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Des juristes renommés critiquent la décision de la CEDEAO du 18 novembre 2010

"Hissein Habré contre République du Sénégal": Un arrêt surprenant

Introduction

Dans son arrêt du 18 novembre 2010, la Cour de Justice de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a décidé que Hissène Habré ne pouvait être jugé au Sénégal que par un tribunal ‘ad hoc' et que les cours et tribunaux ordinaires du Sénégal étaient sans juridiction à son égard. Selon la Cour « toute autre entreprise du Sénégal en dehors d'un tel cadre violerait, d'une part, le principe de la non-rétroactivité de la loi pénale (...) et d'autre part, ferait obstruction au respect du principe de l'impunité (sic) consacré par les (...) textes internationaux».

Cette décision repose sur une prémisse surprenante, à savoir que seul un tribunal ad hoc pourrait appliquer le droit pénal de manière rétroactive, contrairement aux juridictions ordinaires.

Bien que les motifs de l'arrêt soient lapidaires et ne rendent pas compte de manière transparente du raisonnement suivi par la Cour, les juristes parmi lequel nous citons William Schabas de réputation mondiale, démontrent avec succès que l'arrêt se fonde sur une interprétation erronée du principe de non-rétroactivité de la loi pénale et du principe ‘nullum crimen sine lege'. Ils critiquent par ailleurs l'arrêt en ce qu'il reconnaît l'existence d'une coutume selon laquelle seul un tribunal ‘ad hoc' pourrait juger Hissène Habré pour les faits qui lui sont reprochés.

Dans son blog, William Schabas - le Président de la section irlandaise du International Law Association - qualifie de « bizarre » la décision de la Cour de Justice.[i] Une contribution signée par Valentina Spiga, parue dans le célèbre Journal of International Criminal Justice dirigé par le professeur Antonio Cassese, adopte un ton encore plus cassant là ou elle conclut que le raisonnement de la Cour de Justice est « inconsistant », que la Cour de Justice interprète de manière erronée certains principes du droit pénal et - pire encore - que le raisonnement de la Cour a été inspiré par des « considérations politiques ».[ii] Enfin, dans l'INSIGHT de l'American Society of International Law, un juriste du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'Homme  qualifie la décision « d'ambigüe », et note que « l'affirmation d'une coutume [internationale qui exige la création d'une juridiction ad hoc]  est difficile à harmoniser avec toute une série de cas dans lequel les juridictions nationales ont rétroactivement exercé leur compétence sur les crimes internationaux ». D'après ce juriste, suite à cette décision,  une solution envisageable serait la création de Chambres extraordinaires au sein des tribunaux sénégalais composées de juges sénégalais et de juges nommés par la communauté internationale ou l'Union Africaine, tel que proposé par l'Union Africaine - mais rejeté par le Président Wade.[iii]

Ci-dessous sont exposées les principales critiques de l'arrêt de la CEDEAO.

Sur le principe nullum crimen sine lege ou « le droit à la légalité des délits et des peines »

La CEDEAO rappelle que le principe nullum crimen sine lege n'est pas violé en cas de condamnation pour des actes qui bien qu'ils ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national au moment où ils ont été commis, étaient tenus pour criminels d'après les principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations au moment où ils ont été commis.[iv] La CEDEAO se réfère explicitement à l'article 15 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques qui énonce:

1. «Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international au moment où elles ont été commises. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise. Si postérieurement à cette infraction, la loi prévoit l'application d'une peine plus légère, le délinquant doit en bénéficier.

2. Rien dans le présent article ne s'oppose au jugement ou à la condamnation de tout individu en      raison d'actes ou omissions qui, au moment où ils ont été commis, étaient tenus pour criminels,      d'après les principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations».

