d'enfants soldats, leur total pourrait atteindre plusieurs milliers. (49)

Les conditions de vie des enfants soldats se sont avérées déplorables. Les agences d'aide travaillant à l'intérieur du Congo affirment qu'ils voyaient fréquemment les jeunes "volontaires" de Kabila vêtus de vêtements en lambeaux et dans un état alimentaire précaire. Un médecin d'une agence d'aide humanitaire, qui avait parlé avec des enfants soldats déployés au Bas-Congo, l'un d'entre eux n'étant âgé que d'à peine treize ans, craignait que les enfants soldats de cette région ne soient victimes d'épidémies.

Le droit international interdit le recrutement d'enfants âgés de moins de quinze ans et un protocole optionnel à la Convention des Droits de l'Enfant pourrait élever l'âge minimum des enfants soldats à dix-huit ans. (50)Human Rights Watch soutient ce protocole.

Processus de Démocratisation et Société Civile
La déclaration de l'état de siège par le Président Kabila le 2 janvier 1999 a donné de larges pouvoirs à l'armée et a une fois de plus posé la question de savoir si le gouvernement allait respecter sa promesse de tendre vers un gouvernement plus représentatif. Même si cette déclaration ne viole aucune règle de droit international, puisque le Congo est en état de guerre, le transfert des pouvoirs et d'autres mesures prises par le gouvernement depuis le début de la guerre démontrent clairement que toute transition crédible vers la démocratie est au moins temporairement paralysée.

Malgré la levée le 29 janvier 1999 de l'interdiction des activités politiques ordonnée par Kabila après sa prise de pouvoir en mai 1997, les partis politiques sont restés interdits pendant les trois mois qui suivaient leur enregistrement au ministère de l'intérieur. (51) Même s'il "reconnaît" et "garantit" le pluralisme politique, le décret fixe cependant une série de conditions que les partis doivent remplir lors de leur enregistrement comme, entre autres, payer une somme de 10 000$. Quant aux membres fondateurs, ils doivent fournir une série de documents incluant un certificat de naissance, de résidence, une preuve de payement des impôts et une attestation médicale de leur bonne santé physique et mentale. (52) Ils doivent également prouver que leurs deux parents jouissent de la nationalité congolaise.

A l'époque, l'interdiction avait complètement paralysé le système politique du pays, sans aucune tentative crédible du parti au pouvoir de remplir le vide politique qu'il avait cherché à créer avec tant d'agressivité. En raison de la répression continue contre l'opposition et les autres voix dissidentes, même issues des rangs du gouvernement, le décret libéralisant les partis politiques a laissé les politiciens congolais perplexes. Les porte-parole du parti d'opposition Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) ont déclaré à Human Rights Watch que leur parti, qui avait constamment rejeté l'interdiction des activités politiques ordonnée par le Président Kabila, n'avait pas l'intention de devenir une "entreprise de l'État" en respectant les conditions d'enregistrement formulées par la nouvelle loi. (53)

Comme ce fut le cas avant la guerre, les policiers et les soldats ont mené sans raison des raids sur les quartiers généraux des partis politiques. Le raid de la mi-décembre sur la maison du politicien vétéran Antoine Gezenga, qui est également le quartier général du Parti Lumumbiste Unifié (PALU), est un bon exemple de ces attaques. Des agents de police qui ne disposaient pas de mandats ont saisi des documents et des objets personnels et ont interpellé vingt-huit militants qui ont été brièvement détenus. (54)

Les critiques du processus de révision constitutionnelle - qu'elles soient internes ou externes au gouvernement - étaient un sujet sensible. Lorsque le ministre de la santé, Jean-Baptiste Sondji, a publiquement remis en cause la sagesse de limiter les consultations à des individus et groupes soigneusement sélectionnés, il a été renvoyé et brièvement arrêté sans plus de cérémonie. Quand on lui a demandé d'expliquer pourquoi il avait agi de la sorte avec M. Sondji, le Président Kabila a répondu : "il s'est pratiquement banni lui-même du gouvernement! Il a été renvoyé pour avoir critiqué le projet de constitution avec tant de véhémence (...)." (55) Le 14 janvier, des membres du groupe spécial de sécurité présidentielle ont arrêté le directeur de la banque centrale et trois de ses principaux assistants, probablement pour se venger de leur opposition aux politiques de stabilisation monétaire annoncées par le gouvernement. 

