HRW News
  FREE    Recevez des Nouvelles 
Inde, Pakistan : inclure les droits humains dans le sommet avec les Etats Unis
Bush rencontre Moucharraf et Vajpayee

(New York, 8 novembre 2001) Human Rights Watch a aujourd'hui vivement encouragé les Etats Unis, l'Inde et le Pakistan à inclure, dans leurs réunions bilatérales, cette semaine, des stratégies visant la protection des droits humains. Le Président Bush rencontrera le Premier Ministre Vajpayee le 9 novembre, à Washington et le Président Moucharraf, le 10 novembre, à New York.


Sur le même thème

Après les attaques du 11 septembre
HRW documents en français

La tentation existe de croire que durcir les contrôles sur les libertés d'expression et de rassemblement renforcera la capacité de l'état à résister au terrorisme. Cependant, nous avons fréquemment constaté exactement l'inverse.

Sidney Jones, Directeur exécutif de la Division Asie de Human Rights Watch


 
Human Rights Watch a mis en garde contre des changements irréfléchis apportés aux lois des trois pays qui sacrifieraient inutilement les procédures légales et les libertés personnelles au nom de la lutte contre le terrorisme.

"La tentation existe de croire que durcir les contrôles sur les libertés d'expression et de rassemblement renforcera la capacité de l'état à résister au terrorisme. Cependant, nous avons fréquemment constaté exactement l'inverse", a déclaré Sidney Jones, Directeur exécutif de la Division Asie de Human Rights Watch. "La meilleure façon de garantir la sécurité est de consolider les structures démocratiques. Le respect des droits humains doit être une part intégrante de toute stratégie de lutte contre le terrorisme et devrait figurer au programme des deux réunions."

Inde :
Le gouvernement indien est sur le point de promulguer l'Ordonnance sur la Prévention du Terrorisme (POTO) qui est déjà temporairement appliquée dans l'attente d'une action parlementaire. La législation actuellement proposée donne à la police indienne de vastes pouvoirs en matière d'arrestation et de détention. Si cette loi était promulguée, elle signifierait le rétablissement d'une version modifiée du célèbre Acte de Prévention des Activités Terroristes et Troublant l'Ordre Public (TADA), abrogé en 1995, suite à des protestions publiques généralisées. TADA a facilité des dizaines de milliers d'arrestations, de détentions et d'actes de torture en violation du droit international et a été utilisé pour réprimer des opposants politiques, des militants des droits sociaux et des défenseurs des droits humains. Une fois promulgué, POTO pourrait, de la même façon, être utilisé à mauvais escient.

POTO a été fermement critiqué par d'importants groupes indiens de défense des droits civils, des universitaires, des avocats, des partis d'opposition, des organisations de médias et des institutions tant religieuses que laïques. La Commission nationale indienne sur les droits humains affirme également que les lois existantes sont suffisantes pour lutter contre la menace terroriste.

Depuis le début, le 7 octobre, des frappes aériennes menées par les Etats Unis en Afghanistan, le gouvernement indien a pris des mesures draconiennes contre les manifestants pacifiques qui s'opposaient aux frappes, qualifiant ces derniers "d'éléments anti-nationaux". Le 7 octobre par exemple, six étudiants de l'université de Delhi ont été arrêtés pour avoir distribué des pamphlets lors d'une manifestation contre les frappes. Les organisations s'opposant au soutien apporté par l'Inde à la campagne dirigée par les Etats Unis ont également été confrontées à un harcèlement policier accru.

Human Rights Watch exhorte le gouvernement indien à :

  • Suspendre ses efforts pour promulguer POTO et à abroger la loi temporaire.
  • S'assurer que les droits à la liberté d'expression et de rassemblement sont constamment respectés.
Pour plus d'informations sur POTO, consulter : http://www.hrw.org/press/2001/10/india1018.htm

Pakistan :

Selon les amendements apportés à l'Acte Anti-Terrorisme d'août, les agents des forces de l'ordre peuvent intenter une action légale pour "activités anti-gouvernementales" dont la tenue de réunions, les rassemblements et les grèves. Les réunions sont définies comme "une réunion de deux personnes ou plus, soit publique, soit privée". Human Rights Watch craint que le gouvernement continue à utiliser cet acte pour faire taire les opposants politiques et pour réprimer toute expression légitime d'opposition.

