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La politique des Etats-Unis en matière de justice pénale continue à susciter de graves inquiétudes en matière de droits humains. L'année 2008 a vu la reprise des exécutions après sept mois d'interruption et l'augmentation continuelle de la population carcérale des Etats-Unis, qui est déjà la plus importante au monde. Egalement en 2008, Human Rights Watch a confirmé que plus de 2 500 prisonniers américains purgent des peines de prison à perpétuité sans possibilité de remise de peine pour des crimes commis alors qu'ils avaient moins de dix-huit ans ; aucun autre pays n'inflige cette peine à des délinquants mineurs.

Deux évolutions positives ont été l'annulation par la Cour suprême américaine d'une loi qui empêchait les détenus de Guantanamo de remettre en cause la légalité de leur détention, et l'engagement par le Département de la Justice des premières poursuites judiciaires en vertu de la loi de 1994 permettant aux tribunaux de juger les actes de torture commis à l'étranger par des citoyens américains ou par toute personne présente aux Etats-Unis.

Peine de mort

De septembre 2007 à mai 2008, il n'y a eu aucune exécution aux Etats-Unis pendant que la Cour suprême examinait la question de savoir si l'injection létale -méthode utilisée par toutes les juridictions américaines appliquant la peine de mort- constitue un châtiment cruel et inhabituel. En avril 2008, dans l'affaire Baze c. Rees, la Cour a jugé que ce n'est pas le cas et les exécutions ont rapidement repris. De mai à octobre 2008, trente condamnés ont été exécutée, dont la moitié au Texas.

Toutefois, les tribunaux et les assemblées législatives continuent de réduire la portée de la peine capitale. En décembre 2007, le New Jersey a aboli la peine de mort, devenant ainsi le premier Etat à le faire en plus de quarante ans. En juin 2008, dans l'affaire Kennedy c. Louisiane, la Cour suprême américaine a jugé que la peine de mort ne peut pas être infligée pour un crime contre une autre personne n'ayant pas entraîné la mort. Les tribunaux américains ont prononcé 110 nouvelles condamnations à mort en 2007, le nombre le plus bas depuis que la peine capitale a été rétablie en 1976.

De janvier à octobre 2008, quatre prisonniers ont été acquittés et libérés du couloir de la mort, portant à 130 le nombre de prisonniers condamnés à mort libérés depuis 1973 après qu'ils aient été reconnus innocents.

L'année 2008 a été marquée par un revers pour les non ressortissants condamnés à mort sans être autorisés à contacter leurs représentants consulaires comme l'exige la Convention de Vienne sur les Relations consulaires. Le 5 août, le Texas a exécuté le ressortissant mexicain José Medellin en dépit d'une décision de la Cour internationale de justice (CIJ) ordonnant aux Etats-Unis de réexaminer ce type de cas, et d'une directive du Président George W. Bush pour que les tribunaux d'Etat se conforment à la décision de la CIJ.

Prison à vie pour les mineurs sans remise de peine

En 2008, Human Rights Watch a revu à la hausse son évaluation du nombre de personnes aux Etats-Unis condamnées à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle pour des crimes commis avant l'âge de dix-huit ans, portant ce nombre à 2502 personnes. Nous avons aussi vérifié qu'il n'y a de délinquants mineurs purgeant cette peine nulle part ailleurs dans le monde.

Les efforts pour en finir avec la prison à vie pour les mineurs sans possibilité de remise de peine aux Etats-Unis se poursuivent avec la réforme de la législation en attente de décision au Congrès et dans des instances législatives des Etats de Californie, Floride, Louisiane, Michigan et Nebraska. En 2008, le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale a recommandé que les Etats-Unis, « à la lumière de l'application disproportionnée » de la condamnation aux minorités raciales, ne l'utilisent plus pour des crimes commis par des individus de moins de dix-huit ans et réexaminent la situation des personnes purgeant actuellement de telles peines.