Des politiciens et des militants de l'opposition étaient encore arrêtés arbitrairement et perdaient leur droit à la liberté d'expression et de mouvement lorsque le gouvernement se préparait à "libéraliser" les partis politiques. Le 16 janvier, l'agence nationale de renseignements a convoqué cinq figures de proue d'importants partis de l'opposition, leur a fermement rappelé que l'interdiction des activités politiques était toujours en vigueur et ils ont chacun été emprisonnés pendant un certain temps sans qu'aucune charge ne pèse sur eux. (56)

Quelques jours auparavant, Mukendi wa Mulumba, l'un d'entre eux, membre du parti d'opposition Union pour la Démocratie et le Progrès social, n'avait pu embarquer sur un vol pour Bruxelles où il devait représenter son parti à une conférence organisée par des groupes de la société civile congolaise. A la fin du mois d'octobre, le gouvernement a pratiquement assigné à résidence Etienne Tshisekedi, le leader de l'UDPS, et lui a refusé un visa de sortie lorsqu'il a tenté de se rendre à Bruxelles pour prendre la parole à une séance du Parlement européen dont le sujet était le plan de paix pour le Congo élaboré par son parti.

Depuis le début du conflit, Kabila a continué à mettre en avant les activités préélectorales et électorales d'une façon superficielle qui semblait viser à garantir son emprise sur le pouvoir plutôt qu'à faire avancer le pays vers une démocratie représentative. Malgré ses promesses, les mesures les plus importantes qui ont été prises jusqu'à présent, loin d'ouvrir la porte à un retour au pluralisme politique, ont largement exclu l'opposition et les organisations politiques de la société civile. En novembre 1998, le gouvernement a soumis le projet de constitution à des "groupes d'opinion" de la société civile de Kinshasa soigneusement sélectionnés. (57) Ce processus a été largement critiqué par des organisations de la société civile et des partis politiques: beaucoup d'organisations, comme certaines de celles impliquées dans la révision, ont affirmé que le temps imparti pour la révision n'était pas suffisant; les partis politiques ont été exclus du processus; la révision s'est limitée aux organisations de Kinshasa et rien ne garantissait que le gouvernement tiendrait compte de leurs points de vue. Dans le but de préparer un référendum national sur le projet de constitution, le gouvernement a créé un comité chargé d'organiser un recensement de la population, même si la moitié du pays était inaccessible en raison du conflit; le comité a invité plusieurs ONG a participé au processus.

Le gouvernement du Président Kabila est connu depuis longtemps pour les mauvais traitements qu'il inflige aux principales organisations non-gouvernementales, et particulièrement à des groupes de défense des droits de l'homme. Bien que le gouvernement ait coopté dans ses rangs un certain nombre d'importants militants et de défenseurs des droits de l'homme, et évité une confrontation ouverte avec le secteur non-gouvernemental, il a eu du mal a cacher dans plusieurs instances sa colère et sa méfiance à l'égard des acteurs et de l'autonomie de ce même secteur.

La plupart des groupes des droits de l'homme ont intensifié leur travail sur des questions constitutionnelles et électorales ainsi que sur l'éducation civique en préparation des élections promises pour 1999. Plusieurs organisations se sont rassemblées pour fournir une assistance juridique dans le cadre de cas présentés au tribunal militaire. Quelques unes seulement se sont attelées à des questions "sensibles" soulevées par la guerre, la persécution ethnique en particulier, en raison de la crainte d'une association avec le RCD et ses alliés, et à un sentiment général de nationalisme. La plupart des organisations de la société civile ont accordé la priorité à la promotion d'une transition vers la paix et la démocratie en publiant des propositions en faveur de la paix et en organisant de nombreuses conférences, comme ce fut le cas en Belgique à la mi-janvier, où des organisations de la société civile des deux gouvernements et du Congo dirigé par les rebelles se sont rencontrées.


1.Entretien de Human Rights Watch avec le second président de la Cour d'ordre militaire, Cour d'ordre militaire, Kinshasa, novembre 1998. Selon le second président, des tribunaux militaires itinérants ou permanents avaient été ou allaient être établies dans ces villes et dans l'intérieur du pays.

