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Des responsables américains se méprennent sur les exigences de la Convention de Genève
(New York, 28 janvier 2002) Dans une lettre adressée ce matin à Condoleezza Rice, Conseillère pour la Sécurité Nationale, Human Rights Watch a réfuté les affirmations avancées par certains responsables de l'administration selon lesquelles certaines exigences clés des Conventions de Genève ne s'appliqueraient pas aux détenus de Guantanamo.

En français
Reed Brody, directeur adjoint de Human Rights Watch, parle à Radio France Internationale sur le statut et le traitement des prisonniers afghans et Al Qaïda détenus sur la base de Guantanamo Bay à Cuba.
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Le gouvernement américain ne peut pas faire le choix de mener une guerre en Afghanistan avec des armes à feu, des bombes et des soldats puis affirmer que les règles de la guerre ne s'appliquent pas. Déclarer que les Conventions de Genève ne s'appliquent pas à une guerre contre le terrorisme est particulièrement dangereux. Il est en effet très facile d'imaginer que cette "exception" reviendrait hanter les forces américaines lors de conflits futurs.

Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch


 
Répondant point par point aux récentes déclarations de l'administration Bush concernant les Conventions de Genève, Human Rights Watch a expliqué l'obligation qu'ont les Etats Unis de recourir à des tribunaux qualifiés lorsque le statut de prisonnier de guerre des belligérants en détention n'est pas clair. Human Rights Watch a également précisé que les Conventions de Genève n'interdisent pas d'interroger les détenus dont les prisonniers de guerre et que les prisonniers de guerre inculpés de crimes peuvent être détenus même après la fin du conflit armé.

"Le gouvernement américain ne peut pas faire le choix de mener une guerre en Afghanistan avec des armes à feu, des bombes et des soldats puis affirmer que les règles de la guerre ne s'appliquent pas," a déclaré Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch. "Déclarer que les Conventions de Genève ne s'appliquent pas à une guerre contre le terrorisme est particulièrement dangereux. Il est en effet très facile d'imaginer que cette "exception" reviendrait hanter les forces américaines lors de conflits futurs."

Les Conventions de Genève supposent qu'un combattant capturé est un prisonnier de guerre, sauf si un tribunal qualifié décide différemment après une étude au cas par cas. Alors que les membres de al-Qaeda ne remplissent probablement pas les conditions des Conventions de Genève concernant le statut de prisonnier de guerre, les membres des forces armées talibanes rempliraient très certainement ces conditions. Dans le but de déterminer le statut de prisonnier de guerre, la reconnaissance par les Etats Unis des talibans comme étant le gouvernement légitime de l'Afghanistan est hors de propos malgré les affirmations contraires de certains responsables de l'administration.

Human Rights Watch s'est également opposé à des affirmations selon lesquelles la nécessité pour les Etats Unis de recourir à une certaine "flexibilité" en interrogeant les détenus empêche d'attribuer le statut de prisonnier de guerre.

"Certains responsables américains croient apparemment qu'ignorer le mandat clairement défini des Conventions de Genève préservera la capacité américaine d'interroger les détenus," a déclaré Roth. "En fait, rien dans les Conventions n'interdit d'interroger des prisonniers de guerre sur des crimes de guerre ou tout autre acte criminel."

Roth fait remarquer que si les prisonniers de guerre ne sont pas tenus de répondre à des questions autres que celles concernant leur nom, leur grade, leur matricule et leur date de naissance, les Conventions de Genève n'empêchent pas les personnes chargées des interrogatoires de poser des questions sur d'autres sujets. De plus, indépendamment du fait de savoir si un détenu bénéficie du statut de prisonnier de guerre, les personnes en charge des interrogatoires ne peuvent utiliser la torture ou d'autres formes de coercition. Mais elles peuvent avoir recours à des négociations entre accusation et défense ou à d'autres formes de coopération ainsi qu'à un interrogatoire patient, conduit avec soin et finesse tel que cela est toujours requis afin d'obtenir des informations de détenus hostiles.

Human Rights Watch a également mis en avant que les Conventions de Genève n'excluent pas le procès, la condamnation et les peines à l'encontre de prisonniers de guerre. Les prisonniers de guerre peuvent être inculpés et jugés pour des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou d'autres actes qui seraient qualifiés de crimes s'ils étaient commis par des soldats américains. Le statut de prisonniers de guerre n'offrirait une protection que pour l'acte de recourir aux armes contre des forces militaires. S'ils étaient condamnés, les prisonniers de guerre serviraient leur peine dans des centres de détention dépendant des Etats Unis et ne pourraient bénéficier d'un rapatriement sans accord des Etats Unis.

"Ce serait raisonner à très court terme pour les Etats Unis que d'ignorer les obligations qui sont les leurs d'après les Conventions de Genève et une telle attitude pourrait avoir des conséquences tragiques," a déclaré Roth. "Ces conventions représentent un ensemble de règles qui protègent tout le monde, y compris les militaires américains hommes et femmes faits prisonniers au cours d'une guerre."

La lettre envoyée à Condoleezza Rice est accessible à l'adresse suivante (en anglais) : http://hrw.org/press/2002/01/us012802-ltr.htm

Pour plus d'informations sur la guerre en Afghanistan et les conséquences des attaques du 11 septembre, consulter : http://www.hrw.org/campaigns/september11/