Incarcération

Un rapport de juin 2008 du Bureau des statistiques judiciaires du Département américain de la Justice a constaté que la population carcérale avait atteint le chiffre record de 2,3 millions de personnes, soit 762 détenus pour 100 000 habitants. Les Etats-Unis ont toujours la plus grande population carcérale et le taux d'incarcération par habitant le plus élevé au monde.

Les membres des minorités raciales et ethniques encourent de façon disproportionnée le risque d'incarcération. Le pourcentage des hommes noirs incarcérés est six fois plus élevé que celui des hommes blancs, et 10,7 pour cent de tous les hommes noirs de 30 à 34 ans sont derrière les barreaux quotidiennement. Un rapport de 2008 de Human Rights Watch, « Targeting Blacks » (« Les noirs pris pour cibles »), a constaté que les disparités raciales sont encore pires pour les auteurs d'infractions liées aux stupéfiants, un homme noir ayant presque douze fois plus de probabilité qu'un homme blanc d'être emprisonné à la suite d'une première condamnation liée aux stupéfiants, en dépit de taux similaires de consommation de stupéfiants parmi les noirs et les blancs.

En mars 2008, le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale s'est inquiété « des disparités raciales persistantes dans le système de justice pénale ... en particulier du nombre anormalement élevé de personnes appartenant à des minorités raciales, ethniques et nationales au sein de la population carcérale », et a recommandé aux Etats-Unis de « prendre toutes les mesures appropriées pour garantir le droit de chacun à un traitement égal devant les tribunaux, et tout autre organe d'administration de la justice ».

Un prisonnier d'Etat sur cinq aux Etats-Unis est incarcéré pour un délit relatif aux stupéfiants. De nombreux détenus, en particulier ceux qui ont été condamnés pour possession de drogue ou atteinte à la propriété, ont un passé d'utilisation de drogue et de dépendance. Les maladies liées à la consommation de drogues injectables telles que le VIH/SIDA et l'hépatite C sont bien plus fréquentes parmi les personnes incarcérées que dans la population dans son ensemble. Pourtant, les prisons et centres de détention américains demeurent résistants, voire hostiles, à des pratiques éprouvées telles que la distribution de préservatifs ou le traitement par la méthadone, qui ont démontré qu'ils réduisaient la transmission du VIH, de l'hépatite C et des maladies sexuellement transmissibles, ainsi que la dépendance à la drogue.

Le Prison Litigation Reform Act (PLRA) (Acte de réforme des contentieux en prison) de 1996 institue une série d'obstacles pour les prisonniers qui cherchent à revendiquer leurs droits devant un tribunal. Ces restrictions -qui s'appliquent seulement aux prisonniers- ont entraîné le rejet de dépôts de plainte pour des allégations d'abus sexuels et autres atteintes importantes à la personne. En novembre 2007, un projet de loi a été présenté à la Chambre des représentants pour amender ou abroger certaines dispositions du PLRA.

Châtiments corporels dans les écoles publiques

Selon le ministère de l'Education des Etats-Unis, plus de 200 000 élèves d'écoles publiques ont reçu des châtiments corporels une fois au moins au cours de l'année scolaire 2006-2007. Les châtiments corporels -qui prennent en général la forme d'un coup ou deux sur les fesses avec une palette en bois- sont légaux dans les écoles publiques de 21 Etats. Un rapport de 2008 de Human Rights Watch, « A Violent Education » (« Une éducation violente »), étudie les châtiments corporels au Texas et dans le Mississippi, deux des Etats où ils sont le plus fréquents. Le rapport a constaté que les châtiments corporels peuvent entraîner des blessures graves et qu'ils sont employés de façon disproportionnée contre les élèves noirs et ceux de l'éducation spécialisée.