2.  L'état de siège fut proclamé par le Président Kabila, le 2 janvier 1999, à Kinshasa, par le biais du Décret N 171.

3.  Décret N 172, Kinshasa, 2 janvier 1999.

4.  Entretien par téléphone, Human Rights Watch, Lubumbashi, janvier 1999.

5.  La Cour d'ordre militaire fut établie par le décret-loi N 019 du 23 août 1997. L'Article 3 du décret indique que son rôle est de "mettre en lumière toutes les infractions commises par des éléments de la 50ème brigade de l'armée, des soldats des anciennes Forces armées zaïroises et des membres de la police".

6.  Human Rights Watch est opposé à la peine de mort, sans exception aucune, et considère qu'il s'agit d'une peine par nature cruelle et irréversible. De plus, elle est dans la majorité des cas appliquée de manière discriminatoire. Cette discrimination, selon les cas, peut être basée sur des motifs d'ordre ethnique, religieux ou politique. De plus, la possibilité de commettre des erreurs, inhérente à tout système de justice pénale, signifie que des personnes innocentes peuvent être exécutées, et ce même lorsque toutes les règles ayant cours en matière d'administration de la justice ont été dûment respectées. Étant donné le caractère irréversible de la peine capitale, ces erreurs ne peuvent jamais être corrigées.

7.  Entretien de Human Rights Watch avec les Toges Noires, une ONG fournissant gratuitement une assistance juridique aux militaires et civils comparaissant devant la Cour d'ordre militaire, Kinshasa, 18 novembre 1998.

8.  Le Congo a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIRDCP) qui stipule, à l'article 14 (5), que toute personne déclarée coupable d'une infraction a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation. Ce droit ne souffre aucune exception, même lorsqu'un état d'urgence a été déclaré.

9.  L'article 14 (5) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que tout condamné à le droit de faire examiner son cas par une juridiction supérieure. De plus, l'article 6 (4) stipule que "tout condamné à mort a le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine" et que "l'amnistie, la grâce ou la commutation de la peine de mort peuvent dans tous les cas être accordées"

10.  Entretien de Human Rights Watch avec un avocat de la défense, Cour d'ordre militaire, Kinshasa, 19 novembre 1998.

11.  Entretien de Human Rights Watch avec un procureur militaire, Cour d'ordre militaire, Kinshasa, 16 novembre 1998. Dirigé par Etienne Tshisekedi, l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) est l'un des principaux et plus anciens partis d'opposition congolais.

12.  Les conditions d'emprisonnement se sont fortement améliorées pour l'ensemble des prisonniers, mais il nous a été impossible de vérifier l'état des pavillons un et huit, apparemment en état de décrépitude avancée, ceux-ci n'étant pas accessibles aux visiteurs.

13.  Entretien de Human Rights Watch avec le représentant d'une ONG active dans les prisons de Kinshasa, 19 novembre 1998.

14.  Les tutsis vivant à Kinshasa et ailleurs au Congo furent persécutés en 1996 et 1997 par le gouvernement de Mobutu et ses milices. Ils furent physiquement agressés, certains furent tués, d'autres ne durent leur salut qu'à la fuite. Les tutsis du sud Kivu, connus sous le nom de banyamulengue, désireux d'affirmer leur droit à la citoyenneté zaïroise, soutinrent Kabila et ses alliés lorsque celui-ci renversa Mobutu et prit le pouvoir en 1997. Certains hommes politiques et d'autres personnes n'appréciant que très peu le pouvoir économique et politique potentiel dont disposaient un grand nombre de congolais d'origine ruandaise de l'est du Congo remirent en question leur droit à la citoyenneté, le but étant de les empêcher de voter ou d'être élus. Pour obtenir davantage de détails, consultez les publications suivantes:

Human Rights Watch et la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l'Homme (DIDH), "Forcés de fuir, violences contre les tutsis au Zaïre," A Human Rights Watch Short Report, vol. 8, n2 (A), juillet 1996; et

Human Rights Watch, "Transition, guerre et droits de l'homme," A Human Rights Watch Short Report, vol. 9, n2 (A), avril 1997.

15.  "Le Palmarès", journal publié à Kinshasa, n1301, 5 août 1998.

16.  "Le Soft", journal publié à Kinshasa et Bruxelles, n892, 8 août 1998.

17.  Pendant la marche, les manifestants sacrifièrent en public deux chèvres représentant l'ancien ministre des affaires étrangères Bizima Karaha et l'ancien dirigeant de l'ADFL Déogracias Bugera, deux tutsis ayant rejoint les rangs du RCD.

18.  "République Démocratique du Congo: les radios de la haine réapparaissent alors que les rebelles se rapprochent de Bunia," Integrated Regional Information Network, Nairobi, 12 août 1998.

