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CPI : Assurer l’égalité de l’accès des victimes à la justice

Les gouvernements présents à la réunion annuelle doivent soutenir le mandat international de la Cour

Des représentants des États Parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale participaient à la 17ème session de l'Assemblée des États Parties à la CPI à La Haye, aux Pays-Bas, en décembre 2018. © 2018 Syd Boyd/Coalition pour la Cour pénale internationale

(La Haye) – Les pays membres de la Cour pénale internationale (CPI) devraient s’engager, lors de leur réunion annuelle, à fournir un soutien financier, politique et pratique constant à la justice, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. La 21ème session de l’Assemblée des États parties de la CPI se tiendra à La Haye du 5 au 10 décembre 2022.

Vingt ans après la création de la Cour, l’ouverture d’une enquête en Ukraine par le Procureur de la CPI suite à l’invasion à grande échelle de la Russie en février dernier a renouvelé l’attention portée au travail accompli par la Cour pour rendre justice aux victimes de crimes internationaux graves. La question de la lutte contre l’impunité revenant sur le devant de la scène, les pays membres pourront, par les décisions qu’ils prendront lors de cette session, notamment en déterminant le budget annuel de la Cour, s’assurer que cette dernière est armée pour travailler sur l’ensemble des questions relatives à son mandat, en évitant les perceptions préjudiciables de deux poids, deux mesures, dans l’accès des victimes à la justice.

« Les crimes internationaux graves commis en Ukraine et ailleurs démontrent une fois de plus l’importance de la promesse de justice faite par la CPI et du rôle crucial joué par la Cour », a déclaré Liz Evenson, directrice du programme Justice internationale à Human Rights Watch. « Pour les victimes et les survivants du monde entier qui cherchent à obtenir justice auprès de la CPI, les pays membres devraient concrétiser leurs engagements avec le budget dont la Cour a besoin pour faire son travail. »

Les années de maintien des augmentations budgétaires au strict minimum, avec certains pays membres insistant sur une approche de croissance nominale zéro, ont privé la Cour des ressources dont elle a besoin pour soutenir son travail dans les nombreuses situations qu’elle s’est engagée à traiter.

En prévision de la session, Human Rights Watch a publié un rapport de 30 pages qui formule des recommandations pour les pays membres de la CPI. Il existe un écart important entre la charge de travail de la Cour et son budget annuel, fixé à 151 millions d’euros (156 millions de dollars des États-Unis) en 2022. En 2022, outre l’Ukraine, le Procureur a cherché à faire progresser les enquêtes aux Philippines et au Venezuela, et a été autorisé à reprendre une enquête sur l’Afghanistan.

La Cour a de plus délivré trois mandats d’arrêt en Géorgie, et le Procureur a déposé des demandes de mandats d’arrêt supplémentaires dans le cadre de la situation en Libye, tout en cherchant à faire aboutir pour la première fois les procédures préliminaires in absentia, contre Joseph Kony, chef du groupe rebelle ougandais de l’Armée de résistance du Seigneur.

Au début de l’année 2022, le Procureur de la CPI a lancé un appel aux contributions volontaires et à du personnel détaché pour soutenir le travail de son bureau. De nombreux pays membres de la CPI ont apporté leur soutien avec enthousiasme, mais cela a surtout permis de constater que la Cour ne disposait pas des ressources nécessaires dans son budget ordinaire pour remplir son mandat. Certains pays ont publiquement lié leurs contributions au soutien à l’enquête sur l’Ukraine, bien que l’affectation des contributions à des fins précises ne soit pas autorisée dans le cadre réglementaire de la Cour. Pour que la justice rendue par la Cour reste légitime, il est important qu’elle ne soit pas perçue comme étant guidée par les préférences des pays membres, ni comme étant trop sélective en raison de contraintes de ressources, a déclaré Human Rights Watch.

Lors de la réunion annuelle, les pays membres aborderont aussi l’examen approfondi de la performance de la Cour, réalisé en 2020 par des experts indépendants. Depuis que les experts ont rendu leurs conclusions en septembre 2020, les pays membres et la Cour, ainsi que des groupes de la société civile, ont évalué les quelques 400 recommandations qu’ils ont formulées.

Alors que le travail d’évaluation de ces recommandations touche à sa fin, leur mise en œuvre se poursuivra très probablement pendant plusieurs années. Pour tirer parti des progrès réalisés à ce jour, les pays membres devraient, lors de la prochaine session, renouveler pour une période limitée le mandat de l’organe de l’Assemblée des États parties chargé de superviser l’examen, a déclaré Human Rights Watch. Cet organe, connu sous le nom de Mécanisme d’examen, devrait élaborer un plan pour s’assurer que l’administration de la justice par la Cour reste à l’ordre du jour de l’Assemblée, tout en protégeant l’indépendance des procureurs et des juges et en permettant la participation des groupes de la société civile.

En 2022, les pays membres ont aussi adopté une stratégie visant à mettre en œuvre la recommandation du Groupe d’experts sur la lutte contre la politisation de l’opposition au travail de la CPI, en tirant les leçons de la lutte contre les sanctions punitives prises à l’encontre de la Cour par la précédente administration américaine. Pour traduire cette stratégie en action, les pays membres devraient se prononcer pendant la session de l’assemblée sur l’importance de tirer des exemples des bonnes pratiques passées afin de contrecarrer les attaques qui visent la Cour et d’utiliser cette stratégie pour répondre aux attaques contre les défenseurs des droits humains. Le gouvernement israélien a interdit six importantes organisations de la société civile palestinienne, dont plusieurs transmettaient des informations à la CPI sur des crimes présumés commis par les forces israéliennes, et a perquisitionné leurs bureaux. Ces actions ont été condamnées au niveau international.

Plusieurs élections importantes de responsables de la CPI sont prévues en 2023. Les pays membres éliront six nouveaux juges, tandis que les juges de la Cour éliront son prochain greffier. Les pays membres ont convenu de mettre en place en 2021 un processus permanent de vérification de la « haute moralité » de tous les responsables élus de la CPI d’ici leur session de 2023. Un processus de diligence raisonnable visant à s’assurer que les candidats possèdent une « haute moralité » a été mis en place pour l’élection du Greffier, et lors de cette session, les pays membres devraient s’assurer qu’ils ont avancé dans la discussion relative à un processus spécifique de vérification des antécédents pour les prochaines élections judiciaires en 2023, a déclaré Human Rights Watch.

« La CPI ne pourra jamais faire tout ce qu’elle a à faire, mais ces dernières années, l’insuffisance de ses ressources a considérablement réduit les contributions de la Cour à la justice », a déclaré Liz Evenson. « Cette année, le message politique le plus fort que les pays membres de la CPI peuvent envoyer pour s’assurer que personne n’est au-dessus des lois est de donner à la Cour le budget dont elle a besoin pour poursuivre pleinement son mandat à l’échelle mondiale. »

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