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Centrafrique : Des images satellite révèlent la destruction systématique des quartiers musulmans

Le 27 avril 2014, des soldats du maintien de la paix africains lourdement armés ont évacué les 1 300 musulmans se trouvant encore dans le quartier PK12 de Bangui, capitale de la République centrafricaine déchirée par la guerre. Des foules ont aussitôt entrepris le pillage et la destruction de la mosquée, des boutiques et des maisons du quartier, prolongeant ainsi une tendance désormais trop bien connue.

Les images satellite enregistrées au-dessus de la capitale offrent un sombre tableau de l'ampleur de la destruction subie depuis janvier 2014. Ainsi que l’illustre l’image à droite, Human Rights Watch a identifié les sites des décombres de plus de 4 000 maisons, commerces et mosquées détruits pendant plusieurs vagues de violence organisée, de pillage systématique et d'incendies criminels durant cette période.

Les dommages infligés aux bâtiments dans le centre de Bangui sont fortement concentrés dans les quartiers de Kilomètre 5, Kokoro, Miskine et Bouca, qui étaient tous habités par une majorité de musulmans. Dans le nord de la capitale, près de 2 000 bâtiments pour la plupart résidentiels ont été vidés et dépouillés de leurs toits, et certains des matériaux volés ont été revendus dans les quartiers à proximité de PK12 et PK13. Les images satellite ci-dessous, juxtaposant des vues aériennes en octobre 2013 et en mars 2014, montrent l'étendue de la destruction.

IMAGES SATELLITE

Quartier à Bangui
Veuillez déplacer le curseur pour comparer les images avant et après la violence.

Les résidents musulmans occupaient des abris temporaires à proximité des quartiers de PK12 et Kilomètre 5 en raison du risque d’embuscade auquel étaient confrontés les musulmans fuyant le long des routes principales menant hors de la capitale. Mais désormais, la majorité de ces résidents ont été escortés au-delà de la ville, un grand nombre d’entre eux se dirigeant vers les camps de réfugiés au Cameroun ou au Tchad.

Bien que des forces de maintien de la paix internationales et des soldats tchadiens aient aidé à évacuer certains des 120 000 musulmans qui ont cherché à fuir la capitale au cours des quatre derniers mois, les troupes étrangères ont été incapables de protéger de façon adéquate les quartiers musulmans contre les attaque soutenues, le pillage massif et la destruction de milliers de maisons, de commerces et de mosquées.

Le gouvernement intérimaire, dirigé par la présidente par intérim Catherine Samba-Panza, n'a pas la capacité policière ou militaire lui permettant d’assurer une protection efficace et il n'a pas fait preuve d’une grande volonté politique de lutter contre la violence antimusulmane.

Bangui est désormais une capitale presque entièrement vidée de sa population musulmane, et des quartiers entiers sont en ruines. Malgré la présence des forces internationales, plus de 100 000 résidents musulmans ont fui la République centrafricaine depuis la fin de 2013.

Les « anti-balaka » , qui sont principalement chrétiens et animistes, ont lancé des attaques brutales contre la population musulmane du pays depuis août 2013, en réaction à des violations massives des droits humains commises par la Séléka, un groupe rebelle à majorité musulmane qui avait saisi le pouvoir en mars 2013 avant de devoir l’abandonner en janvier 2014 à l’issue d’un règne meurtrier.

Ainsi que Human Rights Watch l’a documenté sur le terrain, les violences anti-balaka ont contraint les résidents musulmans à chercher refuge dans des camps provisoires, ont pillé leurs foyers et leurs commerces, laissant souvent derrière eux des graffiti susceptibles de les incriminer un jour dans ces actions criminelles dont certaines pourraient constituer des crimes contre l'humanité.

Ce conflit représente un énorme défi, tant pour les habitants de la République centrafricaine que pour la communauté internationale, s’agissant de permettre le retour de la population musulmane, d’œuvrer pour la réconciliation des communautés chrétiennes et musulmanes, de reconstruire les quartiers détruits, de rétablir une autorité politique effective, et de traduire en justice les responsables des nombreux crimes.

Il s’agit donc d’une tâche majeure pour la mission de maintien de la paix des Nations Unies qui a été récemment approuvée par le Conseil de sécurité. La force de l'ONU devrait tirer les leçons des limites de ses prédécesseurs, et agir avec audace pour commencer à préparer le retour des centaines de milliers de personnes qui ont été contraintes, au cours d'une année catastrophique, de fuir leurs maisons.

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