19.  Cette estimation est basée sur de multiples entretiens réalisés par des organisations locales et internationales basées à Kinshasa. Ces organisations n'ont pas pu fournir de liste complète détaillant le nombre de combattants et de civils tués durant cette période.

20.  Le gouvernement fit en août une déclaration publique afin d'avertir la population que des rebelles faisant semblant d'être des handicapés mentaux étaient en train d'infiltrer Kinshasa. De nombreux handicapés furent ainsi tués par des foules en colère. Dans une autre déclaration le gouvernement invita la population à se méfier des femmes portant des tresses épaisses, affirmant qu'il était possible qu'elles amènent en ville des grenades. De nombreuses femmes furent harcelées et plusieurs furent même violées.

21.  Entretiens réalisés par Human Rights Watch, Kinshasa, 15, 17 et 21 novembre 1998.

22.  Entretien de Human Rights Watch avec l'épouse d'un détenu du camp de Kokolo, Kinshasa, 21 novembre 1998.

23.  Entretien de Human Rights Watch avec une ONG congolaise de défense des droits de l'homme, Kinshasa, 17 novembre 1998.

24.  "La guerre au Congo: effet de l'ethno-fascisme hima-tutsi dans la région des Grands Lacs," Henri Mova Sakayani, Ministre des transports et des communications, Kinshasa, octobre 1998. Avec la polarisation ethnique croissante qui a marqué les trente dernières années, les populations de la région des Grands Lacs se sont peu à peu identifiées soit en tant que membres d'un groupe de cultivateurs, parfois appelé groupe bantou, ou d'un groupe d'éleveurs. Les deux groupes se sont graduellement mis à se craindre l'un l'autre. Cette peur a souvent été utilisée et manipulée par des hommes politiques qui, à plusieurs reprises, ont affirmé avoir découvert l'existence de plans visant au génocide de l'un ou l'autre des groupes. Les himas et les tutsis sont des éleveurs. On trouve les premiers surtout en Ouganda et en Tanzanie, les seconds étant principalement présents au Ruanda et dans l'est du Congo.

25.  Entretien réalisé par Human Rights Watch, Kinshasa, 16 novembre 1998.

26.  Entretien de Human Rights Watch avec le second président de la Cour d'ordre militaire, Kinshasa, 20 novembre 1998

27.  Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la Protection des Victimes des Conflits internationaux armés (Protocole I), 8 juin 1977.

28.  Michael Bothe et al, Nouvelles règles pour les victimes de conflits armés, (Martinus Nijohoff Publishers, Boston; 1982, P. 326).

29.  New Rules, p. 310.

30.  Il s'agit du gouvernement du Zimbabwe, de l'Angola, de la Namibie et du Tchad, qui ont envoyé des troupes pour soutenir les efforts de guerre du gouvernement congolais.

31.  Selon des entretiens entre Human Rights Watch et des témoins qui étaient au Bas-Congo à l'époque et plusieurs rapports de responsables d'Églises, d'organisations humanitaires et d'ONG du Bas-Congo.

32.  Conversation téléphonique de Human Rights Watch avec des missionnaires du Bas-Congo, de Boston et du Massachusetts, 2 novembre 1998.

33.  Selon des entretiens entre Human Rights Watch et des témoins qui se trouvaient au Bas-Congo à l'époque et des rapports de responsables d'Églises, d'organisations humanitaires et d'ONG du Bas-Congo. Dans les régions de Moanda et de Boma, les membres du RCD étaient habillés en civil lorsqu'ils se sont enfuis. Ils ont probablement fait augmenter le nombre de civils victimes de ces conflits.

34.  Rapport d'une Église du Bas-Congo, septembre 1998.

35.  Ce témoignage d'organisations humanitaires, présentes au Bas-Congo à l'époque, a corroboré les rapports de journalistes et de dockers angolais relatifs à l'arrivée à Luanda de biens volés sur un bateau de l'État angolais.

36.  Entretien entre Human Rights Watch et une organisation d'aide internationale de Kinshasa, 13 novembre 1998.

37.  Rapport issu d'une Église du Bas-Congo, septembre 1998.

38.  Entretien de Human Rights Watch avec une organisation humanitaire, Kinshasa, 23 novembre.

39.  Entretien de Human Rights Watch avec des missionnaires de Bukavu, 10 décembre 1998.

40.  Agence France Presse, "Une bombe zimbabwéenne tue 20 civils dans une ville de la RDC contrôlée par les rebelles," 11 décembre 1998.