Une interdiction du gouvernement de tous les rassemblements politiques "dans les lieux publics, des grèves et des processions" imposée en mars 2000, est toujours en vigueur. Cette année seulement, les autorités pakistanaises ont arrêté des milliers de dirigeants et militants de l'Alliance multipartite pour la Restauration de la Démocratie (ARD) et d'autres groupes politiques.

Plutôt que d'assurer la sécurité au Pakistan, ces mesures ont conduit à la création d'une atmosphère d'instabilité accrue, à l'intérieur du pays en étouffant les voix modérées. Au cours des derniers mois écoulés, Moucharraf a encore consolidé son pouvoir par le biais d'un ensemble de directives augmentant son contrôle sur le gouvernement pakistanais et sur l'armée. Ceci inclut son auto-nomination à la présidence du Pakistan en juin. Alors que le gouvernement maintient qu'il tiendra des élections en octobre 2002, l'érosion actuelle des structures civiles et des libertés civiles ébranle les espoirs d'une transition réussie vers la démocratie.

Human Rights Watch appelle le Président Moucharraf à :

  • Révoquer la Section 16 de l'Ordonnance sur le maintien de l'ordre public (Maintenance of Public Order Ordinance), la loi de sédition et les dispositions appropriées de l'Acte anti-terrorisme qui limitent la liberté d'expression et les procédures légales.
  • Prendre des dispositions pour réformer les récentes mesures de consolidation du pouvoir qui mettent à mal l'engagement du Président de redonner au pays un régime démocratique.
Etats Unis :

Depuis les attaques du 11 septembre, les groupes gouvernementaux et non gouvernementaux de suivi des droits humains ont reçu plusieurs centaines de plaintes concernant des attaques ou des crimes motivés par des préjugés et la haine à l'encontre de personnes originaires du Moyen-Orient, du monde arabe et de l'Asie du Sud, dont des Indiens et des Pakistanais. Les attaques vont du meurtre aux agressions violentes en passant par le vandalisme et les incendies de mosquées, de temples, magasins et habitations sikhs et hindous.

Human Rights Watch a accueilli avec satisfaction les déclarations du Président Bush et d'autres responsables gouvernementaux condamnant de telles attaques. Human Rights Watch presse le gouvernement fédéral et les gouvernements de chaque état d' :

  • Adopter des mesures plus efficaces pour prévenir les crimes motivés par la haine contre des personnes originaires du Moyen Orient, du monde arabe et d'Asie du Sud.

Les responsables américains du maintien de l'ordre devraient :

  • Fournir une protection renforcée aux individus et groupes pris pour cibles, ainsi qu'à leurs lieux d'habitation, de travail et de culte. S'assurer que des suites adaptées sont données à toute plainte pour comportements criminels. Traduire en justice les personnes reconnues coupables de ces actes.
Pour en savoir plus sur les crimes motivés par la haine aux Etats Unis, consulter : http://www.hrw.org/press/2001/09/usreprisal0921.htm

Le USA Patriot Act de 2001, signé par le Président Bush le 26 octobre donne à l'Attorney General des Etats Unis des pouvoirs sans précédents et très élargis pour déterminer qui sont les non-citoyens soupçonnés d'activités anti-terrorisme ou de menaces sur la sécurité nationale puis pour les détenir. La loi comporte une définition vague du "terrorisme" ainsi que d'autres termes clés. Elle n'offre pas de procédé judiciaire valable pour les détenus qui souhaitent que soient réexaminés leurs chefs d'inculpation et la détention qui y a fait suite. La nouvelle loi comporte également des dispositions qui pourraient conduire à la détention prolongée de non-citoyens.

Le gouvernement américain a également détenu plus de 1 100 personnes dans le cadre de son investigation sur les attaques du 11 septembre mais il refuse de diffuser les informations les plus élémentaires sur ces détenus.

Human Rights Watch presse le gouvernement américain de :

  • S'assurer que les règles et régulations qui accompagneront le USA Patriot Act permettront de clarifier les formulations vagues et trop larges contenues dans cet acte.
  • Fournir des informations sur toutes les personnes détenues dans le cadre des enquêtes sur les attaques, notamment sur leurs lieux de détentions passés et présents et sur les raisons de leur maintien en détention.
Pour plus d'informations, consulter : http://www.hrw.org/press/2001/10/terrorism1022.htm

Pour plus d'informations sur la guerre en Afghanistan et les conséquences des attaques du 11 septembre, consulter : http://www.hrw.org/campaigns/september11/