Selon la CEDEAO, la ratio legis  de cette disposition est d'éviter l'impunité des actes considérés délictueux par le droit international. Ainsi, le paragraphe 2 de l'article 15 du Pacte prévoit la possibilité de juger ou de condamner des individus en raison des violations graves des droits les plus fondamentaux même lorsque ces actes ne constituaient pas une infraction d'après le droit national au moment où ils ont été commis.[v]

Sur ce point, les juristes qui ont commenté l'arrêt approuvent l'analyse de la CEDEAO du principe nullum crimen sine lege tel qu'établi dans l'article 15(1) du Pacte. Effectivement, disent-ils, selon l'article 15(1) du Pacte, des individus peuvent être poursuivis pour une action ou une omission qui constituait un acte délictueux d'après le droit national ou international au moment où elle a été commise. Dès lors, si un acte n'est pas répréhensible d'après le droit national mais l'est bien selon le droit international,  cet acte peut être poursuivi devant les cours et tribunaux nationaux à condition toutefois que la cour ou le tribunal saisi ait au moment des poursuites une telle compétence de juridiction.[vi] 

Les auteurs approuvent également l'interprétation donnée par la CEDEAO de l'article 15(2) qui permet que le jugement et la condamnation de tout individu en raison d'actes ou omissions qui, au moment où ils ont été commis, constituaient des infractions au regard des  principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations. Cette disposition constitue en effet un fondement alternatif dans l'hypothèse où ni le droit national ni le droit international (coutumier ou traité) ne viserait de manière explicite certains actes.[vii]

Sur la non-rétroactivité du droit pénal

Pour rappel, en 2007, le Sénégal a adapté sa législation aux règles et normes du Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale et incorporé dans le code pénal le crime de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité.[viii] Le législateur a en outre donné aux cours et tribunaux sénégalais une compétence universelle en ce qui concerne des crimes internationaux et la torture, permettant de réprimer les infractions graves telles que définies par les conventions de Genève de 1949 et leur protocole I et par d'autres instruments juridiques internationaux de même que les actes de terrorisme, indépendamment du lieu ou l'infraction a été commise, de la nationalité de son auteur pour peu que celui-ci ou la victime réside au Sénégal. [ix] En 2008, la Constitution sénégalaise a consacré le principe nullum crimen sine lege tel qu'établi dans l'article 15 de la Convention Internationale sur les droits civils et politiques.[x]

L'arrêt de la CEDEAO du 18 novembre 2010 considère toutefois que le principe de non-rétroactivité de la loi pénale s'oppose à ce que les cours et tribunaux ordinaires poursuivent et jugent Hissène Habré pour des crimes contre l'humanité et torture commis entre 1982 et 1990 en se fondant sur les nouvelles dispositions précitées de la loi pénale et de la Constitution sénégalaises qui établissent la compétence des cours pour des actes de génocide, torture, crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

Cette approche du principe de non-rétroactivité est unanimement et sévèrement critiquée par des juristes pour divers motifs exposés ci-après qui dénoncent en substance une confusion grave entre le droit matériel et le droit procédural.

Pour qu'ils puissent donner lieu à des poursuites et à une condamnation, l'article 15 du Pacte exige que des actions ou omissions constituent un acte délictueux au moment où ils ont été commis soit selon le droit national, soit selon le droit international et à défaut, au regard des principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations. Il est clair que cette disposition concerne uniquement le droit matériel. Elle n'impose aucune exigence en ce qui concerne le droit de la procédure.

Lorsque le législateur national introduit de nouvelles règles relatives à la compétence des cours et tribunaux et à la procédure, - comme ce fut le cas au Sénégal en 2007 -, une telle réforme n'a ni pour objet ni pour objectif d'incriminer des faits qui au moment de leur commission n'étaient pas incriminés par le droit pénal matériel.  Les lois relatives à la compétence et à la procédure concernent le système judiciaire et le déroulement des procédures de poursuites et de jugement. Elles sont étrangères au principe de la légalité des délits et des peines. En d'autres termes, les lois de compétence et de procédure ne sont que les instruments[xi] qui rendent possibles la poursuite et la condamnation pour des faits déjà incriminés d'après le droit pénal.