Droits des femmes

Les luttes pour obtenir l'égalité salariale pour les femmes se sont poursuivies en 2008, les membres du Congrès s'employant à rejeter une décision de 2007 de la Cour suprême qui interprétait étroitement le statut des limitations aux dépôts de plaintes pour discrimination des salaires contre les employeurs. En dépit d'une large mobilisation des groupes de défense des droits des femmes, la Lilly Ledbetter Fair Pay Act (loi Lilly Ledbetter pour un salaire équitable) n'a pas été votée par le Sénat après avoir été approuvée par la Chambre des représentants. Toutefois, l'écart des salaires entre les hommes et les femmes a atteint son plus bas historique, les femmes gagnant 78 cents pour chaque dollar gagné par les hommes.

L'aide internationale américaine est encore entravée par des restrictions qui nuisent aux droits des femmes en matière de sexualité et de reproduction. Le Congrès a à nouveau autorisé en 2008 le Plan d'aide d'urgence du Président pour la lutte contre le SIDA et l'a prorogé de cinq ans, mais a continué à attribuer les fonds aux programmes prônant seulement l'abstinence, et a conservé l'exigence pour les organisations d'affirmer leur opposition à la prostitution avant de recevoir des fonds américains. Pareillement, la « règle du bâillon » continue à interdire aux organisations qui reçoivent des fonds américains de pratiquer des avortements, de conseiller les femmes à propos de l'avortement, ou de défendre le droit à l'avortement, même si aucun fond américain n'était utilisés pour ces activités.

Violence sexuelle

Aux Etats-Unis, de tous les crimes violents, le viol est celui qui présente les taux les plus bas en matière d'arrestation, de poursuites judiciaires et de condamnations. En 2008, Human Rights Watch a ouvert une enquête sur les mauvaises pratiques des autorités chargées de l'application de la loi en matière de conservation et de contrôle des preuves dans les affaires de viol. Lorsqu'elle signale un crime à caractère sexuel, une victime se voit demander de se soumettre à un examen dans les quatre à six heures qui suivent l'agression afin de recueillir les preuves ADN qui, si elles sont analysées, peuvent aider dans l'enquête criminelle. Mais le ministère de la Justice estime que jusqu'à 500 000 de ces kits de preuves de viol non analysées sont stockées dans les laboratoires criminels et les archives de la police dans tous les Etats-Unis. Dans la seule ville de Los Angeles, il y a plus de 7 300 kits de preuves de viol non analysés, et le retard s'accumule avec une trentaine de kits supplémentaires par mois.

Discrimination basée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre

Les lois américaines continuent de n'offrir aucune protection nationale contre la discrimination basée sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, que ce soit dans l'emploi ou d'autres domaines de la vie. Le Defense of Marriage Act (Loi relative à la défense du mariage), qui interdit au gouvernement fédéral de reconnaître les relations formées par des couples de même sexe, est toujours en vigueur. En 2008, la Cour suprême de Californie et celle du Connecticut se sont prononcées en faveur de l'égalité d'accès au mariage pour les couples de même sexe dans ces Etats, mais un référendum organisé au niveau de l'Etat en novembre a annulé la décision de la Californie. Le Uniting American Families Act (Loi relative à l'unification des familles américaines), qui autoriserait les relations formées entre citoyen américain et ressortissant étranger de même sexe de sorte qu'elles soient reconnues dans des buts d'immigration, n'a pas avancé au Congrès.

Droits des non-ressortissants

Il y a environ 38 millions de non-ressortissants vivant aux Etats-Unis, dont près de douze millions sont sans papiers. En 2008, cette population a rencontré des problèmes en matière de droits humains largement similaires à ceux des années précédentes.