41.  Conversation téléphonique de Human Rights Watch/New York avec un habitant de Kisangani, 13 janvier 1998.

42.  Entretien de Human Rights Watch avec une organisation humanitaire travaillant dans les camps, Kinshasa, Novembre 1998.

43.  Conclusion n 48 de la réunion de 1987 du Comité exécutif du HCRNU, affirmant "le caractère exclusivement civil et humanitaire des camps de réfugiés" et "le principe selon lequel l'octroi de l'asile est un acte pacifique et humanitaire qui ne doit pas être considéré comme hostile par un autre état". Le préambule de la Convention de l'OUA de 1969 réitère ces principes.

44.  Entretien de Human Rights Watch avec les prisonniers de guerre des services de sécurité de l'armée du RCD, connus sous le nom de "ancien ANR," Goma, 5 décembre 1998.

45.  Entretien de Human Rights Watch avec une agence humanitaire, Kinshasa, 15 novembre 1998.

46.  Le terme enfant signifie "tout être humain âgé de moins de dix-huit ans" (Article 1 de la Convention des Droits de l'Enfant, 2 septembre 1990). Tous les pays ont signé la Convention des Droits de l'Enfant, hormis les États-Unis et la Somalie.

47. Dirigé à l'époque par le rebelle Kabila, l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) était une coalition de partis politiques de l'est du Congo qui, avec le soutien du Ruanda, de l'Ouganda, de l'Angola et du Burundi, a renversé Mobutu, le Président zaïrois, après une guerre de sept mois qui a éclaté en octobre 1996. Pour obtenir davantage de détails, consultez les publications suivantes (Human Rights Watch short reports):

"Ce que cache Kabila: meurtres de civils et impunité au Congo," vol. 9, n 5 (A), octobre 1997; "Une direction incertaine: transition et violations des droits de l'homme au Congo," vol. 9, n 5 (A), (également disponibles en français).

48.  Entretien entre Human Rights Watch et une agence humanitaire, Kinshasa, 15 novembre 1998. Le soldat de sept ans avait été examiné en 1998 par un médecin de l'agence d'aide située dans le camp de démobilisation de Kapalata, près de Kisangani.

49.  En 1997, la télévision nationale a retransmis une parade de ce que le gouvernement affirmait être 5 900 enfants soldats de Mbuji-Mayi. Les organisations impliquées dans la démobilisation estimaient qu'en novembre, le nombre total avait augmenté de plusieurs milliers.

50.  Conventions des Droits de l'Enfant, Article 38 (2) et (3).

51. "Décret-Loi n 194 relatif aux partis et aux groupements politiques", signé le 29 janvier 1999, Bulletin quotidien de l'Agence de presse congolaise (en français), lundi 1 février 1998.

52.  Ibidem.

53.  Conversation téléphonique de Human Rights Watch avec des porte-parole de l'UDPS, New York/Bruxelles et Kinshasa, 3 février 1999.

54.  "Congo-Kinshasa: RDC - Raid des forces de sécurité sur les quartiers généraux des partis politiques," Kinshasa, AFP, 16 décembre.

55.  "Congo - Kinshasa: Kabila en visite à Bruxelles, le conflit au Congo," Le Soir, Bruxelles, 19 novembre 1998.

56.  Les cinq personnes en question étaient: Adrien Phongo, secrétaire général de l'UDPS et Mukendi wa Mulumba, avocat et conseiller du président du parti; Kamitatu Masamba, leader du parti social chrétien démocrate; Bofasssa Djema, figure de proue du Mouvement populaire pour la révolution; et Kisimba Ngoy, un leader du Parti fédéraliste national.

57.  En mars 1998, les membres triés sur le volet d'un comité constitutionnel ont soumis un projet de constitution à l'approbation du président. En mai, le gouvernement a nominalement élaboré une procédure de création d'une assemblée constituante chargée de réviser le projet de constitution. Les autorités ont adopté une lourde procédure de sélection des membres de l'assemblée basée sur des listes de candidats dont le nombre total était de 10.000 à la mi-juin. L'assemblée n'a jamais été constituée. La tâche de revoir le projet de constitution a été assurée en lieu et place par une "commission technique" dirigée par le ministre de la justice après que la guerre ait éclaté.