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Syrie: La répression des militants se poursuit sans relâche

Les relations avec Damas devraient tenir compte des droits humains

Les pays occidentaux qui cherchent à développer les relations avec la Syrie devraient être conscients que les autorités syriennes continuent à arrêter, juger et harceler les militants politiques et des droits humains, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. En mai 2008, les autorités syriennes ont arrêté un écrivain politique, ont ouvert le procès de deux militants et ont imposé des restrictions de déplacements à sept autres au moins. Avec de plus en plus d’appels dans les pays occidentaux à développer les relations avec la Syrie, Human Rights Watch a insisté pour qu’une amélioration de la façon dont ces militants sont traités soit au cœur de toutes les discussions futures avec les autorités syriennes.

Le quotidien Le Monde a signalé le 9 juin 2008 que le Président français Nicolas Sarkozy prévoit d’envoyer deux de ses représentants les plus importants, Jean-David Lévitte et Claude Guéant, en Syrie dès le 12 juin, à un moment où les liens interrompus l’année dernière au moment de la crise politique du Liban commencent à s’assouplir. La semaine dernière, les sénateurs américains John Kerry et Chuck Hagel ont coécrit un éditorial dans le Wall Street Journal appelant à des relations plus soutenues avec la Syrie, à la suite de « l’annonce récente de négociations de paix entre Israël et la Syrie par l’intermédiaire de la Turquie, et l’accord entre les factions libanaises au Qatar. »

« Toute relation avec la Syrie doit comporter une discussion ouverte sur les problèmes relatifs aux droits humains, y compris le sort des prisonniers politiques et d’autres Syriens victimes d’exactions », a affirmé Sarah Leah Whitson, directrice à Human Rights Watch pour le Moyen Orient et l’Afrique du Nord. « Les autorités de Damas continuent à harceler toute personne qui ose les critiquer. »

Le 7 mai, des membres des services de sécurité syriens ont arrêté Habib Saleh, 60 ans, écrivain et analyste politique, et l’ont emmené dans un lieu inconnu où il reste détenu au secret. Saleh avait écrit des articles critiques à l’égard du régime syrien, par exemple un article défendant Riad al-Turk, figure de l’opposition syrienne. Saleh a déjà été emprisonné deux fois par le passé à cause de ses écrits.

Quelques jours plus tard, le 11 mai, le Tribunal de sûreté de l’Etat, un tribunal spécial avec presqu’aucune protection de procès équitable, a infligé une peine de trois ans d’emprisonnement à Tarek Biasi, 23 ans, un blogueur que le gouvernement avait arrêté en juillet 2007, l’accusant d’ « insulter les services de sécurité » en ligne, et l’inculpant pour « affaiblissement du sentiment national. »

Le 12 mai, un tribunal militaire a ouvert le procès de Muhammad Badi` Dek al-Bab, membre de l’Organisation nationale pour les droits humains, l’accusant de « diffusion de fausses informations qui nuisent au prestige de l’Etat » parce qu’il avait écrit un article critiquant les autorités syriennes qui arrêtaient des écrivains et des intellectuels tout en célébrant Damas comme la « Capitale arabe de la culture » 2008. Il est en prison depuis le 2 mars, et sa prochaine audition devant le tribunal est programmée pour le 11 juin. Dek al-Bab avait déjà été emprisonné pour ses activités. En 2000, il a été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour appartenance les Frères Musulmans, mais il a été relâché en 2005 suite à une amnistie présidentielle.

Pendant ce temps, un groupe de 13 militants politiques éminents, dont l’ancien parlementaire Riad Seif, demeure en détention depuis leur arrestation en décembre 2007 pour avoir participé à une réunion de groupes d’opposition. Ils sont en attente de leur procès sur les accusations d’ « affaiblissement du sentiment national et d’incitation à la violence sectaire », de « diffusion de nouvelles fausses ou exagérées qui pourraient affecter le moral du pays » et d’ « appartenance à une organisation formée dans le but de changer la structure de l’Etat. »

« Ces militants sont en prison parce qu’ils ont osé exprimer leurs opinions », a déclaré Whitson. « Nous espérons que les diplomates occidentaux s’adressant à la Syrie feront preuve du même courage et diront aux autorités syriennes qu’elles doivent libérer ces militants. »

Les autorités syriennes continuent aussi à empêcher des centaines de militants de quitter le pays. Sept militants politiques et des droits humains ont été directement touchés par ces restrictions en mai. Par exemple, les autorités ont empêché Muhannad al-Hasani, président de l’Organisation syrienne des droits de l’homme, de se rendre à Beyrouth le 21 mai pour participer à une émission sur la chaîne al-`Alam TV pour débattre de la situation des détenus syriens en Arabie Saoudite. Elles ont aussi empêché Radif Mustafa, le président du Comité kurde pour les droits de l’homme, de se rendre à Paris pour participer à un atelier de formation organisé par le Réseau Euro-méditerranéen des droits de l’homme du 19 au 23 mai.

D’autres formes de harcèlement consistent à empêcher les rassemblements et les réunions. Le militant Mazen Darwish, président du Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression, avait obtenu une autorisation du ministère de la Culture pour organiser une conférence sur « la liberté de la presse » au Centre culturel arabe à Damas le 25 mai, mais un fonctionnaire du même ministère a appelé le Centre culturel 15 minutes avant le début de la réunion et a ordonné son annulation.

Historique

Les sept militants qui se sont vus refuser le droit de voyager en dehors de la Syrie en mai sont les suivants :

  • Abdel Sattar al-Qattan : déjà emprisonné auparavant pour affiliation à l’association des Frères musulmans puis libéré pour raisons de santé le 12 juin 2007. Son état nécessite une dialyse trois fois par semaine, et ses docteurs ont recommandé qu’il se rende hors de Syrie pour bénéficier d’une transplantation rénale.
  • Radif Mustafa : avocat et président du Comité kurde pour les droits de l’homme. Empêché de se rendre à Paris pour participer à un atelier de formation organisé par le Réseau Euro-méditerranéen pour les droits de l’homme du 19 au 23 mai.
  • Muhannad al-Hasani : président de l’Organisation syrienne des droits de l’homme. Des fonctionnaires de la sécurité syrienne l’ont empêché de se rendre à Beyrouth le 21 mai pour participer à un programme de la chaîne al-`Alam TV pour discuter de la situation des détenus syriens en Arabie Saoudite.
  • Raja` al-Nasser et Muhammad Abdel Majid Manjounah : avocats et membres du parti de l’Union socialiste. Empêchés de se rendre le 8 mai au Yémen pour participer dans un atelier organisé par le Congrès national arabe.
  • Zaradasht Muhammad et `Abdel Rahman Ahmad : deux militants politiques kurdes empêchés de se rendre en Irak le 12 mai pour rencontrer d’autres groupes kurdes irakiens.

Pour plus d’informations sur le travail de Human Rights Watch sur la Syrie, voir le lien :
https://www.hrw.org/doc?t=mideast&c=syria

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