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Burundi : Les crimes de guerre pourraient rester impunis

Un nouveau rapport documente les souffrances endurées par les populations civiles

L’armée burundaise et les forces d’opposition armée se sont rendues coupables de graves crimes de guerre, en ce compris des tueries de civils et des viols, a déclaré Human Rights Watch dans un nouveau rapport publié aujourd’hui.

Le rapport de 63 pages, « Victimes au quotidien : les civils dans la guerre au Burundi », documente des actes de tueries et de viols commis à l’encontre des civils, ainsi que d’atteintes portées à leurs biens, sur une période qui s’étend d’avril à novembre. Au cours de ce dernier mois, le gouvernement et les Forces pour la Défense de la Démocratie (FDD), le groupe rebelle principal, ont signé un accord de paix qui octroie, à chacune des parties, une mesure d’immunité provisoire les protégeant contre toutes poursuites pour crimes de guerre.

« Les accords de paix qui se basent sur une mesure d’immunité fonctionnent rarement », a dit Alison Des Forges, conseiller principal de la Division Afrique pour Human Rights Watch. « Des violations comme celles décrites dans le rapport ne devraient pas rester impunies. »

Le rapport documente, à titre d’exemple, le cas de Kabezi où, à l’occasion des combats contre les forces rebelles hutu, non loin de la capitale Bujumbura, les militaires de l’armée gouvernementale, à dominance tutsi, ont délibérément tué de nombreux civils. En septembre, les mêmes ont commis des faits similaires à Muyira et Ruziba tandis que, au cours de cette même période, les combattants des forces d’opposition armée – les FDD et les Forces Nationales de Libération (FNL) - tuaient des dizaines de civils et pillaient leurs biens.

Tant les soldats de l’armée gouvernementale que les combattants rebelles ont violé des femmes et des filles, un crime qui a pris des proportions inquiétantes à Bujumbura et dans d’autres régions du pays. Les groupes rebelles ont aussi enlevé des enfants pour en faire des combattants.

Le Secrétaire Général des Nations Unies Kofi Annan a salué l’accord de paix intervenu. De nombreux autres dirigeants ont fait de même, au nombre desquels le Vice Président sud africain Jacob Zuma, qui a beaucoup contribué à sa signature. Mais la communauté internationale n’a pas condamné la mesure d’immunité provisoire accordée aux combattants coupables de crimes de guerre. Les partisans de l’accord de paix ont argumenté qu’une mesure d’immunité était nécessaire pour amener autant de parties que possible à la table des négociations. Mais des accords de paix qui ignorent les atrocités du passé aboutissent rarement à des résultats, a déclaré Human Rights Watch. L’accord de Lomé de 1999 qui était supposé mettre fin à la guerre civile en Sierra Leone en est un exemple flagrant.

« Avec cet accord, les soldats du gouvernement et les combattants des FDD n’ont aucune raison de craindre de se voir un jour poursuivis et punis », a dit Des Forges. « Et ce sont les civils qui paient et continueront à en payer le prix. »

Aujourd’hui, dans la capitale et ses environs, les FNL, un groupe rebelle minoritaire, ont refuse de négocier avec le gouvernement. Les combats se poursuivent depuis que l’armée gouvernementale, qui bénéficie parfois déjà de la collaboration de membres des FDD, a lancé une offensive contre les combattants des FNL. Les civils ont quitté certains quartiers des zones Kinama et Kamenge de Bujumbura et des dizaines de milliers d’autres, dans les collines avoisinantes, ont dû fuir leurs maisons et vivent en situation de déplacement quasi permanent, en quête de plus de sécurité. Les soldats de l’armée gouvernementale ont encore tué délibérément des habitants, en représailles aux embuscades et tueries de militaires isolés par les FNL.

« Les civils qui ont subi ces violations, ces « victimes au quotidien », ont le sentiment d’être complètement oubliés », a dit Des Forges. « Protéger les responsables de ces crimes revient à priver les victimes de toute justice pour les souffrances endurées et à ce titre, à les oublier une seconde fois. »

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