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Yémen : Deux ans après la prise de fonction du nouveau gouvernement, aucune obligation de rendre des comptes

L'ancien président et son entourage conservent l'immunité

(Sanaa, le 27 janvier 2014) Le gouvernement du Yémen devrait créer une commission d'enquête sur de graves violations de droits humains commises par le gouvernement précédent et engager des poursuites contre les responsables, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui dans son Rapport mondial 2014. Le gouvernement devrait également adopter une loi pour mettre fin au mariage des enfants, et réformer les lois qui sont discriminatoires à l'égard des femmes.

En 2012, le parlement du Yémen a accordé l'immunité contre des poursuites à l'ancien président Ali Abdullah Saleh, qui était au pouvoir depuis 33 ans, et à ses collaborateurs. Le Président Abdu Rabu Mansour Hadi n'a pas donné suite aux promesses d'adopter une loi sur la justice transitionnelle, de constituer une commission d'enquête sur les abus commis par le gouvernement lors du soulèvement de 2011, ou de créer d'autres mécanismes pour assurer l’obligation de rendre des comptes pour les violations passées ou pour empêcher que de nouvelles violations ne se produisent à l’avenir.

« Le gouvernement doit affronter son passé, à la fois pour rendre justice aux victimes et pour s'assurer que les abus cessent une fois pour toutes », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen Orient à Human Rights Watch. «Cela fait maintenant deux ans que l'administration Hadi ignore les revendications de justice des personnes lésées par le gouvernement de Saleh. »

Dans son Rapport mondial 2014 (24ème rapport annuel, dont la version anglaise compte 667 pages), Human Rights Watch résume les pratiques en matière de droits humains dans plus de 90 pays. Les massacres massifs de civils en Syrie ont suscité un sentiment d’horreur, mais peu d’actions ont été engagées par les leaders mondiaux pour y mettre fin, a indiqué Human Rights Watch. La doctrine de la « responsabilité de protéger », qui a connu un regain de popularité, semble avoir empêché des atrocités de masse dans certains cas en Afrique. Les majorités au pouvoir en Égypte et dans d’autres pays ont étouffé les voix dissidentes, et ont réprimé les droits des minorités. Le rapport examine aussi les révélations d’Edward Snowden sur les programmes de surveillance américains, et leurs répercussions à l’échelle internationale.

Un dialogue national de six mois a commencé en mars afin de formuler des recommandations quant à la rédaction d'une nouvelle constitution. Le processus a impliqué 565 représentants de partis politiques et de divers segments de la société, notamment les femmes et les jeunes. Des groupes de travail sur la justice transitionnelle et sur les droits et libertés ont recommandé des améliorations dans la protection des droits humains. Le dialogue s'est poursuivi au-delà du calendrier de six mois.

La liberté des médias s’est considérablement améliorée depuis que le président Hadi a pris ses fonctions en février 2012, mais il y a eu une hausse du nombre d’agressions commises par les forces de sécurité et par divers groupes armés à l’encontre de journalistes et de blogueurs. L'échec du gouvernement quant à enquêter sur ces attaques et exiger que les responsables rendent des comptes a remis en question l'engagement du gouvernement à promouvoir les droits humains, selon Human Rights Watch.

Le groupe armé Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQAP) a effectué des dizaines d'attentats meurtriers et d’autres attaques contre les forces de sécurité yéménites en 2013. De janvier à novembre, les États-Unis ont mené au moins 23 attaques de drones contre les membres présumés du groupe lié à Al-Qaïda, tuant entre 95 et 162 personnes, ont signalé des groupes de recherche qui suivent les impacts de ces attques. Mais aucun gouvernement n’a signalé ou confirmé le nombre exact de victimes civiles.

Les femmes subissent de graves discriminations dans la législation et dans la pratique au Yémen, selon Human Rights Watch. Les femmes ne sont pas autorisées à se marier sans la permission de leur tuteur, habituellement un père ou un frère. Elles se voient refuser l'égalité des droits au divorce, à l'héritage et à la garde des enfants, et le manque de protection juridique les laisse exposées à la violence domestique et sexuelle.

Le mariage des enfants reste très répandu. Au cours de 2013, des médecins et les médias ont rapporté la mort de filles mariées dès l'âge de huit ans suite à des rapports sexuels ou à l'accouchement. Le Yémen n'a pas légiféré sur l’âge minimum du mariage, bien que le Groupe de travail sur les droits et les libertés du Dialogue national ait recommandé en novembre de fixer l'âge minimum à 18 ans.

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