Comme nous l'avons décrit en 2007 dans notre rapport, « Forced Apart » (« Séparés de force »), des immigrés légaux vivant aux Etats-Unis depuis des dizaines d'années, dont des résidents permanents légaux, sont expulsés sommairement en vertu de lois adoptées en 1996 s'ils ont été reconnus coupables d'un délit, même s'il s'agit d'un délit non-violent tel que le vol à l'étalage ou la possession de drogue en petite quantité. Au cours des procédures d'expulsion, les juges ne sont pas autorisés à apprécier la gravité d'une infraction commise par un non-ressortissant au regard de sa présence légale aux Etats-Unis, de ses relations familiales (même avec un conjoint citoyen américain et des enfants mineurs), de la propriété d'une entreprise, de sa contribution à l'impôt, de son service dans l'armée américaine ou de la probabilité de persécutions après son expulsion. En 2006, l'année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles, le nombre de non-ressortissants expulsés a encore augmenté, passant de 90 426 en 2005 à 95 752, et portant le nombre total de personnes expulsées en vertu de ces lois à 768 345.

En 2008, les services de l'immigration et des douanes (ICE) ont continué à se livrer à une pratique initiée en 2007 de descentes à grande échelle sur les lieux de travail à la recherche de travailleurs sans papiers. En août 2008, dans la plus importante opération de ce type de l'histoire des Etats-Unis, près de 600 non-ressortissants ont été arrêtés à Laurel, Mississippi.

En mai 2008 des agents de l'immigration ont également arrêté 389 travailleurs sans papiers dans une usine d'abattage et de boucherie à Postville, Iowa. Après les opérations, le procureur général de l'Iowa a déposé plus de 9 300 chefs d'accusations contre les propriétaires et directeurs de l'usine pour des violations du droit du travail telles que le travail des enfants et les longues journées de travail sans paiement d'heures supplémentaires. Les procureurs, toutefois, ont aussi menacé d'inculper les travailleurs -dont certains avaient utilisé de fausses cartes d'identité pour obtenir du travail- de vol aggravé d'identité, une accusation qui entraîne des peines lourdes et qui vise les personnes qui commettent un vol frauduleusement plutôt que des immigrés sans papiers à la recherche de travail.

Les Etats-Unis emprisonnent approximativement 300 000 non-ressortissants chaque année pour un coût annuel de 1,8 milliard US$, selon l'ICE. Ces non-ressortissants sont incarcérés dans 300 centres de détention environ : une vingtaine d'entre eux sont directement sous le contrôle de l'ICE, bien que certains soient gérés par des compagnies privées, et les autres sont des prisons locales et d'Etat qui ont un contrat avec l'ICE pour accueillir des détenus de l'ICE.

Le grand nombre de non-ressortissants détenus aux Etats-Unis soulève de multiples préoccupations en matière de droits humains. Dans un rapport de décembre 2007, « Chronic Indifference » (« Indifférence chronique »), nous avons constaté que l'ICE ne contrôle pas suffisamment les soins médicaux des détenus porteurs du VIH, et ne respecte pas les directives internationales ou nationales pour un traitement approprié du VIH. Les recherches de Human Rights Watch sur les soins médicaux des femmes dans les lieux de détention des services de l'immigration ont constaté un manque similaire de soins gynécologiques courants, de détection et de diagnostic du cancer du col de l'utérus et du sein, de services de planning familial, de soins pré- et post- natals, et de services pour les survivantes de violences sexuelles et sexistes.

Une série d'articles publiés dans le Washington Post en mai 2008 a révélé que trente non-ressortissants étaient morts en détention entre 2003 et 2008 à la suite d'actions entreprises ou non par le personnel médical.

Prenant une mesure positive, le Congrès a abrogé une loi vieille de quinze ans empêchant les non-ressortissants porteurs du VIH d'entrer aux Etats-Unis. Bien que le Président Bush ait signé cet amendement, au moment où nous écrivons l'administration n'a pas encore adopté les réglementations permettant d'appliquer pleinement l'abrogation de l'interdiction de voyager.