Il s'en suit, précisent certains auteurs, que la date d'adoption d'une loi de procédure autorisant ou facilitant les poursuites est dépourvue de toute pertinence lorsqu'il s'agit de vérifier si un acte est incriminé d'après le droit pénal au moment de sa commission.[xii]

De même, une loi de procédure ne saurait être contraire au principe de non-rétroactivité si les infractions dont elle organise la poursuite sont déjà incriminées d'après le droit pénal international ou un principe général de droit au moment de la commission des faits.[xiii]

Enfin, les commentateurs relèvent aussi non sans ironie que s'il fallait constater que les nouvelles dispositions sénégalaises en matière de procédure incriminent en réalité des faits qui ne l'étaient pas antérieurement, la Cour semble perdre totalement de vue qu'un tribunal ad hoc qui condamnerait pour de tels faits méconnaîtrait aussi le principe de non-rétroactivité de la loi pénale.[xiv]

Les auteurs rappellent que pour satisfaire au principe nullum crimen sine lege et au principe de non-rétroactivité, trois conditions doivent être remplies pour qu'un tribunal puisse reconnaître la culpabilité d'une personne pour une action ou omission qui constitue une infraction d'après le droit international ou les principes généraux du droit international :[xv]

(i) l'Etat doit avoir ratifié un traité ou une convention internationale qui établit une responsabilité criminelle pour les actes en cause;

(ii) l'infraction doit être clairement définie, ou en d'autres termes, la personne incriminée doit avoir été à même de savoir que les actes incriminés étaient interdits au moment où elle les commettait;

(iii) l'Etat doit avoir adopté des lois substantielles et procédurales sur les crimes internationaux ;

Eu égard à la troisième condition, la réforme législative introduite en 2007 était évidemment requise afin de permettre au Sénégal de poursuivre et juger Hissène Habré.[xvi] Cette réforme avait, comme nous l'avons vu plus haut, un double objectif. D'une part, celui de modifier la loi pénale substantielle en y introduisant les crimes internationaux (génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre). D'autre part, celui de modifier les lois de procédure aux fins de donner au juge sénégalais une compétence universelle pour les crimes de génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerre et la torture.[xvii]

Mais toute autre est la question de savoir si les faits reprochés à Hissène Habré - qui correspondent aux notions de génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerres et torture -  constituaient déjà des infractions d'après le droit international ou d'après les principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations pendant la période infractionnelle, c'est-à-dire entre  1982 et 1990? Sans aucun doute, la réponse est affirmative.[xviii] Tous les crimes visés par les réformes législatives de 2007 étaient déjà qualifiés de crimes par le droit international depuis des décennies, au moment où Hissène Habré les auraient commis.[xix] Les modifications législatives introduites au Sénégal qui permettent que Hissène Habré soit poursuivi et jugé par les cours et tribunaux ordinaires ne sont donc en rien contraires au principe de non-rétroactivité de la loi pénale.

Sur la création d'une juridiction ad hoc

Selon la CEDEAO, la mise en oeuvre du mandat que la République du Sénégal tient depuis 2006 de la Conférence de l'Union Africaine, - de poursuivre et de juger « au nom de l'Afrique » Hissène Habré « devant une juridiction compétente avec les garanties d'un procès juste » - doit se faire selon la coutume internationale qui a pris l'habitude dans de telles situations de créer des juridictions ad hoc ou spéciales. Toujours selon la CEDEAO, l'expression ‘juridiction compétente' reprise dans les termes dudit mandat « ne signifie rien d'autre que la mise en place d'un cadre judiciaire ad hoc dont la création et les attributions trouveraient leur bas relief dans les dispositions de l'article 15.2 de Pacte International sur les Droits Civils et Politiques.»[xx]

La CEDEAO conclut de ces considérations que seul un tribunal ad hoc à caractère international peut poursuivre et juger Hissène Habré, comme l'exigerait le droit international de toutes les nations civilisées.[xxi]

Sur ce point également, l'arrêt fait l'objet de vives critiques émanant de juristes qui soulignent les faiblesses du raisonnement :

(i) La CEDEAO omet tout d'abord de préciser la nature d'un tel tribunal ad hoc ou spécial. La CEDEAO vise-t-elle un Tribunal ad hoc international, tel que la TPIY ou le TPIR ? Ou plutôt un Tribunal hybride, tel que les Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux Cambodgiens ou le Tribunal Spécial pour le Liban ? S'agirait-il au contraire de créer un Tribunal national extraordinaire, avec une juridiction spéciale, tel que le Tribunal spécial irakien ? Nul ne sait tirer à cet égard le moindre enseignement de l'arrêt.

