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Sénégal : Des milliers de personnes ont un besoin urgent de soulagement de la douleur

70 000 personnes souffrent chaque année en raison du manque de traitement

(Dakar) - Des dizaines de milliers de patients au Sénégal souffrent de douleurs atroces chaque année sans soulagement, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui. Des réglementations gouvernementales inutilement restrictives et une mauvaise formation des travailleurs de la santé entravent l’efficacité de leur traitement médical.

Le rapport de 96 pages, intitulé « Abandonnés dans l’agonie : Le cancer et la lutte pour le traitement de la douleur au Sénégal », a constaté que 70 000 Sénégalais ont besoin chaque année de ce que l'on appelle les soins palliatifs pour soulager les symptômes liés aux maladies chroniques et potentiellement mortelles. La morphine est un médicament essentiel et peu coûteux pour le traitement de la douleur sévère, mais le Sénégal importe seulement environ un kilogramme de morphine chaque année – assez pour traiter environ 200 patients atteints de cancer. Human Rights Watch a également constaté que la morphine n'est pas disponible en dehors de Dakar, la capitale du Sénégal. De fréquentes pénuries limitent également l'accès aux médicaments dans la capitale.

« Plusieurs milliers de patients atteints de cancer ainsi que d'autres Sénégalais subissent une agonie inutile parce qu'ils ne peuvent pas obtenir de morphine pour traiter leur douleur », a déclaré Angela Chung, titulaire d’une bourse auprès de la division Santé et droits humains à Human Rights Watch. « Les autorités sénégalaises devraient se demander si elles souhaiteraient que leurs propres parents ou enfants – ou elles-mêmes – subissent une telle douleur alors qu’il existe un moyen peu coûteux et efficace de la soulager. »

Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de plus de 170 patients, membres des familles et du personnel médical, ainsi que des autorités, au sujet de ce problème. De nombreux patients ont indiqué qu'ils se sentaient trop mal même pour être interrogés.

« Je souffre 24 heures sur 24 », a déclaré un homme de 47 ans à Dakar, atteint d’un cancer de la prostate et souffrant en période de pénurie de morphine. « Vous ne pouvez pas imaginer la douleur que je ressens dans tout le corps. C'est dans mes os. Je ne peux pas vivre sans mes médicaments. J'essaie de supporter la douleur pendant 2 ou 3 jours, et quand je ne peux pas la supporter, je prends une pilule ... Je suis allé à toutes les pharmacies et ils n’en vendent pas. »

La douleur sévère et d'autres symptômes débilitants sont fréquents chez les patients atteints de cancer, du VIH et d'autres maladies potentiellement mortelles, en particulier en phase terminale. Les maladies non transmissibles, telles que le cancer, les maladies cardiaques et pulmonaires, et le diabète représentent environ 30 pour cent des décès au Sénégal. Le cancer, qui est souvent diagnostiqué tardivement au Sénégal, tue plus de Sénégalais que le VIH/SIDA, la tuberculose et la malaria réunis.

Le rapport a identifié quatre principaux obstacles à l'amélioration du traitement de la douleur et des soins palliatifs :

·        Le manque de formation. La plupart des médecins au Sénégal ne savent pas comment évaluer ou traiter la douleur sévère parce que le gouvernement n'a pas inclus d'instructions sur le sujet dans les programmes d’études médicaux ou infirmiers.

·        Le manque d’intégration du traitement de la douleur dans les services de santé. Il n'existe pas de plan national pour le cancer, la plupart des autres maladies non transmissibles, ou pour les soins palliatifs. Les soins du cancer et le traitement de la douleur sont centralisés uniquement à Dakar.

·        Un mauvais approvisionnement en médicaments. Les hôpitaux sénégalais s'appuient sur la Pharmacie nationale d'approvisionnement (PNA) pour leur approvisionnement en médicaments essentiels. Alors que les pilules de morphine sont sur la liste des médicaments essentiels du Sénégal, la Pharmacie nationale n'a pas encore commencé à les importer.

·        La réglementation restrictive des médicaments. La réglementation des médicaments du Sénégal est indûment restrictive, ce qui rend très difficile pour les patients, en particulier ceux qui vent dans des zones rurales, d'obtenir des médicaments.

À l'heure actuelle, les hôpitaux ne peuvent obtenir de la morphine qu’en l’important eux-mêmes, un processus très complexe que la plupart des hôpitaux sont incapables ou peu désireux d'entreprendre. Le sirop de morphine, qui est essentiel aux soins palliatifs pédiatriques, ne figure pas sur la liste des médicaments essentiels du Sénégal. Les règles officielles limitent les prescriptions de morphine à une par semaine. En conséquence, les patients ou les membres de leur famille doivent se rendre à Dakar une fois par semaine pour obtenir leurs médicaments. Ceci est pratiquement impossible pour la plupart des patients vivant dans les zones rurales.

Le gouvernement sénégalais a ajouté les pilules de morphine par voie orale à sa liste des médicaments essentiels pour 2013 et la Pharmacie nationale estime qu'elle commencera à importer la morphine à la fin de 2013. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour assurer un accès public plus large à la morphine par voie orale sous forme de pilule ou sous forme liquide, a déclaré Human Rights Watch.

Refuser l'accès au soulagement de la douleur peut entraîner une violation du droit à la santé en vertu du droit international et de la Constitution sénégalaise, ainsi qu'une violation des interdictions strictes contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants, a ajouté Human Rights Watch.

Le gouvernement du Sénégal devrait abroger les restrictions indûment contraignantes, former le personnel médical à l'utilisation des médicaments pour soulager la douleur et assurer l'accessibilité des médicaments qui apportent un soulagement à la douleur, selon Human Rights Watch.

« Qui aurait envie de voir une personne se tordre de douleur quand il existe un moyen de soulager sa douleur », a conclu Angela Chung. « Pour les patients atteints de cancer et d'autres patients au Sénégal ayant un besoin urgent de soulagement, les médicaments contre la douleur peuvent et devraient faire partie intégrante des soins curatifs comme des soins de fin de vie. »

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Tweet (nov. 2018)

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