Guantanamo Bay, détention illimitée et commissions militaires

Bien que le Président Bush ait dit qu'il souhaitait la fermeture des installations de détention à Guantanamo Bay, 255 hommes s'y trouvent encore au moment où nous écrivons et aucune mesure pour fermer l'établissement n'est attendue avant la fin de l'administration Bush. La grande majorité de ces détenus sont emprisonnés depuis près de sept ans sans chef d'accusation. Plus de la moitié sont détenus dans des quartiers de haute sécurité où ils passent vingt-deux heures par jour dans de petites cellules sans lumière naturelle ni air frais, et peu de distractions.

En juin 2008, dans l'affaire Boumediene c. Bush, la Cour suprême a statué à contre une loi qui refusait aux détenus de Guantanamo le droit d'entamer des procédures légales fédérales d'habeas corpus pour remettre en cause la légalité de leur détention. Presque tous les détenus ont présenté des requêtes en habeas corpus, mais ces dossiers ont été retardés par une quantité de questions légales et de procédures, par exemple la question de savoir si les audiences pouvaient avoir lieu à huis clos.

Plus d'une vingtaine de détenus autorisés à être relâchés ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays d'origine étant donné la probabilité qu'ils soient soumis à la torture à leur retour. En octobre 2008, un tribunal fédéral a jugé que les Etats-Unis devaient libérer dix-sept Ouighours chinois détenus à Guantanamo et les transférer vers les Etats-Unis. Le gouvernement américain a reconnu que ces hommes ne représentaient pas de menace mais ne pouvaient pas être renvoyés en Chine parce qu'ils risquent d'y être persécutés. Une cour d'appel fédérale a prononcé l'ajournement de cette décision, et le sort de ces hommes n'était pas encore réglé au moment où nous écrivons.

Les Etats-Unis ont continué à rapatrier vers leur pays d'origine des détenus de Guantanamo sans évaluation sérieuse ou indépendante du risque de torture ou de mauvais traitements qu'ils encouraient à leur retour. Si certains détenus ont obtenu des ordonnances du tribunal exigeant qu'ils soient prévenus à l'avance de tout transfert, beaucoup de détenus ne disposent pas de telles ordonnances. Les Etats-Unis ont prétendu que les « assurances diplomatiques » ou promesses de traitement humain, fournies par le gouvernement du pays d'accueil, étaient une protection suffisante contre d'éventuels abus, en dépit de preuves accablantes du contraire.

Le gouvernement américain continue à détenir aux Etats-Unis Ali Saheh Kahlah al-Marri, de nationalité qatarie, comme « combattant ennemi » sans accusation ni procès. Al-Marri a été qualifié de combattant ennemi pour la première fois en 2003, quelques semaines à peine avant le début prévu de son procès pour fraude financière et fausses déclarations. En 2007, un collège de juges d'une cour d'appel fédérale a estimé que la détention d'al-Marri était illégale, mais l'ensemble des juges a annulé la décision. Al-Marri a fait appel de ce jugement devant la Cour suprême des Etats-Unis.

Pendant ce temps, l'administration continue à poursuivre les détenus de Guantanamo devant des commissions militaires qui ne présentent pas les garanties fondamentales de procès équitables. En mai 2008, le gouvernement américain a présenté des accusations auprès des commissions militaires, réclamant la peine de mort contre Khalid Sheikh Mohammed et quatre autres détenus accusés de responsabilité dans les attaques du 11 septembre. Tous les cinq ont été détenus dans des prisons secrètes de la CIA avant d'être transférés à Guantanamo, où ils auraient été soumis à des années de torture et autres mauvais traitements. Aucune date n'a été fixée pour leur procès. Les Etats-Unis ont aussi entamé des poursuites contre 15 autres détenus, dont Omar Khadr et Mohammed Jawad, qui étaient mineurs lorsqu'ils ont été amenés à Guantanamo, il y a près de sept ans.