(ii) La CEDEAO n'indique pas le fondement légal de la solution qu'elle préconise et elle ne fait référence à aucune source ni précédent pour conclure à l'existence de la ‘coutume internationale' à laquelle elle se réfère.[xxii]

(iii) Pire encore, la doctrine est unanime sur le fait qu'il n'existe pas de coutume internationale obligeant les Etats à instaurer un tribunal ad hoc ou spécial pour juger des (anciens) chefs d'Etat.[xxiii]

(iv) Enfin, l'article 15.2 du Pacte ne saurait en aucun cas constituer le fondement de la création d'un tribunal ad hoc.[xxiv]

Conclusion

Dès lors que l'arrêt commenté est unanimement et vivement critiqué par la doctrine comme étant inconsistant et saugrenu sur le plan juridique tant le raisonnement est contraire à la portée exacte des principes invoqués, certains en viennent naturellement à conclure que l'arrêt de la CEDEAO est inspiré par des considérations purement politiques au sujet desquelles on ne peut que spéculer.

Nul n'ose imaginer que cet arrêt puisse être compris par tout le continent africain comme un précédent, un message déguisé consacrant l'impunité de fait dont jouissent de nombreux dictateurs. 


[i] W. Schabas (2010), ‘Bizarre ruling on non-retroactivity from the ECOWAS Court', p. 1. (http://humanrightsdoctorate.blogspot.com/2010/12/bizarre-ruling-on-non-retroactivity.html)

[ii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 13 et 22

[iii] J.A. Hessbruegge (2011), ‘ECOWAS Court Judgment in Habré v. Senegal Complicates Prosecution in the Name of Africa', American Society of International Law, Volume 15, Issue 4, p. 1-5. (http://www.asil.org/pdfs/insights/insight110203pdf.pdf )

[iv] Affaire Hissein Habré c/ République de Sénégal, par. 58.

[v] Affaire Hissein Habré c/ République de Sénégal, par. 58.

[vi] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 13 et 22

[vii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 13.

[viii] Loi n° 2007- 02 du 12 février 2007 modifiant le Code pénal (‘Loi 2007- 02') , Journal Officiel de la République du Sénégal no. 6332,  10 Mars 2007, 2377, accessible online: http://rds.refer.sn/IMG/pdf/07-02-12CODEPENALMODIF.pdf

[ix] Loi n° 2007- 05 du 12 février 2007 modifiant le Code de la Procédure pénale relative à la mise en œuvre du Traité de Rome instituant la Cour pénale internationale, ibi d. , at 2384, accessible  online: http://www.issafrica.org/cdromestatute/pages/senegal.html

[x] Loi constitutionnelle n. 2008 -33 du 7 août 2008 modifiant les articles 9 et 25 et complétant les articles 562 et 92 de la Constitution, Journal Officiel de la République du Sénégal no. 6420, 8 août 2008, accessible online: http://www.jo.gouv.sn/spip.php?article7026

[xi] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 14.

[xii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 15; J.A. Hessbruegge (2011), ‘ECOWAS Court Judgment in Habré v. Senegal Complicates Prosecution in the Name of Africa', American Society of International Law, Volume 15, Issue 4, p. 3.

[xiii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 16.

[xiv] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 23.

[xv] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 16.

[xvi] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 17.

[xvii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 17.

[xviii] V. Spiga énumère les traités, conventions, et le droit coutumier qui permettent une telle conclusion, voir p. 17-19.

[xix] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 19.

[xx] Affaire Hissein Habré c/ République de Sénégal, par. 58.

[xxi] Affaire Hissein Habré c/ République de Sénégal, par. 61.

[xxii] J.A. Hessbruegge (2011), ‘ECOWAS Court Judgment in Habré v. Senegal Complicates Prosecution in the Name of Africa', American Society of International Law, Volume 15, Issue 4, p. 3; V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 20; W. Schabas (2010), ‘Bizarre ruling on non-retroactivity from the ECOWAS Court', p. 1.

[xxiii] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 20-21; J.A. Hessbruegge (2011), ‘ECOWAS Court Judgment in Habré v. Senegal Complicates Prosecution in the Name of Africa', American Society of International Law, Volume 15, Issue 4, p. 3; W. Schabas (2010), ‘Bizarre ruling on non-retroactivity from the ECOWAS Court', p. 1.

[xxiv] V. Spiga (2011), ‘Non-retroactivity of Criminal Law', JICJ 9, p. 21-22.

Mélanie de Groof est chercheur et candidate à un doctorat à l'Université de Maastricht

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