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Chine : Le renforcement du dispositif de sécurité au Xinjiang fait craindre une importante vague de répression

Le gouvernement devrait ouvrir une enquête impartiale et non se livrer à une chasse aux sorcières

(New York) - L'évolution de la situation au Xinjiang au cours des trois derniers jours indique que les autorités chinoises sont sur le point de lancer une vaste opération de répression à caractère politique contre les communautés ouïghoures de la région, au lieu d'ouvrir une enquête impartiale et objective sur les violences, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le gouvernement a déployé au moins quelque 20 000 soldats dans la ville et aux alentours d'Urumqi, la capitale régionale, où les violences ont éclaté le 5 juillet 2009, après ce qui, à l'origine, semblait être une manifestation pacifique organisée par les étudiants ouïghours. Les autorités étatiques et locales ont également annoncé qu'ils demanderont la peine capitale contre les organisateurs des manifestations et les auteurs des actes de violence.

« L'État a promis de mener une enquête minutieuse, mais jusqu'à présent, il n'a donné qu'une version déformée et incomplète sur les troubles », a déclaré Sophie Richardson, la directrice Plaidoyer à la Division Asie de Human Rights Watch. « Cette attitude suscite de sérieux doutes quant à sa volonté de mener une enquête sur tous les aspects de la violence. Au contraire, il se contente de présenter une version préfabriquée des faits. »

Vingt-quatre heures après l'éclatement de la violence, les responsables chinois ont accusé l'ancienne prisonnière politique de la région du Xinjiang, Rebiya Kadeer, devenue aujourd'hui une éminente activiste des droits ouïghours aux États-unis, d'avoir planifié et organisé les manifestations. Aucune preuve n'a été fournie pour étayer ces accusations qu'elle a rejetées. Les dirigeants chinois ont par ailleurs porté de nombreuses accusations non fondées à l'endroit de groupes terroristes, tels que al-Qaeda et aussi à l'encontre du congrès américain, mis en cause pour les manifestations.

Human Rights Watch a déclaré que les versions des faits présentées par les autorités et les médias d'État semblaient être particulièrement axées sur les attaques perpétrées contre les Hans chinois. Bien que le gouvernement ait déclaré que parmi les 156 personnes tuées 35 étaient Ouïghours, il n'a ni évoqué ni diffusé des renseignements sur les actes de violence contre ce groupe.

Par ailleurs, le rôle que les forces de sécurité ont joué lors des manifestations du 5 juillet n'a pas été clairement établi. Le gouvernement n'a ni précisé la nature des moyens utilisés par ses forces de sécurité pour empêcher les actes de violence perpétrés par différents groupes, ni évoqué le rôle qu'elles ont joué dans la répression des manifestations et des émeutes, ni indiqué si la force utilisée était appropriée.

Le 8 juillet dernier, le président chinois Hu Jintao a présidé une réunion du Politburo à l'issue de laquelle il a fait cette déclaration : « Il faut isoler et frapper cette petite minorité tout en assurant l'unité par la sensibilisation et en ralliant la majorité à notre cause. Des mesures sévères conformément à la loi doivent être prises impérativement. » Le lendemain à Urumqi, le chef de la police chinoise, Meng Jianzhu, a affirmé: « Tous les voyous impliqués dans les émeutes devraient être sévèrement punis, conformément à la loi, faute de quoi nous décevrons les victimes et leurs parents. »

« Si Messieurs Jintao et Jianzhu sont sérieux dans leurs engagements à assurer la justice, des enquêtes crédibles devraient commencer au cours des prochains jours », a déclaré Mme Richardson. « Mais une bonne partie du discours compromet cet objectif et s'apparente plutôt à une chasse aux sorcières. »

Human Rights Watch a également fait part de sa préoccupation croissante sur le sort et le lieu de détention des personnes que le gouvernement dit avoir emprisonnées et sur le fait que les autorités n'aient pas systématiquement informé les familles des détenus. Le gouvernement a annoncé que plus de 1 400 personnes ont été arrêtées depuis le 5 juillet. Même si les responsables de la sécurité ont indiqué que tous les détenus avaient été arrêtés lors des troubles, certaines sources soutiennent que la police a ratissé des quartiers ouïghours et arrêté des hommes après les manifestations. Les médias d'État ont également fait part d'arrestations et publié des photos de personnes recherchées, tous des Ouïghours. Ils seraient les auteurs présumés des « troubles » qui se sont déroulés près de la gare, le 7 juillet dernier, deux jours après les dernières émeutes signalées.

Human Rights Watch a déclaré que le renforcement important du dispositif de sécurité, les arrestations arbitraires et le non-respect de la loi évoquent bien des souvenirs. Ils rappellent non seulement les lendemains des manifestations de 1997 à Yining et de 2008 au Tibet, mais aussi les campagnes « Lutte contre le séparatisme » et « Force de frappe » que connaît la région depuis des décennies.

« C'est le comble de l'ironie lorsque le gouvernement accuse d'une part des "forces étrangères hostiles" d'être à l'origine des manifestations, et affirme d'autre part que les enquêtes sur ces troubles doivent être une "affaire purement intérieure" », a déclaré Mme Richardson. « La seule enquête crédible serait plutôt une enquête internationale. »

Pour en savoir plus sur les travaux réalisés par Human Rights Watch à propos des violences ethniques au Xinjiang et de leur contexte, veuillez consulter les publications suivantes :

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