Trois détenus seulement ont été condamnés par les commissions militaires au moment où nous écrivons. L'Australien David Hicks a été condamné après avoir reconnu sa culpabilité en mars 2007 et il est maintenant libre en Australie. Le premier procès d'une commission militaire s'est déroulé en juillet 2008 contre Salim Ahmed Hamdan, ancien chauffeur d'Oussama ben Laden. Hamdan a été acquitté du chef d'accusation de complot, inculpé pour avoir apporté un soutien matériel au terrorisme, et condamné à cinq ans et demi de prison incluant les cinq années qu'il a déjà effectuées. Comme elle l'a affirmé à propos de tous les détenus de Guantanamo, l'administration Bush soutient que Hamdan peut être détenu même après avoir purgé sa peine. En novembre 2008, Ali Hamza al Bahlul a été inculpé de terrorisme et condamné à la prison à vie.

Pratique de la torture

Au cours des trois dernières années, le Congrès et les tribunaux ont condamné l'autorisation par l'administration Bush de recourir à des méthodes d'interrogatoire qui s'apparentent à de la torture. En septembre 2006, le Pentagone a annoncé de nouvelles règles applicables à tous les interrogatoires effectués par les forces armées des Etats-Unis et il a désavoué des méthodes abusives, telles que la « baignoire » (« waterboarding », ou simulacre de noyade), la nudité forcée et l'exposition à des températures glaciales. En février 2008, le Congrès a adopté une législation ordonnant à la CIA d'adhérer à ces mêmes règles, mais le Président Bush a opposé son veto.

Prisons secrètes de la CIA

En avril 2008, le Département de la Défense a annoncé le transfert à Guantanamo d'un prisonnier préalablement détenu par la CIA, laissant supposer que les prisons secrètes de la CIA étaient toujours opérationnelles à ce moment-là. Vingt à trente anciens détenus de la CIA restent « disparus », sans que l'on sache où ils se trouvent. On pense que nombre d'entre eux ont été illégalement remis à des pays comme la Syrie, la Libye, le Pakistan et l'Algérie.

Refus de protection des réfugiés

Le droit américain permet aux autorités de refuser la protection du statut de réfugié aux personnes dont elles estiment qu'elles ont été associées à certains groupes armés ou qu'elles leur ont fourni un « soutien matériel ». Les termes vagues de la loi ont conduit les autorités à refuser leurs droits à des personnes qui répondent à la définition de réfugié au regard du droit international, par exemple des victimes de viol réduites en esclavage par des groupes rebelles. En janvier 2008, le Congrès a adopté une législation qui a donné à l'administration un pouvoir dérogatoire dans certains cas, mais l'exercice de cette appréciation a été soigneusement ralenti.

Poursuites judiciaires nationales d'actes de torture commis à l'étranger

Faisant un pas positif, le ministère de la Justice a tenu son premier procès en vertu d'une loi de 1994 autorisant les tribunaux à juger des actes de torture commis à l'étranger par des citoyens américains ou par toute personne présente aux Etats-Unis. Un jury de Miami en octobre 2008 a reconnu coupable Charles « Chuckie » Taylor, Jr., fils de l'ancien président libérien et citoyen américain, de plusieurs chefs d'accusation de torture pour des crimes commis par l'unité militaire d'élite qu'il commandait au Liberia de 1997 à 2003.

Acteurs internationaux clés

A la fin de sa visite en juin 2008, le rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a appelé les Etats-Unis à améliorer leur système judiciaire militaire et à garantir que la peine de mort est appliquée équitablement et sans discrimination raciale. Le rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée a exprimé son inquiétude relative à la ségrégation raciale résidentielle et au mauvais état de l'éducation publique après sa visite à la mi-2008.

Bien que l'Union européenne ait appelé les Etats-Unis à fermer le centre de détention de Guantanamo, elle n'a pas ouvertement critiqué les commissions militaires ni formulé de propositions concrètes quant au jugement ou à la libération des détenus de Guantanamo. Par contre, l'UE et ses Etats membres sont intervenus pour tenter d'empêcher des exécutions dans de nombreux cas de peines de mort prononcées aux Etats-Unis.